Chapitre 8 : Torpeur
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Lorsque ce matin de fin septembre la pluie se mit à tomber, la nature assoiffée souffla de soulagement. En effet, depuis le mois de juin, la canicule qui régnait avait asséché les eaux et la végétation habituellement luxuriante de la Grande Bretagne. Jauni par une sécheresse exceptionnelle le parc de Poudlard était désert et les étudiants évitaient de sortir lorsqu'ils le pouvaient. Les cours de botanique étaient une torture pour tous tant il régnait dans les serres une chaleur étouffante. Ce soir Harry sortirai la cape de James pour la première fois cette année et irai dans le parc profiter de la pluie. La journée passa très vite entre les cours de potion, de divination et de métamorphose.
Les soins aux créatures magiques clôturaient cette journée et tous les élèves présents s'accordèrent à dire que leur nouveau professeur était terriblement compétent dans ce domaine. Même les odieux Serpentard avaient été silencieux et attentifs. Le cours débuta avec un questionnaire de mise au point sur leurs connaissances et les corrections commentées alimentèrent une bonne partie de cette double plage horaire que constituait l'après-midi de cours. Satisfaite de la grande majorité de ses élèves Fionna retint Hermione et Neville à la fin du cours. Puis arriva l'heure du repas, celle des devoirs et révisions et enfin l'heure du coucher.
Harry attendit que tous s'endorment et glissa de son lit sans bruit. Lorsqu'il fût sûr que tous ses camarades dormaient, il s'enveloppa dans la cape de James et descendit, pieds nus, pour rejoindre la cabane de Hagrid qui n'était pas à Poudlard en ce moment. Il s'étendit sur l'herbe à l'orée de la foret interdite après avoir posé la cape de son père à ses cotés. Etendu en pyjama, il écoutait la nature boire cette eau bienfaitrice et l'herbe crisser en se gorgeant du précieux liquide. Une branche craqua et Harry se couvrit aussitôt de la cape de son père dans l'espoir que ce bruit, provenant de la foret, était simplement un animal ou un Auror patrouillant dans la nuit.
Malheureusement pour lui, la douleur soudaine lui indiqua qu'il n'en était rien. Surprit, il hurla. Sans bruit. Qui était le sorcier qui avait jeté le sort ? Où était il ? Puis cette voix douce et belle, curieusement glacée, qu'il connaissait maintenant très bien tomba dans les oreilles du jeune garçon.
- Harry Potter, quelle heureuse rencontre ! Comment te portes tu ? ah oui, j'oubliais.
La douleur disparut aussi soudainement qu'elle était apparue.
- Je disais donc comment te portes tu en cette soirée de pluie ?
Comment cette voix dure et froide pouvait elle être la sienne. Il l'avait tant entendue qu'il la connaissait par cœur, les inflexions musicales, l'accent léger, tout avait disparu pour laisser la place à un ton glacé et mordant. Non ce ne pouvait pas être elle, c'était une imitation qui cherchait à le dérouter, à lui ôter ses repères et ses convictions.
- Eh bien, est-ce ainsi que tu m'accueilles ? Allons viens dans mes bras, appelle moi ! Je sais que tu m'as reconnue. Dit la voix déçue. Tu ne veux pas venir me voir, n'est ce pas ? De quoi as-tu peur, tu sais ce que je suis venue te dire…
- Viens Harry, rejoins nous, rejoins le Seigneur des ténèbres. Tu sais que c'est le mieux pour toi. Epargnes-toi des souffrances, vient avec moi que je t'emmène à lui.
- Jamais ! Hurla Harry incrédule face à la sorcière qui se tenait devant lui, lui ayant ôté la cape comme si elle voyait à travers. Je préfère mourir qu'être partisan de Voldemort !
- Soit tu as fait ton choix, tu mourra donc de mes mains. Dit elle d'un air déterminé. Mais je ne veux pas que tu penses que je suis indulgente avec toi simplement parce que nous sommes liés, tu mourras donc dans la douleur !
- « Doloris »
La douleur fut violente, fulgurante, encore plus intolérable parce que c'était elle qui en était la cause. Harry rassembla ses forces pour contrer la sorcière, pourquoi n'avait-il pas pris sa baguette ? Il cria, allant chercher dans ses derniers retranchements les dernières bribes sa volonté mourante.
- Non pas moi, tu ne peux pas me faire ça à moi ! Hurla t-il.
- Avada, le coupa–t-elle.
- Non maman, pas moi, non ! Sirius ! Cria t il encore plus fort, désespéré.
- Kedavra ! Dit simplement Lily.
La lumière verte sorti de la baguette de Lily et frappa Harry de plein fouet. La douleur mourut et le noir vint. Vide, irrémédiable. Fini, le dernier Potter était mort. Ravagé par la rage et l'impuissance Harry se terra au fond de la forêt interdite des mois durant. Ne sortant que le soir pour voir ses amis de loin et suivre leur parcours. Draco était revenu et avait rejoint les mange-morts, Harry n'étant plus là pour lui expliquer. Hermione de Ron s'étaient rapproché encore plus et se soutenait, pour ne pas sombrer dans la douleur inextinguible occasionnée par la perte de leur ami. Ginny était inconsolable et elle et Cho passaient leurs soirées ensemble à se souvenir. Le collège s'était éteint avec la deuxième mort d'un élève en quelque mois. Plus personne ne souriait et les jumeaux Weasley ne trouvèrent plus goût ni à la blague ni aux bêtises. L'année passa avec sa coupe d'Europe junior de Quidditch, l'Italie remporta la coupe, ainsi que les serpentards, Harry l'Attrapeur n'étant plus là pour aider l'équipe à son poste. Denis Crivey l'avait remplacé mais rien n'était plus pareil. Les examens arrivèrent et Harry décida de sortir de son refuge pour aller partager les festivités de fin d'année. Il croisa Hagrid en sortant de la forêt.
- Harry ! Harry ! Cria-t il surpris de le voir.
Le noir à nouveau.
- Harry ! Harry ! Réveille toi, parle moi ! Sirius secouait son filleul. Steward, Lonny, mais où êtes vous tous ? Daedalus, Harley, au nom de Merlin bougez vous !!!
- Sirius, qu'est ce qui se passe ? Cria Remus en accourant avec Fionna à sa suite.
- Remus, le directeur, l'infirmière vite !
Sirius, paniqué hurlait ses ordres à ses Aurors qui courraient en tous sens pour trouver ce qui avait bien pu attaquer son filleul. Il avait encore Harry dans les bras, crispé sur son pyjama. Harry apparemment sans vie ne réagissait plus.
- Sirius, lâche le. Fionna parlait d'une voix douce et rassurante mais d'un ton ferme. Laisse moi faire.
Elle poussa vivement le parrain de son filleul et s'assit sur ses pieds. Elle souleva son pull pour découvrir une marque minuscule, en forme de haricot, qu'elle portait au dessus du nombril. Elle toucha la marque et posa sa main sur la poitrine de Harry, juste au dessus du cœur. Une lueur bleue presque blanche apparut sous les mains de Fionna. Elle renversa la tête en arrière et chanta doucement, un chant que personne ne comprit et dont on n'entendait presque pas les paroles. Brutalement elle pâlit et hurla si haut dans les aigus que seul Sirius entendit le son. Il se boucha les oreilles par réflexe.
Le cri de Fionna mourut dans sa gorge et elle haleta. Elle paraissait à bout de forces, le visage crispé et le front couvert de rides de concentration. La lumière faiblit et Fionna gémit pour rassembler ses forces. La lumière s'intensifia et elle souleva sa main pour la retourner toujours au dessus du cœur de Harry. Une petite bille noire apparut dan cette main et elle vibra puis grossit. Arrivée à la moitié de la taille d'un cognard, elle cessa de grossir et Sirius remarqua qu'elle semblait faite de vide, de néant. Elle vibra de nouveau avec un brouit sourd, un sifflement très grave, comme une pulsation de cœur. La vibration s'amplifia et la balle explosa. Fionna s'écroula et haletant mais retint Sirius qui s'approchait d'elle inquiet.
- … vais bien, … quiètes pas … Dit elle dans un souffle.
- Fionna qu'est ce que, commença le directeur du collège.
- … sauvé, … aller mieux, …sortilège, … puissant… dit elle, puis elle s'évanouit.
Dumbledorre fit apparaître deux brancards et y plaça le filleul et la marraine tous deux inconscients. Sirius ne pouvant rien faire pour Harry et Fionna rassembla ses troupes et fouilla l'ensemble du domaine pour trouver des indices. Pendant ce temps, Fionna fut allongée sur un lit avec un cataplasme à base de sang de dragon et de plantes, tandis que Harry atteint d'une torpeur incompréhensible et insoluble par l'infirmière avait simplement été recouvert d'un drap et d'une couverture après avoir été changé parce que trempé par la pluie. Pompom fut devant le seul et unique échec de sa carrière d'infirmière au collège.
Le lendemain matin, Fionna, fraîche et dispose à comprendre le mal qui touchait son filleul, proposa à madame Pomfresh de lui faire partager son savoir en matière de soins, savoir qu'elle avait acquis en voyageant à travers le monde magique dans des lieux peu explorés jusqu'à présent. Pompom accepta.
Pendant ce temps, une forme fantomatique arpentait un lieu vide de sens et de matière. Tout était noir, inconsistant et impalpable. La forme errait sans comprendre, cherchant dans sa mémoire pourquoi il était là et où donc il pouvait être. Il chercha encore plus profondément dans sa mémoire et se souvint brusquement de son prénom.
- Harry, je m'appelle Harry. Harry Potter. Oui ! c'est ça ! Mais je n'arrive pas à me rappeler où je suis et qui sont mes parents, ma famille. C'est si difficile !
Un sentiment violent, noir envahit son esprit. Une envie irrépressible de trouver quelque chose dans ce néant sur lequel décharger cette chose qu'il ressentait et qui était trop grande pour lui. Il rageait sans même savoir que ce sentiment portait ce nom. Brusquement, une voix l'appela.
- Harry ? Tu m'entends ?
- Oui, mais qui êtes vous ? répondit-il
Il se retourna. L'homme qui se tenait devant lui avait dans les trente cinq ans, les cheveux noirs en bataille, avec des lunettes. A bien réfléchir, il lui sembla que ce visage lui était familier. Mais qui était cet homme ? Harry était de plus en plus agacé.
- Harry tu ne me reconnais pas, n'est ce pas ?
- Non, monsieur, je ne vous reconnais pas.
- Je suis James Potter, ton père. Bonjour, fils.
- Bonjour, papa ? L'homme sourit. Pourquoi suis-je ici ? Où suis-je ?
- Tu es dans l'antichambre de ton esprit mais pas avec ton corps, ni à l'intérieur. Tu es ici pour réapprendre. La colère, par exemple, qui m'a faite apparaître d'autres choses aussi. Tu dois réapprendre à être un sorcier Harry. Tu dois tout réapprendre. Seulement tu dois savoir une chose. Toi seul peux faire ce chemin. Personne, pas même moi ne peut t'aider. L'expérience ne se transmet pas, mon fils, elle s'acquiert. Je vais te laisser maintenant. Tu peux y arriver, tu es fort. Adieu Harry.
- Papa, revient cria Harry.
Mais James disparut ne laissant à Harry que le souvenir incertain de la présence de son père. Un peu comme un rêve dont on se souvient sans être tout à fait endormi ni tout à fait réveillé. Puis il pensa à ce que son père lui avait dit. Maman. Ce mot sauta dans son esprit. Il chercha à visualiser à quoi elle pouvait bien ressembler. Le noir devint bleu sombre mais il ne s'en aperçut pas tant la pensée de voir sa mère envahissait son esprit.
Au même moment, dans le bureau du directeur, le rituel de transmission des savoirs prenait fin. Fionna sortit, vacillante, sans rien dire, et madame Pomfresh s'écroula de fatigue. Rémus la porta à l'infirmerie ou elle prit un léger remontant puis s'activa à trouver un moyen d'aider Harry dans son voyage. Les méthodes de guérison des tribus primitives étaient fortement instructives. Mais concernant Harry tout soin serait forcément expérimental. Elle fit appeler Sirius auprès d'elle et lui tendit un parchemin sur lequel elle avait noté toutes les substances dont elle aurait besoin pour élaborer une potion susceptible d'aider le jeune Potter.
Un matin très tôt, quelqu'un fut amené à l'infirmerie de Poudlard. On tira un paravent après l'avoir mis au fond de la salle, à l'abri des regards des éventuels visiteurs. Hermione, Ron et Ginny qui visitaient Harry chaque jour n'y prirent pas garde.
Hermione toujours penchée dans les livres faisait pour Harry des résumés très précis des cours qu'il manquait. Ron avait demandé à Parvati et Lavande de faire de même pour la divination, qu'Hermione n'étudiait plus. Ginny venait donner des nouvelles des rumeurs et bruits de couloir, qui amplifiaient les dires de Rita Skeeter concernant l'état de celui qui avait survécu.
Tous s'accordaient à dire que la santé fragile de Harry se dégradait et qu'il avait certainement perdu l'esprit également. Ce qui expliquait pourquoi il était absent des cours depuis une semaine. La coupe de Quidditch avançait bien et le match Gryffondor - Serdaigle avait été reporté le temps de savoir si il fallait remplacer Harry dans l'équipe ou si il reviendrait à temps pour la coupe.
Sirius vint pour visiter son filleul et rappela aux jeunes gens que les cours avaient reprit depuis cinq minutes et que même à l'infirmerie on pouvait entendre la sonnerie ponctuant le début et la fin de chaque leçon. Hermione et Ron se levèrent d'un seul chef et sortirent en courant pour rejoindre le cours de Métamorphose, qui malheureusement était un double cours cet après-midi. Mc Gonagall serait furieuse. Ginny s'apprêtait à partir lorsque Sirius la rappela.
- Viens ici un instant, je dois te parler de quelque chose d'important. Dit il à Ginny.
- Bien sûr professeur, qu'y a-t-il ? demanda t elle intriguée.
- Assied toi. Tout d'abord je voudrais te demander si tu as déjà réfléchi à la carrière que tu souhaiterais exercer plus tard.
- Je te trouve particulièrement douée pour les potions même si le Professeur Rogue ne te faisait jamais entendre qu'il était satisfait de toi. J'ai besoin, à cause de ma double fonction au collège, d'un assistant en potions. Tu aurais pour mission de passer le matin et le soir préparer la salle de cours et ramasser les échantillons de potions pour les devoirs ainsi que de classer les dissertations que chaque classe doit me rendre.
- De plus je souhaiterai que tu interviennes pendant mes cours avec les premières années deux fois par mois, ce qui me permettrait de me rendre à Londres, au ministère. Acceptes-tu ?
Ginny hocha la tête pour accepter la proposition de son professeur.
- Merci. Tu peux aller en cours maintenant.
- Professeur ? Murmura t elle.
- Oui ? dit Sirius étonné.
- C'est vous qui devez assurer mon cours maintenant, dois-je dire à la classe que vous serez en retard ?
- Hum, non. Porte ceci au professeur Lupin pour moi. Dit il en lui tendant un parchemin qu'il avait hâtivement griffonné tout en lui en parlant.
- Oui, Professeur. Elle sorti précipitamment en faisant voleter sa robe au couleur des Gryffondor.
Assis sur le lit de son filleul, Sirius ébouriffa ses cheveux, dans la mesure où cela pouvait se faire, en souriant. Lui disant qu'il avait raison de l'avoir mise dans son cœur. Quelle jeune fille merveilleuse, comme Lily. Belle, généreuse oui il avait choisi la compagne idéale. Le savait-il seulement ? Sirius doutait qu'Harry ait conscience de ce qui naissait entre eux deux. Peu importait, il avait une mission trop importante pour s'intéresser à l'amour ou du moins aux prémices de celui-ci.
Harry devait à tout prix survivre et une fois prêt, lui et les trois autres héritiers devraient combattre le seigneur des ténèbres et seulement, à l'issue de ce combat, il aurait tout le reste de sa vie pour s'occuper de tout ce qui préoccupe les autres. Ceux qui n'ont pas le souci de la survie du monde. Pourquoi avait il fallu que James disparaisse et le laisse avec de si grosses responsabilités ?
Sirius repensa aux années qu'il avait passées avec ses amis au sein même de ce collège. Aux moments si précieux qu'il avait partagés avec James, son ami, son frère et dont il n'avait pas su profiter. Son regard s'assombrit et une brume de larmes illumina ce regard d'une lumière pleine de regrets et de désespoir.
- Rien de ce que tu as vécu ne mérite une telle torture Sirius. Fionna qui avait approché sans bruit, posa ses mains sur les épaules de Sirius. Malgré toutes ses années loin l'un de l'autre je suis encore capable de te sentir. J'ai pu sentir ton désespoir depuis le bout du couloir. Tu devrais faire attention, cela te desservira. Un jour, ce ne sera pas moi qui serai touchée et tu mourras.
- Je sais cela Fionna, mais sincèrement, je suis déjà mort depuis quatorze ans. Je suis mort le jour où James a été tué. Dit Sirius, le ton mélancolique.
- Sirius reprend toi, tu as la responsabilité de Harry maintenant, James te l'a transmise le jour où tu as accepté d'être son parrain. Tu dois être fort pour lui, pour que James ne soit pas mort pour rien. Et, juste au cas où tu l'aurait oublié, j'ai moi aussi perdu un être cher dans cette histoire. Je suis désolée de devoir te le rappeler mais Lily était ma cousine !
- Je sui désolé, Fionna. Mais parfois je me sens si…
- Incompétent ? Je sais ce que tu ressens Sirius, mais maintenant que Harry est grand, c'est à nous de l'aider. Tu es autant son père que James, il vit chez toi à présent. Reprends toi !
- Si seulement je pouvais l'aider à sortir de sa torpeur, trouver un moyen de le réveiller. Cria t il.
- Professeur Black ! Vous êtes dans une infirmerie ici. Baissez d'un ton s'il vous plait. Madame Pomfresh les poings sur les hanches apparu dans l'encadrement de la porte de son bureau le visage furieux.
- Mille excuses Pompom, dit Sirius.
Fionna sourit, elle savait ce qui se passait mais ne pouvait en parler en personne. Ils ne résisteraient pas à au désir d'intervenir. Et s'était la dernière chose à faire. Elle soupira et dit au revoir à Sirius en sortant. Ce dernier passa l'après midi à l'infirmerie auprès du jeune Potter pendant que les élèves dont les cours de potions avaient été annulés étudiaient à la bibliothèque sur son ordre.
