Chapitre 6 : le soutien inattendu

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Si on avait dit à Ginny qu'un jour elle se verrait invitée à une cérémonie sensée décerner l'ordre de Merlin première classe à Lucius Malfoy, elle aurait ri aux éclats au visage du plaisantin. Et pourtant elle était là, devant ce miroir, dans sa longue robe de soie blanche à tortiller nerveusement son mouchoir brodé par sa mère.

Elle était nerveuse, atrocement nerveuse, à l'idée d'aller remettre cette médaille à l'homme qu'elle haïssait encore, malgré tout ce qu'elle savait maintenant de son histoire. Et Luna qui avait osé lui dire qu'elle était amoureuse et qu'elle devait arrêter de se voiler la face. Non, concevoir une telle chose était impossible. Elle ne pouvait tout simplement pas être amoureuse d'un être aussi froid et abject que Lucius Malfoy.

Et maintenant, dans moins de cinq minutes, elle allait devoir remettre cette maudite médaille à « Hawk Eye » pour services rendu à la nation sorcière. C'était son poste de chargée de communication et évènements qui le voulait. Un poste qu'elle soupçonnait avoir été créé pour elle quand elle avait quitté le département des relations internationales magiques.

Elle se souvenait parfaitement du jour où elle avait reçu l'invitation, de qui et surtout comment la réception avait pu avoir lieu. En y repensant…

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Quelques semaines plus tôt

Ginny et Lucius ne s'étaient pas revus depuis la démission de la jeune Weasley. C'est à dire environ trois semaines plus tôt. La publication du Chicaneur avait remué un certain nombre de choses dans le monde magique. Lucius revenait au devant de la scène journalistique, mais cette fois on le portait en glorieux combattant. Draco arrivait difficilement à se faire à son statut de fils du héros national, et Lucius regardait toute cette célébrité de tabloïd avec dégoût.

Il adorait être le noble Lucius Malfoy, héritier de la plus ancienne et la plus pure famille sorcière, il détestait être le « pauvre homme bafoué de ses droits ». Il finissait par faire pitié aux gens qu'il croisait et plus que toute autre chose, Lucius Malfoy abhorrait la pitié. Oubliés les crimes et les viols, oublié le personnage hautain et insupportable il n'était plus que « l'agent secret injustement privé de ses droits » par notre gouvernement si peu reconnaissant.

Tout cela le faisait rager. Lui et son fils ne pouvaient plus sortir sans avoir des photographes devant chez eux où à la sortie du théâtre. Fatigué, il avait fini par démissionner lui aussi de son poste attribué par le ministère et même son statut d'agent en attente de mission avait été remis en cause. Il était privé de tout et avait fini par s'enfermer chez lui.

Trois semaines après, un communiqué de la chargée de communication fait à la presse présentait ses excuses à Lucius Malfoy pour le regrettable oubli de ses missions exemplaires dans les guerres contre le seigneur des ténèbres. Le communiqué disait aussi que l'Ordre de Merlin Première Classe lui serait remis dans le courant du mois de Septembre.

Lucius avait déboulé dans le bureau du ministre pour hurler à la provocation. Comment pouvait on l'oublier pendant près de trente ans et lui glisser dans les mains une médaille en guise d'excuse. Inadmissible ! Il ne s'était pas assez vendu à son pays ? On croyait l'acheter avec une misérable récompense ? Pour qui le prenait on ?

Finalement, il avait accepté, son fils le lui avait demandé. Il avait dit que c'était une occasion de laver l'honneur des Malfoy. De toutes les façons, dans quelques siècles on ne retiendrait que son nom et sa fichue médaille, pas la manière dont il l'avait obtenue. Au grand désarroi de Ginny, il avait prit son parti de l'affaire et la réception aurait lieu devant des dizaines de journalistes et des centaines de privilégiés.

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Retour au présent

La porte des toilettes se referma doucement sur Virginia Weasley qui tremblait comme une feuille. Sa mère l'attendait et lui serra la main tendrement entre les siennes pour l'encourager puis la laissa partir après avoir ajusté les lacets du dos de sa robe. Ginny récupéra la médaille des mains de son assistant et s'élança dans la foule des gens qui attendaient.

La pièce était grande et claire, dépourvue de toute décoration autre que les tableaux des plus illustres détenteurs de l'Ordre. Une estrade avec un pupitre, deux fauteuils de bois qui n'avaient rien à envier à celui du directeur de Poudlard dans la grande salle et dans le fond, près de l'entrée, deux grandes tables pleines des victuailles prévues pour la réception étaient les seuls meubles qui trônaient. Dehors, les milliers de personnes qui n'avaient pas obtenu d'invitation profiteraient de la cérémonie depuis les baies vitrées ou sur l'écran géant à l'aide d'un projecteur magique. Après tout, les nuits étaient encore agréables en cette fin d'été.

- Mesdames, mesdemoiselles, messieurs. Ginny commença son discours d'une voix chevrotante. Nous sommes ici pour remettre l'Ordre de Merlin au grade de Première Classe à Lucius Dragan Malfoy pour ses activités au sein de l'unité des services souterrains. Personne n'avait jamais entendu parler de Hawk Eye, jusqu'au moment où les farfouilleurs (un murmure s'éleva dans l'assemblée) du Chicaneur mirent au jour le dossier n°102 435 des archives du département des Aurors et de la défense magique.

- Chers amis du chicaneur, reprit elle après un moment, pardonnez moi les propos peu élogieux à l'encontre de votre journal, car sans vous il n'y aurait pas de remise de médaille. Sans vous, ce soir je ne m'apprêterais pas à décorer d'une des plus prestigieuses récompenses un homme dont le travail a outrepassé le simple devoir.

- Lucius Malfoy a donné sa vie pour son pays, laissant de côté sa famille et sa réputation d'homme de droiture et d'honneur au bénéfice d'une couverture de mangemort parfaite. Je ne vais pas vous dire ce soir que Lucius est un homme parfait…

Draco, loin de la foule sortit discrètement, il ne voulait pas entendre les crimes et autres exactions que son père avait pu commettre dans l'autre camp. Il ne voulait pas se rappeler tout ce que cette mission avait gâché de sa vie. Il refusait à sa mémoire le plaisir ou le soin d'évoquer sa mère malade et malheureuse qui s'était suicidée un matin d'hiver alors qu'il était à l'université, ou la furtive image de Pansy et Harry étendus l'un près de l'autre sur le champ de bataille alors que son père était emmené par les Aurors survivants au combat. Il refusait de sentir l'odeur de la mort qui imprégnait son amie et l'amant de son cœur alors qu'il approchait d'eux. Il niait sa douleur ou plutôt, il refusait de l'admettre légitime. L'amour était un concept trop virtuel pour qu'il le fasse sien.

Lentement, il enfila la cape de lin blanc qui allait à la perfection avec son costume de soie de même couleur. Il ajusta sa cravate noire sur sa chemise toute aussi noire et attacha la lourde double chaîne d'argent qui maintenait les deux pans de sa cape solidairement. Il gravit lentement les escaliers qui menaient à l'étage et continua sa course jusqu'à un une porte d'acier qui menait au toit. Arrivé devant le battant de fer, il crut ne jamais parvenir à tourner le bouton de la poignée.

Finalement, la porte céda devant sa détermination. Il voulait être loin de tout cela, loin de ce monde hypocrite pour lequel les seuls êtres qu'il avait aimés étaient morts. Loin de ces souvenirs de guerre et de souffrance. Il devait effacer à tout prix la mémoire de ce père froid et de cette mère fatiguée de vivre, il devait écraser à jamais l'existence vide et froide qu'il avait menée jusqu'à sa découverte des sentiments.

La seule chose qui soit parvenue à réchauffer son cœur c'était l'amitié de Pansy et le secret amour qu'il vivait pour Harry. Les seules fois où il avait ressenti quelque chose qui le rendait plein et entier avaient été effacées de sa vie comme un coup de craie sur un tableau. Oui, c'était la solution, la seule peut être. S'effacer de la vie tel un coup de craie essuyé d'un coup de baguette magique.

Il s'avança, dans la douceur de cette nuit de fin d'été. Les lucioles, ou alors étaient ce des fées, se promenaient en myriades de points lumineux, tels des flocons de neige illuminés. Oui, c'était une belle nuit pour mourir, pour rejoindre Harry et Pansy. Peut être qu'il y avait un ailleurs où ils pourraient enfin être amis.

Une légère brise souleva le lin et le fit frissonner, il se sentait fiévreux, il l'était peu être après tout. Doucement il posa un pied sur le léger parapet et l'autre le rejoignit Il tourna le dos au vide. En bas, il avait pu voir la petite cour qui succédait à l'entrée, au moins il ne s'écraserait pas dans les jardin noirs de monde venus admirer la remise des médailles.

Une grande acclamation monta de la salle des récompenses. Il profita du tumulte pour lancer un cri d'amour à son amant disparu et bascula dans le vide, les bras en croix et le dos tourné vers le sol. Des larmes brûlaient ses yeux et il chuta silencieusement, sans peur ni regret.

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Hermione était en retard, elle le savait. Elle courrait depuis vingt minutes quand elle déboucha dans la cour, elle se rendit compte que quelque chose clochait. Une forme blanche dégringolait la façade, un mannequin vêtu de blanc. Une intuition lui chuchota qu'il ne pouvait pas s'agir d'un mannequin. La farce serait trop terrible aujourd'hui pour que ce soit un pantin.

Sans réfléchir elle hurla un sort qui amortirait le choc du corps heurtant le sol. Une sorte de matelas gonflable qui se dégonflerai avec la force de l'impact, limitant les dommages a un simple doigt cassé dans le pire des cas. Mais ce soir le sort semblait s'acharner. Si Draco ne parvint pas à mettre fin à ses jours par l'intervention d'Hermione, elle ne formula pas correctement son sort et le matelas de magie se révéla trop fin.

Quand il s'évanouit, elle était déjà près de celui qu'elle avait sauvé. Elle trouva le corps enveloppé de sa cape, qu'elle ouvrit délicatement. Le blanc était maculé de rouge, ce rouge poisseux dont elle connaissait parfaitement l'odeur ferreuse. Elle examina chaque partie du corps, ne voyant aucune blessure. Elle paniqua, une telle tâche de sang ne laissait présager qu'une blessure d'une gravité telle qu'elle ne pourrait rien faire. Elle vérifia elle pouvait bouger l'homme sans causer de blessures plus graves, et remercia ses parents de l'avoir poussée à étudier les médecines magiques.

- Harry… Murmura une voix qu'elle connaissait trop bien et qu'elle préféra ignorer pour se consacrer aux blessures.

- Harry, suis-je enfin mort ? Murmura le jeune homme.

- J'espère que non, Malfoy ! Lui jeta la voix e Hermione.

- Granger, dit il d'une voix brisée. Pourquoi ?

- Parce que le devoir d'un médecin est de sauver des vies ! Tu peux essayer de t'asseoir ? Il obtempéra docilement.

- Rien de grave, une simple coupure, elle saigne beaucoup mais tu survivras.

- Et si je ne voulais pas ! Cracha t il.

- Ton geste était stupide ! Dit elle. Pourquoi agir ainsi alors que ton père, ta famille allez être réhabilités ?

- Je voulais juste rejoindre ceux que j'aime. La tristesse et les sanglots naissants voilaient sa voix autrefois froide et distante.

- Ce n'est pas honorer ta mère et Parkinson que de te donner la mort.

- Il ne s'agit pas de Mère. Murmura Draco. Je ne me souviens l'avoir jamais vraiment aimée. C'était …

- Qui ? Osa t elle demander tout en sachant que la réponse ne lui plairait pas.

- Ha…

Il éclata en sanglots lourds, entrecoupés de gémissements douloureux. Il tomba dans les bras de l'aspirant médicomage et empoigna sa robe de soirée. Elle resta les bras ballants, surprise et désemparée. Il enfouis son visage dans le creux de son ventre chaud et pleura, un temps qui paru éternel. Finalement, il réussit à lui parler.

- Si tu savais à quel point je l'aimais… Dit il entre deux sanglots

- Mais de qui parles tu à la fin ? S'énerva la jeune fille.

- Harry. J'aimais Harry Potter. Bizarrement, la révélation le soulagea plus que quand il avait parlé à son père. La seule personne que j'ai véritablement aimée est morte avant de le savoir. Vois tu l'ironie ? Ses sanglots redoublèrent. Je veux mourir ! Pour le rejoindre enfin.

- Draco ! Hermione se sentit curieusement touchée par le désespoir de son ancien ennemi.

- Laisse moi Granger, tu ne peux plus rien pour moi. Parvint il a articuler avant de sombrer dans ses bras une fois de plus.

- Allez, reprends toi. Viens ! On va y aller. Lui dit doucement Hermione en se levant puis en l'aider à se redresser.

- Je ne veux pas les voir. Dit Draco. Je n'ai plus la force d'être heureux depuis longtemps.

- Je ne t'ai pas dit que nous allions là bas. Lui dit elle doucement. Ce soir, tu vas venir chez moi, je soignerais cette plaie et si tu veux, on parlera de Harry.

Alors que Ginny serrait la main de Lucius Malfoy après avoir accroché l'Ordre à son costume impeccable, Draco quittait l'immeuble soutenu par Hermione Granger qui le guidait vers chez elle.

A suivre

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Les reviews :

To Ivrian : Ah, comme j'espère que ce chapitre est à ton goût. Dis moi le ! Voilà le résultat d'une conv' très prolixe en idées en tout cas.

To Alisa : Ne te gêne pas pour prendre place dans mon salon de lecture alors, si tu aimes tant me lire… On rencontre des gens passionnants.

To Lisandra : Désolée, pardon pour l'orthographe. Est là, c'est tout chaud !

To Sohaya : Et la suite tu le trouve comment ???? Belle aussi ???

A tous mes lecteurs invisibles (bon ok, pas si invisibles que ça vu que je sais que vous êtes là), le petit bouton bleu à la fin, il est là pour que vous postiez vos observations ou désirs, autrement appelés reviews. N'hésitez pas, je n'ai jamais mangé un seul lecteur, je le jure.