8 février 1978, base de l'USAF près de Miami.

Un hélicoptère de la NAVY arriva à l'heure juste. Il était plus petit que les hélicoptères de transport de troupe normal, mais il pouvait quand même accueillir une trentaine de personnes, sans compter l'équipage. Clark et O'Neill se dépêchèrent de monter, puis l'hélico repartit. La réutilisation de la base avait attiré l'attention beaucoup plus que prévu, et ceci n'était pas très bon pour une opération de ce genre. Un départ aussi brutal passait plus inaperçu, surtout avec les gens qui arrivaient tout le temps, pour la plupart des scientifiques pressés de mettre en pièces cet avion qui allait arriver.

« Je déteste les scientifiques » avait dit O'Neill à Clark alors que ce dernier expliquait leur présence au capitaine.

9 février 1978, porte avion américain, mer du Nord.

Le vol fut très long, laissant le temps aux deux hommes de dormir un peu, et de parler aussi avec les personnes présentes dans l'avion ou entre eux.

Lorsqu'il arrivèrent au porte-avions qui devait les accueillir, c'était déjà le lendemain et il faisait grand jour. Le décalage horaire avait toujours été un fléau pour les missions d'espionnage, ou militaires. Clark pensa qu'ici ça serait encore pire car il n'aurait pas le temps de se remettre avant d'être parachuté dans au moins cinquante cm de neige.

L'amiral les fit venir dans sa cabine, où ils eurent à manger et du café. Le décollage était prévu pour dans douze heures. Les consignes avaient changé et au lieu de les parachuter à la tombée de la nuit, ils le seraient un peu avant l'aube. Clark fut content de voir que ses recommandations étaient écoutées de temps en temps. Ainsi, ils resteraient moins de temps là-bas. Ils passeraient la journée à marcher, et la nuit ils pourraient s'occuper de l'avion. Le juge aurait bien aimé que O'Neill puissent se reposer avant de se mettre à voler, mais ceci les obligeait à avoir avec eux une quantité importante de matériel en plus.

Pendant que Clark revoyait des points de détail qu'on lui avait fait comprendre qu'il n'avait pas besoin de savoir, O'Neill se mit à tourner en rond sur le gigantesque porte-avions. Il avait déjà été sur un porte-avions, pas celui-la, mais un autre du même genre et il sut se retrouver là où il voulait sans trop de problèmes. Le bar faisait partie de ces choses qui doivent être partout à la fois, et qui se retrouvaient donc au milieu de tout. Sur certains, il y en avait même plusieurs. Il ne savait pas combien il y en avait ici, mais il finit par en trouver un.

Il fut dans un premier temps tenté de commander une bière, puis il se décida pour quelque chose de non alcoolisé. Ne pas boire moins de 24 heures avant de voler est une règle de sécurité que O'Neill, comme beaucoup d'autres, ne respectaient pas tout le temps, mais là, c'était différend. L'objectif était beaucoup trop important, et si on découvrait qu'il avait bu, c'était la cour martiale qu'il risquait. Bien que son attitude ne le montre pas forcément, il n'était pas très pressé d'y aller. S'il pouvait même ne jamais y mettre les pieds, ce serait bien, mais ceci l'obligeait à faire des choses qu'il n'aimait pas trop, comme respecter ses supérieurs.

Clark arriva plus tard, et commanda lui aussi quelque chose de non alcoolisé. Il alla s'asseoir à coté d'O'Neill.

- J'ai vérifié le matériel, c'est du bon. En plus, il est assez banal pour que si quelqu'un le trouve, il ne puisse pas savoir à quel pays il appartient.

- Tant mieux.

O'Neill ne voyait pas vraiment l'intérêt de tout ceci étant donner qu'il ne parlait que l'anglais, et que Clark était au courrant. Dès qu'il parlerait, tout le monde saurait qu'ils sont américains, et s'ils n'étaient pas pris, il n'y avait pas de raison que leur matériel le soit. Comme s'il lisait dans ses pensées, Clark ajouta.

- dès qu'on aura atterri, on laisse les parachutes là où ils sont. On n'a ni le temps ni la place de les reprendre avec nous, et de toute façon je ne vois pas à quoi ils pourraient nous servir. Quand on sera dans l'avion, il se peut qu'il n'y ait pas de place pour nos affaires qu'on devra laisser sur place.

- Ok, de toute façon c'est toi le chef jusqu'à ce que le moteur de l'avion se mette en route. Après c'est moi qui dis ce qu'il faut faire. Tu es sur que la piste sera déneigée ?

- Oui, ils le font tous les matins avant l'aube, que Lénine 1 sorte ou pas. Par contre, il se peut qu'elle soit verglacée.

- Je sais, c'est dangereux mais pas infaisable.

- Tu commences à stresser ?

- Je commence ? je crois que là mon cas est désespéré.

- Ne t'inquiète pas, dès que tu ouvriras ton parachute, tout ira mieux.

- Si tu le dis, c'est toi l'expert.

Trois quarts d'heure avant leur départ, la tension était à son comble. Clark, qui avait déjà un peu d'expérience pour être allé plusieurs fois au Viêt-Nam dans des conditions similaires, était néanmoins de plus en plus inquiet pour des questions de détails. Il se força à faire le vide dans sa tête et à se calmer un peu alors qu'il montait sur le pont. Un sergent venait de leur apporter leur tenue d'aviateur, pardessus laquelle ils avaient enfilé leur tenue de camouflage : un pantalon et un gros blouson blanc, destinés aussi bien à les cacher qu'à les protéger du froid.

Sur le pont, diverses personnes, dont aucun des deux n'avait pris le temps de se rappeler leur nom, leur donnèrent leur parachute, un sac contenant quelques vivres, à boire et un peu de matériel médical. On leur donna en plus un couteau de chasse, leur couteau normal aurait été trop voyant. Il eurent aussi chacun un automatique, accompagné de quelques chargeurs. Ni Clark ni O'Neill ne se sentait rassuré de partir sans plus d'armes, mais tout surplus aurait été gênant.

L'hélico qui devait les emmener fini par arriver, et on leur présenta son commandant. L'heure du départ arriva enfin, confirmée par un fax de la CIA.

Clark et O'Neill montèrent à bord. Ils entendirent l'amiral leur dire « essayez de ne pas vous casser une jambe », puis l'hélico s'envola.

De sa cabine le commandant leur donna le temps de vol, et leur rappela qu'il n'aurait droit qu'à un seul passage.