Le favori
Par Maria Ferrari
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Les personnages et l'univers de Harry Potter appartiennent à J.K. Rowling.
Base : Tomes 1 à 4 de Harry Potter
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—Chapitre 1—
C'était un personnage tout à fait fascinant et d'un charme incontestable, et Lucius était irrésistiblement attiré par les hommes d'âge mûr, ce qui ne gâtait rien ; si Aristus Malefoy avait connu cette particularité de sa précieuse progéniture, il l'aurait cloîtré dans son manoir malgré ses vingt ans, ensorcelant sa chambre de telle sorte que son fils ne puisse s'échapper d'aucune façon.
Par bonheur, son père ignorait son homosexualité, et surtout sa préférence marquée pour les hommes beaucoup plus âgés que lui ; il serait probablement mort d'une attaque en apprenant une telle nouvelle. Outre le fait qu'il aurait énormément pleuré son père, Lucius se serait haï d'être à l'origine de son décès ; Aristus avait son lot de défauts et n'était pas exactement affectueux, mais, à sa manière – à savoir sa tendance à vouloir toujours le protéger malgré lui –, il aimait son fils et Lucius lui rendait cet amour. Il lui devait bien ça : n'était-il pas tout pour son père ?
Lucius attendait tout de même avec impatience la fin de ses études supérieures qui sonnerait le début de son indépendance. C'était harassant de devoir toujours mentir sur les lieux où il allait, les gens qu'il fréquentait. Son père ne cessait jamais de lui poser des questions ; il s'inquiétait pour lui, il voulait tout savoir… et ne savait rien.
Lucius abandonna ses pensées concernant son géniteur et se concentra sur l'instant présent et sur l'homme mince tenant une coupe de champagne qui se tenait à quelques mètres de lui, pour le moment seul ; un mage noir mondialement craint qui s'adonne aux affres d'une soirée mondaine – même si la soirée en question a été organisée par un club très privé –, voilà qui ne manquait pas d'être insolite.
Lucius avait toujours eu un faible pour ce qui était insolite.
Il fallait agir tout en subtilité ; onduler discrètement du derrière de sorte que personne ne le remarque – il ne tenait pas à passer pour un individu trop maniéré –, mais que cela laisse une impression de félinité, de sensualité ; parler d'or, montrer sa culture, son intelligence, sa finesse, tout en ne monopolisant pas la conversation et en n'intervenant qu'à bon escient ; avoir un visage expressif mais naturel ; ne pas paraître autrement intéressé par l'homme convoité tout en lui accordant l'attention qu'il demande.
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Voldemort se prit à son jeu de séduction et à sourire, un sourire beau et discret fait pour donner confiance. Il coula discrètement sa main dans les cheveux longs et fins de Lucius pour en apprécier la douceur et la pureté.
Pureté, comme il aimait ce mot.
Avec un peu de chance, ce jeune homme serait vraiment entièrement pur. Il en doutait ; malgré son âge, le jeune Lucius Malefoy n'était pas né de la dernière pluie et avait déjà dû commettre le péché de chair avec des hommes. C'était dommage ; toutefois, l'essentiel était qu'il ne cherche plus la compagnie des autres hommes à partir du moment où il serait admis régulièrement dans sa couche. Il était inadmissible qu'un autre profite de sa chair une fois qu'il se la serait appropriée ; cela coulait de source et le jeune homme était sûrement assez avisé pour le comprendre de lui-même.
« Si cela t'intéresse, sois dans ma chambre à minuit ; et tiens-toi prêt à me recevoir dignement », souffla-t-il dans son oreille en passant une main caressante sur son dos puis sur sa hanche, se délectant du tracé de ce corps qu'il ne tarderait pas à faire sien.
Un frisson d'excitation parcourut le corps de Lucius qui s'abstint de répondre, et même d'acquiescer ; cela aurait été superflu. Il avait remporté cette manche et allait accrocher une conquête masculine de plus à son tableau de chasse.
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A presque minuit, Lucius entra dans la chambre de celui qu'on commençait à appeler le Seigneur des Ténèbres. Ce nom, qu'il trouvait ringard et suffisant, le faisait doucettement rire. Ceci étant, la personne qui se plaisait à être nommée ainsi le faisait plutôt frissonner, de peur – c'était un prince de la magie noire après tout –, mais ce qui faisait trembler Lucius en sa présence était davantage de nature sexuelle.
Qu'entendait exactement Voldemort par "prêt à le recevoir" ? Est-ce qu'il fallait qu'il soit vraiment prêt ? Dans le doute, Lucius préféra se dévêtir entièrement et se préparer à l'accueillir en lui. Il s'allongea ensuite sur la couche et sur le ventre, les jambes très légèrement écartées, la partie arrondie de son individu offerte.
Il n'aimait guère s'offrir ainsi, surtout la première fois, cela dénotait une soumission trop importante à son goût ; cependant, ce qu'il avait entendu dire sur Voldemort l'incitait à laisser son orgueil au vestiaire : l'homme était puissant et n'aimait pas qu'on le déçoive ou qu'on lui apporte la moindre contrariété. Lucius sentit son cœur battre dans sa poitrine alors qu'il prenait pleinement conscience de la portée de ce qu'il était en train de faire. Il songea à la puissance de la personne qui allait profiter de son corps, à sa sombre réputation, au fait que nombre de sorciers auraient préféré le savoir mort ou emprisonné ; et lui était nu, dans son lit, plus offert que jamais, à attendre sagement que cet homme dangereux lui fasse ses honneurs.
Ne risquait-il pas d'être violent ? Brutal ? Et si jamais il était déçu, ne risquait-il pas de le tuer sans plus de cérémonie ? Ou alors de prendre son plaisir et de le supprimer pour qu'il n'aille pas raconter qu'il lui avait fait l'amour, qu'il était homosexuel ? Où donc avait-il mis les pieds ? N'était-il pas plus prudent de faire machine arrière ? L'appréhension gagnait Lucius et il aurait souhaité sauter hors du lit, mais la peur le clouait là et annihilait toute sa volonté.
Il l'entendit entrer ; il était trop tard pour s'enfuir. Lucius se mordit la lèvre inférieure, il n'avait plus qu'à assumer sa folie à présent. Dans un certain sens, cela l'arrangeait, car si sa peur l'enjoignait de partir, son désir lui dictait de laisser cet homme l'amener à l'extase ; peu importaient les conséquences, il serait toujours temps d'aviser après.
Du moins l'espérait-il.
Il entendit des bruits de froissements de tissus, puis sentit son poids sur lui, sa bouche sur sa nuque, son membre dur qui le pénétra aussitôt. Lucius se mordit la lèvre plus fortement et crispa ses poings sur l'oreiller durant deux ou trois secondes, le temps de s'habituer à l'intrusion. Un soupir satisfait s'échappa ensuite de ses lèvres et un sourire les étira. La verge d'un tristement célèbre et terriblement puissant mage noir se trouvait toute entière entre ses fesses ; il aurait pu l'y laisser toute sa vie durant tant Lucius trouvait cette idée plaisante.
Voldemort commença un lent va-et-vient qui s'accéléra au fur et à mesure pour vite arriver à un rythme soutenu et régulier. Lucius s'appliqua à ponctuer d'un cri chacun des vigoureux coups de reins de son amant ; les hommes comme lui aimaient qu'on leur fasse sentir qu'ils dominaient. Le Seigneur des Ténèbres se libéra hors de lui assez rapidement, arrosant copieusement ses fesses, marquant ainsi son territoire plus ou moins consciemment, puis s'étendit à ses côtés.
Lucius patienta, gardant sa position ; la semence de son amant dégoulinait sur ses fesses. Il attendait qu'il le reprenne séance tenante, qu'il finisse de lui donner son plaisir, qu'il le soulage de cette frustration terrible qu'il avait provoquée par ce rapport si court.
Son amant n'y revint pas et semblait même dormir ; Lucius en fut quelque peu contrarié et se consola en se disant qu'il devait approcher de la cinquantaine et qu'on ne pouvait demander à un homme de cet âge les mêmes performances qu'à un jeune de vingt ans. Il était tout de même regrettable qu'il se soit si peu soucié de l'orgasme de son partenaire ; son caractère était sans doute à blâmer, ce devait être avant tout son plaisir à lui qui primait, sans compter qu'il devait être assez imbu de sa personne et peu enclin à croire que lorsqu'il avait atteint le nirvana, son jeune amant avait à peine commencé à décoller. Lucius se garderait donc bien de lui en faire la remarque.
Il prit son problème en main puisqu'attendre que Voldemort le fasse semblait totalement vain. Une fois la volupté atteinte et un profond soupir poussé, il se laissa retomber dans la position dans laquelle il avait été trouvé et pris, et s'endormit ainsi.
Il fut réveillé en sursaut au matin par le pénis de son amant qui se trouvait à nouveau là où il était si peu resté la veille ; Lucius n'était pas du genre à s'offusquer de cette liberté que Voldemort avait prise ; même de la part d'un autre – tant que cet autre avait déjà connu l'insigne honneur d'être admis au plus profond de son intimité au moins une fois, bien sûr –, il se serait laissé faire. Le Seigneur des Ténèbres semblait plus enclin que la veille à prendre son temps, et Lucius, malgré son corps encore ensommeillé, sentit le plaisir monter en lui. Il se vit besogné tout en douceur là où il avait été travaillé avec brutalité et rapidité la nuit passée.
Lucius laissa échapper un cri réjoui quand son amant l'amena à l'orgasme. Cette fois-ci, le Seigneur des Ténèbres se déchargea en lui ; il complétait ainsi son marquage, mais sa semence était éphémère et Lucius s'empresserait bientôt de nettoyer ce qui avait séché sur sa peau nue, ce marquage était uniquement psychologique ; il serait bientôt complété par l'apposition d'un fer rouge sur son bras, qui le ferait Mangemort, et par le tatouage d'un serpent enroulé autour d'une rose surmontant le "V" de Voldemort sur sa fesse gauche.
Tom Jedusor, alias Voldemort, était un homme excessivement possessif.
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Ainsi se passa chaque nuit en sa compagnie, variant les positions, n'accordant que rarement des préliminaires – comme cela se disait dans les magazines féminins avant-gardistes – Voldemort profitait dès qu'il le pouvait du corps parfait de son jeune amant qui se laissait faire avec plus ou moins de délices suivant la forme et la délicatesse de son Lord.
Si on lui avait posé la question, Lucius aurait été incapable de préciser la nature exacte du sentiment qu'il ressentait pour son Maître ; attirance, désir, peut-être était-il même vaguement amoureux sans même s'en rendre compte.
Bien que peu de gens le croyaient quand il assurait n'avoir jamais rien fait pour nuire à autrui (rien de définitif en tous les cas), c'était exact qu'il n'avait jamais participé à aucune mission des Mangemorts ; ceux des adeptes s'en étant rendus compte, et ignorant la relation particulière qui unissait Lucius à leur Lord, s'en étonnaient. Lucius était exclusivement réservé au plaisir de son Seigneur qui le gardait jalousement, le préservait pour ses jeux, le protégeait même. C'était sans doute la raison pour laquelle il n'avait eu aucun mal à convaincre le tribunal qu'il n'était pas un véritable Mangemor ; les seuls éléments que les juges possédaient contre lui étaient la marque des ténèbres sur son bras (« On me l'a faite contre mon gré ! » s'était-il exclamé d'un air profondément meurtri) et des témoignages indiquant qu'il avait été vu en compagnie de Celui-dont-désormais-on-ne-prononçait-plus-le-nom à plusieurs reprises (« L'imperium ! Il m'a forcé à l'accompagner ; heureusement, j'ai réussi à lutter contre ; en tout cas assez pour éviter de commettre des actes irréparables ! » avait-il récité en ménageant ses effets). Il n'avait été présent que peu de fois sur les scènes de crime ; les rares fois où il y était allé, c'était en tant que spectateur quand le Seigneur des Ténèbres voulait qu'il vienne admirer son œuvre et sa marche inexorable vers le pouvoir.
Pour tout dire, ce n'était pas l'aspect qu'il prisait le plus dans leur relation ; Lucius n'était pas homme à se délecter des souffrances d'autrui, même s'il se fichait bien du mal que pouvait semer son Lord tant qu'à lui, il faisait du bien.
Lucius n'avait jamais brillé par sa générosité d'âme.
