Dans la bibliothèque, il n'y avait plus un bruit, plus un son. Anthon retenait sa respiration, et la goutte de sang s'échappant de la lèvre de Phil et allant s'éparpiller sur le plancher, le fit sursauter ... Soudain, un cri long et aigu déchira le silence. « C'était quoi ça Anthon ? Le garçon écarquilla les yeux et porta sa main à son front livide : La voisine ... » Ils n'osèrent plus bouger, les bruits avaient dû l'attirer dans la maison pour voir ce qu'il se passait à l'intérieur. Elle avait toujours été curieuse, quelle commère ... L'on entendait rien que le silence encore, puis des grognements. Le chacal. Des cris de frayeurs. La voisine. Un craquement sec, sinistre et macabre, le bruit significatif d'une nuque qui se brise ... Il tuait. Il tuait ! La haine envahit la jeune Phil et une colère incontrôlable lui monta à la tête faisant cramoisir ses joues. Ils n'avaient pas le droit ! Ils ne faisait même pas partie de ce monde, et pourtant ils y allaient et venaient partout où bon leur semblait. Et partout, ils provoquaient toujours la même chose : la peur, la mort, le chaos. Elle voulait que cela s'arrête, plus que tout, elle portait une haine féroce à toutes ces créatures, ces spectres qu'elle connaissait et qui la répugnait ... Ces créatures qui avaient enlevées ses parents ... N'était-il pas dit dans le missel de la sorcellerie que l'existence des Spectres serait fini si la prophétie s'accomplissait ? ? Phil voulait les détruire, pas seulement eux, mais tout, tout ... Cette haine qui avait naquit en elle, était une haine froide et destructrice, que rien ne pourrait arrêter ... Ses yeux se firent noirs, ses poings se serrèrent, sa respiration devint haletante. Elle s'approcha d'un grand miroir posé sur la bibliothèque, pâle et dure était l'image qu'il lui renvoya. Soudain, elle se sentit chargée d'une tâche. Une tâche impossible à accomplir sans haine, sans mort ... D'un puissant revers de main, elle essuya sa lèvre ouverte, éclaboussant le miroir d'un flot écarlate et se regardant encore une fois, elle poussa un cri de rage et quitta son corps pour passer dans le monde des esprits, avec l'idée de mieux les anéantir ...

« Non ! » s'écria Anthon en s'élançant vers sa petite sœur. Il rattrapa son corps avant que celui-ci ne tombe à terre. Déjà, les volutes de l'âme de Phil se dispersaient dans les limbes environnantes. Anthon les voyait. Il pleurait, il s'en voulait. Il n'aurait jamais dû lui dire la vérité, comme il aurait dû mieux veiller sur elle ! ! Sa petite sœur, sa famille ! ! Puis soudain elle réapparut. Transparente, légère et démoniaque comme les autres ... Il tendit le bras pour la traverser, comme pour vérifier s'il ne rêvait pas ... Mais non, c'était la réalité. Elle était devenue revenante, comme ... eux ... Lorsqu'elle le regarda de ses yeux noirs, il détourna la tête et serra contre lui le corps bleuté de l'adolescente. Sa sœur, celle qui l'aimait était là : dans ses bras ... Il comprenait maintenant le rôle de Phil dans toute cette histoire. Il comprenait pourquoi ils avaient eu besoin d'elle, pourquoi ils ne l'avaient pas emmenée avec leurs parents. Elle était le treizième fantôme. Elle était l'œil du diable. Et jamais il ne pourrait la détruire. Il ne pourrait empêcher la prophétie de l'ombre de se réaliser. Comment détruire sa petite sœur ? ?

A ce moment-là, Anthon su que le monde disparaîtrait. Il su que personne ne serait épargné par le fléau qui allait s'abattre sur la terre. Non, il ne ferait rien. Il ferma les yeux, serrant ce qu'il restait de sa sœur et attendit que la mort vienne l'engloutir. Il avait hâte de revoir ses parents ...