Chapitre 3
Une journée riche en émotions
L'homme s'installa un peu plus confortablement dans le haut fauteuil de son bureau.
Une petite formule magique suffit à déplacer et tasser correctement le moelleux coussin qui lui soutenait agréablement le dos alors qu'il posait délicatement sur la table basse près de son siège, la tasse de thé fumante qu'il sirotait. Une légère et très agréable odeur de menthe se rependit doucement dans la pièce au grès de volutes de fumées qui s'en échappaient, pour disparaître presque aussitôt.
Il soupira d'aise en se détendant dans le magnifique siège de satin pourpre et d'ébène et caressa d'un mouvement de main inconscient, presque machinale, le bout de l'accoudoir délicatement poli et orné d'un pentacle inversé.
Il observa un moment cette pièce qu'il affectionnait tant.
Sur l'un des mûrs adjacents à la porte se dressait une majestueuse cheminée de marbre noir dans laquelle crépitait un formidable feu. Les flammes semblaient littéralement dansées, tour à tour bleues, jaunes ou rouges et toujours majestueuse de grandeur et de force. Pourtant, cet étrange foyer ne dissipait aucune chaleur dans cette pièce presque glaciale et parvenait à peine à éclairer le fauteuil installé obliquement devant.
Le reste de la pièce était plongé dans une quasi-pénombre et c'est à peine si l'on pouvait distinguer les contours du lourd bureau de merisier massif sur lequel reposaient papiers, grimoires et plumes d'oie. De même l'immense bibliothèque qui couvrait l'intégralité du mur opposé était parfaitement invisible pour un regard non averti. Mais l'homme n'en avait cure. Il connaissait parfaitement les ténèbres dans lesquelles il évoluait depuis si longtemps et n'avait besoins que de peu de lumière pour accomplir ses tâches. Un excès de luminosité lui était même souvent pénible lorsqu'il lui s'agissait d'étudier en ce lieu.
Il reprit soudain sa tasse et avala une rapide gorgée de son liquide fumant avant de reporter son attention sur le livre qui reposait sur ses genoux.
L'ouvrage, de très vieille facture et pourtant à peine érodé par le temps, contenait quelques formules intéressantes qu'il étudia avec soin. Néanmoins, il ne s'était pas avéré aussi complet qu'il l'avait espéré et valait à peine plus que le prix qu'il l'avait payé.
Soupirant de déception, il en parcourut néanmoins chaque page, espérant qu'un petit coup du destin l'aiderait à découvrir la formule qu'il tentait désespérément de retrouver.
Mais le destin a ses caprices contre lesquels même un des meilleurs sorciers ne peut rien et il fut déçu une fois de plus.
Claquant avec rage la couverture de cuivre enchâssée d'or, il fut un instant tenté de jeter l'ouvrage dans le feu pour le laisser s'y consumer jusqu'à cendre, mais circonspect, n'en fit rien.
Il contenait malgré tout quelques formules qui pourraient avoir leur utilité dans un proche avenir et, au pire, il y avait toujours possibilité de le revendre.
Le posant distraitement sur la table d'ébène à côté de sa tasse maintenant presque froide, il se laissa aller totalement dans son fauteuil et ferma les yeux, ressassant avec une avidité presque morbide ses idées noires.
Rien de ce qu'il avait entreprit jusqu'à maintenant n'avait porté ses fruits. Mais rien de ce qu'il avait entreprit n'avait jamais eut autant de chance d'aboutir que cette solution. Il lui manquait malheureusement l'indispensable formule pour réussir et s'il ne parvenait pas à la découvrir, c'est un « travail » de plus de dix sept ans qui partirait en fumée. Le jour approchait où il lui faudrait agir et il ne devait pas échouer. Il tenait là peut-être la dernière occasion d'accomplir sa mission. Toutes les autres avaient échoué lamentablement et bien qu'il fut toujours préparé à cette éventualité, grâce à ce plan des plus audacieux, il n'avait jamais cru jusqu'alors qu'il lui faudrait en arriver là.
Maintenant le temps pressait et rien ne semblait vouloir se dérouler comme il le souhaitait.
Oui, décidément, le destin était bien capricieux.
Ouvrant son regard de pur azur sur les flammes toujours riantes, il le glissa lentement vers la gauche, jusqu'aux lourds anneaux de fer encastrés dans le mur. Un petit sourire ourla doucement ses lèvres, alors que les souvenirs affluaient lentement.
Il n'avait rien à craindre de ce côté-là, tout était parfait.
Un double et discret cognement se fit entendre soudain à la porte, le tirant de ses pensées. Sans même prendre la peine de répondre, connaissant parfaitement l'identité de son visiteur, il eut un petit geste négligeant de la main en direction du lourd panneau du bois qui s'ouvrit immédiatement sans le moindre grincement.
Une maigre silhouette se glissa rapidement dans la pièce.
A peine plus grand qu'un enfant le visiteur fut en un instant aux côtés de son maître qui le darda d'un œil courroucé. Il savait parfaitement que son serviteur n'aurait pas du revenir avant plusieurs jours et sa présence annonçait forcément des complications dont il n'avait pas besoins.
Un rapide coup d'œil au pendule lunaire lui appris qu'il était déjà cinq heures du matin.
Le serviteur suivit avec attention le regard de son maître et resta quelques instants ébahi devant la beauté de l'objet qu'il n'avait jamais remarqué jusqu'à présent. Il s'agissait d'un petit plateau circulaire, apparemment taillé dans une pierre cristalline d'un bleu presque noir, sur lequel venaient glisser deux boules d'argent reliées chacune à un fils d'or qui semblait fixé à l'unique rayon de lune qui traversait la pièce pour venir mourir exactement en son centre.
Le petit être aurait touché l'objet tant il était fascinant s'il n'avait pas craint le courroux de son maître.
Celui-ci reporta justement son attention sur lui.
_ Quelle mauvaise nouvelle m'apportes-tu donc ? Demanda-t-il d'un ton dangereusement suave.
Il n'avait apparemment pas trouvé ce qu'il cherchait et son serviteur, en venant lui porté aussi mauvaise nouvelle que celle qu'il détenait, était sûr maintenant de voir exploser toute sa colère.
Il tritura d'un geste nerveux sa longue oreille elfique, derrière laquelle cascadait une soyeuse chevelure de geai et se racla la gorge.
Depuis la nuit des temps, tous les membres son peuple étaient dévoués corps et âme aux sorciers et sorcières et en retiraient le plus souvent une grande satisfaction. Mais Pim aurait préféré qu'il en soit autrement. Etre attaché à un personnage tel que son maître relevait plus du cauchemar qu'autre chose, surtout depuis le départ de son seul compagnon.
Il soupira ne sachant pas trop par où commencer. S'il n'avait tenu qu'à lui, il n'aurait rien dit de ce qu'il avait appris, mais son seigneur l'aurait immédiatement su et se serrait probablement venger sur sa famille qu'il gardait secrètement prisonnière. Depuis toujours ce glaive de sang était suspendu au-dessus de sa tête. A cause de lui, il avait du renoncer à son seul ami et maintenant… maintenant, il allait devoir…
_ Et bien parle. Ou veux-tu tellement goûter de mes douceurs ?
L'elfe frémit imperceptiblement et déglutit avec peine.
_ Il semblerait, Seigneur, que… que des personnes soient au courant.
_ QUOI ? ? ? ? Hurla le sorcier en se redressant.
Pim, dont le cœur battait maintenant à tout rompre, alors qu'une terreur sans nom déformait ses traits gracieux, recula rapidement et dans sa précipitation, se prit les pieds dans le lourd tapi d'angora. Il chuta dans un son mât, mais sans se blesser, l'épaisse fourrure amortissant presque totalement sa chute.
Il avait de toute façon bien plus à craindre du sorcier qui dardait maintenant sur lui un regard de flamme, visiblement désireux de le torturer avec assiduité.
_ Je… je suis désolé maître, bégaya-t-il.
Un grognement rauque échappa à l'homme avant qu'il ne se rassoie.
_ Qui est au courant et que savent-ils exactement ? Demanda-t-il d'un ton rude.
_ Ils ne savent presque rien, maître, je vous assure. Ils ont juste une vague idée de ce qui s'est passé, répondit Pim en tentant de cacher son profond dégoût.
_ Combien ?
_ Deux personnes, peut-être trois.
_ Et… ?
_ Je crois qu'ils ne comprennent pas vraiment.
Le sorcier ferma les yeux, visiblement pour réfléchir et se calmer, mais ses mains crispées à s'en faire blanchire les jointures sur les accoudoirs n'échappèrent pas au regard perçant de l'elfe.
S'il échappait à une quelconque punition, il ne lui faudrait pas s'attarder.
_ Bien, finit par dire l'homme. Ce n'est pas grave. Les évènements se déroulent juste un peu plus tôt que prévus. Ce n'est qu'un problème mineur au vu des circonstances. Tant qu'ils n'en savant pas plus, il n'y a pas danger et je doute que cela arrive jamais. Tu vas retourner là-bas et reprendre ta surveillance. Préviens-moi immédiatement s'il y a le moindre changement.
_ Oui, seigneur, murmura Pim en s'inclinant.
Puis le petit homme courut rapidement vers la porte peu désireux de rester une minute de plus dans la pièce. La porte claqua violemment derrière lui et il se dépêcha de gagner la sortie du manoir, espérant arriver à destination avant l'aube.
Après avoir franchit les immenses grilles de fer forgé qui en gardaient magiquement l'entrée, il se retourna pour jeter un dernier coup d'œil à la bâtisse et plus précisément à la fenêtre du bureau de son maître sur la plus haute tour. Un petit sourire satisfait glissa sur ses lèvres. Il était parvenu à omettre le plus important sans que l'homme ne s'en rende compte.
Tout n'était pas encore perdu.
Se détourant rapidement, il se mit à courir à travers bois, bien trop familier de cet environnement pour en craindre quoi que ce soit à cette heure de la nuit, même si près du château.
Si Pim était resté quelques secondes de plus devant la porte, il aurait entendu un grand fracas de verre se brisant au sol, ainsi qu'un terrifiant hurlement de rage.
***
Ron n'en crut pas ses yeux lorsqu'il se retrouva nez à nez avec le contrôle d'histoire de la magie et au vu des gémissements qui s'élevèrent de tous les coins de la classe, il n'était apparemment pas le seul.
Jamais il n'avait vu tel questionnaire.
Il jeta un coup d'œil incrédule au professeur qui s'était tranquillement assis à son bureau et les fixait un petit sourire satisfait aux lèvres.
De toute évidence, il avait décidé de faire chuter un maximum d'élève en se concentrant sur les points les moins importants de la leçon, ceux que l'on a tendance à ne pas réviser, persuadé qu'ils ne pourront jamais apparaître dans aucune question.
Et bien c'était maintenant chose faite.
Ron se sentait surtout désolé pour ses camarades car il venait de lire entièrement le formulaire et connaissait toutes les réponses. Il se félicita mentalement d'avoir révisé le matin même, apprenant justement de manière plus approfondie tout ce qu'il avait eu tendance à mettre de côté. Les questions lui semblaient donc évidentes, mais il savait que ce n'était pas le cas de la quasi-totalité de la classe.
Il se demanda un instant comment s'en sortait Harry et Hermione, mais n'osa pas se retourner pour les regarder, de peur d'être accuser de tricher.
Il avait par contre une vue imprenable sur le dos de Malfoy dont la classe avait été « aimablement » invité à partager les joies de ce contrôle.
Le jeune homme, penché sur sa feuille, avait déjà commencé à écrire. De toute évidence lui aussi connaissait parfaitement son cours.
Ron en fut inexplicablement heureux et se mit aussitôt en devoir de répondre de manière concise mais précise aux différentes questions.
Le temps passa très rapidement et il eut à peine le temps de finir lorsque le professeur annonça la fin de l'interrogation.
Tous les crayons se posèrent d'un coup sur les tables et il passa rapidement dans les rangs pour ramasser les copies.
Un peu partout des chuchotements indignés s'élevèrent, alors que tous les élèves ou presque pestaient contre le nouveau professeur.
Il est vrai que mettre un tel niveau de difficulté pour un premier examen, surtout si près de la fin d'année, avait de quoi surprendre.
Il allait longtemps en entendre parler.
Ronald Philibert Ernst étaient probablement, avec Rogue, le pire professeur qu'ils aient jamais eu.
Avec une stature de squelette ambulant, des yeux beaucoup trop grands pour un visage trop fin et des cheveux déjà blanchis et presque inexistants malgré son âge (à peine quarante ans), il tenait plus d'un fantôme, et de Peeves en particulier, que d'un homme. Si on comptait en plus un caractère particulièrement vicieux et sadique, il atteignait déjà des sphères très élevées dans le classement du pire professeur ayant jamais existé. Seul avantage, il paraissait ne pas avoir de préférence pour une classe en particulier, tout le monde au même régime, à savoir la torture pure et simple.
Ron soupira et profita que Ernst ait enfin ramassé sa copie pour jeter un coup d'œil en direction de ses deux amis qui arboraient une mine plutôt déconfite. De toute évidence le contrôle s'était mal passé pour eux aussi et il s'en sentit désolé. Surtout pour Hermione d'ailleurs. La jeune femme était habituée aux notes parfaites, arrivant très souvent première de la classe, voir de la promotion et une telle débandade devait être une véritable torture. Harry aussi était à plaindre, mais beaucoup moins, car avec sa réputation, il ne craignait pas grand chose. D'ailleurs, il n'avait jamais vraiment atteint des sommets d'excellences contrairement à sa fiancée.
Il se ferait une meilleure idée après la classe.
Il se retourna ensuite vers Draco qui regardait toujours sa table et ne le lâcha plus des yeux.
Se sentant probablement observer, ce dernier finit par tourner la tête et son regard s'encra à nouveau dans celui de Weasley. Mais contrairement aux deux dernières fois, il resta presque vide, si ce n'est un peu condescendant et Draco brisa bien vite le lien pour reporter son attention sur son bureau.
Ron retint à grand peine un soupire de frustration.
Il ne savait pas sur quel pied danser et cela le frustrait au plus haut point.
Il ne se rappelait pas une seule seconde depuis la première fois qu'il avait vu le blond dans le train pour Poudlard, où il ne l'avait pas profondément haï. Son sourire moqueur et sa façon de toujours le tourner en ridicule, de toujours ridiculiser sa famille à cause de sa pauvreté, ses manières brusques, voire cruelles et son air suffisant, tout avait contribué à pousser le jeune homme à le détester.
Pourtant… pourtant, hier, il avait découvert que le blond n'était pas si inhumain qu'il voulait bien le paraître, qu'il avait des sentiments et que lui aussi pouvait souffrir. Et Ron avait sentit toute sa haine être balayée d'un coup, car si quelqu'un comme Malfoy était capable soudainement de pleurer, c'est que personne au monde ne méritait de vivre ce qu'il avait du endurer.
Ron l'avait consolé à cet instant et s'était mis à espérer malgré tout que peut-être une barrière avait été abaissée et la réaction du jeune homme le matin même semblait l'avoir confirmé. Mais voilà qu'il le regardait à nouveau avec cette suffisance qu'il détestait tant et Ron aurait voulu pouvoir recommencer à le haïr aussi facilement qu'il semblait l'avoir fait. Mais il en était tout bonnement incapable.
Qu'il l'ait voulu ou non, Draco lui avait montré un petit bout de sa vraie personnalité et Ron ne désirait plus qu'une chose, la découvrir entièrement.
Il se savait ridicule, mais n'y pouvait absolument rien et maintenant, il était blessé. Blessé de se sentir rejeter.
« Maudit soit tous les Malfoy ! Oh et puis, je n'en ai rien à faire ! Flûte à la fin ! »
Sans plus un regard pour le jeune homme, il sortit rapidement de la classe quand le professeur en eut donné l'autorisation et se dépêcha de rejoindre ses amis.
Peut-être parviendrait-il à sortir le souvenir de la tête blond pleurant contre son épaule de son esprit.
Peut-être.
Ou peut-être pas.
***
Leur regard se croisèrent pour la troisième fois de la journée et Draco dut faire un effort considérable pour ne pas laisser ses sentiments l'envahir une nouvelle fois. Il ne laissa paraître que son mépris, mais du bien vite détourner les yeux, avant que sa volonté ne vacille.
Fixant avec une intensité presque inquiétante les sillons tracés dans le bois de sa table, il résista tant bien que mal à son envie de se retourner pour regarder le jeune Weasley.
Il ne se comprenait plus.
Il y a deux jours il n'aurait eu aucun mal à le dévisager avec suffisance, mais ce n'était plus le cas aujourd'hui. Par sa simple et réconfortante présence la veille au soir, le jeune homme était parvenu à faire craquer le vernis de son masque.
Un masque qu'il avait eu tant de mal à se construire.
Ron n'avait jamais compris.
Jamais comprit qu'il ne l'avait jamais haï, qu'il ne l'avait jamais méprisé, pas un seul instant. Bien au contraire. Il l'enviait, il l'enviait tellement. Mais un Malfoy ne se doit pas d'envier les autres, ne se doit pas d'éprouver quoi que ce soit pour qui ce fut, jamais. Les sentiments ne sont que faiblesse et il n'avait pas le droit d'être faible. C'est son père qui le lui avait appris. Parfaitement bien apprit.
Trop bien appris.
Mais Draco n'avait jamais pu s'empêcher d'envier Ron. Alors, pour que son père ne le sache jamais, il avait fait la seule chose qu'il lui semblait raisonnable, il s'était moqué. Il l'avait injurié, tourné en ridicule, humilié en public et personne n'avait jamais rien soupçonné.
Il avait fait de même avec toutes les personnes pour qui il ait jamais eu le moindre début de sentiment : Harry, Hermione, Genny, Neville, oui même Neville qui, avec ses airs de grand naïf maladroit, lui donnait envie de rire.
Mais surtout, surtout Ron.
Le jeune homme avait une telle joie de vivre en lui, il suffisait de le regarder pour sourire inconsciemment. Il était rieur, généreux, emporté, si franc dans ses sentiments, si plein de bonne volonté. Si plein d'amour. Tout ce que Draco avait toujours voulu être. Et il avait une chose que le blond ne possédait pas, mais qu'il enviait plus sûrement qu'un pirate envie le plus gros diamant du monde.
L'amour de sa famille.
Ron avait beau avoir été élevé dans une famille trop nombreuse pour leur peu de revenu, il avait beau n'avoir jamais pu porter que ce que ses frères avaient porté avant lui, il n'en restait pas moins qu'il n'y avait jamais eu de haine, jamais eu de mépris entre eux. Ils s'aimaient tout simplement.
Depuis toujours Malfoy ne rêvait que de ça et s'il avait pu maintenir l'illusion de son rêve jusqu'à la veille, aujourd'hui tout était bien terminé.
Il lutta avec plus où moins de succès contre la vague de dégoût et de nausée qui menaçait de l'envahir une fois de plus, fermant fortement les yeux pour empêcher les larmes qui inondaient son regard de couler le long de ses joues en feu.
Il crispa violemment le poing et se força à se calmer avant que quelqu'un ne s'en rende compte.
« C'est trop tard ! »
Oui, c'est vrai, il était déjà trop tard. Ron savait.
Il ne comprenait pas pourquoi le jeune homme avait agit ainsi. Il aurait du l'envoyer balader, aller se venter auprès d'un tout à chacun d'avoir vu le grand Draco Malfoy pleurer. Mais non, au lieu de quoi, il l'avait gentiment réconforté, il l'avait laissé exprimer toute sa douleur, toute sa détresse sans rien lui demander, sans rien dire.
Et le matin même, il y avait eu tellement de compréhension dans son regard, un si visible désir de l'aider !
Et Draco était tenté de le laisser faire.
Mais il ne pouvait pas, il ne devait pas ! Jamais ! Dieu sait ce qui pourrait lui arriver à lui aussi et il ne voulait jamais revivre ce qu'il avait vécu. Jamais !
***
_ Ron ? Ron ? RON ?!?!?
_ Hein ? Quoi ?
_ Mais qu'est-ce que tu as aujourd'hui, demanda Fred l'un des jumeaux Weasley. Tu es complètement dans la lune.
_ Je réfléchissais.
_ Ohhhhh ! Bah dis, j'espère que tu ne t'es pas fait trop mal au moins, le charia gentiment George la copie conforme de Fred.
_ Ah ! Ah ! Ah !
_ Aller, fait pas cette tête, c'était juste une blague quoi !
_ Je sais, je sais, marmonna Ron en soupirant.
_ Bah alors quoi ? Je croyais que tu avais réussi ton contrôle.
_ Mais je l'ai réussi.
_ Explique-toi dans ce cas. Je te signale que tu es censé être ici pour soutenir Harry qui se défonce comme un forcené pour attraper le Vif d'Or et toi, tu ne semble même pas te rendre compte qu'il y a un match.
_ Ce n'est rien, ce n'est rien, souffla le rouquin.
Il est vrai que pour le coup, il ne faisait pas un excellent ami. Il n'avait rien suivit du jeu depuis le début et était bien incapable de dire qui était en train de gagner des Serpentards ou des Griffondors. Et pour tout dire, pour la première fois de sa vie peut-être, il s'en fichait royalement.
Il avait beau faire, il n'arrivait pas à sortir Malfoy de son esprit. A chaque fois qu'il fermait les yeux, il revoyait son visage si triste à peine éclairé par la lune. Il sentait sa chaleur contre son corps, le doux parfum de ses cheveux…
« ASSEZZZZZZZ ! » Hurla-t-il mentalement.
Mais non, rien n'y faisait.
Il soupira de rechef s'attirant une fois de plus les regards étonnés de ses frères.
_ Et puis c'est quoi cette cape que tu trimbales partout depuis ce matin ? Demanda Fred, une curieuse lumière dans le regard. Tu ne nous aurais pas caché quelque chose par hasard ?
La cape ?
Oui, c'est vrai, il ne l'avait pas lâchée une seule seconde. Pourquoi ?
_ Alors ?
_ Qu…quoi ?
_ Comme s'appelle-t-elle? Sourit malicieusement George dans un clin d'œil.
Ron s'empourpra aussitôt et bégaya tant bien que mal :
_ Mais…euh…il n'y a pas…de…euh…de…elle…
_ C'est « IL » alors s'exclama, Fred un peu trop fort, s'attirant les regards curieux de plusieurs personnes.
S'il l'avait pu, Ron serait immédiatement rentrer sous terre, alors qu'il était définitivement passé au rouge écrevisse. Il nota néanmoins dans un coin de son esprit que cela n'avait pas l'air de déranger le moins du monde ses frères que ce puisse être un garçon.
_ Mais ça va pas non ! S'exclama-t-il enfin.
_ Aller, tu peux bien nous le dire !
_ Il n'y a personne !
_ Aller…insista Gorge en lui pinçant légèrement les côtes pour le faire sourire.
_ Je suis pas amoureux je te dis ! J'ai trouvé cette cape par terre et je vais essayer de la rendre à son propriétaire.
_ C'est pas beau de mentir à ses frères, Ron ! Le taquina Fred.
Le jeune homme allait riposter quand Percy se décida enfin à intervenir.
_ Laisse le tranquille à la fin, s'il vous dit qu'il n'y a personne, c'est qu'il n'y a personne, dit-il une main sur le micro pour que personne ne l'entende.
Les deux jumeaux se regardèrent et poussèrent un soupire résigné, avant de reporter leur attention sur le match.
_ Merci, murmura Ron à l'attention de son aîné.
Celui-ci lui adressa un chaleureux sourire avant de retourner à ses commentaires sur la partie.
Au bout de cinq minutes, ne pouvant plus tenir, Ron se leva pour quitter les gradins.
Genny et Hermione lui lancèrent un regard surpris auquel il répondit uniquement par un petit sourire, avant de filer en quatrième vitesse.
A peine en fut-il descendu qu'il rentra de plein fouet dans un corps qui se dirigeait à grand pas vers le terrain.
Ils tombèrent tous les deux à terre de concert et Ron secoua un peu la tête pour reprendre ses esprits. Il s'assit et regard la personne qu'il venait de percuter.
_ Malfoy ! Murmura-t-il.
A suivre…
