Disclaimers habituels : les personnages de X ne m'appartiennent (toujours) pas, etc.

Devoir

Chapitre Cinq

C'était une journée calme. Subaru n'avait eu que deux exorcismes à pratiquer. Il n'avait donc pas à se plaindre.

- Tout est trop calme, se dit-il cependant.

Il était vrai que depuis le choix de Kamui, les Dragons de la Terre ne s'étaient toujours pas manifestés de nouveau.

- Je me demande ce qu'ils attendent...

Subaru alluma lentement une cigarette d'un air songeur. Les Dragons de la Terre devaient sans aucun doute préparer un mauvais coup.

- Ils doivent sans doute planifier toutes leurs attaques à l'avance. Ainsi, quand ils attaqueront, nous aurons à peine le temps de nous organiser pour riposter. Ils prendront donc l'avantage.

Mais il ne pouvait rien y faire. La princesse Hinoto elle-même ne pouvait pas les aider, car le liseur de rêves ennemi bloquait son pouvoir. Quant à trouver le quartier général des Émissaires... Où que puisse être cet endroit, il était protégé à la fois des investigations magiques et informatiques. Les ordinateurs du campus Clamp — parmi les plus puissants et sophistiqués au monde — n'avaient toujours rien trouvé. Les Sceaux pouvaient juste attendre et espérer.

Subaru rit doucement. Attendre et espérer. Quel joli programme en perspective ! En tout cas, tout ceci n'arrangeait pas ses affaires.

- Seishiro-san, murmura-t-il.

Il n'avait guère été surpris que sa nemesis fasse partie des Dragons de la Terre. Après tout, les clans Sumeragi et Sakurazukamori étaient ennemis depuis toujours. Mais comme les Dragons de la Terre ne bougeraient pas avant un moment, Subaru avait peu de chance de le revoir... et de réaliser son souhait.

- Mon souhait... celui que je porte en moi depuis ce jour... Est-ce qu'un être humain peut vivre uniquement pour réaliser ses souhaits véritables ?

Il jeta sa cigarette par la fenêtre et soupira.

Alors qu'il allait se coucher sur le canapé, son regard tomba soudain sur son portefeuille. Il le regarda un moment, puis il le prit dans ses mains. Il l'ouvrit et prit sa carte d'étudiant du campus Clamp. Dire qu'à une époque, il rêvait d'étudier le plus possible. Tout ça pour croire qu'il avait une vie normale, en dépit de tout le reste. Sa grand-mère avait toujours toléré cela, car elle savait au fond d'elle-même que Subaru deviendrait tôt ou tard son successeur. Elle avait traité cela comme un simple caprice. Mais, pour Subaru, cela représentait beaucoup plus. Les paroles du professeur Kumiko Nagi1 lui revinrent en mémoire :

- Subaru, je sais que vous avez un grand pouvoir et que vous en souffrez beaucoup...

Il eut un rire bref. En effet, son pouvoir l'avait toujours fait beaucoup souffrir. Il aurait été bien plus heureux s'il avait été un enfant comme les autres. Déjà, pour commencer, il n'aurait pas attiré sur lui l'attention du Sakurazukamori.

Subaru eut un soupir de lassitude. Décidément, il ne pouvait pas penser une seule fois à quelque chose sans que cela n'aboutisse à Seishiro. Mais ce n'était pas si étonnant que ça : après tout, toute sa vie tournait autour de Seishiro depuis ces neuf années.

- Kamui aussi doit regretter de ne pas avoir été un enfant normal, se dit-il soudain.

Cette pensée le surprit, mais elle n'était pas entièrement fausse. Il avait déjà remarqué que son destin et celui de Kamui présentaient beaucoup de similitudes, ne serait-ce déjà qu'avec la tragédie qui a marqué chacune de leur vie : Kamui a perdu son amour d'enfance, tuée par son meilleur ami, tandis que Subaru avait perdu l'autre moitié de son âme, tuée par celui qu'il aimait.

- Le destin devait manquer d'inspiration, songea-t-il sans humour.

Toutefois, ce devait être cette similitude qui le rendait plus sensible à la détresse de Kamui. Il voulait lui éviter l'enfer qu'il avait lui-même vécu.

- La haine n'apporte jamais rien de bon, se dit-il, mais je suis tombé trop bas pour pouvoir remonter, à présent. Kamui a encore une chance, et si je peux l'aider, alors cela me soulagera d'une certaine façon.

Il prit la carte d'étudiant entre ses doigts et la tapota contre la table. Sa décision était prise.

***************************

Le lendemain, il profita de quelques heures de libre pour se rendre au campus. Il ne savait pas trop ce qu'il avait l'intention de faire. En tout cas, aller en cours était hors de question. Cela réveillerait trop de mauvais souvenirs en lui.

Il regarda sa montre : il était une heure. Avec un peu de chance, il allait pouvoir croiser Kamui à la sortie du lycée. Sans prendre le temps de réfléchir davantage à ce qu'il faisait, il se concentra sur la présence de Kamui et le repéra. Le garçon ne cherchait même pas à se cacher, à croire qu'on ne lui avait jamais appris à le faire. Ou peut-être qu'il se sentait en sécurité au campus. Subaru suivit sa piste spirituelle et le trouva assis seul à un kiosque, dans un endroit assez retiré du campus. Le garçon ne remarqua pas son arrivée : il était trop occupé à lire une liasse de feuilles et à écrire dans un cahier.

Subaru le regarda un moment, amusé par l'acharnement que le jeune garçon mettait à son travail. Kamui fit soudain une grimace et il se redressa légèrement pour mieux regarder sa feuille. Puis il poussa un soupir de frustration et il l'arracha et la roula en boule. Il la posa à côté de lui, sur un coin de la table déjà obstrué par les feuilles rejetées. Kamui prit ensuite une nouvelle page du cahier et recommença, plus lentement cette fois. Subaru le prit en pitié et s'approcha. Il eut le temps de s'asseoir en face de lui avant que Kamui ne se rende compte de sa présence.

Le garçon leva soudain les yeux et un sourire étonné éclaira son visage.

- Subaru ?

- Bonjour Kamui.

- Que... Qu'est-ce que tu fais ici ?

Puis Kamui rougit, se rendant compte que sa question était un peu brutale. Il essaya maladroitement de se rattraper :

- Je veux dire... je suis content de te voir, mais... c'est juste que...

Subaru lui lança un léger sourire amusé.

- Je suis inscrit comme étudiant ici, ne l'oublie pas. Je me suis dit que ce serait peut-être une bonne idée de voir à quoi cela pouvait ressembler.

- Et alors, demanda Kamui, que penses-tu des cours ?

Le sourire de Subaru retomba.

- Je n'y suis pas allé.

Kamui garda le silence un moment, gêné.

Subaru releva les yeux vers lui et reprit, d'un ton plus léger :

- Qu'est-ce que tu étais en train de faire ?

- Oh, je révisais mes leçons et j'essayais de faire mes devoirs...

- 'Essayais' ?

Kamui se mit à rougir.

- C'est que... je ne suis pas très doué.

- Tu as demandé à l'un des autres de t'aider ?

Kamui soupira.

- Yuzu-chan n'a pas le même niveau, et je n'ai pas envie de déranger Arashi pour ça. Sorata est le seul à s'être porté volontaire... mais je crois que je suis quand même plus doué que lui. À chaque fois qu'il m'aide, je fais encore plus de fautes que si j'avais tenté de le faire seul. Alors...

Il haussa les épaules d'un air fataliste.

- Je peux regarder ? demanda Subaru.

Kamui hocha la tête et lui tendit les feuilles. Subaru les parcourut. Il s'agissait de physique. Kamui devait être en seconde, alors que Subaru avait plus ou moins continué jusqu'en première. Il fut surpris de voir qu'il se souvenait encore de ses cours, alors qu'il n'y avait plus pensé depuis des années.

- Ce n'est pas bien difficile, fit-il à Kamui. Il te suffit d'appliquer à chaque fois cette formule en te servant des données de l'énoncé.

Kamui lui lança un regard étrange, puis il se mit au travail. Subaru surveilla ses calculs mais tout allait bien.

- Et voilà, fit-il quand Kamui eut achevé le dernier exercice. Ce n'était pas si dur, n'est-ce pas ?

Kamui avait l'air de ne pas en revenir d'avoir réussi tous ses exercices.

- Non fit-il, ce n'est pas dur, mais il faut seulement que quelqu'un vous explique les choses correctement.

- C'est vrai. Tu as d'autres devoirs à faire ?

Kamui soupira.

- Oh oui, j'ai des maths et du japonais.

- Et bien, allons-y.

Kamui lui lança un regard étonné, puis il lui sourit joyeusement.

- D'accord !

***************************

Une demi-heure plus tard, ils entendirent un bruit dans les buissons. Bien que Subaru ne ressentait pas de danger immédiat, il se tint quand même sur ses gardes. Il se détendit en voyant que ce n'était que le moine.

- Oi, fit Sorata, Kamui, je suis désolé d'arriver en retard, mais Miss était à deux doigts d'accepter que l'on déjeune ensemble, alors je ne pouvais pas laisser échapper une telle occasion !

Sorata s'arrêta soudain en voyant Subaru.

- Ah, Subaru-san ! comme c'est gentil à vous de nous rendre visite ! Vous étiez peut-être en cours ?

- Non.

Sorata ne s'offusqua pas de la réponse brève et il prit place à côté de Kamui, un grand sourire aux lèvres.

- Allons, fit-il, on va pouvoir regarder tes exercices !

- Euh... C'est que... je les ai déjà faits avec Subaru.

Sorata prit un air blessé. Ses yeux se portèrent sur Subaru, puis retournèrent se poser sur Kamui.

- Tu veux dire que tu me fais des infidélités ?! Je suis vraiment choqué, Kamui. Moi qui croyais être le meilleur professeur du monde ! Mais bon, puisqu'on ne veut pas de moi ici.

Il se leva dramatiquement. Kamui essaya de le retenir.

- Mais non, ce n'est pas du tout ce que tu crois...

Sorata se retourna soudain vers lui, un sourire géant à nouveau plaqué sur les lèvres.

- Ah ! je crois comprendre : tu préfères me laisser plus de temps libre pour conquérir le cœur de Miss, c'est ça ?

- Mais non, je...

- Non, non, il n'y a pas à avoir honte. Sache que je te suis très reconnaissant ! Et je te promets de mettre désormais ces heures à profit pour faire de Miss ma future épouse !!

Sorata prit une pose qui se voulait héroïque mais dont l'effet parut plutôt ridicule à Subaru. Puis le moine se tourna vers lui et lui tapota l'épaule.

- Avec vous pour prendre la relève, fit-il, je me sens plus rassuré ! Je suis donc sûr que Kamui n'aura aucun problème avec son travail scolaire !

- Sorata ! s'écria Kamui, rouge de honte.

- Allons, allons, ma future épouse m'attend ! Amusez-vous bien et ne faites pas de bêtises pendant mon absence !

Sorata quitta la clairière en riant, tandis que Kamui devenait de plus en plus rouge.

Finalement, le jeune homme trouva le courage de se tourner vers Subaru.

- Il est vraiment impossible, marmonna-t-il.

Subaru acquiesça. Kamui le regarda soudain, l'air gêné.

- Euh... Tu sais... Tu n'es pas obligé de venir m'aider avec mes devoirs tous les jours. Sorata a dit ça comme ça, c'est tout. Je suis sûr que je peux y arriver seul et...

- Cela ne me gêne pas, répondit simplement Subaru.

Kamui, coupé dans son élan, ne pouvait que le regarder.

- C'est vrai ? fit-il d'une petite voix timide.

Subaru hocha la tête. Kamui lui envoya un sourire radieux.

- Merci, fit-il.

***************************

En revenant chez lui le soir, Subaru ne pouvait s'empêcher de se demander ce qui lui avait pris d'accepter d'aider Kamui tous les jours. N'avait-il pas dit autrefois qu'il voulait avoir le moins possible affaire à lui et aux Sceaux ?

- N'empêche, j'ai donné ma parole et je n'ai pas l'intention de la reprendre. Et puis, disons que ce sera mon unique contribution à la fin du monde : soutenir notre leader dans son travail scolaire.

Cette pensée amena un léger sourire sur ses lèvres.

- Toutefois, je n'oublie pas mon souhait.

Il regarda par la fenêtre, songeant que Seishiro devait être lui aussi là, quelque part en ville, sans doute en train de traquer une autre de ses proies. Subaru appuya sa tête contre la vitre.

- Seishiro-san, murmura-t-il, nous nous reverrons bientôt... Et alors... alors... je réaliserai mon souhait, mon unique souhait...

Il se détourna de la vitre et se dirigea vers le canapé.

/Bientôt.../

Fin.

(Commencé le 27 Octobre 2001, fini le 28 Octobre 2001)

D'accord, ce n'est pas une vraie fin. Mais n'oublions pas quel était mon but en écrivant cette histoire : combler un peu le brutal passage entre les volumes 10 et 11. Et ça y est, je pense que tout y est : l'explication sur l'inscription de Subaru aux cours du campus, pourquoi il a accepté d'aider Kamui avec ses devoirs, et pourquoi il se comporte soudain gentiment avec lui, ainsi que son revirement sur sa participation à la fin du monde.

Pour cette histoire de 'rentrée des classes' et de 'premier jour', je pense qu'il s'agit simplement de la rentrée des vacances d'août. En effet, la rentrée scolaire au Japon se fait en avril. Je pense que les traducteurs ont un peu tout confondu, ou bien qu'ils n'ont pas été assez explicites. Enfin... --;;;;;

(1) Kumiko Nagi apparaît dans Save (volume 4 de Tokyo Babylon), c'est la directrice du centre de recherche MS à Shinjuku.