Chapitre 21

La création des papillons de papier eut divers effet dans la vie de Mlle Poissondoret, outre celle de lui permettre de déclarer sa flamme auprès de Mr Beaufils et d'avoir une mention d'excellence à cet examen.

La première conséquence se fit sentir aussitôt la présentation finit. Les professeurs, qui avaient toujours considéré cette élèves comme une sorcière médiocre, durent revoir leur jugement sur elle. Certain, comme Mr Petsèque pour ne pas citer de nom, crièrent à la tricherie mais ils étaient minoritaires et personne ne les écouta. Le maître d'envoûtement et le professeur de potion se demandèrent même ce qu'ils avaient encore à apprendre à une élève capable de créé elle-même des incantations et des potions de  haut niveau.

Une des autres conséquences fut que la manière dont les autres élèves la regardaient changea. A présent, il la considérèrent comme l'une des leurs et non plus comme une moldu qui se serait égarée par hasard dans l'école comme ils l'avaient fait jusqu'à présent.

Plus anecdotique sans doute mais tout aussi intéressant, la jeune fille  reçus, quelques semaines plus tard, un hibou de Grentmègre&Peutigrau, le leader français de la carte postal magique, lui demandant l'autorisation d'utiliser (contre monnaie sonnante et trébuchante) le procédé de fabrication des papillons de papier. Heureusement Mme D'Alembert, qui était une femme à l'esprit pratique, avait pensé à faire breveter le procédé, ainsi Alice reçut un coquet petit nombre de gallions en échange de l'autorisation d'utilisation du voult et de la fabrication de l'encre magique qui sert à les faire.

Ce voult porte désormais le nom de « Procédé Poissondoret » et l'encre qui en permet la réalisation est actuellement commercialisée sous le nom « encre d'envoûtement Poissondoret » (disponible en flacon de 10ml, 20ml et 50ml, dans toutes les bonnes papeteries sorcières). Et sachez, cher lecteur, qu'à chaque fois vous achetez l'une des cartes magiques reprenant ce procédé, l'un des flacons de cette encre ou encore un ouvrage expliquant le mode de confection de ce voult, une partie de l'argent que vous payez est reversée à leur inventeur même si à présent c'est Alexandre et non plus  Alice qui en profite.

Mais revenons à notre histoire…

L'année s'était donc terminée admirablement bien pour Alice. Ce fut donc un déchirement quand il fallut que chacun rentre chez soi pour les vacances d'été.

Mais la séparation fut de courte durée car pour la deuxième année consécutive, Alice et Bastien travaillèrent sur le domaine de Beauxbâtons pour la récolte des feuilles de chêne Anaphorique. Ils passèrent ainsi la majeur partie de leurs vacances ensemble. En apprenant à mieux se connaître, il formèrent un couple très soudé… très très soudé même aux dires de certaines personnes qui étaient malencontreusement tombées sur eux alors que manifestement le couple avait voulu s'isoler.

De son côté, Mlle Pyvert avait obtenu un petit job au magazine Géomagie (hebdomadaire d'ethnographie magique). Elle passa deux mois à préparer du café et du thé, à faire des photocopies (la photocopieuse est une invention moldu bien pratique) et à trier le courrier des lecteurs. Mais il en fallait plus pour dégoûter Esmé du journalisme. (Dommage diront certaines personnes à Beauxbâtons). La jeune fille fut tout de même très heureuse de retourner à l'école et de dire au-revoir à l'équipe de rédaction qui lui avait copieusement marché dessus durant tout l'été.

Le 5 septembre, sur le quai de Poulèvair-les-flots (information qui n'est plus censurée par le ministère de la Magie depuis que le village a  été rendu incartable), la première personne qu'Esmé rencontra fut Mlle Delacour. Cette rencontre n'enchanta guère la jeune fille.

« Alors toute seule Pyvert ! » Pérora Fleur.

Non, mais pour qui elle se prend cette pimbêche ? Esmé regarda la demi-vélane qui s'éloignait d'une manière méprisante. Elle fit alors la triste constatation que le sang de vélane avait de nombreux avantages car, au cours de l'été, Fleur avait encore embelli … . et en plus elle ne faisait vraiment pas son age. Qui aurait cru que cette splendide jeune fille de 1m67, aux mensurations parfaites, au sourire de Joconde… avait à peine 14 ans !  « Mon Dieu ce que le monde est injuste » soupira Esmé.

Alors que la jeune fille recherchait activement son amie aux cheveux blancs et bleus, elle faillit percuter Mme D'Alembert, la tante d'Alice. Zut alors elle cherchait du mauvais côté du quai. Mais Esmé n'eut pas le temps de faire demi tour car la femme en habit sombre lui adressa la parole.

- Esméralda, c'est ça ?

- Heu… Oui ! Répondit Esmé qui avait une saint horreur qu'on utilise son prénom en entier, même les profs l'appelaient Esmé (ou alors Mlle Pyvert).

- Est-ce que je peux te parler une minute ?

- Ben, c'est que je cherchais Alice et…

- Ne t'inquiète pas pour Alice, elle est actuellement très occupée !

Une ombre de désapprobation traversa le regard bleu saphir de Mme D'Alembert. Esmé survola la foule du regard. Au loin elle aperçut Alice, à cette distance la silhouette de la jeune fille se confondait avec celle de Bastien. Effectivement elle était très occupée…

- Il faut que je te parle. Reprit la voix de la tante d'Alice. Je sais que Mlle ma nièce t'a fait gardienne du secret.

Esmé approuva d'un signe de tête. Pourtant elle ne comprenait pas pourquoi il y avait quelque chose à dire la-dessus maintenant alors que cela faisait plus de trois ans que le secret lui avait été confié.

- Cela fait plusieurs années que j'essaye de te contacter mais Alice intercepte les messages et  elle a lancé un sort d'évitement pour que nous ne puissions pas nous parler…

- Mais…

- Ne m'interromps pas sinon le contre sort ne sera pas efficace assez longtemps. Je ne sais pas jusqu'à quel point tu es au courrant de la situation, ni ce que tu ignore, mais en tant que gardienne de ce secret tu tombe sous le contrôle du ministère et de l'Ordre des Chevaliers d'Eole. Tant que tu es élève à Beauxbâtons cela n'a aucune importance mais dans moins d'un an tu ne le seras plus. Il faudra que tu fasse un choix : soit tu entre dans l'ordre, soit tu renonce au secret… Lis ce document et réfléchis bien… Ces documents sont ensorcelés pour que toi seul puisse les lire mais fait attention à ce qu'Alice ne tombe pas dessus car ce genre de sort n'est pas efficace sur elle…

La femme aux yeux de saphir semblait avoir de plus en plus de mal à parler et Esmé avait du mal à écouter… le contre sort s'estompait.

« Garde un œil sur elle de ma part, l'oracle annonce une année bien triste… » parvint tout de même à articuler Mme D'Alembert et puis elle se tut. Le contre sort ne faisait plus effet.

Instinctivement (où était-ce le sort d'évitement ?) Esmé se détourna de cette femme. Elle tenait la liasse de document qu'on lui avait donné, elle les rangea prestement car ce n'était ni le lieu ni l'heure de les lire. La jeune fille réfléchit rapidement à la situation… interceptait les messages ?! Sort d'évitement ?! … mais à quoi tu t'amuse Alice ?

Esmé se fraya un chemin dans la foule compact qui s'agglutinait sur le quai. Il lui fallut joué des coudes pour arriver à rejoindre Alice. En apercevant son amie approcher, celle-ci consentit à lâcher (momentanément) son petit ami (celui-ci avait d'ailleurs deux où trois personnes à aller saluer… où alors il ne désirait pas parlé à Esmé…). Oubliant la brève conversation avec la tante de son amie, Mlle Pyvert se lança dans son traditionnel monologue de rentrée… Visiblement Alice n'écoutait absolument pas. D'habitude elle faisait au moins semblant. Cet infime changement dans le comportement d'Alice attrista Esmé, elle sentait que son amie s'éloignait d'elle… Alice s'éloignait d'elle pour se rapprocher de Bastien… Mon Dieu ce qu'elle détestait ce type.

***

L'école de magie de Beauxbâtons regroupait plus de trois cents élèves entre 11 et 18 ans. Et comme dans toutes les écoles des couples s'y formaient et s'y défaisaient à longueur d'année. Petite ou grande romance, histoire pour un jour ou pour toujours… ainsi va la vie des adolescents. Quoi de plus normal ?

Le couple formé par Alice et Bastien devint rapidement célèbre dans tout l'établissement. Il y avait plusieurs raisons à cet état de fait, tout d'abord car grâce à ses papillons Alice était devenue relativement connue. Mais la raison majeur de la célébrité du couple venait du fait qu'on pouvait tomber sur eux dans les endroits les plus insolites (et souvent les plus isolés aussi) … et s'ils s'isolaient de la sorte ce n'était pas pour manger des chocogrenouilles en tête à tête… ni pour jouer aux échecs…

Le sujet provoqua bien quelques plaisanteries de mauvais goût mais les accidents (jamais dangereux mais très embarrassant pour les victimes) qui survenaient aux malheureux plaisantins eurent vite fait d'y mettre fin.

Bien sûr certain membre du corps professoral s'offusquèrent de la situation. Le jeune couple fut alors convoqué plusieurs fois chez la directrice pour leur conduite jugée totalement indécente. (bien que les personnes qui lançaient ce genre d'accusation n'ait jamais rien vu par eux-même, mais la réputation du couple leur suffisait.)

La menace d'un blâme contraignit Alice et Bastien à un peu plus modération et à être beaucoup plus discret.

Bref en cette septième et dernière année à Beauxbâtons la vie était belle et douce pour Alice.

Par contre ce n'était pas du tout le cas pour Mlle Esméralda Pyvert.

Esmé était cette année là, pour la deuxième fois consécutive, rédactrice en chef de l'Echo de la Roseraie. Après un an en poste, elle connaissait déjà toutes les ficelles pour ne pas perdre de temps. Elle organisa rapidement l'équipe de rédaction, les réunions de recrutement des rédacteurs furent de simple formalité et la rédaction du journal fut rapidement quelque chose de parfaitement rodé, sans aucune perte de temps.

Cette organisation lui laissa une quantité non négligeable de temps libre… Temps dont elle ne savait pas quoi faire car elle les passait toute seule. En six ans à Beauxbâtons, Esmé ne s'était faite qu'une seule amie : Alice. C'était sa faute après tout, elle n'avait qu'a pas écrire des articles pareils. Et cette année Mlle Poissondoret, entre son bénévola à la bibliothèque et son cher Bastien chéri, n'avait presque plus une minute à consacrer à Esmé.

La jeune journaliste vivait très mal cette situation, ce sentiment d'exclusion nourrissait sa haine envers Bastien. C'était lui qui lui avait volé l'amitié qui la liait à Alice.

En plus de ses sentiments d'exclusion et de solitude, en plus de sa haine de Bastien, il y avait autre chose. Un sentiment diffus mais très fort… Un sentiment qui la poussait à penser «Elle, elle est… Elle, elle a… Et pas moi ! Moi aussi j'aimerais être… Moi aussi j'aimerais avoir… »

L'humeur de la journaliste s'en ressentit et la chronique Pyvert fut plus assassine que jamais (et c'est pas peu dire). Esmé s'attira des ennuis avec la direction, les parents d'une des victimes ayant porté plainte on la menaça de lui retirer le poste de rédacteur en chef si elle ne se calmait pas.

De son côté, suite à la menace de blâme, Alice sembla se souvenir de l'existence d'Esmé et s'excusa auprès d'elle de l'avoir un peu laisser tomber. (Un Peu ?)  mais qu'il fallait la comprendre. (Comprendre quoi ? Comprendre que sa meilleure amie l'avait laissée tomber comme une vieille chaussette car elle s'était amouraché  du premier venu ? Comprendre que malgré tout ce qu'elle avait fait pour elle, elle comptait pour du beurre dans la vie de son amie ?) Elle promit de faire plus attention à l'avenir.

Alice tint sa promesse et réussit à se partager entre les cours, la bibliothèque, Bastien et Esmé. Un vrai tour de force en faite car les journées n'ont jamais que 24 heures, ce qui n'est pas beaucoup…

Au mois de janvier eurent lieu les inscriptions pour le grand jeu. Tous le monde en parlait et on se jurait d'y participer dés l'entrée en première année. Deux journée et demi… Soixante heures pour éliminer les autres élèves et montrer qu'on est le (la) meilleur(e). C'était aussi l'occasion d'éliminer tout le stress accumulé au fil des mois lors de la préparation du BAM (Brevet d'Aptitude à la Magie), l'examen qui venait sanctionner les sept années d'étude à Beauxbâtons.

Comme d'habitude, à peine la moitié de la promotion s'inscrivit. La plupart jugeait qu'il n'aurait pas le temps pour se préparer convenablement pour une tel épreuve, et puis on était des gens civilisés, pas des barbares qui se battent dans la boue.

Esmé réussit à convaincre Alice de s'inscrire avec elle (ne serait-ce que pour l'aidé à ne pas se faire éliminer trop vite). Et Alice ne pouvant rien faire sans son chéri, persuada celui-ci de s'inscrire aussi. Ceci ne fit pas du tout plaisir à Esmé mais il allait falloir faire avec.

Parallèlement à leurs révisions pour le BAM, le petit groupe mit au point un nombre impressionnant de stratégies pour le grand jeu. En fin de compte ils arrivèrent à la conclusion qu'ils feraient mieux de concourir chacun pour soi, sans pitié pour les autres… Il était ainsi parfaitement clair aux yeux d'Esmé que ce serait Alice qui gagnerait. (Qui pouvait rivaliser avec le Gardien de la Source ?) mais Elle espérait bien lancer quelques sorts sur les gens qu'elle n'aimait pas… en tête de sa liste venait un nommé Beaufils…

***

Les mois passèrent et la pression de l'examen augmenta. Les plannings de tous les  élèves de dernières années se chargea d'une ou plusieurs heures de révision quotidienne. Heureusement, soupiraient les malheureux élèves, que le contrôle continu comptait pour la moitié de la note… C'était d'ailleurs pour cela que cet examen était si difficile.

Alice, qui, en tant que Gardien de la Source, n'avait pas vraiment besoin de réviser, aida tant qu'elle put Esmé et Bastien dans leurs tâches de relecture des textes obscures qui leurs servaient de notes de cours.

Esmé faillit mourir de désespoir car quand elle voulut se replonger dans son cours d'histoire de la Magie, ses vieux cours de voult avaient eu une fuite de magie dessus et ses notes étaient devenues absolument incompréhensible.

Bastien, de son côté, dut entièrement traduire son cours de potion en un langage lisible à partir de sa  collection de notes semi-hiéroglyphique … Mais même une fois traduit, il ne comprenait rien à ce cours.

Pour travailler, Esmé, Alice et Bastien établirent leur QG à la bibliothèque, à la table qui marquait l'angle de la section jaune,  entre les rayonnages N 23 et N24. C'était un lieu très calme car son emplacement exacte était connu de seulement quelques personnes. Il faut dire qu'il était placé dans la zone à l'extrême sud du bâtiment où s'était créé un vortex spatiale dû à une trop grande concentration d'ouvrage magique et dans lequel une personne non initié pouvait errer pendant des journées entières sans jamais trouver la sortie.

Le soir, lors fermeture de la bibliothèque au publique, le QG était transféré dans la chambre des filles (bien que théoriquement Bastien n'ait pas le droit d'y entrer)  et où l'on continuait à compulser quelques ouvrages empruntés (pas toujours très légalement) à la bibliothèque.

Bien sûr, ce n'était pas tous les jours comme ça car les lundi, jeudi et dimanche soir Esmé avait réunion pour le journal et  les mercredi et dimanche après-midi Bastien avait quidditch.

Ce n'était pas toujours facile pour Alice de se répartir entre les deux emploies du temps. Le partage entre Esmé et Bastien devint peu à peu moins équitable et les deux jeunes filles finirent pas ne se voir qu'aux moments où elles se retrouvaient le soir pour aller dormir ou pendant les cours ou encore pendant  les moments de révision en commun.

Esmé s'en rendit compte mais elle avait un planning tellement chargé qu'elle n'avait pas tellement le temps d'y pensé. Cela lui permettait d'alimenté sa rancœur envers Bastien, sinon son hostilité envers lui aurait fini par disparaître car, après tout, c'était un chic type. Et puis Alice était plus ouverte et semblait ne plus faire de cachotteries à son amie. Esmé prit alors sur elle, après tout Alice avait bien le droit au bonheur comme tous le monde.

***

Le mois d'avril arriva à une vitesse hallucinant. Ce mois là était celui où les pauvres élèves de dernière année s'inquiétaient gravement pour leurs avenirs post-scolaire. Certain faisaient des demandes pour poursuivre leurs études de magie, d'autres prospectaient pour dénicher un travail et puis il y avait ceux qui n'avaient pas la moindre idée de ce qu'ils allaient bien pouvoir faire.

Alice avait déjà choisi de travailler à la librairie D'Alembert, la librairie moldu que tenait sa tante. Esmé ne savait pas si c'était par choix réel  ou une obligation.

Mlle Pyvert, elle, avait un problème beaucoup plus épineux à régler. Elle avait lu et relu les feuilles que lui avait donné la tante d'Alice au début de l'année. Un terrible dilemme se posait à elle, soit elle entrait dans l'ordre des Chevaliers d'Eole et perdait toute chance de devenir journaliste, car être Chevalier c'était comme un sacerdoce, vos moindre fait et geste étaient contrôlés soit elle devenait journaliste et devait renoncer au secret, et renoncer à quelque chose d'aussi important lui était impossible… presque autant que de renoncer à sa carrière dans le journalisme… Esmé ne savait pas quoi faire. Elle ne pouvait demander conseil à personne, il allait falloir qu'elle décide toute seule.

Bastien ne savait pas, lui non plus, ce qu'il allait bien pouvoir faire. Sans doute allait-il travailler un peu à l'herboristerie de ses parents et peut-être que son frère aîné (avec qui il avait 11 ans de différence) l'aiderait à trouver mieux. En fait, il ne s'en faisait pas trop, le BAM l'inquiétait beaucoup plus.

Début mai, Bastien reçus un étrange hibou en prévenance du ministère qui lui annonçait que son profil avait retenu l'attention du maître de l'Ordre d'Eole en charge du recrutement. Le jeune homme fut stupéfait par cette lettre, comment avait-il put retenir l'attention de quelqu'un qu'il ne connaissait pas, lui le prototype de l'homme invisible…

A l'arrivée de cette lettre Esmé ressentit comme un violent coup au cœur. Elle savait que s'il avait reçu cette lettre ce n'était pas parce qu'un illustre inconnu voulait l'embaucher mais parce qu'Alice en avait fait la demande auprès des Chevaliers. Esmé savait aussi, grâce aux documents que lui avait donné Mme D'Alembert, que le Gardien ne pouvait nommé lui-même qu'un seul des Chevaliers qui l'entourait… UN seul… Et dire qu'elle se demandait depuis le mois de septembre si elle allait devenir ce Chevalier là. Quelle triste ironie du sort ! Maintenant elle n'avait plus à se poser la question, Alice avait attribué le rôle à quelqu'un d'autre.

Esmé oscillait entre l'effondrement et la rage sourde.

Maintenant elle comprenait pourquoi Alice avait intercepté les messages que lui envoyait sa tante à ce sujet… et pourquoi elle avait jeté un sort d'évitement… En fait, Alice n'avait jamais voulut d'elle dans ce rôle. 

La jeune fille sentit une colère sourde et aveugle monté en elle.

Alice avait attribué le rôle à un type qui ne savait absolument pas dans quoi il s'embarquait. Comment réagirait-il en apprenant ce qu'elle était vraiment. Et puis comment pouvait-elle placer sa confiance en lui alors qu'ils ne se connaissaient vraiment depuis à peine un an ? … Alice était aveuglée par ses sentiments envers ce type.

Esmé eut alors une idée.

Si Alice était aveugle, il suffisait de lui ouvrir les yeux  sur les faiblesses (humaine) de son petit ami. A quoi servait les amies sinon ?

***

Le mois de mai passa comme tous les autres mois avant lui. Les élèves étaient plongés dans leurs fébriles révisions de dernières  minutes.

Les épreuves du BAM débutèrent le 22 mai par l'épreuve de métamorphose.

Pendant toute la période des examens, l'ailes ouest fut mise en isolement pour éviter que les candidats soient dérangés par les autres élèves. Dans les loges l'ambiance aussi était studieuse… entre les septième années au bord du surmenage et les 6ème année en plein fignolage de leur chef d'œuvres. Et puis de toutes façons, les autres élèves avaient cours normalement.

Le 28 mai eut lieu la dernière épreuve de l'examen, il s'agissait de l'épreuve d'histoire de la Magie. L'ordre des épreuves était immuable et les élèves finissaient leur scolarité par la même matière que celle avec laquelle ils l'avaient commencée.

Les épreuves finies, c'était au tour des  profs de travailler car ils avaient tout juste 2 semaines pour corriger les copies, les résultats devant être affiché la veille de la grande kermesse, soit le 11 juin à 17h.

Le 28 mai au soir il fut organisé une grande fête dans chaque loge pour fêter cette fin d'examen.

En fin de soirée, un léger vague à l'âme envahit les élèves de dernière année. Oui les examens étaient finis, mais l'année aussi, et avec elle leur scolarité à Beauxbâtons. Cela faisait sept ans qu'ils vivaient ici en période scolaire… Sept ans entre ces murs… Dans quelques semaines tous partiraient d'ici pour la dernière fois, la plupart d'entre eux ne se reverrait sans doute jamais… A  cette idée ils avaient un pincement au cœur.

Mais il leur restait encore deux semaines et demi à passer sur l'île et il comptaient bien en profiter.

Traditionnellement, la grande Kermesse était organisée par un comité spécialement créé en début d'année, mais le travail de montage, décoration, etc revenait aux dernières années. Ils avaient deux semaines à y consacré.

Bien évidemment, les concurrents du grand jeu s'impliquaient moins que les autres, et pour cause, il avaient à se préparer pour la terrible bataille. Alice, Esmé et Bastien passèrent un temps fou à étudier des livres de sortilèges et autres méthodes pour gagner. Pour cela il s'installèrent  sur la plage. Il était hors de question de rester enfermé par un si beau soleil.

Pendant les deux semaines entre les exams et le grand jeu, Esmé élabora tout un plan diabolique pour sortir Alice de son aveuglement. Non, elle n'avait pas oublié mais elle n'avait pas eu les temps d'y pensé pendant les examens… Et puis le moment de la grande Kermesse lui semblait idéale pour mener à bien ses projets.

***

Le 11 juin à 16h59, les 43 élèves de dernière année s'étaient massés devant le panneau d'affichage qui avait été dressé dans l'atrium. D'une minute à l'autre les résultats du BAM allaient être affichés.

Esmé, qui était restée désespérément petite, joua des coudes pour être le plus près possible. Bastien resta dans son sillage pour être, lui aussi, au première loge. Alice, elle, resta prudemment à l'écart, de toute façon grâce à son don d'hyper-tropie elle voyait très bien à cette distance.

A 17h pile, la liste des reçus se matérialisa sur le panneau de liège.

La foule se compacta, et, après une interminable minute de silence, des cris fusèrent. La foule s'anima rejetant vers l'extérieur ceux qui avaient constaté leur présence ou leur absence de la liste.

Esmé et Bastien ressortirent de la masse juvénile agglutiné, l'air radieux. Il allèrent rejoindre Alice dont le visage n'exprimait aucun sentiment. S'ils n'avaient pas vu son nom sur la liste, ils auraient bien cru qu'elle avait raté.

Le soir de ce même jour, une grande fête fut improvisée sur la plage par les élèves. Certains pour fêter leur réussite, d'autres pour oublié leur échec… échec temporaire car ils comptaient bien se présenté à la session de rattrapage fin juillet.

Seul les participants au Grand Jeu allèrent se coucher à une heures raisonnable (enfin si une heure du matin est une heure raisonnable) car le lendemain matin le rassemblement devait avoir lieu à 8h sur l'esplanade.

La nuit ayant été bien courte tout de même, un certain nombre de concurrent(e)s furent en retard et Mme maxime, qui était secondée par Mme Monsoveur et Mr galonnez, ne put commencer à donner les instructions qu'à 8h11.

Les règles du jeu furent entièrement rappelées aux élèves, avec la liste de tout ce qu'il était interdit de faire, les endroits où ils ne devraient pas mettre les pieds… On leur expliqua aussi en détail la manière dont les juges surveilleraient leurs faits et gestes… grâce un à un brassard doré dont la couleur virait au blanc lorsque l'on était éliminé. Ces même brassards envoyait un signal indicateur sur la carte qui était dans la salle des juges (lieu interdit aux élèves) sous forme d'un petit point lumineux, quand le tissu passait au blanc, le point lumineux sur la carte passait lui aussi au blanc. Et pour contrôler ce que faisait les concurrents, il suffisait de placé une lentille spécial sur le signal pour faire apparaître l'image de la scène que l'on désirait voir.

Tout contrevenant serait sévèrement sanctionné. Et pas avec des punitions scolaire, car à présent ils ne dépendaient plus de l'école, mais des sanctions juridiques pouvant aller jusqu'au retrait de l'autorisation d'utilisation de la magie  voir pire mais le cas ne s'était encore jamais présenté.

A 8h32, les élèves reçurent l'autorisation de se disperser sur toute l'île (excepter dans les loges, les communs et le jardin où avait lieu la kermesse).

A 9h00, le sonnerie qui marquait le début du jeu resonna jusqu'aux confins de l'île.

Alice, Esmé et Bastien se séparèrent comme convenu. Emportant chacun  un exemplaires d'une carte confectionnée par Esmé et ensorcelée par Alice et qui piratait les signaux du système de surveillance. Bastien, quant à lui, avait réussi à se procurer  des cristaux qui pouvaient servirent de lentille, l'image était assez mauvaise mais permettait de savoir à qui appartenait le point sur la carte.

L'important dans ce type de jeu était de savoir où est l'adversaire et à qui l'on va avoir  affaire pour le prendre par surprise (ou pour tout simplement l'évité).

Bastien prit la direction du domaine. Esmé et Alice prirent d'abord la même direction avant de se séparer devant le jardin des Lys. Alice utilisa un sort d'invisibilité et disparut. Esmé jeta un coup d'œil sur sa carte et vit le point lumineux désignant son amie prendre la direction du domaine. Exactement comme elle l'avait imaginé. Elle-même prit la direction des ruines de l'ancien temple d'Apollon un peu plus au sud..

Dés le premier jour, presque la moitié des points lumineux de la carte virèrent au blanc. L'élimination de ces concurrents étaient majoritairement dû à Mahée Macfelson, la championne en duel sorcier de la Roseraie, la grande favorite du jeu. Mais un certain nombre avait aussi été éliminé par Anne De Larêverie, une fille de la Chapelle. Et puis d'autre encore par Esmé ou Bastien qui utilisaient leur carte pour prendre leurs camarades par surprise… D'autre élèves participèrent à ce record d'élimination mais ce n'est pas important pour l'histoire, mais l'on peut constater que personne ne fut éliminé par Alice.

Pour l'annecdote, la première éliminée avait été Liem Aminessa, qui avait pêché par excès de confiance et n'avait pas surveillé ses arrières.

Le jeu ne s'arrêtant ni pour les repas, ni pour la nuit, les élèves durent faire avec les moyens du bord. Mais, en général, ils avaient été parfaitement prévoyants et avaient tout prévus.

Dans le courant de la nuit un violent orage éclata, transformant en l'espace de quelques heures certaines parties de l'île en vrai bourbier. Instinctivement les élèves se regroupèrent sur les parties praticables.

A midi il ne restait que six concurrents en lice : Alice, Esmé, Bastien, Mahée, Anne et Clément Pentecôte un élève de la Chapelle.

Après plusieurs heures de traque, Esmé parvint à éliminer De Larêverie.

A 15h12 il ne restait donc plus que cinq participants. Esmé jugea qu'il était temps de mettre son plan en exécution.

Elle vérifia où se trouvait Bastien et Alice… Comme c'est étrange, il était tout les deux dans le domaine. La jeune fille les y rejoignit en faisant bien attention à ne pas croiser Mahée ou Clément en chemin.

Elle n'eut pas beaucoup de mal à localiser précisément Bastien. Par contre Alice fut très difficile à trouver car depuis la veille elle n'avait pas retiré son sort d'invisibilité (sa stratégie étant que si personne ne la trouvait, personne ne pourrait l'éliminer !)

Quand elle fut sûr que Clément et Mahée étaient loin et qu'elle jugea que Bastien et Alice étaient suffisamment proche l'un de l'autre, elle entama la première étape de son plan. Elle lança alors deux sortilèges, tous les deux agirent sur la carte qu'elle avait confectionné et donné à Alice.

Il n'y avait pas qu'Alice qui savait ensorcelé les objets !

Sur la feuille de la jeune fille il se passa deux choses : les point lumineux de Clément et Mahée virèrent au blanc et le signal désignant Bastien disparut. Ces deux sortilèges ne feraient effet tout au plus que cinq minutes, elle devait donc ce presser d'agir.

Pour la deuxième partie du plan soit possible il fallait qu'Esmé provoque un face à face avec son amie tout en amenant Bastien à tout voir. Pour ce faire, la jeune fille utilisa une méthode que même un moldu peu utiliser : l'injonction verbale. Cela  fonctionna à merveille car il ne fallut que quelques minutes à Alice pour apparaître devant son amie.

Le plus dure restait à faire car il fallait encore convaincre celle-ci et ce n'était pas gagné.

 « La Source ? Tu veux voir de quoi est capable la gardienne de la Source ? » S'exclama Alice, horrifiée par la demande.

Pourtant Esmé tint bon et argumenta tant qu'elle put en faveur d'une démonstration. Alice jeta un coup d'œil sur sa carte, celle qu'avait trafiqué Esmé, et sembla conclure que comme elles étaient les dernières et qu'elles étaient seules, elle pouvait bien faire voir ça à son amie.

Esmé, en même temps avait jeté un coup d'œil à sa propre carte, Bastien était tout près. Elle vit alors Alice faire un petit geste de la main et les deux points dorés qui représentaient les deux jeunes filles disparurent. Esmé savait que son amie venait de couper le signal pour être sûr qu'aucun des juges ne puisse les observer. Quand on voyait Alice faire, ça avait l'air si facile…

Finalement Alice céda à la requête de son amie.

La Gardienne de la Source s'écarta un peu et tendit son poing droit devant elle. Doucement, elle ouvrit les doigts. Dans la paume de la jeune fille il y avait un minuscule point  très lumineux. Peu à peu ce point grossit et devint une sphère. Elle  atteignit la taille d'une noisette, puis la taille d'une noix, elle continua de grossir. Tout à coup Esmé remarqua que la sphère était agité de pulsation comme un cœur.

Plus Esmé regardait la chose… plus la chose grossissait… plus elle sentait l'incroyable force magique qu'y s'en dégageait. Elle en eut des frissons. Quand la sphère fut plus grosse qu'une noix ses cheveux s'électrisèrent et elle sentit la chaire de poule lui parcourir tout le corps… Quand l'objet atteint la taille d'un œuf la puissance qui s'en dégageait était si intense que la jeune fille en était oppressée, que l'air était plus dense…

Comprenant ce que faisait son amie, Esmé fut prise d'une terreur indicible. Oui elle lui montrait de quoi était capable le Gardien de la Source… elle lui montrait le contrôle qu'elle avait sur la Source en matérialisant celle-ci… 

Il y eut alors un bruit…

Alice referma aussitôt la main et la sphère disparut. La jeune fille se tourna. A quelques mètres d'elle se tenait Bastien qui la fixait. Il avait l'air terrifié. Il essaya de reculer mais se prit les pied dans une racine d'arbre et tomba.

Alice le vit tombé. Mais que faisait-il l ? Elle ne prit pourtant même pas le temps d'y réfléchir et avec un geste habile dû à de longs entraînements, elle tendit la main paume ouverte vers le jeune homme,  la referma et ramena le poing vers elle.

Le jeune homme eut l'air un peu absent mais se reprit bien vite. Il n'avait absolument aucune idée de ce qui s'était passé. Et c'est avec un naturel légèrement inquiétant qu'Alice lui expliqua qu'il avait trébuché et s'était cogné la tête en tombant.

Esmé regarda la scène totalement ahurie. L'espace d'un instant elle avait entre aperçut la Source et avait vu comment la Gardienne en protégeait le secret.

Alice rétablit le signal de surveillance du grand jeu et chercha l'explication de la soudain apparition de Bastien en jetant un coup d'œil à sa carte. Les sorts d'Esmé ne faisant plus effet. Elle conclut simplement qu'elle avait mal dû regarder. Mais maintenant, ça n'avait plus d'importance car ils étaient éliminés.

 Esmé s'aperçus seulement à ce moment là que son brassard, comme celui d'Alice et de Bastien, avait viré au blanc, ils avaient sentit l'énergie de la Source et l'avaient prise pour un sort éliminatoire…

Le petit groupe prit donc le chemin de l'école comme s'il ne s'était rien passé.

Esmé était furieuse contre elle-même, son plan avait parfaitement fonctionné mais elle n'avait pas tenu compte du fait qu'Alice pouvait vous retirer un souvenir aussi facilement… Le résultat était un échec car même si la réaction de terreur de Bastien l'avait un peu touché, elle n'en montrait absolument rien… Il fallait absolument qu'Esmé trouve autre chose…. Et vite ! Il fallait qu'elle sorte Alice de son aveuglement envers ce type…elle n'avait que quelques jours devant elle…

Pendant ce temps le jeu continuait avec les deux derniers participants en lice : Mahée et Clément. Juste avant la nuit, les deux jeunes gens s'affrontèrent.

Cette année là, le Grand jeu ne dura que 35heures et 52 min, un record, et il fut gagné par Mahée Macfelson.

***

Esméralda passa la majeur partie de la fin de l'après midi à réfléchire à comment elle pourrait bien faire comprendre à Alice qu'elle ne devait accorder aucune confiance à Bastien.

Totalement à court d'imagination, elle décida, après le dîner, d'aller assister aux présentations nocturnes des chefs d'œuvre des sixièmes années. De toute façon elle n'avait que ça à faire car, une fois encore, Alice et Bastien avaient disparu.

Sur le chemin pour se rendre sur le lieu de la présentation, elle croisa Mélissa Laguentrie et Joachim Bratreaucourre (tout les deux en sixième année à la Chapelle) en pleine querelle d'amoureux. Esmé, dont l'extrême curiosité (certain diront l'indiscrétion) était de notoriété publique,  ralentit le pas pour connaître la cause de cette altercation. De toute évidence, Mélissa reprochait à Joachim d'avoir flirté avec Mlle Peutidoie (5ème année à la Chapelle), ce qui constituait un cas grave d'infidélité à ses yeux.

Esmé rigolait doucement pour elle-même… Si seulement il n'y avait eu que Danaé Peutidoie… La liste des infidélités de Sir Bratreaucourre était d'une longueur affligeante… Comment Mélissa avait-elle fait pour être aussi aveugle jusqu'à maintenant ?

La querelle s'acheva par un pathétique « je veux plus jamais te voir » dit par la voix pleine de sanglot de la pauvre Mlle Laguentrie. La jeune fille s'éloigna de son désormais ex-petit ami d'un manière qui se voulait digne. Le jeune homme la regarda s'éloigner avant de réagir et de lui courir après en réitérant ses excuses…

Esmé continua à observer  le couple de loin, même si à présent elle n'entendait plus ce qu'ils disaient elle avait comme l'impression que Joachim pourrait bien dire tout ce qu'il voudrait Mélissa ne reviendrait pas sur sa décision. L'infidélité est une chose qui se pardonne difficilement.

Esmé trouvait cette querelle un peu pitoyable mais elle avait eut le mérite de lui donner une idée… Elle ne savait pas encore comment elle allait s'y prendre mais c'était ça la solution…

Esmé assista d'un œil vide aux chefs d'œuvre de quatre malheureux 6ème année, dont un mit le feu à la tente recouvrant le stand le plus proche. Elle réfléchissait.

Quand le dernier élève fut passé et que l'on eut réussi à éteindre le début d'incendie. Esmé suivit machinalement les élèves qui regagnaient leurs loges respectives. Comme elle ne faisait pas vraiment attention à sa trajectoire exacte elle heurta de plein fouet une autre élève.

Il s'agissait de Mlle Fleur Delacours.

Les deux jeunes filles évitèrent de justesse de se lancer des injures à la figure car à quelques mètres d'elles de tenait Mme Maxime. Elles se firent mutuellement des excuses d'une froide politesse en s'échangeant des regards lourds de sous-entendus et s'éloignèrent rapidement l'une de l'autre.

Esmé observa du coin de l'œil la demi-vélane rejoindre un groupe d'élève de sa propre loge. Décidément elle n'aimait pas cette fille, surtout que celle-ci avait encore embellit durant l'année et que même les derniers années tombaient parfois sous son charme. C'était de la concurrence déloyale !

Même si elle ne savait pas encore comment elle allait faire, Esmé savait quelle fille elle allait mêler à cette histoire.

***

Esméralda avait eu du mal à trouver le protocole d'envoûtement approprié, et avait eu encore plus de mal à obtenir les ingrédients nécessaires à sa confection car elle était très limité par le temps. Mais tout était près le 14 en fin d'après midi. Restait à attendre le bon moment pour le mettre en œuvre.

Ce moment ce présenta vers 21h30 alors que le bal commençait juste. Esmé vit Fleur s'éclipser pour aller prendre l'air.

Esmé, qui savait tout sur tous le monde ou presque, savait que la jeune fille allait s'isoler pour un petit moment loin de la cohue et du groupe de garçon qui la harcelait quasiment en permanence. Esmé savait aussi qu'elle avait tous juste un quart  d'heure pour réaliser son plan.

Tout d'abord, il fallait séparer Alice et Bastien. Chose plus facile à dire qu'à faire. Esmé réussit à envoyer le jeune homme chercher des rafraîchissements. Comme il y avait du monde il en aurait pour un petit moment. Ensuite Alice, sans le savoir, lui facilita la tâche en se s'éclipsant momentanément pour aller se « repoudrer le nez» comme disent les dames élégantes.

Esmé attendit que Bastien revienne. Celui-ci l'interrogea sur où était passé Alice. Avec un mensonge éhonté, Esmé l'envoya faire un tour dans le jardin où elle était sûr qu'il tomberait sur Fleur. Ne restait plus qu'à finaliser l'envoûtement et envoyer Alice constater le résultat… C'était presque trop facile.

Alice revint quelques minutes après que la silhouette de son Bastien chéri ait  disparu dans le jardin. Alice s'inquiéta de l'absence de celui-ci. Tout naturellement, Esmé envoya son amie le rejoindre dans le jardin. A présent toutes les pièces étaient en jeu. La jeune fille croisa les doigts et dit une petite prière pour le bon déroulement de son plan.

Esmé regarda Alice s'éloigner. Elle la suivit discrètement.

Dehors la nuit était sombre, à peine éclairée par un pâle croissant de lune. Un vent frais agitait la verdure. Au loin, on entendait le ressac de la mer sur les rochers.

Alice suivit l'indication que lui avait fourni Esmé et se rendit dans le jardin. Elle marcha un peu, après la chaleur du chapiteau où avait lieu le bal, la fraîcheur de la nuit lui faisait du bien. Elle scruta la pénombre à la recherche de son cher et tendre.

Elle trouva Bastien…

Elle trouva Fleur…

Elle sentit quelque chose en elle se briser.

Son premier geste fut de colère et de rage. D'un geste violent de la main elle détruisit cette vision ignoble. Le sort qu'elle utilisa envoya Fleur percuter un arbre et brisa l'envoûtement qu'avait lancé Esmé.

Bastien aurait aimé lui expliquer mais lui même ne comprenait pas ce qui s'était passé. Et puis Alice n'avait pas l'air en état d'écouter quoi que ce soit. Il croisa le regard de la jeune fille aux cheveux blancs et bleus. Bastien y  vit la profonde blessure qu'il venait de lui faire.

Alice tourna les talons et s'éloigna dans le nuit. Elle n'avait émis aucune protestation, aucune remontrance, elle n'avait pas fait de scène, elle ne s'était pas mise en colère…Elle avait tourné les talons et s'était éloignée dans le nuit, c'est tout.

Ce silence était plus éloquent que tous les discours du monde. Il n'existait aucun mot plus fort, aucun argument pour le faire ployer, rien à y répondre… Accepter, c'était le seul choix qu'il vous laissait.

Mais Bastien ne voulait pas accepter. Il voulut rattraper Alice. Il reçut un choc violent dans l'épaule qui le fit tomber en arrière. Il se releva mais un autre coup le mit à terre de nouveau. Il appela Alice… la supplia…en vain.

La silhouette de la jeune fille fut engloutie par la nuit.

Dans le vide Bastien cria une dernière fois le prénom d'Alice. Sa voix chargée de désespoir se brisa en des larmes silencieuses.

***

Esmé avait suivi toute la scène de loin. Et même si elle ne l'aimait pas, elle fut effrayée par le vole-plané que fit Fleur. Mais le silence qui suivit était bien plus effrayant. Pourquoi ne disait-elle rien ? Pourquoi ne se mettait-elle pas en colère comme le ferait n'importe quelle fille de 18 ans ?

Alice n'était pas n'importe quelle fille de 18 ans…

L'horreur de ce qu'elle avait fait lui apparut et Esmé se rendit compte qu'elle était allée beaucoup trop loin…

Mais qu'avait-elle fait ?

Elle fut pris d'un violent dégoût envers elle-même. Elle s'était laissée aveugler par sa haine contre Bastien et en voulant s'en prendre à lui elle avait cruellement blessé Alice.

Mon dieu ! Mais qu'avait-elle fait ?

Comment avait-elle put oublier à ce point la promesse de toujours protéger la pauvre petite Alice qu'elle avait fait quelques années plus tôt ? Aujourd'hui elle avait fait le contraire de tout ça. Quelle amie était-elle donc pour faire des choses pareilles. Comment pourrait-elle se regarder dans un miroir après ça ?

Mon Dieu ! Qu'ai-je fait ?

Perdue dans sa propre horreur d'elle même, elle vit la silhouette de son amie disparaître dans la nuit. Tout à coup, une peur immense l'envahit. Qu'allait faire Alice à présent ? Cette angoisse terrible lui coupa la respiration.

Mon Dieu ! Mais qu'ai-je fait ?

Esmé partit à la poursuite d'Alice le cœur prêt à exploser sous l'effet de  cette folle angoisse. Sauver ce qui pouvait encore l'être  voilà tout son espoir.

Mon Dieu, qu'est ce que j'ai fait…..

***

Esmé erra un long moment dans les jardin sans trouver aucune trace d'Alice.

Où était-elle ?

La jeune fille commençait à se décourager … Si Alice avait utilisé un sort d'invisibilité elle n'avait aucune chance de la trouver…

« Les étoiles sont tristes ce soir… »

La voix atone et triste d'Alice fit sursauter Esmé. Elle était là, juste à côté d'elle, recroquevillée au pied d'une vieille statut de Diane.

 « … le ciel est triste, la mer est triste, le jardin est triste… cette nuit est triste… »

Esmé ne saisissait pas le sens de ces paroles.

- Ecoute moi Alice, il faut que je te dise…

- … mon cœur est triste… Oui cette nuit est bien triste…

- S'il te plait écoute moi…

- Ma fidèle Esmé, qu'est ce que je vais devenir maintenant… Murmura Alice qui s'était redressé et se relevait doucement. Qu'est ce que je vais faire ?

Submergé par une vague de chagrin l'image d'Alice vacilla. La jeune fille fit un pas en arrière et disparut.

Juste avant qu'elle ne disparaisse Esmé remarqua un geste imperceptible que fit Alice. Un éclair de lucidité assaillit Esmé. Ho non…  Tu ne m'aurais pas cacher ça … Dis moi que tu n'as pas garder un secret comme ça pour toi toute seule… Alice …

Quelle gâchis et c'est entièrement ma faute… Mon Dieu ! qu'ai-je fait ?

« ALICE !!! »