Ch. 5 : Le démon

Je restais cloîtrée dans ma chambre pendant des mois. Un an peut-être s'écoula. J'avais passé trois ans déjà ici. Personne ne semblait s'inquiétait de moi, et cela m'arrangeait. Je pensais souvent à ma vie sur Terre, à Jajuka et à Séréna, et aussi aux bons moments que j'avais passés en compagnie de Narya, Erya et de Folken. Je dormais peu.

Un soir, une vérité s'imposa à moi. Je ne servais plus à rien. J'étais aussi inutile ici que je l'avais été sur ma planète. Je contemplais une dernière fois la Lune et la Terre dans le ciel. La plus belle chose que j'avais pu voir dans ce monde, mais qui devait en recelé bien davantage. Je n'aurais pas l'occasion de les voir. Je préférais mourir. Je m'asseyais sur le rebord de la fenêtre, le jambes pendantes dans le vide. Je devais être au sixième ou au septième étage. Soit à environ vingt bons mètres du sol. Je faisais le vide dans mon esprit, et je me mis à sourire. Je retrouverais peut-être ma grand-mère dans la mort, qui sait ?

Je regardais le sol, en bas. De nuit, simplement éclairés par la Lune et la Terre, les jardins étaient encore plus beaux. Je n'y avais jamais fait attention. Encore un trésor de Gaea. Toutes ces petites fleurs blanches et roses éparpillées sur un tapis vert tendre... Je me mis à rire, un rire nerveux, en songeant que bientôt une grosse tâche rose et rouge viendrait souillée ce tapis si beau. Et puis je me laissais tomber.

J'avais l'impression de voler, c'était merveilleux. Je me mettais en étoile et savourais la caresse du vent sur ma peau, les yeux fermés. Je pensais à ma famille, mes amis. Je me sentais bien, libérée de tout. Mais le Destin en décidât autrement. Une main attrapa fermement mon poignet et je remontais. J'ouvris les yeux et restais stupéfaite. C'était Folken. Il avait des ailes. Il me serra davantage contre lui et me remonta dans ma chambre. J'étais incapable de faire un geste. Folken me laissa tomber sur le lit et ses ailes disparurent.

-Petite idiote ! siffla t-il, furieux.

Et je m'évanouie encore une fois. Lorsque je me réveillais, il était à mon chevet. Je pensais que c'était un rêve, un nouveau délire, mais une plume blanche sur le sol attira mon regard, me prouvant que je n'avais pas rêvé.

-Des ailes... soufflais-je avec un sourire idiot.

J'avais un mal de tête affreux, comme si je m'étais saoulée la veille, mais je n'y faisais pas plus attention.

-Il vaudrait mieux pour toi que tu tiennes ta langue, espèce d'idiote !

-Pourquoi vous m'avez ramené ? Je veux mourir.

-Tais-toi. Tu es trop stupide pour prendre des décisions importantes.

-Je ne suis pas stupide. Je sais ce que je veux, et je veux mourir.

-Tais-toi. N'ajoute pas un mot.

-Vous n'avez pas répondu à ma question. Pourquoi m'avez-vous sauvée ? Je ne le mérite pas. Je ne sers à rien. Ma vie n'a aucun sens...

-Tu n'en sais rien.

-Je veux retourner dehors. J'étais bien là-bas.

-Tais-toi donc.

-Vous m'avez ignoré pendant un an. Comment avez-vous pu être là ?

-Parce que ça fait un an que je te surveilles, imbécile.

-Pourquoi ? Je n'en vaux pas la peine. S'il vous plaît, laissez-moi mourir en paix.

Il secoua la tête et serra ma main de sa main encore humaine. J'eu l'impression de me faire électrocuté et me reculais vivement. Il me regarda, semblant attristé, puis se leva et me demanda de le suivre. J'obtempérais et il me guida à travers les couloirs. Les escaliers se succédaient, et je crois que la pièce dans laquelle il me conduisit était au dernier étage. C'était une vaste salle d'un blanc éclatant, qui m'éblouit. Un vieil homme était assis, seul. Ses cheveux grisonnant retombaient sur ses épaules maigres.

-Seigneur Dornkirk... murmura Folken en baissant la tête.

-C'est elle... souffla le vieil homme. Cette fille...

-On parle de moi ? soufflais-je à Folken qui me lança un regard exaspéré.

Je me sentais mal. Mon mal de crâne redoubla et je tombais à genoux sous la douleur.

-Ton Destin... lâcha le vieillard en me regardant tomber.

-J'ai mal... articulais-je.

-Voyons, ce n'est qu'une petite douleur. Ainsi tu veux mourir ? Pourquoi ?

Et ce fut comme si je n'avais pas le choix. Je lui racontais tout, ma peine de vivre, ma douleur, mon monde si regretté. Je ne pouvais plus m'empêcher de parler, les mots franchissaient le seuil de mes lèvres sans que je puisse les contrôler.

Dornkirk caressa gentiment mes cheveux. La douleur disparut. Un sentiment de sérénité m'envahit, et je souriais.

-Tu vois, ce n'est rien... Toute cette tristesse n'a pas d'importance. Tu as des choses bien plus grandes à accomplir.

Folken s'était retranché dans un coin, appuyé contre un mur, ses yeux bruns me fixant.

Nous dûmes bien restés six heures sans parler. Puis le jeune homme me raccompagna à ma chambre. Je le retins par le bras.

-Que va t-il se passer ? demandais-je.

-Tu verras bien !

Il sortit sans me laisser le temps de lui poser une autre question. A peine ma tête toucha l'oreiller que je m'endormais profondément. Depuis mon arrivée sur Gaea, je n'avais fait aucun rêve dont je me souviennes. Mais celui-ci me marqua énormément. Je ne pourrais jamais l'oublier.

J'étais allongée sur un lit d'hôpital, des tuyaux et des fils sortants de mon corps. Ma peau était très blanche, j'avais l'impression d'être morte près de mon lit, ma mère et ma sœur pleuraient. Mon petit frère restait calme mais semblait lui aussi très triste. Le visage de mon père n'affichait aucune expression. Lui aussi semblait mort. Ses yeux verts qui d'habitude affichaient toutes ses expressions, et avaient toujours une étincelle de joie, étaient froids. Un médecin entra, petit et gras, très antipathique. Il chercha mon pouls et secoua la tête.

-Je suis vraiment désolé, dit-il sans avoir l'air de l'être le moins du monde. Je ne pense pas que... votre fille se réveillera un jour. Cela fait trois ans maintenant, vous comprenez, nous n'avons plus aucune chance de la voir se réveiller.

-Non, elle va se réveiller ! répliqua ma mère d'une voix que je ne lui connaissais pas. Elle... elle a bougé sa main, tout à l'heure. Sa main a bougé. Elle a failli revenir, elle reviendra.

-Cela arrive parfois, mais ça ne veut pas dire qu'il y ai une chance. Son agresseur a été particulièrement violent.

-Nous n'aurions jamais dû la laisser se promener seule dans ce parc la nuit, déclara mon père d'une voix d'outre-tombe.

Les sanglots de ma mère redoublèrent, et ma sœur l'emmena dans le couloir pour la calmer un peu.

-Monsieur, il faudrait penser à... à la débrancher... dit lentement le médecin. Vous comprenez, nous avons d'autres patients et...

-C'est hors de question. Nous payons assez cher pour le peu de soins que vous lui prodiguez. Elle restera ici jusqu'à ce qu'elle se réveille.

-Papa... murmura mon frère.

-Elle ne se réveillera pas ! éclata le médecin. Vous ne comprenez pas ? Elle ne reviendra pas ! Ce n'est que son corps, il est comme une coquille vide ! Elle ne se réveillera pas, et sans ces appareils et serait déjà morte !

Le poing de mon père s'abattit sur le visage du docteur si vite que j'eus à peine le temps de le voir. Le petit gros releva sa face ensanglanté, les yeux agrandis de stupeur.

-Ca ne se passera pas comme ça ! hurla t-il avant de sortir.

Je me réveillais en sursaut. Alors, étais-je bien dans un délire de mon imagination ? Je ne savais plus que penser. Je sortais dans les couloirs et errais sans but. Finalement, je me retrouvais dans un couloir identique au mien, et qui devait d'ailleurs être le même. J'ouvrais ma porte et entrais, la tête baissée, repensant à mon rêve si étrange. Lorsque je relevais les yeux, je trouvais Folken, torse nu, qui me regardait, surpris. Je n'étais pas dans ma chambre, c'était la seule chose que je pouvais affirmer.

-Mais qu'est-ce que tu fais là ? demanda t-il en enfilant une chemise.

-J'arrivais pas à dormir. J'ai fais un rêve bizarre.

-Tu veux m'en parler ? proposa t-il en me montrant une chaise.

Je me laissais tomber sur le lit et lui racontais mon rêve. Il m'écouta en silence, sans m'interrompre. Je me mis à rire.

-Tout le monde m'écoute aujourd'hui ! expliquais-je. Ca veut dire quoi à votre avis ?

-Hum... Je ne connais pas la signification de ce rêve. D'autre part, je ne connais pas les significations des rêves en général. Mais, crois-moi, tu n'es pas dans un délire de ton imagination. Tout ici est bien réel...

Je crus l'entendre dire « malheureusement », mais je n'y fis pas attention. Ca m'avait fait du bien de me confier à lui. Je n'avais pas senti cette obligation qui s'était imposée à moi devant l'Empereur Dornkirk. Il me tapota l'épaule pour me ramener à la réalité.

-Pourquoi vous ne souriez jamais ? demandais-je brutalement en réalisant que pas une fois au cours de ses quatre années je n'avais vu son sourire.

-Ce n'est pas dans mes habitudes, dit-il simplement après un temps de réflexion.

-Vous devriez essayer. Je suis certaine que vous avez un très beau sourire ! ajoutais-je avant de me mettre à sourire.

Il poussa un soupir et se tourna vers la fenêtre. Je promenais mon regard sur la pièce. Tout était tellement... impersonnel et austère. Le lit impeccablement fait, l'armoire bien fermée, le bureau sur lequel rien n'était posé. Je n'avais pas tarder à décorer la mienne de petits bouquets de fleurs cueillis dans les jardins, collé des fleurs séchées au mur, des tas de dessins d'enfants encombraient mon bureau, et des vêtements à laver attendaient sur ma chaise. En outre, j'avais recoloré ma couverture avec de la peinture volé aux enfants, et la petite main de Miguel couverte de peinture rouge avait laissée sa trace sur le mur, au-dessus de mon oreiller. J'avais même trouvé des livres dans la bibliothèque qui traînaient sur ma table de chevet.

Folken ne semblait pas vouloir que l'on découvre son caractère. Il était toujours distant. Je ne savais même pas quelle place exactement il occupait dans l'Empire.

Il se retourna et poussa un nouveau soupir.

-Vous avez toujours l'air si triste... murmurais-je.

Il haussa les épaules pour toute réponse, et me raccompagna à ma chambre en me disant de dormir. Je ne parvins pas à retrouver le sommeil cette nuit là.

Lorsque je quittais mon lit le lendemain matin en voyant le soleil se lever, je me précipitais à la fenêtre pour contempler le lever du soleil. C'était magnifique de le voir se lever et savoir que, rien qu'en tournant la tête, je pouvais voir la Terre et la Lune.

Je baissais les yeux et songeais que, si Folken n'avait pas été là, je n'aurais jamais vu un lever de soleil. Que s'il n'avait pas été là, je n'existerais même plus. Savoir que pendant un an il m'avait surveillée en secret m'apportais un profond bien-être.

Dans les jardins, j'aperçus des arbres qui se couvraient de fleurs blanches. Je repensais au cerisier qu'il y avait dans notre jardin, derrière la maison.

Je sortis et essayais de trouver le réfectoire. En chemin, je croisais Narya et Erya, et baissais les yeux, gênée. Erya me bouscula légèrement et s'arrêta.

-Excuse-moi... marmonnais-je.

-Ce n'est pas à toi de t'excuser ! répondit-elle chaleureusement.

Je relevais la tête, surprise.

-Petite sœur ! s'exclama Narya en me serrant dans ses bras.

Erya se jeta elle aussi sur moi, et elles manquèrent de m'étouffer.

-Tu veux venir t'entraîner avec nous ?

-Euh... oui, je veux bien mais... je cherchais le réfectoire en fait, pour aller manger...

-Sophia... c'est de l'autre côté... souffla Narya comme si elle me dévoilait un grand secret, en me faisant un clin d'œil.

-On y va aussi, ajouta Erya en me donnant une tape sur l'épaule.

Je les suivais sagement. Tout redevenait comme avant, c'était presque trop beau pour être vrai. Je reprenais ma place dans l'Empire. Folken faisait attention à moi, Dornkirk m'avait dit que j'étais importante, Narya et Erya me reparlaient. Seule ombre à mon bonheur : Jajuka et Séréna. Mais Séréna n'existait plus et je devais m'y résoudre. J'étais cependant certaine que personne ne me laisserait approcher Dilandau une nouvelle fois, du moins pour le moment.

J'avalais presque avec joie l'infâme nourriture, et accompagnais mes deux amies dans une autre salle. Elles me dirent, radieuse, que le Seigneur Folken leur avait offert une nouvelle salle d'entraînement, et quelques épées pour qu'elles deviennent aussi maîtresses dans le combat à l'épée. Je les regardais pendant un long moment croiser le fer à force d'éclats de rires, semblant plus jouer que se battre. Chacune évitait les coups de l'autre avec une facilité déconcertante, et d'après l'expérience que j'avais –et qui d'après le maître d'armes qui avait commencé ma formation, j'étais très bonne- elles étaient extrêmement douées. Je finis par me saisir d'une épée et échangeais quelques coups. Je ne sais pas combien de temps j'y passais, mais je m'amusais beaucoup. Elles étaient très douées, et je m'apercevais que j'avais le même niveau qu'elles.

Des applaudissements nous firent lâcher nos armes. Je me retournais et vis Dilandau, appuyé contre un mur, un sourire narquois aux lèvres.

-Deux monstres et une idiote qui s'amusent ! lâcha t-il.

Je me retenais de courir vers lui pour le frapper. Ce n'était pas tant pour moi, je me moquais de ce qu'il pensait, mais pour Narya et Erya. Elles m'avaient dit que les gens comme elles étaient traités en inférieurs, et j'avais bien pu le remarquer avec Jajuka, mais elles étaient malgré tout merveilleuses, très belles et intelligentes.

-Il n'en vaut pas la peine, ce n'est qu'un gamin, me souffla Erya en sentant ma rage.

Dilandau souleva l'une des épées accrochées au mur. Je fus un peu surprise. Même pour moi, qui étais plus vieille et plus forte que lui, elles étaient lourdes. Et il la tenait comme si elle n'était qu'une plume.

-Allez, un petit combat ? me proposa t-il.

Je ramassais mon épée et lui faisais face. Le combat commença. Je me sentais fière, j'avais eu un bon maître d'armes, et j'étais certaine d'être plus doué qu'un enfant. Je me trompais. Au bout de quelques minutes, mon arme m'échappa et il éclata de rire. Un rire sadique.

-Tu n'arrives même pas à battre un enfant ? dit-il doucement, devinant mes pensées.

-Je n'aurais pas voulu te blesser ! Tu te serais mis à pleurer ! répliquais- je en reprenant mon épée. Sale petit démon !

Il devint fou-furieux et se battit de toutes ses forces. Mais moi aussi j'étais furieuse, et donc plus forte. Je voulais le battre. Mais une nouvelle fois, il envoya voler mon épée qui alla se planter dans un mur. Je tombais à la renverse en même temps. Il posa la lame sur ma gorge et appuya légèrement, juste pour faire naître une tracée rouge sur ma peau. Ses yeux rouges brillèrent en voyant le sang.

-Idiote... souffla t-il.

Folken entra alors.

-Dilandau ! cria t-il d'une voix furieuse.

Sans se presser, l'enfant releva l'épée et se retourna.

-Oui ? demanda t-il, arrogant.

-Vas t-en tout de suite ! lâcha le jeune homme en reprenant son calme habituel.

Narya m'aida à me relever. Je suivais des yeux Dilandau qui quittait la pièce. Folken s'approcha de moi et prit mon menton entre ses doigts. Mon cœur s'affola. Mais il ne fit que relever mon visage et examina la coupure.

-Ce n'est rien... dit-il finalement.

-Ce gamin est insupportable ! éclata Erya.

-La prochaine fois qu'il te propose un combat, refuse-le ! me dit Folken, visiblement déçu par mon comportement.

Je songeais qu'il avait dû assister à toute la scène. Mais alors, pourquoi n'était-il pas entré plus tôt, pour au moins prendre la défense de ses deux protégées ? Je n'arrivais pas à le cerner.

Je serrais les poings et m'enfuyais en courant. J'entendis à peine Narya criait mon nom et courrais dans les couloirs, sans trop savoir où j'allais. Je percutais quelqu'un de plein fouet.

-Vous ne pouvez pas faire attention où vous allez ? hurlais-je avant de m'apercevoir que c'était Dilandau qui, a ma grande joie, était tombé sous le choc.

-Toi... marmonna t-il.

-Pour une fois, c'est toi qui est par terre ! répondis-je avec un grand sourire. Et bah ? T'es pas content de me voir le nain ? Tiens, le nain ça sonne bien... Je t'appellerais comme ça maintenant.

Mais Dilandau grandit très vite. Un an après cet épisode, il m'arrivait aux épaules, et il n'avait pourtant que onze ou douze ans.

Je devins plus forte, aussi bien au combat à mains nues qu'à l'épée. Les face-à-face avec Dilandau redoublèrent, et bien souvent Folken n'était pas là pour dire quoi que ce soit. Mais il était obligé de le savoir. Mes meurtrissures et celle de l'enfant étaient bien visibles.

Un jour, alors que je me promenais avec un superbe œil noir dont j'étais assez fière, car Dilandau arborait le même, Folken m'intercepta et me fit la morale. J'écoutais à peine. Je ne retins que « tu es plus vieille que lui, mais tu n'es pas plus mûre. Tu es aussi gamine que lui, sauf qu'il n'a pas ton âge ». Je répliquais par « Je ne suis pas si vieille » et le laissais sans plus. Je ne sais pas s'il abandonna sa surveillance ou s'il fut encore plus attentif, car je m'en moquais.

Je me savais forte, intelligente, et mignonne puisque, à mes vingt printemps, les hommes de la forteresse s'intéressait beaucoup à moi. Dans le fond, ce n'était pas vraiment étonnant, car il y avait très peu de femmes. En réalité, à part Narya et Erya, je n'en avais croisé aucune, même pas une servante. Et Narya et Erya vouaient un culte sans faille au Seigneur Folken, sans que je sache pourquoi d'ailleurs.

La nourriture devint encore pire, et je pensais pourtant que c'était impossible. Je m'entraînais dix heures par jour, je mangeais à peine, j'étais devenue terriblement maigre mais bien musclée, et Folken s'inquiéta de mon état de santé.

-Ce n'est pas raisonnable... marmonna t-il alors que je subissais un examen médical.

-M'en fous de ce qui est raisonnable ! répondis-je. Arrêtes de me tripoter vieux fou ou tu devras en répondre en face de Cristal ! hurlais-je au médecin.

Cristal était le nom que j'avais donné à mon épée. Ce n'était pas original, mais c'était joli. Au regard que me lança Folken, j'eus l'impression qu'il voulait me gifler.

Je sautais de la table où l'on m'avait installé pour m'ausculter, disais que je mangerais plus et quittais la salle après un regard provocant vers Folken. Il le rattrapa par le bras et me plaqua au mur.

-Arrêtes ton petit jeu. Je sais que ce n'est pas toi. Ca ne te ressemble pas.

-Voyons, Seigneur Folken... susurrais-je en le collant contre moi.

Il s'écarta vivement et partit à grands pas.