Il entra à pas pressé, mais ne croisa personne dans les couloirs le menant au hall d'entrée.
- « Comme d'habitude, il n'y a jamais personne quand il le faut » grogna-t-il pour lui-même.
Avant toutes choses, il décida de monter les escaliers et se dirigea vers la chambre de Jean. Il frappa et ouvrit doucement la porte, mais elle était vide, idem pour la salle de bain. Pas d'affolement, elle a peut-être seulement daigné en sortir, pensa Logan avant de redescendre dans le hall et de prendre cette fois-ci la direction du bureau du professeur mais, en passant devant la salle de classe de Ororo, il s'arrêta en chemin. La sorcière du temps était entrain d'enseigner l'histoire dans cette superbe pièce au plafond voûté et vitré, emplie de plantes vertes en tous genres.
- « Logan ? Qu'est-ce qui se passe ? » s'enquit la mutante en voyant Wolverine arriver.
Les élèves se tournèrent vers celui-ci, il n'était pas du genre à interrompre un cours pour rien. Logan fit signe à Ororo de s'approcher pour qu'il puisse lui parler.
- « Où est passée la voiture de Scott ? »
- « Comment ça ? elle n'est pas à sa place ? »
- « Si c'était le cas, je ne te le demanderais pas » fit remarquer Logan « J'ai pensé que le Professeur avait pu la vendre… »
- « Non, il nous en aurait parl »
- « Et Jean n'est pas dans sa chambre » ajouta Logan.
- « Quoi ? »
- « Est-ce que tu sais si elle est avec Charles ? »
- « Non, elle ne voulait pas sortir de sa chambre quand je le lui ais proposé pour l'énième fois » nia Tornade avant de se rendre à l'évidence « …C'est pas vrai ! c'est elle qui a dû prendre la voiture ! »
- « Mais pour aller o ? »
- « Je ne sais pas, n'importe où, elle est tellement perdue ! »
Ororo était vraiment inquiète désormais.
- « Le cours est termin » annonça-t-elle à ses élèves d'une voix grave avant de faire appel au professeur qui ne tarda pas à lui répondre par télépathie.
Je suis déjà en route Ororo Jean n'est plus à l'Institut, mais Cerebro sera capable de la localiser
Elle avait beau ne pas avoir bonne mine après ces quelques jours cauchemardesques qu'elle avait passés, elle avait beau ne pas avoir prêté beaucoup d'attention à son apparence, Jean possédait toujours ce charme envoûtant qui la caractérisait. Lorsqu'elle entra dans le bar, plusieurs hommes la suivirent du regard, mais elle ne leur en adressa aucun.
Elle avait quitté l'Institut sans destination précise, peut-être avait-elle pensé qu'en s'en éloignant la douleur ferait de même ? Mais il n'en avait rien été, bien au contraire la voiture de Scott était emplie de souvenirs plus intenses les uns que les autres et c'était terrible de savoir qu'il n'y en aurait plus. Sous le coup des émotions, aveuglée par les larmes, elle s'était arrêtée dès qu'elle l'avait pu et s'était retrouvée devant cet établissement. Elle n'était pas du genre à fréquenter les bars, mais plus rien ne comptait désormais si ce n'est tenter d'apaiser cette souffrance semblable à une lame plongée dans son âme.
Une musique passait en sourdine à la radio, un poste de télé diffusait des images d'un match de base-ball, des clients riaient, des verres s'entrechoquaient, mais elle n'était pas de ce monde. Ces odeurs d'alcool mêlé de tabac lui retournaient l'estomac, mais c'est à peine si elle y fit attention. Elle se dirigea vers le comptoir et s'assit sur une des chaises lui faisant face. Rapidement, un barman quitta sa discussion avec ses clients et vint prendre sa commande :
- « Qu'est-ce que je vous sers ? »
- « Cognac » répondit-elle d'une voix éteinte, rendue légèrement rauque par ses journées de mutisme.
- « Un… » le barman avait ouvert la bouche, mais l'étrangère l'interrompit comme si elle savait ce qu'il allait dire.
- « Je vous en prie…ne me posez aucune question…»
L'homme ne termina donc pas sa phrase, se retourna pour attraper une bouteille, en versa un verre et le posa devant elle. Jean le saisit et le but cul-sec, fermant les yeux lorsque l'alcool lui brûla la gorge comme des centaines d'aiguilles. Elle n'avait jamais aimé ça, mais elle ne voulait plus ressentir de douleur pendant un moment, ne plus penser à son absence…
Elle se sentait vidée de toute essence vitale…ne pouvait s'empêcher de penser que la semaine précédente, à la même heure, elle et Scott partageaient un moment romantique sur le ponton près du lac, la semaine précédente, il était encore en vie. Rien n'était plus terrible que de se réveiller le matin et de trouver l'autre côté du lit vide, de réaliser qu'elle ne l'avait pas retrouvé comme dans ses rêves, qu'elle ne pourrait plus le sentir contre elle même si elle avait encore cette impression qu'il allait apparaître à tout instant. Elle avait le sentiment qu'elle ne pourrait plus jamais sourire à nouveau et reprendre goût à la vie, pas sans lui, pas sans Scott.
- « Un autre » demanda-t-elle au barman alors qu'il s'apprêtait à retourner au bout du comptoir.
L'homme, revint vers elle et lui versa à nouveau un verre.
- « Laissez la bouteille » fit-elle alors qu'il la rebouchait.
- « Ecoutez, je ne sais pas ce qui vous est arrivé ma petite dame, mais vous… » tenta-t-il.
- « Je ne vous demande rien, juste la bouteille…j'ai de quoi payer si ça peut vous rassurer » répondit-elle toujours sur ce même ton éteint en jetant deux billets de 20€ sur le comptoir.
Il rencontra brièvement son regard et y lut une profonde tristesse. Après tout, il n'avait qu'à s'assurer qu'elle ne quitte pas son établissement avant d'avoir dessaoulée –quitte à fouiller dans ses poches pour trouver quelqu'un à prévenir et qu'on vienne la chercher– pensa le barman cette idée sembla le convaincre car il finit par se saisir de l'argent et laissa la bouteille bien qu'un peu à contrecœur.
Verre après verre, Jean sentait l'alcool lui brouiller l'esprit, mais pas comme elle l'aurait voulu. Scott...la douleur était toujours là. Cette absence aussi bien corporelle que psychique, ce vide intérieur comme si elle était privée d'une partie d'elle-même, de sa moitié…oui, une grande partie d'elle-même était morte avec lui et ne pourrait plus jamais être reconstruite…ça la rongeait de l'intérieur, lui comprimait le cœur, elle se sentait lasse, elle se sentait mal.
D'un geste de moins en moins assuré elle se versa un quatrième verre qu'elle vida d'un trait avant de s'en remplir un autre. Mais celui-ci, elle le laissa attendre un peu. Pourquoi ne pouvait-elle pas savourer quelques minutes d'inconscience ? Elle plissa les yeux, un mal de tête commençait à lui vriller le crâne, le genre de mal de tête qu'elle avait subi des journées entières il y a quelques années, quand elle ne contrôlait pas ses pouvoirs…et ce qui devait arriver arriva, sans qu'elle ne puisse les stopper, des milliers de pensées s'insinuèrent dans son esprit...
…Je ne sais pas ce que je dois faire………et alors on est allés………mais qu'est-ce qu'il fait ?………Elle est bonne celle-là, non mais regardez-moi ses formes………10€ pour une bière ? il n'est pas prêt de me revoir celui-là………je ne vais………alors……et…… …
Elle plaqua ses mains contre ses tempes. Quelques bouteilles poussées par sa télékinésie tombèrent de leurs étagères et se brisèrent sur le sol, mais personne n'irait imaginer qu'elle en était la cause. Jean savait ce qu'elle devait faire même si cela allait l'obliger à se focaliser sur l'objet de ses souffrances : Scott, penser à lui avait toujours été la seule chose capable de l'aider à reprendre le contrôle de ses pouvoirs. Rapidement, elle parvint à se vider l'esprit, à s'isoler et à reformer ses boucliers mentaux tandis que le barman nettoyait l'alcool qui s'était répandu parterre en se demandant si son bar n'était pas hanté.
Soulagée de toutes ses pensées qui n'étaient pas les siennes, Jean poussa un soupir, s'accouda au comptoir et vida un autre verre, soutenant sa tête de l'autre main. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle vit qu'un homme à l'aspect débraillé s'était assis à côté d'elle et la regardait d'un air quelque peu lubrique:
- « Alors ma poule, on se sent seule à ce que je vois ? »
- « Laissez-moi » répondit Jean d'une voix pâteuse.
- « Aller, on pourrait aller faire un petit tour juste toi et moi… » insinua le type en posant sa main sur la cuisse de Jean.
Sans en avoir conscience, l'homme projeta quelques images issues de ses fantasmes actuels vers la télépathe, ce qui, associé au geste qu'il venait de faire, ne passa pas :
- « Enlevez vos sales pattes » réagit-elle.
Même si elle l'aurait voulu, ses mots n'avaient pas beaucoup d'impact tellement l'alcool commençait à l'endormir. Elle n'avait même pas tourné la tête vers lui et gardait les yeux mis-clos, sa main dans ses cheveux, soutenant sa tête qui lui semblait peser deux tonnes.
- « Aller… »
- « Je ne vous le répéterais pas… »
- « C'est ton mec ? il ne doit franchement pas être un bon coup pour ne pas avoir réussi à te garder il n'a pas été capable de… » commença le lourdaud en tentant de passer son autre main dans les cheveux de Jean, mais, sans comprendre ce qui lui arrivait, il se retrouva projeté à travers la pièce et s'écrasa sur une table, quelques mètres plus loin, à moitié assommé.
- « Tu ne sais rien » articula-t-elle avant de se masser les tempes que l'utilisation de ses pouvoirs avait rendues meurtrières.
Dans le bar, après le moment de silence nécessaire aux clients pour comprendre ce qu'il venait de se passer, les réactions firent leurs apparitions…
- « Mais qu'est-ce que ?? C'est elle ! C'est une mutante !! »
- « Je ne reste pas dans un bar qui sert des monstres !! »
- « Ouais !! On ne veut pas de ça ici !! Regardez ce qu'elle a fait à Vic !! »
Jean ferma les yeux en entendant les menaces commencer à fuser contre elle. Elle n'aurait pas dû perdre son sang froid, mais elle n'avait pas pu se retenir sans le vouloir ce type s'était attaqué à la mémoire de Scott et les images qu'il lui avait projetées inconsciemment n'étaient pas acceptables, qu'elle soit enivrée ou non.
Elle savait qu'elle devait sortir, mais elle se sentait mal et ne pourrait vraisemblablement pas aller bien loin…mais après tout, souhaitait-elle vraiment échapper au lynchage qui l'attendait ? elle n'en était pas sûre.
Des clients se levèrent de leurs chaises et s'approchèrent d'elle l'air menaçant tandis que la porte du bar s'ouvrait et qu'un homme à l'air renfrogné entrait sans que personne n'y fasse attention.
- « Fous le camp de mon bar sale monstre !! » aboya le barman.
- « Ouais ! » appuya un type en attrapant une bouteille par le goulot
A suivre….
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