Chapitre 10 : L'invitation au bal.
En rentrant à la salle commune après une bataille de boule de neige mémorable opposant Hermione, Harry, Ginny, Fred, George, Seamus, Neville… bref, opposant la totalité des Gryffondor à Ron –qui s'était retrouvé submergé par une montagne de neige et d'élèves sensiblement énervés par ses râleries continuelles- , Harry prétexta qu'il devait passer à la volière poster une lettre pour s'esquiver. Il n'avait toujours pas de cavalière pour le bal, et il ne se sentait pas le courage de demander à Cho. Il la respectait trop pour cela. Et il respectait trop Cédric Diggory aussi. Pourtant, il mourait d'envie de le faire, il rêvait depuis que Dumbledore avait annoncé la nouvelle du Bal de Noël, de cette soirée passée avec Elle, à danser, à discuter, à plaisanter, à s'embrass… non, pas ça, il ne devait pas penser à cela. D'ailleurs, il n'y pensait pas du tout… Ou alors juste un peu, un chouilla, un tout petit, petit peu, juste de temps en temps… le jeune homme eut une moue triste, plongé dans ses pensées : il se persuadait qu'il n'y pensait pas, alors que la jolie Cho Chang ne cessait d'occuper ses pensées depuis déjà deux ans. Et ces derniers temps, Elle était dans tous ses songes, dans tous ses rêves, dans tous ses soupirs et dans tous les recoins de son esprit.
Mais il avait peur d'elle, qu'elle refuse.
Il se dirigeait d'un pas vif et pressé vers le bureau du professeur Rosenberg : il avait décidé de l'inviter au bal de Noël. Après tout, le petit ami de Mione avait bien 20 ans le professeur Rosenberg n'en avait que deux de plus… Il se trouvait totalement ridicule, mais la perspective d'aller seul au bal le rendait malade. Il ne voulait pas donner à Malefoy la chance de se moquer de lui, et y aller seul signifiait tendre la canne pour se faire battre. Et puis, son parrain, Sirius Black, avec qui il avait de longues discussions concernant les filles – discussions qu'il ne pouvait pas avoir avec Hermione, elle-même trop concernée par LA chose, et encore moins avec Ron, dont les seules relations qu'il entretenait avec des filles, consistaient en d'incessantes disputes avec sa meilleure amie et sa petite sœur - lui avait rétorqué que «qui ne tente rien, n'a rien ». Comme il n'avait pas vraiment envie d'être la risée de la maison Serpentard, il avait choisi une solution, ma foi très brillante selon lui.
Il allait frapper à la porte de bureau de son professeur quand une voix sifflante arrêta son poing, et glaça son sang :
« - Bon sang, Potter, mais qu'est ce que vous fichez ici ? C'est à croire que vous m'espionnez !
- Pas du tout, professeur Rogue, je suis seulement là pour parler au professeur Rosenberg. »
Il semblait d'une humeur terrible… Ou plutôt, en le regardant mieux, il avait l'air angoissé : des perles de sueur brillaient sur son front, et il semblait en proie à une agitation fébrile. Ce n'était pas bon signe. Harry recula de quelques pas.
« - Ca tombe plutôt mal, car moi aussi, j'ai à lui parler. Cela ne vous ennuie pas si j'y vais d'abord ? Dit-il, d'un ton faussement doucereux.
- Non, bien sûr… »marmonna Harry, que la perspective de faire perdre 50 points à sa maison rendait docile et doux comme un agneau…
Il alla s'asseoir un peu plus loin en attendant que «sa seigneurie » en ait terminé avec le professeur Rosenberg.
Rogue tapa quatre petits coups discrets à la porte du bureau. Une partie de lui – une partie seulement – priait pour que personne ne lui réponde, mais…
«- Entrez ! »
Il inspira profondément, jeta un regard en biais à Potter, qui s'était assis sur un banc de pierre, non loin, et qui regardait ses pieds avec insistance. Puis, il entra.
Willow, qui corrigeait encore et toujours, leva les yeux un instant, les rabaissa sur la copie qu'elle venait de gratifier d'un ''F-, vous êtes désespérant…'' puis, après une demi- seconde de réflexion, elle releva la tête. Et avant qu'il ait pu prononcer une seule parole ou amorcer un seul geste, elle bondit littéralement de sa chaise et dit durement, laissant le professeur Rogue sans voix, stupéfait – chose très rare, je vous l'accorde…-
« - Ecoutez professeur Rogue, si vous venez encore plaider en faveur de monsieur Malefoy, vous pouvez rebrousser chemin immédiatement : je ne veux pas entendre ce que vous avez à me dire. Ce qui s'est passé tout à l'heure, Drago l'a bien mérité ! Bon sang, c'est tout de même fou qu'il soit venu se plaindre alors qu'il est coupable de tentative d'assassinat !
Et laissez-moi vous dire que je me trouve bien bonne de ne l'avoir que si peu sanctionné. Ne venez surtout pas me dire que c'est moi qui m'acharne ! Je ne le considère pas, contrairement à ce que vous pensez, comme ma tête de turc, j'ai déjà donné des dizaines de rouleaux de punitions à Londubat et aux jumeaux Weasley pour beaucoup moins, et étrangement, ils ne sont pas allés se plaindre au professeur MacGonagall ! ! Et Londubat ne fait jamais exprès, il est juste très maladroit ! Et puis…
- Professeur Rosenberg, je ne suis pas là pour vous parler du cas de Malefoy… » Dit Rogue d'une voix blanche.
Willow déglutit avec difficultés, toute tremblante de rage, les mains moites et les joues rouge vif, sans voix.
« - En fait, je suis venu vous demander si vous vouliez bien… êtremacavalièrepourleBaldeNoël ?
- Pardon ? ! ! » Elle était extrêmement rouge et confuse. Elle faillit s'étouffer lorsqu'elle demanda :
- M'inviter au bal de Noël ? Moi ?
- Oui, vous… » les joues du professeur Rogue, d'ordinaire blanches et cireuses, avaient pris une légère teinte rosée Ses lèvres fines étaient pincées.
- Oh ! Et bien… D'accord.
- D'acc… d'accord ? » Il n'en revenait pas.
- D'accord ! » Elle osa le regarder dans les yeux et lui sourit, très très timidement. Il était à présent aussi rouge qu'elle.
- A… Alors retrouvons-nous à 20heures devant la Grande Salle.
- Très bien, à 20heures, j'y serais…
- A 20heures… Bon, et bien, alors à dans cinq jours, bonsoir professeur Rosenberg.
- Bonsoir professeur Rogue. »
Il sortit sans oser la regarder à nouveau et en passant devant Harry, qui fixait toujours ses pieds avec un drôle d'air il lança presque joyeusement – presque, faut pas exagérer quand même- :
« - Je vous souhaite de très bonnes vacances Potter !
- Euh.. merci professeur, vous aussi… »
Harry le suivit du regard, quelque peu interloqué par l'attitude non conventionnelle de son ''meilleur ennemi''. Il haussa les épaules en refoulant un fou rire nerveux et frappa à son tour à la porte :
« - Oui ? »
Il entra. Déjà, il sentait ses joues s'empourprer. Willow, un petit sourire timide aux lèvres, était en train de re- noter sa copie laissée en suspend. Elle avait inscrit : D, en progrès
« - Oh, bonsoir Harry.
- Bonsoir professeur.
- Il y a un problème ? Vous semblez troublé ? »
Il n'osa pas lui répondre «vous aussi » et marmonna un petit :
« - Non, tout va très bien…
- Asseyez-vous ! Que puis-je faire pour vous ?
- Et bien, c'est un peu embarrassant…
- Dites-moi ?
- … Voilà, voulez-vous m'accompagner au Bal mercredi ?
- Oh ! Harry… Vous savez, je crois que je suis un peu vieille pour vous ! Et puis pour l'éthique, je veux dire, c'est un peu étrange un couple élève – professeur… Vous ne trouvez pas ?
- Oui, bien sûr, mais ce n'est pas interdit, j'ai fait des recherches approfondies sur le sujet.
- Des recherches ?
- Oui, le règlement de Poudlard n'interdit pas à un élève d'inviter son professeur à danser. J'ai cherché dans tous les livres que j'ai trouvé, et on n'en parle nulle part. Il faut dire que le problème ne s'était jamais posé avant… les autres professeurs sont trop… enfin vous savez…
- Harry, je suis tellement navrée, mais j'y vais déjà avec quelqu'un…
- Oh ! Ce… ce n'est pas grave, tant pis. » dit-il, déçu et contrarié
- Mais dites-moi la vérité Harry, ce n'est pas avec moi que vous avez envie d'aller au bal ?
- …
- C'est avec une autre que vous avez envie de danser.
- …
- Et vous n'osez pas lui parler de peur qu'elle dise non ?
- Oui… Et puis, je ne peux pas lui demander ça, son petit ami est mort il y a six mois.
- Ecoutez, je crois que si vous attendez trop, elle vous passera sous le nez. Elle intéresse beaucoup de garçons, et je crois savoir que Dean Thomas lui a déjà demandé cent fois d'y aller avec lui. Si ça continue, il l'aura à l'usure.
- Mais… comment savez-vous…
- Je le sais, c'est tout. Mais je sais aussi qu'elle n'attend qu'une demande de votre part pour dire oui. »
Elle lui sourit gentiment et ajouta :
« - Ayez le courage d'aller lui parler Harry, ce n'est pas si difficile.
- Oui, vous avez raison, merci professeur Rosenberg, passez un joyeux Noël, et à mercredi.
- Joyeux Noël à vous aussi Harry, et n'oubliez pas, qui ne tente rien n'a rien. »
Il sortit de la salle et se dirigea lentement, le pas traînant, vers la tour Gryffondor. Il venait de prendre une grande décision : Il irait seul au bal. Tant pis si cela signifiait qu'il serait la risée des Serpentard, et tant pis si cela signifiait qu'il devrait supporter de voir Dean Thomas au bras de Cho.
Tant pis.
En arrivant dans la salle commune, il trouva Hermione déjà plongée dans ses devoirs : elle avait décidé de tout faire dans les deux jours à venir, pour pouvoir profiter à fond de Viktor et de ses vacances. Ginny était sur le canapé vert, près du feu, des larmes de colère dans les yeux et Ron était dans son coin, la mine renfrognée…
« - et bien, c'est la joie ici ! Quelqu'un peut-il m'expliquer ? » Lança Harry, moqueur. Hermione leva le nez une seconde, lui sourit tristement, et dit tout en replongeant dans ses bouquins.
- Il se passe que Ron est jaloux.
- Pourquoi ?
- Parce que Ginny va au bal avec Lee.
- Lee ? Lee Jordan ?
- Oui.
- Et alors ? Tant mieux !
- C'est ce que je me tue à lui dire, mais Môssieur Weasley est trop tête de mule pour l'entendre. Il est jaloux car lui n'a pas de cavalière.
- Oh, tais-toi Hermione ! Je préfère encore y aller seul que d'y aller avec …Mon Vicky !
- Ron ! Arrêtes ça tu veux ! Ce n'est pas de ma faute si tu ne supportes pas Viktor !
- C'est vrai Ron, calme-toi, moi non plus je n'ai pas de cavalière pour le bal, je n'en fais pas un drame pour autant…
- Ah bon ? » Demandèrent Hermione et Ginny en chœur, le plus innocemment du monde. Toutes deux étant devenues très proches, Hermione n'avait pas résisté à lui révéler son petit secret.
- Non. »
Ron, loin d'être rassuré ou calmé par les paroles de son meilleur ami se leva, foudroya les deux jeunes filles du regard et s'en fut dans son dortoir, la mine haineuse. Hermione haussa les épaules et se re- concentra sur son devoir d'histoire de la magie. Ginny se leva et dit :
« - De toute façon, qu'il soit d'accord ou non, j'irai au bal avec Lee. »
Elle sourit à Harry et sortit. Le jeune homme s'assit près d'Hermione , sortit une plume, un rouleau neuf de parchemin, ouvrit son livre de divination – Hermione grimaça… - et commença à s'inventer un avenir peuplé de dangers mortels et de destinées funestes que le professeur Trelawney appréciaient tant.
De son côté, le professeur Rosenberg venait de terminer de noter ses copies, un large sourire illuminant son visage – elle avait finalement mis sur celle déjà corrigée une fois un très élogieux : B, vous avez de la chance , je suis de TRES bonne humeur…- Elle prépara son sac de voyage à la hâte, enfila des vêtements de ville, mit Miss Kittie dans sa petite caisse et sortit. Hagrid l'attendait au dehors pour l'amener au train qui devait la renvoyer pour cinq petits jours dans le monde des moldus. Elle s'installa dans un compartiment vide et colla son visage à la fenêtre pour regarder le château s'éloigner lentement.
Là bas, à la gare de King's Cross, Ses amis l'attendaient, quelque part entre la voie 9 et la voie 10…
