Le temps était nuageux, la pluie menaçait mais Tornade n'avait pas la force d'y remédier, et puis que voudrait dire le soleil pour un jour comme celui-ci ? Là, la nature semblait compatir…ou bien faire preuve de cruauté, tout dépendait la manière de le voir.
La clairière, située sur une légère butte, était entourée d'arbres clairsemés et donnait sur le bout du lac longeant l'immense propriété de l'Institut Xavier. Un mémorial de pierre gravée avait été apporté en début d'après-midi par le Fauve et placé face à l'étendue d'eau où il serait témoin chaque soir d'un superbe coucher de soleil. La plupart des élèves jetaient des œillades compatissantes au Docteur Grey, qu'ils revoyaient pour la première fois depuis quatre jours. La Jean souriante du lundi matin avait disparue, celle qu'ils avaient devant eux n'était plus que l'ombre d'elle-même. Le teint pâle, des larmes silencieuses glissant le long de ses joues, le regard rivé sur ce monument qui officialisait ce qui jusqu'à présent aurait pu n'être qu'un cauchemar, elle était soutenue par Ororo, qui avait préféré ne pas la lâcher de peur qu'elle ne s'écroule.
Jean était consciente que plusieurs personnes rendaient leurs hommages à Scott, saluant l'homme, le frère, l'enseignant ou le leader des X-Men, mais elle ne parvenait pas à saisir leur sens, simplement leurs émotions qui venaient se rajouter aux siennes. Elle avait l'impression d'être là sans vraiment l'être, de se trouver comme projetée dans une autre dimension, comme si son esprit voulait se détacher de cette réalité qu'elle ne pouvait accepter. Les larmes, elle pensait ne même plus en avoir, mais pourtant elles continuaient à perpétuellement glisser le long de ses joues elle serrait dans ses mains la tige de la rose rouge qu'on lui avait remise à elle ainsi qu'à toutes les autres personnes présentes.
Les hommages devaient avoir touché à leurs fin, un silence pesant les avait remplacés, perturbés simplement par quelques sanglots ça et là. Après cette minute de silence, chacun à son tour déposa sa rose au pied du mémorial dans un interminable cortège funèbre.
- « Jean ? » l'interrogea doucement Ororo en accompagnant ce nom d'un mouvement de tête vers le monument.
La jeune femme ferma brièvement les yeux et secoua doucement la tête, elle n'était pas prête, pas tout de suite. Tornade respecta sa volonté et –après s'être assurée que Logan n'était pas loin– lâcha son amie pour aller placer à son tour sa rose sur le marbre de cette tombe symbolique. Au passage, elle échangea quelques mots réconfortants avec Alex qui venait de faire ses adieux à son frère pour la deuxième fois de sa vie. Le jeune homme se tourna alors vers sa petite amie et se dirigea seul vers Jean, l'âme sœur de son grand frère. Il savait qu'aucun mot ne pourrait décrire ce qu'il ressentait, alors il la serra simplement contre lui et elle fit de même avec les forces qui lui restaient. Alex sentit les larmes de la jeune femme humidifier sa chemise et laissa s'écouler quelques-unes des siennes. Après quelques instants, il défit son étreinte, prit ses mains dans les siennes et lui dit en réussissant à capter son regard :
- « Courage »
Un simple mot, mais elle n'aurait guère pu en supporter plus. Elle se mordit la lèvre inférieure, tentant de réfréner ses larmes, et hocha doucement la tête. Alex posa une dernière fois sa main sur son épaule et rejoignit les autres qui s'étaient reculés pour laisser la place à la jeune femme.
Jean sembla hésiter quelques instants mais finit par s'avancer à son tour vers la dernière demeure de son amour. Pour les personnes présentes –excepté pour le Professeur Xavier dont la télépathie fut avertie par une forme de bourdonnement qu'il reconnu tout de suite–, elle resta silencieuse, mais ce n'était pas le cas les quelques mots que Jean déclara, elle le fit à travers ce lien qui la liait à Scott et qui désormais demeurerait vide à jamais. Elle déposa à son tour cette rose qu'elle avait tant serrée dans sa main, commença à se relever dans l'intention de passer ses doigts sur la pierre, mais ne se souvint pas l'avoir fait, et pour cause…Une exclamation secoua le groupe, alors que la jeune femme s'écroulait sur le sol.
- « Nom de dieu ! » s'écria Logan en la rejoignant rapidement, suivit de Hank et Ororo, les mouvements du Professeur étant handicapés par son fauteuil.
- « Jean ? »
- « Est-ce qu'elle va bien ? » s'enquirent quelques élèves.
Ils n'obtinrent pas de réponse. Déjà le Docteur Mc Coy vérifiait les fonctions vitales de Jean mais ne trouva rien d'alarmant.
- « Ce n'est rien. L'émotion et l'hypoglycémie conjuguées n'ont simplement pas plu à son organisme, c'était plutôt prévisible » dit-il en la soulevant comme si elle ne pesait que quelques grammes.
Il se tourna vers le Professeur :
- « Je l'emmène à l'infirmerie et vais la mettre sous perfusion pour lui faire reprendre des forces. »
Charles acquiesça et laissa Hank s'éloigner.
- « Ne vous inquiétez pas, elle va bien, ce n'est qu'un léger malaise » dit-il à ses élèves pour les rassurer.
Guidés par Tornade, le groupe de mutants commença à rentrer vers l'Institut, laissant le Professeur faire à son tour ses adieux à Scott, celui qu'il avait considéré comme son fils durant toutes ses années. Logan resta respectueusement en retrait, attendant que le puissant télépathe ait terminé pour l'assister durant le trajet de retour, les roues du fauteuil ayant tendance à patiner sur le gazon qu'une pluie fine recommençait à arroser.
Alex ne s'attarda pas à l'Institut et repartit le soir même pour Hawaï avec son amie, après avoir salué ceux que Scott considérait comme sa famille et s'être assuré que Jean allait physiquement mieux, demandant qu'il lui soit dit qu'elle pouvait l'appeler à tout heure si elle en ressentait le besoin.
Quelques minutes après le dîner, Logan partit faire un tour en moto sans vraiment savoir combien de temps celui-ci durerait et le Professeur convoqua Tornade et le Fauve dans son bureau, lesquels ne tardèrent pas à arriver :
- « Ororo, Hank, je vous ais demandé de venir car j'aimerais que vous repreniez les cours dès demain je crois qu'il n'est pas bon de laisser les élèves inactifs, il faut leur occuper l'esprit, leur montrer que la vie continue »
- « Oui, je suis assez de cet avis » acquiesça Mc Coy « Nous pouvons recommencer doucement les premiers temps. »
- « Je doute de toutes manières qu'ils parviennent à beaucoup se concentrer » fit remarquer Ororo.
- « Au début sûrement » concéda Charles avant de poursuivre « Je me chargerais de reprendre la classe de Scott, en attendant qu'un des élèves les plus doués dans cette matière prenne le relais, auquel cas je me contenterais de le ou de la seconder. Je m'occuperais également des élèves pourvus de pouvoirs psychiques dont Jean avait prit la charge, jusqu'à ce qu'elle se sente prête à reprendre leur entraînement »
- « Et moi je me chargerais de sa classe hebdomadaire de génétique» proposa Hank « Après tout, ce doit être dans mes cordes »
Le Professeur acquiesça d'un mouvement de tête.
- « Bien, je vais aviser les élèves par télépathie que les cours reprendront demain matin à 9h. Pour les sessions dans la salle des dangers, nous verrons un peu plus tard. Quoiqu'ils en soit, ils savent qu'ils peuvent venir nous parler s'ils en éprouvent le besoin. » déclara-t-il avant d'aborder un autre sujet « Est-ce que vous avez raccompagnée Jean à sa chambre ? »
- « Oui, je lui ai bien proposé de rester un peu dans le salon avec nous, mais je n'ais pas eu beaucoup de succès » répondit Tornade.
- « Elle était épuisée de toutes manières, cette journée a été difficile pour tout le monde » fit Hank.
- « Oui » acquiesça le Professeur d'une voix grave.
Le lendemain, comme prévu, les cours avaient repris pour les jeunes élèves de l'Institut Xavier. A l'extérieur, malgré une journée d'été bien meilleure que celle de la veille où un soleil radieux chauffait les pierres de la bâtisse, aucun mutant n'était entrain de provoquer un combat de pouvoirs à l'encontre de ses semblables, aucune partie de basket endiablée ou baignades animées n'avaient lieu, tout était silencieux si ce n'est le roulis de l'eau jaillissant de la fontaine surmontée d'un ange située en face de l'Institut.
Le bruit d'un moteur se fit entendre et s'amplifia au fur et à mesure de son approche rapidement la forme d'une moto se dessina au loin. Wolverine contourna la battisse et, dans un dernier vrombissement, entra dans le garage où il gara sa grosse cylindrée à sa place habituelle, en appui sur sa béquille. D'un geste rapide, il retira son casque, l'accrocha au guidon et s'apprêta à partir lorsque quelque chose lui sauta aux yeux…Une voiture manquait, et pas n'importe laquelle…
A suivre….
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