" l'arrivée à Beauxbâtons "
La Barbaresque vogua tranquillement sur une mer d'huile, sous un soleil de plomb et sans le moindre souffle de vent. Le grand avantage des bateaux à voiles magiques, c'est qu'ils n'ont pas besoin de vent pour avancer. Il s'agissait d'un moyen de transport hautement écologique. Bien sûr, il était hors de question de mettre au courant les différents partis écologistes mondiaux car la fumée provenant des nombreux bûchers qui découleraient de la découverte du monde sorcier ne ferait qu'aggraver l'effet de Serre.
L'après midi passa doucement. La plupart des élèves avaient fui les effets dévastateurs pour la peau de l'exposition prolongée au soleil. Ils s'étaient réfugiés dans les ponts inférieurs du bateau où ils chahutaient avec enthousiasme dans les coursives.
Ce fut un élève de troisième-année qui vit apparaître l'île le premier mais, comme pour lui ça n'avait aucun intérêt particulier, il ne fit part de sa découverte à personne. Il fallut qu'une élève, qui faisait alors sa première rentrée à l'école et qui avait passablement le mal de mer, se mette à scruter l'horizon à la recherche du port d'arrivée qui la délivrerait, pour que l'information circule enfin. Ce fut alors la grande ruée vers le pont supérieur. Tous les élèves de première année se bousculèrent pour constater de leurs propres yeux qu'effectivement ils approchaient de destination. Certain, plus malins que les autres, avaient même emmené des jumelles et les louaient à prix d'or aux plus curieux.
Alice parvint tant bien que mal à se frayer un passage dans la foule. Tout d'abord éblouie par la réverbération du soleil sur l'eau, elle parvint à distinguer, posé sur la ligne d'horizon, un mince trait blanc qui aurait très bien put être une simple nappe de brume... En fait, il s'agissait effectivement d'une nappe de brume... de la brume... en pleine canicule... ça ne pouvait qu'être magique ! Le navire fonça droit dans ce mur cotonneux. L'opacité de l'air devint tel que l'on ne pouvait même plus distinguer ses propres pieds. Les élèves n'osaient plus bouger de peur de trébucher et de passer par dessus bord.
Après un temps incroyablement long, le navire sortit enfin de cette purée de poix. Ce n'est qu'alors que l'île apparut dans toute sa splendeur avec ses falaises blanches, son petit port rustique et, surtout, perchée en haut des falaises, son école.
Les nouveaux élèves n'en croyaient pas leurs yeux. Les autres élèves, quant à eux , blasés, commençaient à se regrouper pour être les premiers à descendre du bateau.
Le navire accosta. La passerelle fut installée et les élèves commencèrent à regagner la terre ferme (au grand soulagement de certain). Un peu plus loin, sur une estrade, un vieux bonhomme s'évertuait à donner des indications que personne n'écoutait. Les nouveaux finirent quand même par comprendre qu'ils devaient se regrouper sur l'esplanade en haut du massif escalier qui menait au sommet de l'île.
L'escalier, taillé dans la pierre blanche, était d'une longueur affolante. Les nouveaux arrivèrent épuisés par cette escalade sur une esplanade pavée au centre de laquelle trônait, solitaire, une sorte de socle en pierre grise veinée de blanc.
Lorsque tous les élèves de première année furent enfin arrivés, reposés et à peu près calmes, apparut, dans un bruit assourdissant, quelqu'un debout sur le socle. L'effet qui était étudié pour impressionner les élèves fonctionna à merveille. Tout les ans, la directrice apparaissait de le même manière. C'était la tradition. Pourtant elle resta plantée là sans dire un mot tout un moment en jetant des coups d'œil nerveux en direction des bâtiments. Elle parut soulagée lorsqu'une silhouette sortie enfin par la porte principal, petite d'abord car elle était loin mais plus elle se rapprochait plus le qualificatif de petite devenait ridicule. Il s'agissait de la femme la plus grande que les élèves n'aient jamais vu de toute leur vie. Même la directrice du haut de son socle lui arrivait à peine à l'épaule. Il est vrai, aussi, que la directrice n'était pas très grande. Celle-ci commença son discours :
" Chers nouveaux élèves ! Je vous souhaite la bienvenue. J'espère aussi que les années que vous passerez ici vous seront profitables. Je suis Madame Fildassier, la directrice de cet établissement.
Comme pour un certain nombre d'entre vous le voyage a été long, je vais donc aller à l'essentiel. Tout d'abord comme c'est la tradition de l'établissement les cours ne commenceront qu'après demain pour vous permettre de vous remettre du voyage et de vous familiariser avec les locaux. Demain, les élèves de dernière année vous feront visiter l'établissement et vous expliqueront tout ce que vous avez besoin de savoir pour faire tranquillement vos études ici.
Bien sur avant de vous laisser partir, je vais procéder à l'attribution des Loges car, comme vous le savez, l'établissement est constitué de deux Loges qui sont représentées sur le blason de l'école par deux baguettes magiques. Il s'agit de la Roseraie et de la Chapelle, chacune possède sa propre aile du bâtiment. Pour l'attribution des loges, il va vous être distribuer des médaillons. Lorsque vous les prendrez dans la main, un symbole apparaîtra. S'il s'agit d'un soleil vous êtes à la Chapelle et s'il s'agit d'une rosace vous êtes à la Roseraie. "
La directrice fit une petite pause puis reprit.
" Je tiens à préciser qu'il faut conserver précieusement ces médaillons car ils vous serviront de clef pour accéder aux Loges. Bien évidemment, pour les petits malins qui, régulièrement, tentent de pénétrer dans la Loge adverse, il ne sert à rien de se procurer le médaillon de la Loge concernée car, à votre contact, le médaillon change de symbole. "
La directrice fit une nouvelle pause.
" Je vais à présent vous appeler un à un. A l'annonce de votre nom vous direz 'présent' et vous irez chercher votre médaillon auprès de madame Maxime "
La directrice fit un signe de la main en direction de l'immense femme qui se tenait à ses côtés.
" Ensuite ceux de la Roseraie se placeront du côté droit et ceux pour la chapelle du côté gauche.... Je commence :
- Aaron Wilfried
-Présent !
- Alota Marie-Thérèse
- Présente !
Les noms de la liste s'égrenèrent un à un puis ce fut le tour d'Alice
- Poissondoret Alice
- Présente !
Alice se dirigea vers l'impressionnante madame Maxime qui lui tendit un petit médaillon doré rectangulaire qui pendait au bout d'une chaînette. Dés qu'elle l'eut en main, la surface métallique se grava aussitôt d'une très belle rosace. Alice alla donc rejoindre le groupe de la Roseraie.
