Chapitre 2 :  l'attente…

C'est les yeux pleins de larmes que j'écris ces lignes : pendant notre voyage jusqu'au Gouffre de Helm, où nous sommes arrivés il y a peu de temps, nous avons perdu Aragorn lors d'une attaque fomentée sans nul doute par Saroumane. Des Orques montés sur les Wargs se sont précipités sur nous, et, malgré sa bravoure, Aragorn a été entraîné jusqu'à un ravin et y est tombé. Il est impossible qu'il ait pu survivre à une chute pareille, les falaises sont à pic à cet endroit…

Il a bien fallu continuer, et installer tout le monde dans les cavernes du Gouffre, femmes et enfants pauvres et effrayés. Je m'y suis employée de mon mieux, pendant que les hommes s'occupaient d'organiser la défense du Fort le Cor. Jamais il n'est tombé en des mains ennemies, il faut qu'il tienne cette fois…

La nuit commence à tomber sur le fort, et s'étend sur moi, je sens mon cœur devenir froid comme la glace…l'assaut aura lieu cette nuit, je le sais, et cela glace mon cœur. Je n'ai pas peur de mourir, une femme de la maison d'Eorl ne tremble pas quand vient la mort, mais je ne peux combattre et cela me frustre. J'ai tout autant le droit qu'un homme de vouloir défendre    ma patrie contre le mal…

(plus tard)

Aragorn est revenu, vivant ! un vrai miracle…il est blessé mais vivant, et a décidé de combattre à nos côtés. Dans ma joie de le revoir vivant, j'ai perdu toute dignité et me suis jetée à son cou, geste que j'ai regretté par la suite, il ne me ressemble pas du tout. Comment ai-je pu me laisser aller à ce point ? Je connais la réponse, mais je crains encore de la regarder en face, ce qui n'est pas digne de moi…

Un autre miracle est arrivé un peu plus tard : une escouade d'elfes, qui venaient honorer le serment d'alliance depuis longtemps existant entre les hommes et les elfes. Ces archers elfes avaient une prestance sans pareille, et leur venue a été accueillie avec beaucoup de joie, c'est une chance supplémentaire pour nous.

Je n'ai pu en voir plus car on m'a priée de rentrer, le roi m'ordonnait de me mettre à l'abri. J'ai donc dû retourner, la mort dans l'âme, aux abris dans les grottes. Tous les femmes et les enfants pleurent autour de moi, et j'essaie de croire encore en un avenir pour le Rohan…

(Bien plus tard)

Je suis de retour à Edoras, dirigeant notre peuple selon le souhait de Theoden Roi. Nous avons vaincu au Gouffre de Helm, et j'ai revu avec beaucoup de joie mon frère, qui est aussitôt reparti pour accompagner notre Roi, Aragorn, Mithrandir, Legolas et Gimli en Isengard. Mithrandir et Eomer nous ont sauvé au moment où nous étions submergés d'orques, à ce que l'on m'a dit…

Je n'ai pas dormi cette nuit-là, et je me souviens des cris, des clameurs des combattants et des orques alors que la terre tremblait au dessus de nous. Les femmes et les enfants qui étaient autour de moi hurlaient et pleuraient, et je m'efforçais de leur venir en aide, tout en gardant l'épée à la main pour pouvoir me défendre si l'ennemi arrivait jusque-là…S'il avait fallu, j'aurais vendu chèrement ma vie et celle de mon peuple.

Mais je n'ai pas eu à combattre…serai-je donc toujours privée de combat, alors qu'on nous apprend, à nous les femmes de la maison d'Eorl, à combattre dès notre plus jeune âge pour que nous soyons capables de nous défendre par nous-mêmes et que nous ne soyons pas une charge pour les hommes ? Quelle ironie !

Un messager est arrivé hier, me demandant de préparer un grand banquet qui aura lieu au retour de Theoden Roi pour honorer nos morts, comme le veut la tradition, et j'ai donné les ordres adéquats, sachant bien qu'avec lui reviendrait Aragorn, la source des maux secrets que mon cœur endure…Je ne peux me cacher plus longtemps qu'il a pris mon cœur, comme jamais je ne l'aurais cru possible un jour, moi consacrée à servir mon roi. Des sentiments contradictoires m'agitent l'esprit, j'ai à la fois envie de le voir et en même temps je crains de ne pouvoir lui cacher ce que je ressens, lui qui a tellement d'expérience ne pourrait manquer de voir ce que je veux à tout prix lui celer.

Au milieu des préparatifs, car je dois veiller à tout, je m'occupe l'esprit, je ne veux pas penser…

(Après le banquet)

L'esprit encore en tempête, je ne peux dormir, alors que le banquet vient de se terminer et que l'aube blanchit déjà le sommet des montagnes…le roi est revenu, avec Aragorn, Mithrandir, Legolas, Gimli et Eomer, ainsi que deux semi-hommes, fort étranges mais fort civils et gais. A ce que j'ai compris, ce sont des amis qui partirent avec eux et qu'ils avaient perdus…

Comme le voulait mon devoir d'hôtesse de la maison, je suis allée vers Aragorn et lui ai donné la coupe traditionnelle en prononçant les mots traditionnels : « Westu Aragorn Hal ». Je m'étais promis de ne rien laisser paraître de mon trouble, mais, quand il m'a regardée de ses yeux bleus si profonds et si énigmatiques, je n'ai pu m'empêcher de sourire et de laisser involontairement paraître ce que j'aurais tant voulu contenir. A son regard, j'ai vu qu'il avait compris…

Theoden Roi aussi a compris. Quand Aragorn s'est détourné, il m'a félicitée pour mon choix….je n'ai pu m'empêcher de baisser la tête, parce que je voulais qu'il ne voie pas mon trouble.

Cependant, je ne peux m'appesantir sur moi-même quand nous sommes de nouveau en danger…

(Quelques jours plus tard)

Nous attendons, sans savoir vraiment quoi…Mithrandir et l'un des semi-hommes sont partis à Minas Tirith. Qu'attendons-nous du Gondor, ils ne nous ont pas aidés au Gouffre de Helm, pourquoi leur porterions-nous secours ? Et pourquoi viendraient-ils au nôtre ? Leur pays est à la lisière du Mordor, ils n'ont sans doute pas d'aide à nous donner…

Pourtant, cet après-midi, un après-midi ordinaire, alors que j'étais dans la grande salle, Aragorn est arrivé en courant et en hurlant :

« Les feux d'alarme de Minas Tirith sont allumés ! le Gondor appelle à l'aide ! »

Eomer et moi nous sommes regardés, comme soulagés, et Theoden Roi a répondu d'un ton décid :

« Et le Rohan répondra ! »

A cette réponse, j'ai compris que la partie finale de l'infernale partie d'échecs qui se joue entre l'Ennemi et nous venait de commencer, et que l'enjeu serait rien moins que notre simple survie…

A suivre…