11 : Le coup du pingouin :

Le 24 décembre au soir, Willow était redevenue la Willow moldue dans toute sa splendeur. Elle avait laissé ses robes, sa baguette magique, son chapeau pointu et son titre élogieux de professeur de Défense Contre les Forces de Mal pour redevenir juste Willow. Elle se sentait bien entourée de ses amis, mais son cœur lui, était resté dans sa petite chambre, tout en haut de la tour Gryffondor, blotti sous son édredon de plumes, en attendant fébrilement que le professeur le plus haï de Poudlard l'emmène danser… Elle ne pouvait expliquer ce sentiment qui s'emparait d'elle, cette envie de rentrer là-bas au lieu de profiter de ses amis venus spécialement pour elle de Californie…

Ses cadeaux de Noël lui remirent pourtant un peu de baume au cœur : Elle reçut de Giles un manuel de magie d'une grande rareté, rédigé en Babylonien par un moine de l'ordre des Templiers au XII ème siècle : Les mythes d'avant les mythes. Xander, Buffy et Dawn, quant à eux, s'étaient débrouillés pour trouver une petite chouette grise magnifique. Willow la surnomma Salem. Elle leur offrit à tous une quantité industrielle de caramels magiques, bonbons surprise de Berttie Botts et chocogrenouilles, ainsi que de très beaux chapeaux de sorciers dernier cri et selon Dawn, «très tendance ».

De leur côté, Ron, qui avait fini de bouder, et Harry se promenaient sur le terrain de Quidditch enneigé, engoncés tous les deux dans leurs capes de laine. Harry mettait au point son programme d'entraînement de Quidditch, et il profitait de ce que tout Poudlard était resté pour le bal, pour faire lever son équipe tous les matins avant l'aube et les faire travailler pendant des heures dans l'air glacé de cette fin d'année. Le jeune homme parlait avec ferveur de leur premier match de la saison qui aurait lieu le 1er janvier, contre l'équipe des Serpentard, quand tout à coup Ron explosa :

« - Harry, Viktor prend Hermione pour une imbécile !

- Mais, qu'est ce que tu raconte ? ?

- J'ai un très mauvais pressentiment, je sens qu'il n'est pas sincère avec elle… J'ai du flair pour ça, crois-moi.

- Ton flair, ça serait pas plutôt de la jalousie ? »

La grande perche rousse allait répondre quand…

« - Harry ? »

Le jeune homme se retourna et faillit tomber raide mort dans la neige, foudroyé par la stupeur et la magnificence de la personne qui lui faisait face : Cho Chang. Elle était là, devant lui, un sourire timide aux lèvres, les joues rougies par le froid, les yeux pétillants et brillants. Harry déglutit difficilement et articula :

« - Cho ?

- Harry, est-ce que je peux te parler une minute ? »

Le brun se retourna vers son ami qui, en voyant la teinte pourprée qu'avait pris son visage, compris qu'il était de trop. Il dit :

« - Bon, ben, je te retrouve dans la Grande Salle pour le dîner… » Puis il s'éloigna, sa silhouette maigre et immense recourbée pour se protéger du vent de décembre qui emportait avec lui de petites particules de neige glacée. Harry sourit bêtement, ne sachant que faire. Cho dit en s'approchant de lui doucement :

« - Ecoute Harry, je sais que… si tu n'es pas venu me voir pour me demander d'être ta cavalière pour demain soir, c'est parce que tu as du respect pour moi et, ça me touche vraiment…

- …

- J'apprécie ce que tu as fait.

- …C'est normal Cho, je…je ne voulais pas te faire de peine et puis...

- Harry, est ce que tu … voudrais bien être mon cavalier pour demain ? » Demanda-t-elle abruptement.

Le jeune homme la regarda avec de grands yeux ronds. La fille la plus jolie de l'école venait de lui demander de l'accompagner au bal de Noël ! Il n'en revenait pas.

« - Harry, tu as entendu ce que je viens de te dire ?

- …Oui, bien sûr, je… je suis d'accord pour être ton cavalier demain soir ! » Et tous les autres soirs, pensèrent-ils de concert.

- Super ! Merci Harry…

- Merci à toi Cho. »

Un lourd silence s'installa entre eux, uniquement froissé par le bruit du vent s'engouffrant dans les grands arbres de la forêt interdite. Le jeune homme dit, histoire de briser la glace (c'est le cas de le dire...)

« - Je crois que nous ferions mieux de rentrer, si nous ne voulons pas passer la nuit de demain dans un lit. »

Elle le regarda avec de grands yeux interloqués. Il rougit et ajouta :

« - Je veux dire… à l'infirmerie. »

Oups…

« - Oui, avec un gros rhume… »

Elle lui sourit et dit :

« - Oui, un gros rhume j'avais compris ! »

Tous deux rouges d'embarras s'élancèrent vers la Grande Salle. Cho lui adressa son plus joli sourire et rejoignit son groupe d'amies à la table des Serdaigle, et Harry courut s'asseoir à la table des Gryffondor, près de Ginny. Ron et Hermione n'étaient pas là, et personne ne les avait vus mais Harry, trop heureux et excité, ne prêta pas attention aux assiettes vides de ses amis et passa la soirée à plaisanter avec Ginny elle aussi trop absorbée par le beau Lee Jordan avec qui elle allait au bal le lendemain.

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Lorsque Ron entra dans la salle commune, il avait la ferme intention de dire à Hermione que son Vicky était un nul, doublé d'un abruti. Il la trouva face à la fenêtre qui donnait sur les serres du cours de Botanique. Elle tournait le dos à Ron et ne sembla pas faire attention à lui. Il lança :

« - Tu scrutes le ciel en vain Mione, les pingouins ne volent pas… »

Elle ne fit pas un mouvement et dit, d'une voix enrouée :

« - Ron, laisse-moi s'il te plaît. »

Le jeune homme aperçut sur la table basse, près du feu de bois qui crépitait, un papier, une lettre plutôt. Il s'avança lentement tout en demandant d'un ton sarcastique :

« - Tu crois sincèrement que ton prince charmant va venir t'enlever sur son balai doré ou quoi ? »

Il attrapa la lettre sans bruit, alors qu'elle disait, toujours sur le même ton étrangement calme :

« - S'il te plaît Ron, fiche-moi la paix. »

Ron lut le message qui était d'une brièveté et d'une cruauté à faire pâlir :

Mione, mon Ange,

Ma toute belle, pardonne-moi s'il te plaît, même si je suis un ignoble individu… D'ailleurs, si tu ne me pardonne pas, je comprendrai. Ca ne sert à rien de te mentir plus longtemps, je ne viendrais pas demain soir. En réalité, je passe Noël avec Ana, ma fiancée depuis quelques semaines. Ne pleure pas, je t'en prie, tes yeux sont si jolis lorsque tu es heureuse et que tu ris… Je ne vaux pas la peine que l'on pleure pour moi.

Essaye de ne pas trop m'en vouloir, ma petite Fleur pour tout le mal que je t'ai fait et que je te fais encore. Je me déteste autant que tu me haïs, mais nous n'étions pas faits l'un pour l'autre, tu es si jeune, si intelligente et si jolie, et moi je suis si moche de te faire ça… Tu mérites bien mieux que moi.

Pardon mille fois, je t'embrasse.

Viktor.

« - Quel monstre ! » Ron s'exclama-t-il.

- Ron, fiche-moi la paix bon sang ! »

Hurla la jeune fille en se retournant violemment. Ses yeux étaient rouges et de grosses larmes coulaient sur ses joues. Elle traversa la pièce en direction du dortoir des filles. Ron la rattrapa :

« - Mione, je…

- Tais-toi ! Ne dis pas que tu es désolé ! C'est faux, tu le détestais !

- Non, je ne le détestais pas. » Murmura-t-il, confus.

- Tu dis ça parce que je pleure, mais tu sais très bien que… » Il la coupa :

- J'étais jaloux Hermione.

- …

- Je le déteste c'est vrai, parce qu'il peut avoir toutes les filles qu'il veut et qu'il t'a choisi toi, la seule fille que JE veux… »

La jeune fille le regarda à travers ses larmes, sans voix.

« - Voilà Hermione, maintenant, tu sais. »

Il eut une petite grimace d'excuse et allait pour partir quand :

« - Ron, attend. »

Il se retourna et la jeune fille put voir que son ami pleurait presque.

« - Je suis désolé pour toutes les fois où je t'ai taquinée à propos de Lui.

- Ron, je m'excuse… » Elle s'approcha de lui et, à la grande surprise du Roux, se blottit contre lui en fondant en larmes. Il la serra un peu maladroitement dans ses bras en murmurant doucement :

« - Ne pleure plus Mione, il ne vaut pas la peine qu'on se fasse du mal pour lui.

- Je… je ne pouvais pas savoir.

- Allons, calme-toi, ça va aller maintenant. Harry et moi on est là, et puis il y a aussi Ginny…

- Ron ? Tu ne m'écoutes pas.

- Si, bien sûr que je t'écoute, mais ça n'a aucune importance ce que je t'ai dit, je ne te demande pas de me comprendre, juste de ne pas changer d'attitude. Reste toi-même, et oublie ce que je viens de te dire.

- Mais non, Ron. Ecoute-moi, j'aimerais comprendre !

- Chut ! Allez, n'en parlons plus.

- …Et si moi aussi, je te disais que je t'aime… » Ron releva la tête et regarda la jeune fille dans les yeux en souriant

- Tu dis des bêtises ! C'est parce que tu es triste à cause de l'autre pingou… de Viktor.

- Mais enfin Ron, arrête de me traiter comme si j'étais une gosse ! je te dis que…

- D'accord grande fille, alors tranchons la poire en deux : acceptes-tu que nous allions tous les deux au bal, comme deux grands adolescents de 15 ans, responsables et tout, et tout ?

- …Je ne vois pas le rapport, mais… Oui. Mais pourquoi tu ne me crois pas quand je te dis que… enfin tu vois ?

- Parce que ce soir, tu n'es pas toi-même, tu es triste et en colère contre Viktor, et tu te jetterais dans les bras de Malefoy s'il était là, juste pour oublier et te venger.

- Malefoy ! Mais ça va pas la tête !

- C'était juste un exemple ! »

Tout à coup, Hermione se hissa sur la pointe des pieds et déposa un baiser sur les lèvres fines et haut- perchées de Ron. Celui-ci, surpris par la spontanéité du geste, voulut passer ses bras autour des épaules de son amie mais déjà Hermione s'échappait de l'étreinte de Ron. Elle lui dit seulement, un petit sourire illuminant son visage encore baigné de larmes :

« - A demain alors, cavalier ! » Elle allait gravir l'escalier de pierre qui menait à son dortoir quand:

« - Mione ?

- Oui ? » Elle fit volte- face. Le Roux eut un sourire un sourire gêné et demanda :

- Pourras-tu… lisser tes cheveux comme l'année dernière ? Tu étais si… jolie.

- …Bien sûr Ron, bonne nuit.

- Bonne nuit Mione. »

Le jeune homme eut un soupir désabusé, et il s'assit près du feu, seul dans la salle commune redevenue silencieuse et sombre. Il raviva le foyer puis se perdit dans la contemplation des flammes, bercé par le crépitement des bûches moussues. Il fut tiré de sa torpeur par Harry et Ginny qui rentraient.

« - Tiens, salut Ron ! »

Harry lut immédiatement dans le regard vague de son meilleur ami qu'il était arrivé quelque chose. Il s'approcha et demanda :

« - Ca va ?

- Ron, qu'est ce qui ce passe, t'as pas l'air bien… » Dit Ginny.

- Ginny, tu devrais aller voir Hermione, elle a reçu de mauvaises nouvelles. »

Il lui tendit la lettre froissée. Ginny comprit alors que son frère voulait être seul. Elle monta en courant l'escalier et disparut dans le tourbillon des marches qui menaient à son amie.

En bas, Harry s'assit sur le canapé près de son ami et demanda :

« - raconte-moi Ron.

- Viktor a plaqué Mione… j'ai perdu mon sang froid et je lui ai dit…que je l'aimais.

- Qui, Viktor ?

- Tu le fais exprès ou quoi ? Tu sors de l'œuf parfois ! Elle voyons, qui d'autre ?

- Tu… tu aimes Hermione ?

- Et l'oscar du sorcier le plus perspicace de l'année 2003 est attribué à… Monsieur Potter !

- Mais, je…Tu ne me l'avais jamais dit !

- J'avais peur Harry

- Et Mione ?

- Elle a accepté de m'accompagner au bal, c'est un bon début… Désolé mon vieux, j'ai trouvé une cavalière et pas toi.

- Ben…en fait… si, j'en ai une.

- …Pardon ?

- Je vais au bal avec Cho Chang…

- Cho Chang ? Tu veux dire…le capitaine de l'équipe des Serdaigle ? ?

- Oui, la seule et unique…

- Mais…

- Eh oui Ron, vois-tu c'est le jour des confessions.

- Mais…tu…

- Oui, depuis que je suis entré dans l'équipe des Gryffondor, je…m'intéresse à elle. Je n'osai pas aller la voir à cause de Cédric, mais finalement c'est elle qui m'a invité.

- Mais…tu ne m'en avais jamais parlé ?

- Comme tu ne m'avais jamais parlé de tes sentiments pour Mione !

- Enfin Harry, elle est en sixième année, et puis… c'est ta rivale !

- Enfin Ron, elle est préfète, et puis…c'est ta meilleure amie !

- C'est vrai, tu marques un point. »

Ils restèrent un instant silencieux puis, Le brun déclara :

« - Je vais me coucher, et je crois que tu devrais en faire autant, si tu ne veux pas avoir la tête dans les choux demain.

- Je te rejoins dans une minute. »

Harry acquiesça et monta en silence les l'escalier en colimaçon. Ron resta encore quelques minutes, les yeux dans le vague, plongé dans ses pensées. Puis, il rejoignit Harry qui dormait déjà. Il semblait que tout Poudlard était calme et serein. Même le professeur Rogue, allongé très droit sur son lit, telle une momie des temps anciens, les bras le long du corps, s'était endormi un fin sourire sur les lèvres, dans sa petite chambre sombre.

Plus personne n'avait peur, plus personne n'était triste, plus personne ne pensait à la menace extérieure qui avait été dans tous les esprits ces derniers mois …

La magie de Noël opérait…