Recroquevillée en position fœtale, Scully resta immobile sur le sol pendant dix bonnes minutes. Ses pensées étaient figées, comme paralysées. Elle ne savait pas quoi faire, où aller.
Tout lui semblait n'être qu'un cauchemar.
Ca ne peut pas être vrai… Ce n'est pas possible… Pourquoi moi ?…
Puis, comme dans un rêve, les paroles de Sargood lui revinrent en mémoire.
« … je devrais te tuer, comme les autres… »
Et s'il changeait d'avis ? S'il revenait sur ses pas pour en finir ?
La jeune femme, tenant son poignet blessé contre sa poitrine, se releva péniblement. Tout son corps la faisait horriblement souffrir, du sang coulait de son entre-jambe sur sa cuisse. Sa respiration douloureuse provoquait des nuages de vapeur dans la nuit noire et l'air était si gelé qu'il en était piquant.
Elle se rhabilla comme elle pouvait et boita jusqu'à son immeuble.
Une fois chez elle, Scully lutta contre le besoin de prendre un bain, de se laver encore et encore pour essayer de se débarrasser de cette affreuse impression de saleté. Mais elle détruirait toutes les preuves de son… . Le mot ne vint pas, elle ne voulait pas qu'il vienne.
Sa respiration se faisait de plus en plus courte et rapide, son corps était si douloureux qu'elle ne pourrait jamais arriver jusqu'à l'hôpital…
Mulder. Il la conduirait.
Non. Comment pourrait-elle lui avouer ? Elle était sensée être forte, capable de se défendre, un agent du FBI. Pas qu'un corps sanguinolent.
Mais elle avait besoin de quelqu'un. Seule, elle s'effondrerait sans doute à peine passé le pas de la porte. Elle saisit le téléphone et composa le numéro de son partenaire.
*******
La sonnerie du téléphone tira Mulder de son film. Il bougonna un peu avant de décrocher.
- Mulder.
Seule une respiration hachée et sifflante lui parvint.
- All ? Il y a quelqu'un ?
- Mul-Mulder ? murmura faiblement une voix familière.
- Scully ?! Qu'est-ce qui ne va pas ?
- Je… j'ai besoin de… de toi…
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Tu peux venir ?… je t'en prie…
- J'arrive.
Il saisit ses clefs de voiture et sa veste en cuir avant de sortir en trombe de chez lui.
*******
Il ne prit pas la peine de sonner en arrivant devant son appartement et utilisa directement sa clef.
- Scully ? Scul… Oh Seigneur…
Sa partenaire était assise sur son canapé, le visage bouffi et tâché de sang. Son arcade sourcilière et sa lèvre étaient ouvertes, elle tenait son poignet droit contre sa poitrine. Ses vêtements déchirés laissaient entrevoir plusieurs autres blessures, des bleus et des coupures.
Mulder se précipita auprès d'elle.
- Qu'est-ce qui s'est pass ? Qui t'a fait ça ?!
La jeune femme tourna la tête vers lui et lui adressa un regard qu'il ne connaissait pas. Sombre. Désespéré.
Il sentit son estomac se retourner.
Mulder passa doucement une main sur son épaule et elle se mit soudain à trembler violemment.
- Mon ange, tu es en état de choc… Il faut que je t'emmène à l'hôpital.
Elle hocha la tête et tenta de se relever, mais un gémissement lui échappa. Alors, avec toute la douceur dont il était capable, le jeune homme la souleva dans ses bras et sortit de l'appartement. Scully perdit connaissance dans la voiture.
A l'hôpital, la jeune femme avait tout de suite été prise en charge et son partenaire, malgré ses protestations, avait dû attendre à l'extérieur.
Mulder s'assit sur une chaise et tenta de se calmer.
Il avait vu ses blessures, le sang qui coulait sur sa jambe, ses vêtements déchirés, son regard. Et il savait ce que cela signifiait.
Scully avait été violée. Violée.
Le jeune homme sentit la haine monter en lui comme une vague et serra les poings.
Il le tuerait. Il tuerait le salopard qui avait osé la toucher.
- Agent Mulder ?
Il sursauta et se retourna vers l'infirmière qui venait de l'appeler.
- Comment va-t-elle ?
La femme fit une petite grimace.
- Les examens ne sont pas terminés, mais je sais qu'elle a son poignet droit et une côté cassé, plus deux fêlées. Son corps et son visage sont couverts d'hématomes, mais ce n'est que superficiel…
Mulder s'appuya à la chaise, prit d'un léger vertige. Elle eut un sourire compatissant et posa sa main sur son épaule.
- Elle a repris conscience, agent Mulder, et vous a demandé. Vous voulez que je vous conduise à sa chambre tout de suite, ou je vous laisse un moment ?
Le jeune homme secoua la tête.
- Non, je veux la voir.
Scully était allongée sur un lit, vêtue d'une chemise d'hôpital. Elle était presque aussi pâle que les draps, et le seul contraste venait du sang séché de ses blessures. Même ses cheveux d'un roux d'ordinaire si vif étaient ternes.
Mulder s'approcha d'elle et prit sa main fine dans la sienne. Elle tenta de sourire mais échoua lamentablement, et ferma les yeux.
- Je veux rentrer à la maison, souffla-t-elle.
- Quoi ? Mais les examens ne…
- Je sais. Mais quand ils seront finis, j'ai besoin que tu me ramènes à la maison.
Il hocha la tête.
- Tu peux demander une décharge au médecin ? continua-t-elle.
- Oui, si tu veux. ( Un docteur entra alors dans la chambre, portant un kit de viol.)
- Vas-y, Mulder.
- Tu ne veux pas que je reste avec toi pendant que…
- Ce n'est pas la peine. Je veux juste en finir le plus vite possible.
Mulder se releva et déposa un baiser sur son front.
- Je reviens tout de suite.
A peine la porte refermée, la jeune femme ne put s'empêcher de frissonner. Le médecin s'en aperçut et lui adressa un sourire compatissant.
- Vous êtes encore en état de choc, Mlle Scully. Vous devriez vous détendre.
Mulder revint quelques minutes plus tard. Les examens étaient terminés, Scully était seule dans la chambre.
Il s'assit près d'elle et caressa tendrement ses cheveux.
Elle ferma les yeux de toutes ses forces, tentant de contenir ses larmes. Elle tentait d'être forte, comme elle le faisait toujours. Mais son partenaire la connaissait trop bien…
Précautionneusement, il passa un bras autour de sa taille et la ramena contre sa poitrine. Il la sentit se tendre un peu et embrassa sa tempe.
- Ca va aller, mon ange, murmura-t-il dans ses cheveux. Je suis là.
Il sanglot secoua son corps tout entier et elle finit par se laisser aller. Elle pleura longtemps, le visage enfouit dans son épaule. Il la serra un peu plus fort, étouffé par la culpabilité de n'avoir pas été là.
Il aurait dû la protéger.
Un homme en uniforme les aborda à peine passée la porte de la chambre.
- Mlle Scully ? Je sais à quel point c'est difficile pour vous, mais j'ai quelques questions à vous poser.
Mulder, un bras protecteur passé autour de ses épaules, lui adressa un regard noir.
- Ca ne peut pas attendre demain ?
- Je suis désolé, mais je dois le faire tant que les évènements sont encore frais, et qu'elle se souvient de son visage…
- Je sais qui c'était, murmura Scully.
Les deux hommes sursautèrent.
- Quoi ? s'écria son partenaire. Qui ?
- Sangood. Marc Sangood.
- Euh… ( Mulder s'adressa à l'officier et sortit son badge, regagnant contenance) Nous sommes des agents du FBI, et cet homme est déjà recherché. Vous avez sûrement déjà reçu son avis de recherche, d'ailleurs.
Pas vraiment convaincu, le policier n'eut cependant aucune raison de les retenir plus longtemps.