Titre : Ames Sœurs
Auteur : Aakanee
Genre : larmes de sang
Base : Harry Potter
Notes : 1) okiiii, d'abord désolée pour le retard, mais comme je l'ai déjà dit, je bosse sur plusieurs fics en même temps et j'ai en plus un emploi du temps relativement chargé
2) merci à toutes les personnes qui m'ont écrites, ça m'a encouragé à finir ce chapitre sur lequel j'ai un peu pataugé
3) la suite mettra du temps à venir car je n'ai pas encore une idée très claire de comment je vais conclure tout ça, mais une chose est sûre, il y aura un point final à cette histoire. Je pense écrire encore environs deux chapitres.
4) comme d'habitude, il est interdit de tuer l'auteur, j'avais prévenu que je serais sadique, ah mais !!!
Ames Sœurs
Chapitre 12
Sãryl Rhreï
Draco ouvrit lentement les yeux, pour les refermer presque aussitôt, aveuglé par la pâle lueur d'une lampe sur sa droite. Il poussa un petit grognement et couvrit instinctivement son visage de son bras, espérant ainsi se protéger des rayons pénétrants de cette simple lumière. Il voulut également détourner la tête, mais ce geste, pourtant banal, lui sembla si pénible qu'il y renonça rapidement. Il se sentait fatigué. Terriblement fatigué. Son corps tout entier, chaque muscle, chaque fibre le brûlait, comme courbatu par des heures d'exercices. Il avait l'impression d'avoir couru ou plutôt lutté à n'en plus finir et pour une raison qu'il ne comprenait pas. Et son esprit… Il semblait encore englué dans un marécage boueux dont il se débattait vainement pour sortir. Sa bouche était pâteuse et il avait terriblement soif. Il tenta encore une fois de bouger légèrement, mais le simple fait de remuer la tête suffit à le rendre malade au point de presque vomir. Aussi décida-t-il, au moins pour un temps, de rester immobile et de rassembler ses idées.
Il s'était rarement sentit aussi mal de toute sa vie. Non… faux… il avait connu bien pire et à de nombreuses reprises, mais ces souffrances semblaient remonter à si loin en cet instant, que celles qui brûlaient chacun de ses nerfs lui paraissaient déjà en soit par trop pénibles. Et il ne savait pas pourquoi. Son esprit était flou, des images, des sons, perdus, mêlés, complètement embrouillés qu'il ne pouvait discerner. Il était incapable de se rappeler ce qui s'était passé et cela l'inquiétait pour une raison qu'il n'arrivait pas à définir. Il ne savait même pas où il était. Il lui semblait être étendu sur un lit, mais où, là était toute la question. Il pouvait sentir le matelas plier doucement sous son poids pour épouser parfaitement les courbes de son corps et les draps venir adhérer doucement à sa peau nue et humide.
Nue ?
Un frisson lui parcourut instantanément l'échine. Il ne dormait jamais nu. Jamais. Quoiqu'il puisse se passer, quel que soit le temps, il portait au moins un caleçon, quelque chose, n'importe quoi pour se protéger. Il ne supportait pas l'idée d'être ainsi entièrement découvert et vulnérable. Il en était malade rien que d'y penser. Et cela avait toujours été ainsi depuis le jour où… depuis… même lorsque ses souvenirs lui avaient arraché, il avait gardé cette habitude, sans jamais chercher à s'en débarrasser. Il était tout simplement impossible qu'il se soit endormi ainsi. Il sentit presque aussitôt une vague de nausée le terrasser et il se recroquevilla automatiquement sur lui-même dans un gémissement pathétique, resserrant le plus possible son corps tremblant pour former une boule protectrice. S'il s'en était senti la force, il se serrait levé sans attendre pour trouver quelque chose à mettre, mais le simple fait de bouger avait déjà suffit en soit à l'épuiser, aussi dut-il se résigner à attendre. Mais si son corps n'avait pas encore retrouvé toute sa vitalité, son esprit, lui, s'était enfin éclaircit et lui offrait malheureusement tout le loisir de penser, de se souvenir et de trembler. Il pouvait presque encore sentir leurs doigts gluants et glacés courir sur sa peau, chassant sa chaleur et réouvrant chacune de ses plaies dans le simple plaisir de voir couler son sang. Il pouvait presque sentir leur odeur fétide l'envelopper complètement jusqu'à l'étouffer, leur souffle rauque et bestial venir glisser sur son cou, le brûlant presque de son acidité. Il pouvait presque encore sentir les derniers lambeaux de ses vêtements lui être arraché pour l'exposer complètement à leur vu.
Un sanglot étouffer passa la barrière pourtant serrée de ses lèvres et il ouvrit finalement les yeux, préférant affronter la lueur blessante d'une lampe, que les reliefs tranchants de ses souvenirs. Il ne put cependant rien voir de la pièce tout d'abord, aveuglé par cet éclair doré qui sembla danser devant ses yeux à ne plus vouloir les quitter. Il formait un halot qui couvrait presque entièrement ses pupilles et sa vision pour ne laisser à son regard qu'une ligne de ténèbres à sa périphérie. Pourtant, le temps passant, celle-ci gagna peu à peu du terrain pour découvrir finalement presque toute la pièce et ne laisser de son aveuglement qu'une trace presque transparence qui se superposait à chaque objet qu'il pouvait enfin apercevoir. C'était gênant, mais moins douloureux que le flash d'une intense lueur ou que la marée houleuse de sa mémoire.
Sans bouger, il laissa son regard dérivé lentement sur chaque meuble, chaque livre, chaque chose, découvrant peu à peu la pièce dans laquelle il était étendu. Il y avait un bureau sur sa droite sur lequel reposait une lampe renversée. Les feuilles, éparses, qui le couvraient, étaient pour la plus part froissées voir déchirées, comme balayées par un coup de vent et la chaise était tombée sur le tapi, éparpillant dans sa chute les quelques vêtements qui se trouvaient dessus. Il y avait également une bibliothèque remplie de livres de cours, quelques objets décoratifs et deux tableaux abstraits venaient égayer les murs de leurs couleurs pastelles, mais soigneusement arrangées. Et il y avait aussi cette cape qui reposait sur une autre chaise près d'une armoire de chêne massif.
Son cœur sembla manquer un battement. Cette chambre, il la connaissait par cœur, ayant déjà eu tout le loisir d'observer chaque détail, chaque contour. Il déglutit péniblement. Comment était-il arrivé ici ? Il ne s'en souvenait plus. Il se rappelait avoir travaillé dans sa chambre sur un problème de mathématique, la peur au ventre et l'esprit torturé par ce que son père pourrait leur faire si jamais il venait à apprendre qu… Son… son père ? Oui, il se rappelait maintenant, des brides, des images, ce cri… et le silence bien plus pénétrant encore. Cette sensation de menace, oppressante, qui semblait écraser ses poumons. Il avait voulu fuir sa solitude, ce danger qu'il pouvait sentir rugir à ses veines. Mais il n'avait pas été assez rapide. Son père… Lucius… il l'avait vu. C'est lui qu'il avait bousculé lorsqu'il était sorti dans le couloir. C'est son souffle qu'il avait senti courir sur sa peau. Ses accusations qui avaient résonné à ses oreilles. Et ensuite… il ne savait plus. Il avait beau chercher, creuser les ruines de son esprit, il était incapable de se souvenir. Il y avait juste cette sensation de ne plus exister, de ne plus avoir de prise sur ses pensées ou sur son corps.
DRACO !
Il sursauta. Ce cri, silencieux, comme une supplique à son esprit. Cette voix… ce… non… il… Que faisait-il ici ? Comment… comment était-il arrivé dans sa chambre ? Il n'avait pas rêvé la présence de son père, il le savait. Son emprunte glaciale était bien trop présente sur ses chaires et dans son esprit. Alors comment ? Il savait que Lucius ne l'aurait jamais laissé partir comme ça, surtout si…
DRACO ! NON !
Un long frisson lui parcourut l'échine, alors que le cri se répétait encore une fois, une terreur au goût de sang. Il pouvait le sentir dans sa bouche maintenant. Il pouvait sentir rouler sur sa langue sa saveur cuivrée qu'il connaissait par cœur. Comment n'avait-il pas pu la reconnaître avant ?
Son regard tomba finalement à terre, au pied même du lit où il put voir les vêtements, parfois déchirés, qui y reposaient en boule. Mais ce n'est pas tant ce spectacle qui attira son regard que celui du liquide carmin qui gouttait lentement à leurs côtés, larmes après larmes, pour former une petite mare qui se mêlait presque parfaitement à la couleur auburn du bois ciré. Elle brillait légèrement d'or, alors que la lumière de la lampe semblait venir danser dessus, pour s'étaler à mesure qu'elle continuait à être alimenter. Et le drap gorgé qui reposait sous lui n'en était pas la seule source. Ses mains, ses propres mains qui pendaient légèrement dans le vide en étaient recouvertes et le laissaient fuir. Oh, bien sûr, pas autant qui le pan de tissu qui avait glissé de son support, mais déjà bien trop.
Il regarda, presque hypnotisé, le spectacle de sa propre peau recouvert de ce liquide odorant et poisseux, tremblant un peu plus, refusant de laisser son esprit expliquer sa provenance. Et pourtant… pourtant, il ne pouvait plus nier maintenant le son discret et difficile d'une respiration hésitante derrière lui. Il ne pouvait plus nier les gémissements douloureux qui venaient parfois briser le silence assourdissant qui semblait envelopper la pièce. Et ce cliquetis caractéristique qui venait résonner à ses oreilles, échos de son passé.
Il lui sembla que des heures s'étaient écoulées avant que son corps ne veuille bien réagir, encore douloureux, mais plus docile à ses ordres et que, sans quitter le sol des yeux, il ne se redresse lentement pour s'asseoir. Chacun de ses muscles protestèrent à ces simples mouvements, mais il n'en eut cure et leur douleur lui parut bien douce face à celle qui menaçait de faire chavirer son esprit. Lorsque enfin, il se redressa, il resta un long moment sans bouger, le regard fermé et les poings, maintenant retombés, crispés sur les draps détrempés. Il pouvait le sentir désormais, ce liquide qui adhérait à sa peau, ce liquide qui pliait le tissu fin et autrefois blanc, à la volonté de son corps. Ce liquide qu'il avait pris pour de la sueur, mais qui n'en était pas, combien même le souhaitait-il avec ferveur. Il pouvait sentir sa chaleur, sa vie qui semblait le noyer complètement.
Laissant échapper une plainte suppliante, il se prit la tête entre les mains. Il ne pouvait pas… il ne pouvait pas… Mon dieu, non, il n'avait pas pu lui faire ça !
_ Non…
Il n'avait pas pu…
Lentement, le cœur prit dans un étau et le souffle saccadé, il se retourna, le regard fixé au drap et déjà presque brouillé par ses propres larmes. Il se retourna lentement et faillit presque vomir lorsqu'il vit dépasser de la blancheur maculée du tissu la première rondeur de peau autrefois albâtre. Il aurait voulu dévier son regard, fuir, fuir cette chambre, fuir son crime, mais il en fut incapable et ses yeux tracèrent implacablement le corps battu devant lui. Les jambes d'abord, écartées, la droite légèrement repliée et lacérée, marquées toutes deux des traces maintenant bleuies de ses doigts puissants. Abandonnées, soumises à quelques volontés obscènes. Puis le pelvis sous lequel il pouvait voir le sang couler encore lentement. Ce même sang qui maculait son corps et coulait dans sa bouche. Un sanglot franchit ses lèvres à cet instant, secouant doucement le lit et son regard remonta un peu plus pour venir tracé les courbes de son ventre et de son torse. Des courbes battues, tant et tant de fois, en tant de points différents qu'elles semblaient presque entièrement noires par moment. Et écorchées également, griffées, chaires mises à vifs, maintenant enflées et toujours suintantes, ajoutant encore un peu au flot de sang qui semblait presque entièrement le recouvrir et s'écoulait pour venir détremper un peu plus le drap. Puis son cou, parfaitement exposé, au creux duquel il pouvait voir battre doucement son pouls. Au creux duquel il pouvait voir les marques distinctes de ses dents, vampires goûtant la chaleur de sa proie, perçant ses chaires vulnérables. L'avait-il lapé ? Bu à grande goulée, savourant à cet instant sa saveur puissante et envoûtante ? S'était-il corrompu à ce goût dont, d'après les légendes, on ne pouvait pu se passer une fois qu'il avait coulé sur nos papilles affamées ? Oui… oui il l'avait fait, puisqu'il pouvait encore le sentir dans sa bouche, mais il n'en voulait plus. Dieu seul savait à quel point qu'il n'en voulait plus. A quel point sa saveur l'écœurait.
Il hésita alors un instant. Pendant une fraction de seconde, il ne put aller plus loin. Il ne put affronter ce visage qu'il avait tant aimé et qu'il venait de détruire à tout jamais. Il ne put affronter la douleur de savoir qu'il ne pourrait plus jamais se perdre dans son sourire, dans ses grands yeux émeraudes et rieurs. Il ne put supporter l'idée d'avoir à regarder ses lignes battues et ensanglantées, ses lignes qu'il avait adoré tracer. Et pourtant, il leva les yeux, oubliant les larmes qui semblaient ne plus pouvoir s'arrêter de couler. Il leva les yeux pour découvrir le spectacle de ses pommettes déchirées et noircies, de ses lèvres fendues d'où s'échappaient un souffle hésitant, de ses yeux fermés et englués par le sang, de sa tempe marbrée et de ses cheveux dont la couleur rouille ne pouvait concourir face au rubis qui venait se fondre dans leur masse soyeuse. Un nouveau sanglot secoua son corps et il tendit une main hésitante vers son visage qui n'eut pas le temps d'effleurer sa peau avant qu'il ne la retire précipitamment.
Il n'avait pas le droit de le toucher. Pas le droit. Il aurait voulu croire qu'il n'était pas responsable de tout ceci, il aurait voulu espérer que ce n'était pas son visage qu'il avait vu lorsqu'il avait été torturé. Mais ce corps nu offert à ses yeux et le sien étendu à quelques centimètres à peine, baignant dans Son sang… et ses chaînes. Il pouvait les voir également maintenant, emprisonnant ses poignets, son corps tout entier, incapable de lui échapper. Ces chaînes, ces fers qu'il avait lui-même testés.
Comment… comment avait-il pu lui faire ça ? Pourquoi ? Il l'aimait… Il… Non, son père avait raison, il n'était qu'un monstre. Un monstre qui détruisait tout ce qu'il touchait. Qui tuait tous les gens qui osaient l'approcher, qui osait l'aimer. Il n'aurait jamais du naître, il n'aurait jamais du vivre. Jamais. Jamais ! Tout était sa faute. S'il ne l'avait pas laissé l'approcher, s'il n'avait pas été aussi faible, peut-être… Non, pas peut-être, rien, rien de tout ceci ne serait arrivé. Il n'aurait pas eu à souffrir. Il n'aurait pas été lui aussi sacrifié sur l'autel de sa folie.
Ron, je suis désolé.
Et le pire, le pire c'est qu'il ne souvenait de rien. Il ne se rappelait pas avoir gagné sa chambre, ne se rappelait pas l'avoir agressé. Il ne pouvait s'imaginer s'être jeter sur lui et l'avoir enchaîné. Comment s'y était-il pris ? L'avait-il d'abord frappé avant de le porter jusqu'au lit, le menotter et le déshabiller ? Ou l'avait-il traîné, suppliant, lui arrachant violemment ses vêtements, ignorant ses cris, avant de le jeter sur le matelas et s'acharner ? Avait-il été tout le temps conscient, goûtant chacun de ses coups, chacune de ses lacérations, chacune des ses pénétrations ? Ou avait-il sombré dans l'inconscience avant qu'il n'ait pu connaître la pire de toutes ses tortures. Il l'espérait, il l'espérait sincèrement. Qu'il n'ait au moins jamais à se souvenir de ça. Mais il ne se faisait pas d'espoir. Et ses cris, ses hurlements, ses suppliques ? Avait-il seulement pu en pousser une ou l'avait-il bâillonné ? Il ne savait pas, ne savait plus. Et ne pas savoir le tuait aussi sûrement que s'il avait eut à revivre chaque seconde de cette abomination, car il pouvait facilement imaginer ce qu'il lui avait pu lui faire subir, sans être tout à fait sûr qu'il n'ait pas fait plus encore. Plus terrible et plus déchirant.
Je suis désolé.
Un rire aux accents de folie, mais tenant plus du pleur échappa à ses lèvres et il effleura tendrement une de ses mèches cuivrées et brillantes sous un rayon d'étoile, avant de se reculer précipitamment et de tomber hors du lit. Il ne cria pas lorsqu'il son flanc cogna douloureusement le pied de la chaise, ignorant la souffrance qui éclata dans ses côtes et se releva en titubant. Un vent glacial, provenant de la fenêtre entrouverte, vint lécher son corps exposé le faisant frissonner doucement, mais il n'y prêta pas attention, incapable de détacher son regard du lit. Le spectacle était encore plus horrible vu d'ici. Plus sanglant et plus violent.
Désolé, désolé, désolé…
Sans trop savoir comment, il parvint à détourner son regard et fit quelques pas hésitant pour se saisir d'un bas de pantalon qu'il enfila rapidement. Sans prendre le temps de passer quoique ce soit d'autre, il se recula précipitamment vers la porte. Il savait qu'il aurait du au moins le détacher, appeler à l'aide pour que quelqu'un vienne le soigner, mais il en fut incapable. Aucun son ne semblait pouvoir franchir ses lèvres. Au lieu de quoi, il continua difficilement son chemin, butant parfois sur un objet renversé à terre, manquant de tomber, avant de retrouver péniblement son équilibre. Il lui sembla presque que des heures s'étaient écoulées avant qu'il ne sente dans son dos les contours arrondis et lisses de la poignée. Il hésita encore un peu avant de finalement se retourner pour faire face au lourd panneau de bois et de l'ouvrir d'une main tremblante, s'écroulant presque dessus. Il tourna parfaitement dans ses gonds et il fut bientôt hors de la pièce, la laissant ouverte aux quatre vents, incapable de la regarder en arrière. Son pas se fit d'abord lent, puis de plus en plus rapide, jusqu'à courir vers cette voix qui sembla soudain l'appeler. Une voix à laquelle il aurait voulu résister, mais dont le chant envoûtant l'hypnotisa complètement.
Il n'avait pas quitté la chambre depuis plus de trente secondes lorsque deux silhouettes en franchirent le seuil et étouffèrent un cri d'horreur.
***
Remus détourna les yeux et ravala péniblement la bile acide qui menaçait de remonter dans sa gorge. Presque aussi pâle qu'un mort, il prit lourdement appui sur le mur, regardant d'un œil absent les visages, tout aussi cendreux, des autres sorciers qui n'avaient, pas plus que lui, supporté le spectacle de cette mort. Il avait pourtant vu quelques massacres, mais celui-ci dépassait tout ce qu'il aurait pu imaginer. Il sentit la main de Ernst venir effleurer son épaule en signe de compréhension et ramena péniblement son regard sur le couloir pour voir son ami s'approcher du cadavre. Il inspira profondément, s'efforçant d'oublier les effluves cuivrés de sang qui envahissaient totalement le lieu, accompagnés d'autres bien plus pénibles encore et se porta finalement à ses côtés.
Si le spectacle de Rusard et de sa chatte était affligeant, celui de McGonagall était une monstruosité. La sorcière presque exsangue, avait été littéralement crucifiée au mur par quatre énormes clous de fer de presque deux centimètres d'épaisseurs. Deux d'entre eux avaient été plantés dans chaque épaule, déchirant muscles et ligaments et broyant les os, alors que les deux autres s'enfonçaient juste au-dessus des cuisses, au niveau de l'aine. Il n'osait imaginé la douleur que cela avait du être et tenta vainement d'oublier son cri qui résonnait encore à ses oreilles et amplifiait l'horreur de cette vision. Elle avait également été éventrée, sans doute avec lenteur et ses entrailles s'étaient déversées presque entièrement à terre, pendant de son abdomen désormais creux. L'odeur qui s'en dégageait était presque insupportable et aucun de deux sorciers ne doutait qu'elle était encore vivante à cet instant, aux souvenirs terribles de son hurlement d'agonie. L'élargissement de ses plaies aux cuisses et aux épaules prouvait également qu'elle s'était peut-être débattue ou avait été, plus probablement, secouée de violents spasmes alors que la mort la prenait avec lenteur, augmentant encore ses souffrances. Le dernier sévisse était sans doute le moindre, mais le plus lourd de conséquences pour les deux hommes qui échangèrent un regard éloquent. Son poignet droit portait la marque évidente d'une lacération par lequel son sang s'était écoulé lentement. Il en restait encore quelque trace sur ses doigts crispés et figés par la mort, sans doute les dernières gouttes échappées avec son ultime souffle. Mais le reste avait été emporté, selon toute évidence, précieusement protégé dans une fiole de cristal.
Lupin aurait aimé échapper à cette vision, mais il savait qu'il ne devait pas. Même indirectement, il avait sa part de responsabilité dans cette mort et n'avait dès lors pas le droit de s'y soustraire. Il remercia néanmoins la miséricorde qui cachait son visage à son regard, derrière les ondulations de sa chevelure libérée de son chignon. Mais il n'avait aucun mal cependant, à imaginer la grimace scabreuse qui devait le déformer et qui, malgré tous leurs efforts, resterait à jamais gravé sur ses traits.
Ernst qu'en à lui devait lutter contre chaque fibre de son être qui le suppliait de la libérer de ses entraves pour lui redonner au moins, une position plus décente. Mais il n'en avait pas le temps. Les clous avaient été plantés par une puissance magique importante et il lui faudrait sacrifier plus qu'il ne devait de Pouvoir pour la libérer et de cela il n'était pas question. Quant à utiliser ses propres mains, quand bien même cela suffirait, il lui faudrait probablement plusieurs précieuses dizaines de minutes pour y parvenir. De précieuses minutes, il ne pouvait pas se le permettre de perdre. Il eut cependant le courage de lui relever doucement la tête pour lui fermer les yeux, ignorant le regard voilé de terreur qui lui fit face pendant quelques secondes.
Que de temps perdu ! Que d'erreurs qui les menaient inexorablement sur les routes de l'échec ! Ils avaient cru avoir encore assez de temps, ils avaient cru le surveiller de suffisamment près, pouvoir anticiper chacune de ses actions, pouvoir agir avant lui et lui subtiliser ce qu'il cherchait avec tant d'avidité. Mais ils avaient eu tord. Tellement tord et ils risquaient maintenant de payer le prix de leur trop grande assurance. Et chaque seconde qu'ils perdaient, était autant de pas qui le rapprochaient de son but.
Lucius…
Il serra les poings à s'en blanchir les jointures. Ils avaient déjà presque perdu Draco et peut-être même était-il trop tard. Le jeune homme avait déjà disparu de sa chambre lorsqu'ils y étaient enfin parvenus et ils n'avaient trouvé devant sa porte que sa cape abandonnée. La pièce, quant à elle, bien qu'éclairée, s'était révélée vide de toute présence, même si elle semblait n'avoir été désertée que peu de temps auparavant et avec précipitation au vu des cahiers de cours encore ouverts qui trônaient sur le bureau. Leur seul espoir résidait dans les chances que le jeune homme soit aller rejoindre son compagnon avant que son père ne vienne le chercher. Mais cet espoir sonnait creux.
Délaissant avec répugnance le corps de McGonagall, il fit signe à Remus de le suivre et faillit, dans son empressement, rentrer dans Dumbledore qui s'était enfin montré. Le visage de ce dernier, bien que pâle, conservait un masque de fausse impassibilité qui le rendait cependant plus vieux qu'il ne paraissait. En quelques secondes, il semblait avoir gagné dix ans et sa voix trembla légèrement lorsqu'il salua son vieil ami. Bien entendu, le sorcier n'ignorait rien des raisons de la présence de Ernst dans son école et, s'il ne faisait pas réellement partie de son « équipe », il connaissait parfaitement les risques et ce qu'un tel carnage pouvait signifier.
_ Ronald, salua-t-il rapidement.
Ernst se contenta de lui adresser un petit mouvement de tête, avant de reporter brièvement son regard sur les trois cadavres.
_ Je suis désolé, souffla-t-il.
_ Je sais, je vais m'en occuper. Allez-y, j'essaierais de vous rejoindre plus tard.
Ernst lui répondit par un petit sourire triste car il savait que maintenant chaque sorcier aurait son rôle à jouer et courrait le risque d'y laisser sa vie. Il aurait aimé qu'il en soit autrement, mais c'était un choix qui ne lui appartenait plus et c'est sur cette pensée terrifiante qu'il s'élança dans les couloirs presque immédiatement suivit de Lupin. Ce dernier ne s'arrêta que le temps de souffler à son aîné :
_ Sirius est dans notre bureau, pourriez-vous…
Il n'eut pas besoin de terminer sa phrase, Dumbledore hocha immédiatement la tête, posant une main réconfortante sur son épaule avant de le laisser s'en aller.
Remus eut tôt fait de rejoindre son aîné qui avait ralenti sa course pour l'attendre.
_ Où allons-nous ? Demanda le jeune homme lorsqu'il fut à sa hauteur, adaptant sa course au pas rythmée de son ami.
_ Chez Ron. Avec un peu de chance Draco se serra rendu chez lui avant que son père ne le trouve.
Remus n'émit pas ses doutes quant à cette maigre chance, car il savait que Ernst les partageait probablement. Néanmoins, à chaque pas qui les rapprochait de leur but, ils s'effilochaient, laissant naître en son cœur le fol espoir que tout puisse encore être stoppé. Car si Draco ne se trouvait pas avec le jeune homme, c'est qu'il était déjà aux mains de son père et dans un lieu inconnu d'eux, sans aucune chance de pouvoir le lui arracher. Et si tel était le cas, alors ils avaient d'hors et déjà perdu et plus rien ne pourrait les protéger de l'horreur qui viendrait bientôt s'étendre sur les deux mondes. Même la sorcellerie la plus puissante ne pourrait rien contre celle qui s'apprêtait à renaître. Rien.
Il ne leur fallut pas longtemps pour gagner l'aile des Griffondors, passant la porte sans difficulté, ignorant le regard outré de la Dame du Tableau pour poursuivre rapidement leur chemin vers la chambre de Ron. Ils avaient presque atteint leur but lorsque Ernst s'arrêta soudain, manquant de se faire renverser par Remus qui émit un petit grognement de protestation contre sa halte brutale. Mais son compagnon n'y prêta pas attention. A quelques pas à peine, une porte grande ouverte laissait entrevoir une scène qui lui glaça le sang. Il ne voyait pas grand chose de la pièce, mais il devinait aisément les vêtements épars par terre, la forme étendue sur le lit dont la peau nue et rubis rayonnait sous la fine lueur de la lampe renversée, tout comme le sang qu'il ne pouvait manquer de voir goutter lentement à terre. Il fit un pas hésitant dans le silence de cet instant, tout juste troublé par le hoquet horrifié de son compagnon. Puis un autre et encore un, jusqu'à atteindre le seuil de la pièce. Il vacilla alors légèrement et du prendre appui sur le chambranle de la porte pour ne pas s'écrouler quand ses jambes refusèrent de le porter une seconde de plus. Il détourna le regard et prit une inspiration difficile avant de le ramener sur la silhouette qu'il ne pouvait manquer de reconnaître maintenant, malgré… son horrible condition.
_ Ron…
Il était arrivé trop. Bien trop tard.
_ Merde !
Malgré lui, des larmes se formèrent dans son regard qu'il chassa d'un mouvement rageur. Il avait échoué sur tous les tableaux. Non content de perdre Draco, car il ne se faisait plus d'illusion maintenant, ils avaient mis en danger la vie du jeune homme. Ce n'était qu'un adolescent, non de dieu ! Presque un gamin. Et ils n'avaient même pas été capables de le protéger. Ah ! Ils avaient fière allure les « sauveurs du monde ». Que leur orgueil soit maudit ! S'ils ne s'étaient pas crus aussi forts. Que le restaient-il maintenant ? Une équipe décimée, un sorcier en possession du livre le plus dangereux ayant jamais existé, des cadavres horriblement massacrés et le corps battu d'un adolescent qui n'avait rien demandé d'autre que de goutter quelques instants de bonheur. Un bonheur qu'il lui avait volé de ses propres mains en étant incapable de prendre les bonnes décisions au bon moment.
_ Ronald.
La voix de Remus le ramena à la pénible réalité, mais il ne put se résoudre à faire face à son ami, le regard maintenant rivé au montant du lit, plus précisément aux fers qui y étaient accrochés et retenait une vie bafouée.
_ Ronald, reprit Lupin, semblant deviné les remords qui rongeaient son ami. Il ne sert à rien de se lamenter. Nous ne pourrons pas changer ce qui a été fait, mais nous pouvons encore agir sur ce qui doit l'être. Je vous en pris ne me lâcher pas maintenant. Ne les abandonner pas maintenant, ni lui, ni Draco, ni aucun des innocents qui se trouvent ici.
Ernst frissonna légèrement, mais accepta de regarder son compagnon qui lui adressa un pauvre sourire, le visage défait. Il était évident qu'il avait déjà vu bien trop d'horreur en une seule journée, malheureusement, il était incapable de le rassurer comme il l'avait toujours fait jusqu'à maintenant, car il savait qu'ils n'en avaient pas encore terminé et ne se sentait plus lui-même le courage d'en supporter. Il lui rendit néanmoins son maigre sourire. Il avait raison sur un point, il n'avait pas le droit d'abandonner maintenant.
Se forçant au calme, il entra finalement dans la pièce pour se diriger rapidement vers le lit et s'assurer de l'état du jeune homme. Un coup d'œil rapide suffit à lui dire qu'il avait énormément souffert, néanmoins beaucoup de ses blessures semblaient plus graves qu'elles ne l'étaient en vérité. Malgré tout son état restait préoccupant et il ne put s'empêcher de vaciller légèrement lorsqu'il vit le sang qui souillait le drap entre ses jambes. Remus qui l'avait rejoint, ne manqua pas de le voir aussi, mais ne dit rien, se contentant d'ôter sa cape pour en couvrir le jeune homme et protéger ce qui lui restait de pudeur. Il grimaça au vu des marbrures presque noires qui couvraient certaines parties de son corps et des nombreuses lacérations qui continuait à déverser son sang. Mais le pire fut les gémissements plaintifs qui échappèrent au jeune homme lorsqu'il déposa le tissu, pourtant fin, de son vêtement sur ses chaires meurtris et le tremblement craintif qui le secoua doucement. Aucun des deux hommes ne manqua d'entendre le nom péniblement soufflé et si Remus afficha alors une mine encore plus peinée, Ernst dut recourir à toute sa volonté pour ne pas frapper du poing le mur en face de lui.
Trop tard.
Ils n'eurent ni besoin de se parler, ni de se regarder pour comprendre ce qui s'était passé et la culpabilité se fit plus encore lourde, ainsi que la colère.
Secouant doucement la tête, Lupin ignora les faibles suppliques du blessé alors qu'il l'enveloppait plus sûrement dans sa cape et que son ami défaisaient rapidement les anneaux qui emprisonnaient ses poignets. Lorsqu'il fut enfin libre, le jeune homme, toujours inconscient, se roula instinctivement en boule pour se protéger, sanglotant presque. Remus fut alors tenter de lui caresser les cheveux pour le réconforter, mais, circonspect, n'en fit rien, conscient que ce simple geste ne pourrait qu'aggraver la situation. Il allait le prendre délicatement dans ses bras, lorsqu'un cri étouffer le fit sursauter lui et son ami et qu'ils se retournèrent pour découvrir dans l'encadrement de la porte, cinq jeunes gens horrifiés.
Hermione, Ginny, Harry, Goyle et Crabbe, qui avaient passé la soirée ensemble à discuter des évènements de l'après midi, riant à cœur joie aux souvenirs du regard perdu de Rogue ou de la tête de leur deux tourtereaux à la bibliothèque, n'avaient pas manqué eux non plus d'entendre le cri de McGonagall. Comprenant que quelque chose de grave venait de se produire, ils n'avaient que peu hésité avant de décider d'aller vérifier que leurs amis n'avaient rien. Malheureusement, ne se trouvant pas dans l'aile des Griffondors à cet instant, mais dans la bibliothèque, ils leur avaient fallu un peu de temps pour arriver. D'autant que la surveillante, affolée, n'avait tout d'abord pas voulu les laisser sortir. Elle n'avait malheureusement pas eu le choix, surtout lorsqu'un professeur était venu annoncer la terrible nouvelle, demandant à tous les élèves de regagner immédiatement leur chambre. Ils n'avaient alors plus perdu un seul instant, mais jamais ils n'auraient pu s'attendre à découvrir un tel spectacle. Hermione, horrifiée, se serra aussitôt contre Harry, la tête tournée contre sa poitrine, pour échapper à la vue du corps meurtri de son ami et étouffer un sanglot. Le jeune n'hésita pas avant de la serrer contre lui, le corps crispé et les lèvres serrées en une fine ligne qui disait toute sa colère et toute sa peine. Ginny, elle, n'avait pas bougé, supportant sans mot dire le spectacle de son frère, mais ses poings étaient crispés à en saigner et lorsque Goyle l'attira à elle, elle ne refusa pas son étreinte et reposa, presque soumise contre son torse. Crabbe fut le seul à oser franchir le seuil de la porte, se portant aussitôt à hauteur des deux adultes pour les aider. Remus lui en fut reconnaissant, alors que sans poser une seule question, le jeune homme l'aida à soulever délicatement Ron pour le placer dans ses bras en évitant au mieux d'aggraver ses blessures. Puis il ramassa rapidement quelques vêtements épars dont il pourrait avoir besoin plus tard, avant de suivre rapidement les deux adultes qui sortaient déjà, accompagnés de ses amis, dans un silence effrayant. A aucun moment cependant il ne fut brisé, chacun étant bien trop choqué pour oser parler.
***
Avancer.
Au milieu du brouillard. Ne plus rien distinguer. Rien sauf la douleur et la peur. La douleur et la culpabilité.
Avancer.
Un pas après l'autre et oublier, sans jamais le pouvoir. Repousser ces images qui venaient sans cesse le tourmenter. Sang. Etoile. Chaire. Douceur d'une peau glacée. Souffrances. Ni plus ni moins. Un goût de trahison.
Et avancer.
Oublier le monde autour. Ne plus voir les tapis anciens, manquer les portraits des plus célèbres magiciens, leurs bustes, leurs regards de pierre, froids et accusateurs. Oublier les portes qui défilaient une à une devant son regard et parfois le reflet d'un miroir.
Surtout, surtout ne pas voir.
Et avancer.
Ne pas écouter les sons perdus de cris ou de sanglots horrifiés. Les respirations haletantes de fantômes oubliés. Son propre souffle comme seul écho. Encore en vie. Encore. Encore. Déchiré sa peau. Fendre son âme. Punition. Traite. Menteur. Tueur.
Assassin !
Sa faute.
Ta faute !
Et encore un pas.
Oublié l'univers autour de soi. Se perdre dans le cauchemar d'un passé au reflet de présent. A moins que ce ne soit un présent au goût acre de passé. Il ne savait plus. Ne savait plus. Avait-il crié ? Il ne savait plus. L'avait-il supplié ? Il ne savait plus. Comme lui-même l'avait fait tant de fois ? Il ne savait plus. Comme il l'avait fait en attendant une réponse qui ne venait pas, jamais ? Il ne savait plus.
Une marche.
Une peau au goût de sang. Un être à l'odeur de sang. Une chose à la couleur de sang. Ses grands-parents. Tuer ! Tuer ! Tueur ! Un couteau dans la main et droit dans le cœur ! Pim. Des chiens lâchés, un cri étouffé et encore un pleur.
Et toujours ce pas.
Ron… La chaleur d'un souvenir. Un sourire. Un bras autour de sa taille. Une voix fredonnant à son oreille. Un souffle chaud, coulant sur sa nuque. Des doigts se mêlant aux siens. L'odeur entêtante d'un parfum. Un rire. Vivre.
Avancer.
Fané, rompu, battu. Un champ de coquelicot fauché s'écoulant en une rivière de mort. Etre chez soi. Etre soi. Ombre parmi les ombres tentant d'embrasser la lumière. Une folie. L'étreinte glacée de la réalité.
Et avancer encore.
Regarder le futur défiler devant son regard. Un lac noir. Silence. Douceur. Oubli. Passer la porte de l'infini. Enfin, enfin ne plus avoir peur. Enfin, ne plus souffrir. Ebauche d'un sourire. Une fin. Peut-être. Car…
Un pas.
Un doute. Ce morceau de mémoire qui s'échappe et s'éparpille. Un espoir. Inutile. Douloureux. Prisonnier de son étreinte. Il ne peut l'abandonner. Ne veut le lâcher. Un réconfort. Une main tendue. Et si…
Encore un pas.
Et son regard s'ouvre une nouvelle fois.
Un couloir.
Draco frissonna, comme tiré d'un cauchemar éveillé. Il ne savait pas où il était. La nuit coulait sur lui, encore plus sombre semblait-il ici, cajoleuse, portant en son sein cette voix qui l'avait guidée et qui l'attirait encore. Une partie de son âme aurait voulu lui résister, mais l'autre se laissait doucement entraîner.
Il regarda la porte qui lui faisait face. Elle était étrange, comme tiré d'un conte de fée, et massive. Sa forme rappelait celle des lourds panneaux des vieux châteaux forts, s'étirant doucement en pointe vers le sommet. Le bois formait un large quadrillage mêlé de fer qui la faisait paraître inébranlable et son verrou, forgé d'argent, captait le moindre rayon de lumière pour luire doucement, comme pailleté d'or.
Draco leva lentement sa main pour tourner la poignée, mais figea son geste lorsque celle-ci fut éclairée et qu'il put voir le sang qui la maculait encore. Son souffle se bloqua dans poitrine et il referma son poing avant de glisser lentement à terre, ébranlé. Trop de souvenirs mêlés.
_ Ron… souffla-t-il doucement. Qu'ai-je fait ? Qu'ai-je fait ?
Il se prit la tête entre la main et dans un accès de rage contre lui-même, hurla et frappa violemment son poing à terre, savourant la douleur qui se répercuta immédiatement dans son corps, explosant dans son cerveau pour l'embrumer au point de le faire vaciller. Sans réfléchir, il frappa encore une fois, puis une autre et encore une autre, jusqu'à ne plus sentir son bras et faire couler son propre sang cette fois. Il ne sut pas combien de temps passa ainsi avant que sa rage ne commence enfin à se calmer et qu'il cesse de s'acharner sur la pierre glacée, pour seulement pleurer. Peut-être des heures. Peut-être quelques minutes à peine. Mais lorsqu'il releva son regard, la poignée de la porte était abaissée et elle commençait à s'ouvrir doucement, grinçant à peine dans ses gonds pourtant rouillés.
Sans trop savoir ce qu'il faisait, encore poussé par cette force étrange, il se releva, effaçant ses larmes et s'avança lentement, passant sans hésiter le seuil de la pièce pour y pénétrer. Malgré la pénombre qui y régnait, il discerna sans mal ses contours circulaires et lisses, à peine parfois coupés par une discrète colonne de marbre noir. Au fond, deux larges fenêtres grandes ouvertes laissaient pénétrer un vent froid qui s'y engouffrait doucement pour venir en faire le tour, caressant sa peau sans la faire frissonner. Il n'y avait rien d'autre ici. Rien si ce n'est sur sa droite un léger reflet argenté qui attira aussitôt son attention. Il s'avança doucement, pas après pas, jusqu'à faire face à un immense miroir.
Le miroir de Riséd.
Que faisait-il ici ?
D'un mouvement impulsif, il toucha sa surface lisse et froide qui sembla presque onduler sous ses doigts et dessina le contour de son visage et de son corps, traçant les lignes de sang qui le marbrait, les peignant du sien qui coulait doucement sur son reflet, insensible. C'est à peine s'il se rendait compte de ce qu'il faisait.
Une bourrasque de vent, plus violente que les autres, vint soudain ébranler son corps et emmêler sa chevelure avant de glisser doucement sur la surface du miroir. Cette fois, il ne put douter de l'avoir senti se plisser légèrement et il s'écarta pour le voir se troubler comme une étendue d'eau touchée d'une pierre, ondes infinies et parfaites. Hypnotiques. Et son reflet commença à changer, comme celui de la pièce derrière lui. Très peu tout d'abord. De petits détails, rien de bien important. Les traces carmines s'effaçant de son corps, une feuille blanche et volante, tournoyant jusqu'à toucher terre. Un étrange faisceau de lumière. Puis les changements se firent plus nombreux, plus précis et alors que son corps se faisait nu et son visage étonnamment dur, peint d'un masque au sourire sadique. Et la pièce se fit chambre. Il y eut une chaise tout d'abord, puis un bureau, quelques vêtements et un lit.
Il hoqueta et recula d'un pas, mais ne put détacher son regard de la scène qui se jouait maintenant devant ses yeux. De cette pièce qu'il ne pouvait manquer de reconnaître. De ce corps qui était le sien. De celui déjà étendu et attaché qui reposait dans d'immenses draps blancs, encore intact. Il croisa le regard de son reflet et le sourire de celui-ci s'agrandit un peu plus, avant qu'il ne lui fasse légèrement signe de la main. Sa respiration se bloqua et il commença à paniquer lorsqu'il le vit se retourner vers le lit d'un mouvement fluide et étrangement félin. Un prédateur poursuivant sa proie.
Non…
Il voulut l'arrêter, tendre la main pour le rattraper, mais il fut stopper par la surface du miroir et forcer de reculer, impuissant face à son propre reflet. Face à lui-même. Il se vit alors grimper lentement sur le lit et s'installer aux côtés de Ron pour venir jouer avec ses mèches cuivrer.
Non…
Il se passa presque une minute avant que le jeune homme ne bouge légèrement, reprenant apparemment conscience, mais sans pour autant ouvrir les yeux. Il gémit doucement avant de s'immobiliser à nouveau et Draco hurla presque lorsqu'il vit son double armer sa main pour le frapper violemment au visage.
_ NON !
Il buta une nouvelle fois contre le miroir, alors qu'il tentait follement de l'arrêter et s'effondra à ses pieds, légèrement étourdi. Lorsqu'il posa à nouveau son regard sur la scène, son estomac se contracta violemment et son cœur manqua un battement. Il lui sembla presque entendre les cris étouffer de Ron alors que son reflet s'acharnait sur lui, le frappant encore et encore, au visage, au ventre, à la poitrine, sur les bras, griffant, le forçant à le regarder lorsqu'il détournait son regard. Un regard empli de terreur et de tristesse. Un regard trahi, qui ne comprenait pas, qui le suppliait silencieuse d'arrêter, mais qu'il n'écoutait pas. Un regard rempli d'un amour qui se fanait un peu plus à chaque coup reçu.
_ Non…
Il posa une main sur la surface glaciale, la griffant légèrement sachant qu'il était incapable d'arrêter ce qui était en train de se passer, mais désespérant de ne pouvoir le faire.
_ Ron… non…
Son reflet s'arrêta soudain de le frapper et il vit le jeune homme se recroqueviller légèrement sur lui-même, perdu dans sa douleur, avant de regarder son double, littéralement éclabousser de son sang, comme il l'était lui-même à présent. Il observa rapidement sa poitrine avant de détourner les yeux, se mordant violemment la lèvre, pour les ramener sur le miroir. Son reflet s'était retourné et attendait visiblement qu'il le regarde. Lorsque leurs yeux jumeaux furent encrés l'un à l'autre, il le vit lui faire un clin d'œil et d'une main distraite venir déboutonner la robe de Ron. Draco secoua la tête et se redressa légèrement, tremblant.
Il ne…
Le jeune homme commença à se débattre, criant faiblement à travers son bâillon, mais son double, désormais tourner vers lui, n'y prêta pas la moindre attention et continua à le déshabiller vivement, lui arrachant même ses vêtements en les déchirant.
_ Non ! Non, non, non, non, non ! RON !
Ses chaires nues et battues furent bientôt exposer à sa vue et Ron le supplia une dernière fois du regard, tentant encore de lui échapper, mais comme avant, sa demande ne fut pas écouter. Au lieu de quoi, son double eut un rire fort et clair, presque joyeux et lui lécha le visage pour laper son sang, avant de lui écarter les jambes et le pénétrer violemment. Le hurlement, même étouffé, de Ron fit chavirer Draco qui détourna les yeux, incapable dans supporter d'avantage.
C'est ce qu'il lui avait fait ? C'est ce qu'il lui avait réellement fait ? C'est ce qu'il avait souhaité ? Il ne pouvait le croire, mais le miroir de Riséd ne montrait que les désirs les plus profonds. La vérité de l'âme. C'est donc ça qu'il avait voulu depuis le début ? Le posséder, l'anéantir, le sentir craquer sous ses mains, lui faire goûter ce que lui-même avait subit et y prendre du plaisir ? C'est tout ce qu'il était ? Ce… cette chose ?
Non… Non !
Mais pourtant, il ne pouvait nier l'évidence. Il croyait l'avoir aimé. Il croyait sincèrement l'avoir aimé, mais il ne pouvait pas. Jamais. Jamais. Sinon il ne lui aurait pas fait ça. Jamais il n'y aurait pris ce plaisir. Cette possession bestiale.
Il regarda ses mains, peinant à les reconnaître, ses mains qui avaient créé tant de souffrance, le sang qui avait séché lentement dessus et se sentit incapable de pleurer, incapable de crier. Il n'y avait plus rien en lui. Tout son monde, toute sa vie venait de s'écrouler pour la deuxième fois. Sauf qu'il n'y avait plus rien à rebâtir. Ce qu'il y avait eu de plus beau dans sa vie, il l'avait détruit. Et il ne lui restait rien. Plus rien. Plus d'âme. Plus de pleurs. Plus de cri.
Juste la douleur.
Lorsqu'il releva la tête, la scène avait disparu et le miroir avait repris sa teinte naturelle, reflétant impassiblement les courbes inchangées de la salle. L'instant lui parut presque irréel, perdu dans quelques secondes d'éternité entre rêves et réalité. Et il put effleurer, juste l'espace d'un instant, le délicat espoir que tout ceci n'ait jamais existé. Mais cet espoir s'effilocha entre ses doigts ensanglantés lorsqu'il reprit pied dans le monde baigné de ténèbres et il se sentit définitivement sombrer. Il fixa alors son reflet, maintenant calme et impassible, parfaite copie de lui-même dans ses moindres mouvements, avant de reporter son attention sur celui qui le dominait. Un petit sourire fleurit ses lèvres et il vint presque chercher la caresse qui effleura sa chevelure. Il sentit les doigts puissants courir dans sa masse blonde et ferma un instant les yeux, se laissant aller sous cette douceur inattendue. Lorsqu'il les rouvrit, il était agenouillé près de lui le visage impassible et la main désormais poser délicatement sur son épaule. Il le regarda intensément à travers le miroir avant de s'allonger contre lui et lever les yeux sur ce visage si semblable au sien.
Un long moment passa ainsi, juste bercé par le doux roulis du vent et les battements puissants de son cœur, blotti dans cette chaleur familière et pourtant étrangère. Un moment comme il en avait rarement connu et qu'il goûta pleinement, fermant les yeux lorsque deux bras l'entourèrent doucement pour se serrer un peu plus à lui, caressant presque machinalement le duvet blond de sa nuque.
Un cadeau.
Un adieu.
Il ne sursauta pas lorsqu'il sentit le métal froid glisser dans la paume de sa main et couper doucement sa chaire tendre et vulnérable. Il referma ses doigts sur l'objet et le serra un instant contre son corps, répugnant à rompre un contact qu'il avait cherché depuis trop longtemps. Il pencha légèrement la tête, appuyant son front à la base du cou de son aîné et s'installa plus confortablement dans son giron. Ce dernier l'accueillit pleinement pour le blottir contre lui comme un enfant et laissa même échapper un léger sourire.
_ Tu avais raison, tu sais, souffla doucement Draco.
_ Ah ?
_ C'était vraiment ma faute. Je n'ai jamais su être suffisamment fort, même lorsque j'étais ignorant et arrogant, rien de ce que je faisais, n'était assez bien. Je l'ai compris maintenant. Parfaitement compris. Merci.
Son aîné ne dit rien, se contentant resserrer un peu plus son étreinte sur lui et Draco soupira légèrement, mélange d'appréhension et de contentement. Il regarda alors le poignard qu'il tenait toujours à la main et sourit doucement en le reconnaissant. Il avait déjà pris deux vies et failli prendre la sienne des années auparavant, cette fois, il la gagnerait définitivement. On lui avait dit un jour que les âmes des morts laissait un peu d'elle-même dans l'arme qui les avait tués, il se demanda si cela était vrai et l'espéra. Il regarda alors une dernière fois son aîné, dégageant gentiment une mèche de cheveux tombée sur ses yeux, pour lui sourire.
_ Je t'aime papa, souffla-t-il avant de se blottir une dernière fois contre son épaule.
_ Moi aussi, mon fils, répondit tout aussi gentiment Lucius avant de l'embrasser doucement sur le front.
Draco sourit un peu plus avant de tourner la lame du poignard sur son poignet et trancher profondément le fil de sa vie. Le sang coula immédiatement et en abondance et il tourna rapidement la pointe sur son autre bras, avant de ne plus en avoir la force. Mais même ainsi, il trembla doucement, alors que sa vie le quittait déjà et il sentit son père l'aider. Sans le guider, il maintint suffisamment main pour l'empêcher de trembler et de le faire souffrir plus que nécessaire. Lorsqu'il eut fini de couper son deuxième poignet, Draco lâcha la lame qui rebondit dans un petit bruit métallique au sol. Il se laissa alors aller, bercé par le souffle régulier qui soulevait la poitrine de son père et la caresse légère qui effleurait tendrement sa joue. Sa dernière pensée avant de sombrer dans les ténèbres fut néanmoins pour Ron. Une pensée d'amour et de regret, un baiser volé. Un dernier souffle capturé.
***
Ernst et Sirius travaillaient rapidement et en silence, mêlant magie et médecine traditionnelle pour tenter de soigner au mieux les blessures de Ron. Les plus graves et douloureuses étaient lentement effacées par la sorcellerie, usant du même sort qui avait permis de soigner Black un peu plus tôt, alors que les simples coupures et quelques bleus étaient soigneusement pansés et bandés à la main. Ils avaient rapidement découvert que hormis quelques côtes fêlées et des tendons d'épaules déchirés, l'état du jeune homme était moins inquiétant qu'il n'y paraissait. Ils avaient bien sûr fait disparaître les marques de son visage et rapidement réduit les cassures et les déchirures, pour le reste, autant physiquement que psychologiquement, seul le temps pourrait avoir un véritable effet. Ernst regrettait juste de ne pas pouvoir le soigner complètement, mais il avait déjà usé trop de magie et Sirius était encore trop faible. En fait, c'était même un miracle qu'il soit déjà éveillé.
Lorsqu'ils avaient regagné son bureau, un peu plus tôt dans la soirée, le corps de Ron délicatement placé contre la poitrine de Remus, ils l'avaient découvert parfaitement conscient et en grande discussion ave Dumbledore à qui il expliquait visiblement la situation. Dans sa joie de le voir, Lupin avait failli oublier qu'il portait encore Ron et il lui avait visiblement fallu prendre sur lui-même pour ne pas lui sauter aussitôt dans les bras. Au lieu de quoi, il lui avait tendrement, mais tristement sourit avant de déposer son précieux fardeau sur le canapé, le laissant au bon soin de son ami. Ce n'est qu'une fois qu'il fut sûr que Ron était confortablement installé, qu'il laissa sa joie éclatée pour se réfugier dans les bras de son amant qui l'accueillit un petit sourire aux lèvres. Personne ne souffla mot à cette découverte peu surprenante en vérité et les voir ainsi réunis permis même au petit groupe d'oublier pendant quelques instants ses tourments. Certains s'autorisèrent même un petit sourire amusé de voir Sirius presque étouffer sous le l'étreinte soulagée de son compagnon. Néanmoins, ils durent rapidement se séparer pour permettre au sorcier d'aide Ernst à soigner le jeune homme, alors que ce dernier lui expliquait brièvement la situation, s'attirant l'oreille attentive, non seulement de Black, mais aussi de toutes les personnes présentes.
Un silence de mort était tombé à la fin de ses brefs éclaircissements, alors que chacun pesait ce qu'il venait de révéler. La présence de Lucius, pour une raison que certains ne comprenaient pas encore, le probable enchantement de Draco, ce qu'il avait visiblement fait à Ron. Beaucoup de poings se serrèrent, mais aucune colère ne fut dirigée contre le jeune Malfoy qui ne pouvait avoir été qu'ensorcelé. Personne n'était en tout cas prêt à penser le contraire, même ceux qui n'avaient pas connaissance exacte de leur relation. Ils étaient évidents aux yeux de tous, qu'il ne pouvait avoir fait une chose pareille sans y avoir été forcé.
Beaucoup de questions se posaient également, se bousculant dans chaque esprit, mais tous avaient conscience que les réponses devraient encore attendre un peu. Au moins le temps qu'ils aient fini de panser le jeune homme.
Ernst en finit avec le bras de Ron et jeta un rapide coup d'œil à Sirius qui terminait de bander sa jambe de droite. Si son visage ne trahissait pas la moindre expression, le sorcier n'en était pas moins soulagé de voir son ami presque rétabli. Malgré ses efforts, il n'avait pu s'empêcher de craindre le pire et de le voir bien vivant à ses côtés le rassurait plus qu'il ne n'aurait pu le dire. Car il n'était pas seulement son plus vieil ami maintenant, mais également son plus puissant allier. Il avait malheureusement perdu presque tous les autres déjà et il aurait besoin de lui désormais pour trouver Draco et le sauver, si cela était encore possible.
Ayant terminé son bandage, Sirius releva la tête pour encrer son regard à celui de Ronald et les deux hommes se fixèrent un long moment, avant d'entamer la tache la plus pénible. Protégeant au mieux la pudeur du jeune homme, il le roulèrent avec précaution sur le côté pour dévoiler son dos et ses fesses. Sirius laissa alors à son aîné le soin de le tenir, pendant qu'il inspectait minutieusement les dommages qu'il avait du subir. Il écarta doucement la peau encore engluée de sang avant de relever sur son ami un regard à la fois étonné et soulagé. Ernst fronça un sourcil à l'expression du sorcier avant de regarder à son tour et secouer doucement la tête. Ils repositionnèrent alors doucement le jeune homme, avant de rapidement lui enfiler les vêtements que Crabbe avait eu l'intelligence d'apporter et de le recoucher sous une couverture pour laisser le sommeil faire son propre travail.
Lorsqu'ils se retournèrent, sept regards anxieux attendaient leur sentence, visiblement maintenant tous au courant de ce qu'il y avait à redouter.
_ Il va bien au vu des circonstances, dit alors Ernst, amenant un soupire de soulagements à toutes les lèvres. Ses blessures étaient moins importantes qu'il n'y paraissait et nous avons pu guérir les plus graves. Il va encore souffrir pendant quelques semaines, surtout du à ses bleus, mais il n'a rien à craindre et…
Si le soulagement avait commencé à délier les langues, ce « et » suffit à ramener toute l'attention sur lui.
_ Et, reprit-il, nous pouvons dire avec certitude que Draco ne l'a pas touché.
Personne n'eut la stupidité de faire préciser ce qu'il entendait par-là et un silence définitivement heureux pesa un long moment sur la pièce.
_ Je le savais, souffla finalement Ginny. Il ne pouvait pas lui avoir faire ça.
_ Il… il ne l'a pas violé, mais je croyais que son père… commença Crabbe, s'attirant tous les regards.
_ Je sais, répondit Ernst. Je vois ou tu veux en venir. Effectivement, il aurait du le faire, mais apparemment Draco, je ne sais trop comment, a été capable de résister aux ordres de Lucius.
_ Mais pourquoi le forcer à faire une chose pareille. C'est son fils tout de même ! S'exclama soudain Harry ne pouvant plus contenir sa colère.
_ C'est compliqué et il serait trop long de tout vous expliquer maintenant, dit Sirius. Disons pour simplifier que Lucius a besoin de corps de son fil pour accomplir un rituel puissant. De son corps volontairement sacrifié. Il a travaillé des années à détruire l'esprit le Draco dans le seul espoir de voir ce jour arriver. Mais lorsque enfin, il s'est présenté, il a découvert que son fils n'était plus aussi vulnérable, qu'il avait une raison de continuer de l'avant. Il lui fallait détruire cette raison, la détruire de telle façon qu'il ne resterait plus aucun espoir à son enfant. Et c'est pour cela qu'il a choisi cette solution.
_ Mais puisque Draco ne l'a pas fait, souligna Goyle.
_ Je crains malheureusement qu'il ne le sache pas lui-même. Il a du probablement se réveiller près de Ron sans aucun souvenir de ce qui s'était passé et à le voir ainsi…
_ Mais il reste toujours un doute dans ces cas là, une hésitation. Draco ne peut pas être sûr, pas complètement sûr, donc Lucius ne doit pas encore avoir toute son emprise sur lui, dit Ginny.
_ Oui ! C'est vrai ! Il y a donc toujours une chance de le sauver, souligna Goyle en la serrant doucement contre lui.
_ Je ne sais pas, répondit Ernst. Lucius et malin, il aura probablement paré à cette éventualité.
_ Mais comment, c'est toute la question malheureusement, souffla Remus.
Ernst haussa les épaules devant son ignorance qui le frustrait au plus haut point et chacun poussa un soupire vaincu. Il fallait pourtant qu'ils trouvent. Il le fallait !
_ Riséd, murmura soudain une voix épuisée derrière eux.
_ Ron ! S'exclama Ginny avant de courir s'asseoir aux côtés de son frère qui avait difficilement ouvert les yeux.
Elle fut bien vite rejointe par tout le petit groupe qui laissa néanmoins la place à Ernst de s'occuper de son blessé.
_ Ron ? Demanda celui-ci. Comment te sens-tu ?
_ Mal.
_ Je suis désolé, nous avons fait de notre mieux, mais il faudra du temps pour te guérir complètement.
_ Je sais.
_ Ron, Draco ne…
_ Je sais, souffla à nouveau le jeune homme en laissant une larme couler sur sa joue. Je vous ai entendu.
Oui, il savait et il ne retenait qu'à grand peine les sanglots de soulagement qui serraient sa gorge. Il avait tout de suite su que ce n'était pas vraiment Draco qui l'avait attaqué, mais l'entendre dire était autre chose. Et savoir qu'il avait su résister à la magie de son père, que finalement, il ne l'avait pas touché, pas ainsi, pas dans ses conditions, le soulageait plus qu'il ne pouvait le dire. Mais cela signifiait aussi que Draco était en danger.
_ Le miroir de Riséd, répéta-t-il.
_ Quoi ?
_ Il ne montre pas seulement les désirs profonds des gens…
_ … mais aussi ce qu'il pense être la vérité, termina pour lui Dumbledore. Bien sûr, c'est évident, Lucius va s'en servire contre Draco.
_ Et Draco serra ainsi persuader qu'il aura réellement violé Ron, ajouta Remus, faisant pâlir un peu plus tout le monde.
_ Il n'y pas une minute à perdre, jura Ernst. Sirius, Remus, j'aurais besoin de vous.
_ Je viens aussi, souffla Ron en se redressant péniblement.
Il ravala le cri de douleur qui menaçait le franchir ses lèvres lorsqu'il remua son corps meurtri et vacilla dangereusement, pris de vertiges.
_ Il en est hors de question ! Affirma Sirius en tentant de le recoucher.
Mais Ron n'était pas prêt à l'écouter. Il avait juré à Draco de le protéger, de toujours être là quoiqu'il arrive et il était bien décidé à tenir sa promesse.
_ Personne n'a dit que vous aviez le choix ! Lança le jeune homme en se redressant une fois de plus.
_ Ron, commença Ginny le visage dévoré d'inquiétude, il vaut mieux…
_ Je suis désolé, la coupa son frère, mais j'irais, que vous le vouliez où non et sans vous si c'est nécessaire. Draco a besoin de moi et je ne vais pas le laisser tomber. Surtout pas maintenant.
Remus allait objecter, mais Ernst l'en empêcha. Le courage du jeune homme l'impressionna. Il savait qu'il lui faisait courir un risque dans son état, mais si Draco avait été capable de contrer la magie, pourtant puissante, de son père pour ne pas le toucher et si lui-même était capable d'une telle détermination à le protéger, alors peut-être était-il celui qui pourrait faire pencher la balance.
_ D'accord, dit-il. Tu viens avec nous.
_ Mais, Ro… commença, Remus.
_ Pas de mais, nous aurons besoin de toute l'aide possible et la sienne probablement plus que toutes autres. Dumbledore, je vous charge de l'aider. Et vous autres, dit-il en désignant le reste de la petite troupe, vous restez ici.
_ Hors de question, s'exclama aussitôt Ginny, s'il y va, j'y avais aussi. C'est mon frère et Draco est mon ami.
_ Et moi aussi, ponctua Harry. J'ai vaincu Voldemort, je pourrais certainement vous aider cette fois aussi.
_ Je crois que, de toute façon, la question ne se pose pas, dit Hermione, nous venons tous.
Ernst dévisagea un long moment cet étrange groupe avant de s'incliner devant leur détermination.
_ D'accord.
***
Lucius regarda son fils sombrer lentement, sa respiration se faisant plus lente à chaque seconde, plus rauque et difficile. Il avait déjà perdu connaissance et il pouvait sentir son pouls s'affaiblir de plus en plus, filant entre ses doigts comme mille chevaux de course. Sa peau, elle aussi, semblait perdre de sa contenance, refroidissant à mesure que les secondes passaient, devenant plus pâle, presque blanche. Il devait avoir déjà perdu près de deux litres de sang, lorsqu'il stoppa enfin le saignement, enserrant les deux poignets de son enfant dans des pans de tissu fortement serrés, tirés de sa propre robe. Il savait qu'il n'avait plus beaucoup de temps. Peut-être vingt minutes tout au plus avant qu'il ne meure définitivement. Il lui fallait se dépêcher. Repoussant loin de lui, les derniers moments qu'ils avaient partagés pour les enfermer à tout jamais dans son esprit, il se releva, portant toujours serrer contre lui le corps maintenant éthéré de Draco. Il était si pâle, avec ses mèches blondes et rubis qui encadraient doucement son visage. Angélique. Et si fin, si fragile. Si semblable au jeune enfant qu'il avait sauvé, il y a si longtemps, car il n'était pas encore temps alors, car il n'avait pas voulu le…
Lucius secoua doucement la tête et répartit un peu mieux le poids de son fils dans ses bras, laissant sa robe gorgée de sang retomber lourdement au sol. Il réajusta également le sac de cuir qui n'avait pas quitté son épaule et l'effleura rapidement, se rassurant presque de sa présence.
Il était temps partir. Faisant demi-tour sur lui-même, dans un frôlement de tissu sur la pierre qui put presque se mêler aux plaintes du vent, il gagna rapidement le centre de la pièce où l'attendait un pentacle de poudre étoilée qu'il avait pris soit de fabriquer lorsqu'il l'attendait. Il sortit d'une de ses poches une poussière cendreuse avant de réciter une rapide incantation qui lui permit de traverser le cercle qui protégeait le pentacle pour se placer en son centre. Il allait entamer sa deuxième incantation lorsque la porte de la pièce fut ouverte à la volée, dévoilant la plus surprenante assemblée de sorciers qui lui avait été de donner. Six adolescents et quatre adultes qui dardèrent sur lui des regards flamboyants de colère. Un petit rire lui échappa devant ce pauvre spectacle, alors qu'il reconnaissait sans mal chacun des membres. Il leva néanmoins un sourcil surpris à la vue du jeune Weslay, visiblement mal en point, mais tenant sur ses deux jambes et le visage inquiet. Il sourit doucement et lança un petit regard indulgent à son fils, avant de lui murmurer :
_ Tu avais tord Draco, tu es bien plus fort que tu ne le crois. C'est d'ailleurs pour ça que tu as été choisi. Et tu viens de le prouver une fois de plus, je suis fier de toi.
Et plus fort, regardant avec arrogance cette pathétique assemblée qui croyait pouvoir l'arrêter :
_ Vous arrivez trop tard, la roue du destin c'est déjà mis en marche. Le Sãryl Rhreï a été amorcé et rien ne pourra l'arrêter. Décidément, mon pauvre Ronald, tu ne serras jamais à la hauteur.
_ Tu n'as pas encore accompli le rituel Lucius, hurla ce dernier.
_ Mais plus rien ne peut m'en empêcher. Ton précieux espion a offert sa vie pour ouvrir l'Oryale et je suis en possession des Klena Rhreï. Que crois-tu donc pouvoir faire ?
_ T'arrêter.
_ Si tu t'en crois capable, le salua ironiquement le sorcier. Je t'entendrais sous la lune noire, mais tu arriveras trop tard.
Et avant que quiconque n'ait pu faire un seul mouvement, il lança son incantation et disparu dans un éclair de lumière aveuglante.
_ NONNNN !!!!! Hurla Ron en les voyant disparaître. DRACO !!!!!!!!
Le jeune homme tituba vers l'endroit où il s'était évaporé, s'écroulant près des restes encore légèrement fumant de ce qui avait été le pentacle et sanglota doucement.
_ Non…
Il l'avait perdu, il le savait. Il le sentait. Dès qu'il était entré dans la pièce et qu'il avait vu son corps étendu dans les bras de son père, ange de sang crucifié à la folie d'un homme, il avait su qu'il l'avait perdu. Au plus profond de lui, résonnant d'un gals mortel, il l'avait su. Il avait vu son visage pâle et perdu, le sourire tranquille qui dessinait ses lèvres, la sérénité de ses traits. Il avait accepté de mourir, il l'avait voulu. Il avait trouvé cette paix qu'il semblait avoir tant chercher et il savait qu'il ne pouvait pas lutter. Il n'avait aucune arme pour le rappeler à lui, combien même il pouvait l'aimé, il avait choisi sa destiné et il allait le perdre. Il l'avait déjà perdu.
La tête lui tourna soudain et il lutta pour ne pas s'évanouir alors qu'un poids de milliers de tonnes semblaient écraser ses poumons.
Il l'avait perdu.
Il sentit soudain une main sur son épaule et se retourna pour voir un visage qu'il ne connaissait pas le fixer tristement. L'étrange créature, qu'il reconnut être un elfe, lui sourit gentiment avant de lui tendre une perle transparente bigarrée bleu et rouge. Ron n'hésita qu'un instant avant de la prendre délicatement au creux de sa main.
_ L'avenir est ce qu'on en fait, lui souffla alors le petit-être. Rien n'est encore perdu. Je sais qu'il peut encore être sauvé, j'en suis persuadé. Il n'est pas encore mort et tant que cette perle brillerait encore d'azur, il y aura toujours un espoir. Toujours. S'il te plait, ne l'abandonne pas maintenant.
Et sur ce, il s'éloigna rapidement pour regagner le groupe avec lequel il était arrivé, c'est à dire ses trois frères, Fred, George et Percy. Ron referma alors ses doigts sur la perle pour la glisser finalement à l'abri dans sa robe et se redressa fort d'un nouvel espoir.
Ernst qui n'avait pas bougé depuis le départ de Lucius s'approcha finalement du jeune homme et posa une main déterminée sur son épaule.
_ Le petit elfe a raison, dit-il. Rien n'est encore décidé.
Ron hocha doucement la tête et parvint même à se peindre d'un fantôme de sourire qui suffit à redonner confiance à chacun.
Alors que Remus expliquait rapidement la situation à ses frères, Ron vit Sirius s'approcher de son ami.
_ Il parlait de Gorn, n'est pas ? Demanda-t-il.
_ J'en ai bien peur, répondit Ernst sans le regarder, les yeux rivés à l'étendue étoilée que dévoilait une des fenêtres, là où la lune aurait du briller. Le sang de Gobelin est suffisamment puissant pour ouvrir à lui seul l'Oryale. Nul doute qu'il n'aura pas hésité à l'utilisé, surtout en connaissant son identité.
_ Depuis combien de temps le connaissions-nous ?
_ Bien trop, souffla tristement Ronald. Bien trop.
_ Tu sais ce que cela signifie.
_ Oui… qu'il nous faudra l'achever.
_ Qu'allons nous faire ? Demanda soudain Ron, interrompant leur conversation, nous ne pouvons pas rester sans agir.
_ Bien sûr que non, lui affirma le vieux sorcier. Je sais où se trouve l'Oryale et nous allons y aller, mais seulement certains d'entre nous.
Et se retournant vers le petit groupe partagé entre la muette stupéfaction et le désire de comprendre la situation, il déclara d'une voix qui ne souffrait aucune contestation.
_ Remus, tu vas rester ici et t'assurer encore une fois que les protections sont bien posées, elles seules sauront nous protéger si le pire venait à se produire. Sirius, Dumbledore, vous m'accompagner. J'aurais aussi besoin de ton aide Harry et de la tienne Ron, dit-il en se retournant vers le jeune homme. Il me faudra aussi le soutien d'un autre sorcier pour communiquer. L'un des jumeaux, souligna-t-il, faisant sursauter les deux frères. Votre lien facilitera notre communication.
_ J'y vais, assura George sans laisser à son frère le temps de réagir.
_ Bien, dit Ernst, coupant court aux éventuelles protestations de Fred. Remus va vous aider à établir le lien télépathique. Percy, il faut faire rassembler tous les élèves dans une même salle. Cela pourrait devenir nécessaire si nous avons à nous protéger. Inventer une excuse, n'importe quoi et au besoin, dit-il leur la vérité, elle devrait suffire à les convaincre.
_ J'y vais de ce pas, répondit le jeune homme en s'apprêtant à sortir.
_ Attendez ! Lança Ernst, le stoppant. Emmenez les autres avec vous.
_ Il en est hors de question, protesta Ginny, je viens avec nous !
_ Je ne vous laisserais pas faire, lui rétorqua aussitôt le sorcier, dus-je user la force.
Et devant son air choqué, il ajouta plus gentiment.
_ Là où nous allons, il n'y a pas le droit à l'erreur, ni à l'hésitation. Si l'un de nous reste en arrière, personne n'ira l'aider, car se serait la mort assurer. Il y peu de chance que nous revenions tous vivants et il y a déjà bien trop de vies en jeu, je n'en risquerais pas d'autres inutilement. Votre présence ne pourrait que nous gêner et peut-être nous faire tuer.
_ Je comprends, soupira la jeune fille, vaincu.
_ Bien. Percy ?
Le jeune acquiesça, mais laissa néanmoins les jeunes gens faire leurs adieux, encourageant lui aussi discrètement ses frères. Hermione, embrassa Harry un long moment, s'efforçant de ne pas pleurer et lui faisant jurer de lui revenir vivant et Ginny fit de même avec Ron, alors que Goyle et Crabbe serraient la main des trois jeunes hommes. Les jumeaux s'échangèrent un coup d'œil complice, mais lourd de signification et se serrèrent affectueusement l'un contre l'autre.
_ Si tu ne reviens pas, souffla Fred à son frère. Je te jure que j'irais te chercher moi-même pour t'achever.
_ Oh, ne t'inquiète pas, lui assura le jeune homme. Je reviendrais, rien que pour avoir le plaisir de te voir embrasser Rogue sur la joue.
_ Grrrrr !
Gorge éclata de rire, avant d'abandonner son frère et de le regarder partir avec les autres, alors que Percy leur donnait déjà des instructions pour l'aider à rassembler tous les élèves.
Remus fut le dernier à les quitter. Il s'approcha de Sirius pour l'embrasser rapidement et le prendre une dernière fois dans ses bras.
_ Fait attention à toi, lui souffla-t-il à l'oreille. Je ne veux pas te perdre une seconde fois.
_ Et ce ne sera pas le cas, lui fut-il gentiment rétorqué.
Remus hocha la tête et se recula, puis il salua rapidement Ernst et Dumbledore pour leur souhaiter bonne chance avant de s'en aller.
Une fois seul, le petit groupe se regarda quelques instants sans rien dire, avant que Ronald ne brise le silence.
_ Je crois qu'il faut y aller. Des questions avant de partir ?
_ Une seule, dit Harry. Qu'allons nous affronter ?
_ Le plus grand sorcier et le pire monstre que la terre ait jamais porté.
***
L'Oryale s'ouvrait sur une étendue de terre exposée à la furie du vent. Elle trônait tout près de la mer, à quelques mètres à peine d'une falaise rocheuse sur laquelle les flots venaient s'écraser avec force et sur le même sol qui portait les murs majestueux de Poulard. Elle était une des clefs du rituel, un autel des sacrifices jusqu'à présent scellé et dissimulé dans les profondeurs de la terre. Mais le sang des ténèbres versé selon un rite bien précis avait su la rouvrir. Le corps de sa victime reposait à quelques pas à peine, empalé vivant sur un pieu d'argent qui se dressait hors de terre pour s'abreuver de son sang, la vie même de l'Oryale. Gorn avait depuis bien longtemps cessé de gémir, attendant dans une souffrance sans nom que la mort veille bien lui ouvrir ses bras de glace, tout en sachant qu'il lui faudrait encore patienter longtemps.
L'autel était un cercle de pierres millénaires, créées et modelées par la lave pour en retirer toute sa richesse, couleur de saphir fondu d'argent qui luisait uniquement à la lueur des étoiles. Il était enchâssé d'un grand pentacle inverser en direction de la mer, un peu plus grand qu'un homme, dans lequel venaient courir des milliers d'inscriptions tracées dans la langue interdite des sorciers des incantations puissantes, barrières protectrices, appels aux succubes et aux goules, poisons de vie, autant de formules qui pourtant n'étaient rien sans leur ultime clef, l'Aŀhŗan Nēhr, le livre maudit d'Arkam. Lui seul contenait l'invocation capable de rappeler son maître. Lui seul contenait les mots manquant à chacune des formules qui dansaient sur la pierre de vie. Chaque branche du pentacle était elle-même prisonnière de trois cercles mêlés.
L'Oryale était doucement éclairée par de petites boules de lueurs bleutées qui traçaient parfaitement son contour extérieur et se révélait être également un puissant champ de protection. Néanmoins, fort de son savoir et de ses possessions, Lucius le pénétra sans mal et s'avança respectueusement jusqu'au centre de l'autel pour y déposer son fardeau selon un alignement bien précis. La tête devait reposer sans la branche dominatrice, alors que chaque membre était placé dans les quatre autres de façon à ce que son corps épouse parfaitement le dessin. Il prit cependant bien garde à ne pas blesser inutilement son fils, avant de se redresser. Puis, il sortit le grimoire et les fioles de cristal contenant le sang qu'il avait précieusement recueilli et il laissa l'Aŀhŗan Nēhr léviter au-dessus du corps de Draco, alors qu'il préparait le rituel. Désormais, plus rien ne pourrait l'empêcher de l'accomplir et il eut un sourire indulgent lorsqu'il vit apparaître près de lui Ernst et ses amis.
Il n'avait pas été difficile pour le sorcier de trouver l'emplacement de l'Oryale puisqu'il en connaissait l'existence depuis bien longtemps maintenant. Son tri aïeul était l'un des neufs sorciers qui étaient parvenu à le refermer et à emprisonner l'âme d'Arkam dans sa pierre maudite. Lorsqu'il vit Lucius prêt à entamer le rite que le libérerait, il se jeta immédiatement à sa rencontre, pour malheureusement être stopper par la barrière de lumière sur laquelle il rebondit douloureusement.
_ Ronald ! Cria Sirius en le voyant aller frapper le tronc d'un arbre plusieurs mètre derrière lui, avant de courir à sa rencontre immédiatement suivit de Harry et Gorge.
Heureusement, le sorcier semblait avoir put contenir le plus gros de l'impact, puisqu'il commençait déjà à se relever, rassurant au mieux ses trois compagnons. Seul Ron et Dumbledore était rester en arrière, observant d'un œil horrifier la scène qui se jouait devant eux. Le jeune homme fit un pas, puis encore un autre et encore, jusqu'à presque toucher la barrière. Il l'aurait d'ailleurs certainement fait, si son aîné ne l'en avait empêché.
_ Tu n'y survivrais pas, dit-il simplement d'une voix transparente que le jeune homme eut du mal à entendre.
_ Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que le Sãryl Rhreï ? Demanda-t-il alors. Que veut-il réellement de Draco ?
Mais Dumbledore ne lui répondit pas, comme hypnotisé, par la pierre qui luisait doucement.
_ Dit-le moi ! Supplia Ron en le secouant un peu, incapable cependant de détacher son regard du corps de son compagnon à quelques pas à peine et pourtant, intouchable. S'il vous plait.
Mais son aîné ne l'écoutait pas.
_ Je ne savais pas, marmonna-t-il. Comment aurais-je pu savoir qu'il était ici ? Comment ?
_ Sãryl Rhreï signifie rituel de sang, dit la voix de Ernst derrière lui.
_ Rituel de sang ?
_ Oui. Dumbledore, souffla-t-il en secouant le vieux sorcier qui sembla enfin sortir de sa concentration.
_ Quel sang ? Demanda alors Harry.
_ Ce serait trop long à expliquer, mais grossièrement, lorsque l'âme d'Arkam a été enfermée dans la pierre, cinq scellées ont été posées. Cinq scellées qui ne peuvent être réouvertes que par cinq sangs, Klena Rheï, pour le libérer, selon un rite bien particulier.
_ Et Draco ?
_ Il est la clef du rite. Son corps est celui par lequel Arkam reviendra à la vie, mais je n'ai pas le temps de vous expliquer cela. Il faut casser le rituel, ouvrit la barrière qui les protège. Il suffirait d'atteindre Gorn pour tout arrêter.
_ Gorn ?
_ C'est son sang qui nourrit l'Oryale, si nous le tuons, elle se refermera et Lucius devra recommencer, ce qui nous donnerait le temps d'agir. Fred, Harry, je vais avoir besoin de vous. Il faut que vous vous placiez chacun à un endroit de la barrière et concentriez toute votre énergie en un seul point pour la déchirer. Sirius et moi-même allons faire de même, il n'y a pas une minute à perdre.
Les trois sorciers acquiescèrent et allèrent rapidement se placer, mais Ron arrêta Ernst avant qu'il n'ait pu faire de même.
_ Et moi ?
_ Tu es trop faible, en plus, j'aurais besoin de toi pour protéger Draco. Lucius doit presque entrer en transe pour accomplir le rituel, mais elle ne durera pas longtemps. Lorsque la barrière cédera, il faudra que tu coures le lui reprendre sans tarder, c'est bien compris ? Dumbledore sera là pour te protéger.
Le jeune homme et le sorcier hochèrent la tête et regardèrent Ernst aller se placer, alors que ses trois compagnons avaient déjà commencé, mais ce qu'ils virent à l'intérieur de l'autel leur glaça le sang car Lucius avait, lui aussi, entamé le rituel.
Il avait rapidement compris ce que son adversaire de toujours tentait de faire et n'avait pas perdu une seconde, car il était assez malin pour réussir et lui, n'avait pas le droit d'échouer si près du but. Pas après tout ce qu'il avait sacrifié. Pas après tout ce qu'il avait fait tout au long de ses années. Sans perde un instant de plus, il prépara les trois fioles de cristal et le poignard et se concentra, lentement, jusqu'à sentir son âme se détaché presque de son corps, gagnant un niveau de conscience bien plus puissant. Il commença alors à incanter doucement.
_ Klena Rhreï ena Sãryl.
_ Cinq sangs pour le rituel, souffla doucement Dumbledore près de Ron.
Lucius prit le premier flacon et versa doucement son contenu au creux des branches du pentacle pour le voir en dessiner rapidement les contours à mesure qu'il se déversait.
_ Rhreï Alrahr ena iden Sah.
_ Le sang des innocents pour lever la scellée.
Un éclair vif déchira le ciel et le sorcier ouvrit le seconde flacon qu'il laissait couler dans chaque cercle qui enchâssait le pentacle.
_ Rhreï Kilour ena Orin etn.
_ Le sang des sorciers pour un pouvoir libéré.
Puis, il se saisit de son poignard et sans hésiter, se coupa le bras droit pour déverser son propre sang, tournant lentement autour de Draco pour fermer un nouveau cercle.
_ Rhreï Emlir ena asher.
_ Le sang des serviteurs pour la pérennité.
Alors qu'il progressait lentement, Dumbledore jeta un coup d'œil aux quatre sorciers qui tentaient de percer la barrière, mais ils étaient évidents qu'ils peinaient à arriver. Ils étaient déjà en sueur, les mains à quelques millimètres à peine de cette formidable concentration d'énergie qu'ils s'évertuaient à vouloir fendre, ne serait-ce que de quelques millimètres, mais sans succès jusqu'à présent.
Ernst releva rapidement la tête pour voir que la troisième phase du rituel était déjà presque terminée et sentit son sang se glacer, avant de se concentre une nouvelle fois. Il fallait y arriver !
Un autre sang se glaça tout près. Celui de Ron lorsqu'il vit Lucius achever son tour et, après s'être rapidement bandé le poignet, s'approcher de son fils.
_ Non !
Mais il ne pouvait pas agir et c'est impuissant qu'il le regarda défaire les pans de tissu qui avait jusqu'à présent stopper les saignements pour laisser à nouveau couler son sang.
_ Rhreï Shalim ena Arem del.
_ Le sang des sacrifiés pour une vie échangée.
_ Non ! Cria à nouveau Ron, glissant lentement au sol. Draco !
Il vit son compagnon tressaillir, une de ses mains se serrant convulsivement alors qu'il prenait une respiration laborieuse. Il crut l'entendre gémir, mais sans en être tout à fait sûr et vit sa poitrine se soulever encore une fois, mais plus difficilement que la précédente et le supplia.
_ Je t'en pris, je t'en supplie, Draco… ne fait pas ça.
Le flot sang qui s'écoulait rapidement de ses plaies se fit peu à peu moins important, formant autour du jeune homme un miroir de vie dont la pierre semblait s'imprégner, l'absorbant doucement, comme on boit à un calice.
_ Ne fait pas ça, s'il te plait…
Sa respiration devint souffle, à peine plus qu'un filet d'air qui s'échappa de ses lèvres tremblantes et entrouvertes, déjà bleuies, pour s'envoler.
_ S'il te plait. Je sais… je sais que ce n'est pas ta faute. Je t'aime. S'il te plait…
Mais sa demande, comme le dernier souffle du jeune homme fut emporté par le vent pour se perdre dans l'immensité de cette nuit sans lune et lorsqu'il regarda Draco, celui-ci n'était plus.
Il sentit ses forces l'abandonner. Il aurait voulu pouvoir crier, pleurer, mais il ne ressentait qu'une immense fatigue qui réveillait à son corps les douleurs qu'il avait jusqu'à présent mises de côté.
Oui, si fatigué.
Il l'avait perdu. Le petit-être avait eu tord, ils n'avaient pas pu le sauver. Il n'y avait jamais eu d'espoir. Tout ceci, cette mascarade n'avait plus d'importance à ses yeux. Il l'avait perdu. Il se sentait étrangement engourdi.
Perdu.
Complètement détaché de la réalité, il ne vit pas Lucius accomplir la dernière phase du rituel. Ouvrant la dernière fiole, il versa lentement son contenu au contact des poignets de son fils, mêlant son sang encore frais, à celui du flacon et lança la dernière incantation.
_ Rhreï Amele ena Isham nir. Klena Rhreï elin nahr ena id nahr eth ahir. An Ikar Rehn.
_ Le sang des justes pour une âme retrouvée. Cinq sangs unis en un pour que de un il renaisse. Ainsi soit-il.
A suivre…
Yataaaaa !!! Fini !!!! Bon, alors pour ceux qui se poseraient tout de même la question, non Draco n'a pas violé Ron, je ne le voulais pas ainsi. Par contre, oui il croit l'avoir fait. Pour les traces de sang, ce n'est ni plus ni moins que celles de ses autres blessures. Et oui, j'ai bien tué Draco à la fin. C'est bien son dernier souffle qui a franchi ses lèvres. Je vous avait dit que je serais sans pitié. Quand à la suite… hum, j'ai mon idée… nirak, niark, niark !!!!
