The best Ennemies in the World
by Sataï Nad
Disclaimer : The characters are not mine. They belong to Thomas Harris. I just borrowed them. No infringement of copyright is intended.
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Chapter 2 : The long wait
Quatre semaines s'était écoulées depuis cette fameuse nuit.
Quatre semaines de harcèlements, d'interrogatoires, de cauchemars pour Clarice Starling.
L'attitude du F.B.I. en cette matière était réservée, pour ne pas dire, embarrassée.
L'enquête avait révélé la corruption de Paul Krendler et les manipulations de Mason Verger. Le témoignage de Cordell, le médecin personnel du milliardaire, confirma celui de Starling. L'invalide avait voulu se venger du Docteur Lecter : il avait payé l'inspecteur Pazzi et des bandits Sardes pour la capture du monstre en Italie ; il avait payé Krendler pour qu'il produise de fausses preuves contre Starling, la fasse relever de ses fonctions et en faire un appât pour attirer le célèbre sociopathe.
La presse s'était emparée de cette histoire. De bourreau, le Docteur Lecter passa au statut de victime qui s'était fait justice ; Clarice Starling fut à nouveau traînée dans la boue par certains journaux, alors que d'autres clamaient haut et fort qu'on l'avait manipulée. On rappela les faits qui avaient conduits à leur rencontre et l'étrange relation qu'ils avaient tissée sept ans plus tôt. On parla de l'affaire avec fascination et horreur. On se moqua du Bureau et du Département de la Justice. On dénonça la corruption de certains fonctionnaires et les tirages augmentèrent...
Malgré les morts découverts à la ferme, le Bureau était prêt à faire des concessions. Les agissements criminels de Mason Verger indisposaient les autorités. Après tout, malgré ce qu'on pouvait lui reprocher, Hannibal Lecter n'avait fait que de se défendre.
Le cas de Starling était cependant plus épineux. Relevée de ses fonctions, elle avait désobéi à un ordre direct de son supérieur, utilisé une arme qui ne lui appartenait pas et tué trois hommes. Elle avait aidé et délivré un criminel dangereux. Il était facile de lui attribuer la responsabilité de la fuite de Lecter.
Mais ce qu'on allait juger, c'était l'attitude de Starling, pas les faits. Encore une fois, elle avait compris ce qui allait se produire et avait fait cavalier seul, n'en faisant qu'à sa tête. Après la découverte et la mort de James " Buffalo Bill " Gumb, la commission d'enquête avait passé l'éponge sur la désobéissance de la stagiaire, à la demande du Sénateur Martin et de sa fille, Catherine. L'opinion publique avec elle, Starling était intouchable. A présent, les hyènes qui réclamaient sa tête depuis longtemps, allaient pouvoir s'acharner sur elle et la mettre en pièces.
On lui avait assigné un conseiller pour sa défense. Starling essayait de prendre du recul par rapport aux manœuvres politico-judiciaires qui se déroulaient dans la coulisse, mais ces considérations lui échappaient. Elle savait que son avenir au sein du F.B.I. dépendait de quelques directeurs qui feraient valoir le politiquement correct plutôt que ses états de service. Resterait-elle ? La prierait-on de partir ?
Son geste l'avait marginalisée un peu plus à l'intérieur de sa propre division. Elle se savait indésirable. Ses collègues ne lui parlaient plus, la fuyant comme la peste. Certains l'ignoraient, d'autres détournaient les yeux, gênés. Starling avait toujours été une solitaire qui appréciait de travailler en solo. A présent, elle était réellement seule dans cette épreuve.
Et toujours, les paroles et les actes de Lecter revenaient la hanter. Depuis cette nuit, il avait semé le doute en elle et perturbé le fragile équilibre et la discipline dont elle était si fière. Sa raison et sa ligne de conduite se heurtaient à présent à des sentiments contradictoires, certains refoulés depuis des années.
Elle dut vivre à présent avec la honte, la culpabilité et la rage. Pour la première fois de sa vie, elle sut qu'elle n'avait pas agi en fonction de sa conscience ce soir-là. Elle s'était trahie, et surtout, elle avait ce sentiment de l'avoir trahi, Lui... Lui, le tueur en séries qui s'était toujours montré honnête avec elle, qui la connaissait et la comprenait mieux qu'elle-même ne se connaissait. Lui, le paradoxe humain dont elle se sentait le plus proche...
Son système s'effondrait. Dans les moments de fièvre, elle haïssait Hannibal Lecter : il avait réveillé les hurlements des agneaux. Au cœur de la tourmente, les limites entre les notions de bien et de mal devenaient floues dans son esprit, et elle doutait de tout. Elle, si sûre d'elle-même, si disciplinée, remettait ses principes en cause. L'examen de conscience était douloureux et effrayant. Dans son désespoir, elle entendait la voix du Docteur au timbre si particulier, elle voyait son sourire sardonique, ses yeux qui la guettaient comme un chat à l'affût. Mais malgré tout, elle se raccrochait à lui. Parce que, quoi qu'elle pensa, elle se heurtait systématiquement aux vérités qu'il avait énoncées. Parce qu'il avait toujours raison. Parce que, depuis leur première rencontre, il était le maître du jeu et il contrôlait la situation. Parce que, au fonds d'elle-même, des voix s'élevaient, qu'elle ne pouvait plus faire taire...
Dans les moments de lucidité, elle osait considérer les raisons de la conduite d'Hannibal Lecter. L'amour était une notion qui n'existait pas dans l'univers du Docteur, se répétait elle sans arrêt. Et pourtant, malgré tous les arguments raisonnables, elle savait intuitivement qu'il avait agit par amour. Il la protégeait, n'hésitant pas à tuer pour elle, traversait l'Atlantique juste pour la voir courir dans un parc, s'exposait à être capturé et tué, prenait le risque de la revoir alors qu'il savait qu'elle serait l'instrument de sa propre perte, lui proposait un marché sans équivoque, sacrifiait sa main gauche au lieu de couper la sienne... et lui pardonnait son refus et sa trahison. Toutes les fois, comme gravé au fer rouge, elle se remémorait l'absence d'animosité et la compassion qu'elle avait lue dans son regard fatigué. Comme elle aurait préféré y voir de la froideur ou de la haine...
Clarice Starling tentait de tenir le coup. Une autre question obsédante et beaucoup plus insidieuse revenait sans cesse dans son esprit : qu'éprouvait-elle pour lui ? Consciemment, elle ne pouvait aimer ce monstre. Elle se répétait ces mots inlassablement, mais ils ne lui apportaient aucun réconfort. Elle n'oubliait pas qui il était mais elle devait s'avouer que le respect dont elle faisait montre envers lui cachait de l'admiration et de l'attirance. On va finir par croire qu'on est amoureux l'un de l'autre. Sept ans plus tôt, le docteur avait prononcé ces mots pour la taquiner et voir sa réaction. Elle lui avait retourné un visage impassible. Mais son cœur avait battu plus fort sous son regard scrutateur. L'avait-il senti ?
De même, lorsqu'il l'avait embrassée, une partie d'elle avait hurlé sa répulsion. Mais profondément, quelque chose en elle s'était réjouie qu'elle soit à sa merci et qu'il lui ait empêché toute liberté de mouvement. Quand il avait posé ses lèvres sur les siennes, elle n'avait pas eu à détourner la tête. Mais là encore, elle n'avait trahi aucune émotion, restant maîtresse d'elle-même.
En fait, elle n'avait laissé échapper qu'une seule larme au moment où elle lui passait les menottes.
Une larme de honte. Le prix de sa trahison.
Elle le revoyait brandir le hachoir et l'abattre avec un claquement sinistre. Elle avait ressenti une immense douleur, alors qu'il souffrait en silence. Le voir ainsi avait été insoutenable. Toujours les agneaux. Mais cette fois, c'était de sa faute. En cet instant, elle s'était détestée, souhaitant qu'il la tue. Le sentiment de honte et de culpabilité l'avait envahie immédiatement pour ne plus la lâcher. Quand leurs regards s'étaient croisés, le docteur avait lu en elle comme dans un livre ouvert et lui avait renvoyé la même peine. Puis, sans un mot, il était parti.
Clarice Starling ressassait toutes ses pensées, se torturant sans cesse. Elle était au bord de la rupture. Dans ces instants là, elle maudissait Hannibal Lecter et se promettait de n'avoir de cesse de le poursuivre jusqu'à sa capture. Après tout, n'était-ce pas ce qu'elle lui avait dit ? A d'autres moments, l'attente et l'indifférence venaient à bout de ses résolutions et de sa patience. Elle voulait tout quitter, oublier le F.B.I, les criminels, les manipulations et les intrigues de couloirs, recommencer une nouvelle vie... Elle savait aussi que fuir n'était pas la solution. Lecter faisait partie d'elle et ne lui laisserait aucun répit jusqu'au jour de sa mort. Et puis fuir devant des responsabilités n'était pas dans sa nature. C'était une guerrière, selon les propres mots du Docteur. Elle devait maintenant apprendre à accepter sa dualité et ses contradictions.
Clarice Starling vivait le pire moment de sa vie avec la sensation folle que tout lui échappait, et que, quoi qu'elle fasse, elle courait à la catastrophe.
C'est alors qu'elle reçut une lettre du Docteur Lecter.
… To be continued…
