Louveteau 1 : La Meute

Mi-mai, et ils étaient en pleine canicule. Remus détestait le mot autant que la chaleur, et les rayons du soleil à travers les fenêtres l'empêchaient de se concentrer sur Du Côté de chez Swann. Lorsque sa mère entra, en portant les ingrédients d'une potion infecte, il grogna et monta dans sa chambre en courant.

Il faisait encore plus chaud en haut, naturellement, mais au moins il avait son intimité. D'une certaine façon : il avait arraché la porte de ses gonds il y a des années, qui avait forcé sa mère à construire une cabane en métal dans la cour arrière. Il retraçait maintenant les éraflures aux murs, étonné qu'il ait jamais été si petit.

Son corps humain était loin de la puberté—il ne mesurait guère quatre pieds cinq pouces et pesait à peine 35 kilos—mais son adolescence canine commençait à point. Ses pattes n'étaient plus trop grandes pour ses jambes, sa fourrure s'est transformée du duvet blanc aux poils raides d'une couleur gris brunâtre, et sa dentition de bébé avait été échangée contre des canines luisantes de trois centimètres de long. Les changements physiques étaient accompagnés par des désirs : de courir avec la meute, de diriger la meute, et surtout de chasser. Mais s'il n'arrivait pas à échapper des murs en aluminium, il ne chasserait jamais que des souris—bien qu'il sache que ses voisins les plus proches avaient des jumeaux de deux ans. Un kilomètre à travers les champs, qui ne serait qu'une petite foulée... pourvu qu'il soit libre. Laisse tomber les bébés, ils n'étaient que des amuse-gueules : il mangerait les parents. Un bébé pour le dessert, s'il aurait encore faim.

La chaleur et le désarroi lui donnaient mal à la tête, et en regardant son calendrier lunaire, il aperçut qu'il y avait encore trois jours avant la pleine lune. (Ce qui restait de l'humain en lui gémit : il se sentait comme ça trois jours en avance? Que Dieu le prenne en pitié). La bête reprit vite le dessus: trois jours. Si elle préparait une potion, il pourrait sortir par la fenêtre, se glisser dans la cabane métallique, et... et peut-être faire quelque chose que les pouces pourraient faire et les pattes non. Il pourrait se servir d'une scie, au moins.

Il ouvrit la fenêtre et regarda le paysage, content de l'isolation de la maison à cause de sa proximité à la forêt. Combien de son espèce courraient-ils en liberté ce mois-ci? Cette fois il irait les rejoindre, leur démontrait qui était le plus grand et le plus fort. Stupidement, il renifla—mais un nez humain, bien sûr, ne lui dirait rien. Ce bout de chair inutile n'était même pas digne du nom de nez. Et les oreilles! Toujours orientées dans la même direction. Incapables de registrer les fréquences élevées, même le couinement d'une souris leur échappait. Créatures inférieures. S'il avait le choix, il resterait un loup vingt-neuf jours sur vingt-neuf.

Il venait de mettre son pied sur le rebord de la fenêtre lorsqu'un objet apparut dans le ciel devant lui. Les yeux humains ne détectaient guère le mouvement, mais ils enregistraient bien la couleur, et il aperçut qu'il agissait d'une chouette hulotte. Il s'attendait à ce qu'elle descende pour entrer au rez-de-chaussée, où était sa mère, mais il s'écarta avec surprise quand elle continua vers lui.

La chouette sembla aussi étonnée que lui, et elle laissa tomber la lettre et disparut dans le ciel ensoleillé. La lettre gisait à l'envers sur le plancher égratigné, le sceau sur le dessous ayant l'air énorme et dérisoire.

Il l'avait reconnue, sans question. Il avait vu celle de sa mère, il y a des années : il y a une moitié de sa vie, lorsqu'il avait été encore un enfant et pas un louveteau. Ils rodaient dans le parc de leur ancienne ville, lui et sa mère, quand un gang de créatures méchantes leur barrèrent le chemin. Sa mère sortit sa baguette magique : « Des chaporouges, » dit-elle, « cache-toi. » Mais il agita la main et ils disparurent, avant qu'il ne sache ce qui arrivait.

Elle en avait été tellement fière. Cela n'avait pas été sa première magie, à lui; il avait transformé son petit canard en caoutchouc en un vrai cygne une fois dans le bain, et s'était échappé aux petites brutes d'école une douzaine de fois, mais cette fois elle avait été sure, et elle avait sorti sa vieille malle de Poudlard et lui avait montré tout ce qui l'attendrait pour son onzième anniversaire.

Ce qu'ils n'avaient pas su était que les chaporouges avaient été là parce que, il y avait quatre mois, une enfant avait été tuée et ses parents mordus par un loup-garou. Comblés de honte, le couple s'est enfui—dans un coin perdu pareil à celui-ci, sans doute. Ils n'avaient rien dit à personne, et dans un mois à peine, ce serait le tour de Remus. La vieille sorcière qui avait soigné sa morsure lui avait raconté cette histoire; il avait été beaucoup trop jeune pour comprendre pourquoi les victimes avaient choisi de garder le secret.

Son père passa toute l'année suivante à la recherche d'une cure. Tout ce que Remus se rappelait de lui était un silence pesant, ponctué par des cadeaux de fioles horrifiantes dont il était obligé d'avaler le contenu. Des choses qui puaient, crachaient, ou se tortillaient, se cachaient sous les verres noirs et les étiquettes en roumain. Un de ces médicaments lui avait fait tomber les cheveux (il était devenu toujours un loup-garou ce mois-là, ne serait-ce qu'un moins poilu); un autre lui avait fait couler du sang de partout, même des yeux. La dernière tentative l'avait empêché de dormir le mois entier, en passant ses nuits hurlant devant des visions dont le souvenir le faisait encore frémir d'horreur. Peu après, M. Lupin avait laissé tomber et était parti avec une jolie jeune sorcière de Transylvanie.

Maman était seule depuis, et Remus essayait de cacher son soulagement d'être épargné des potions.

Leur famille, dont ils avaient peur, s'arrêta de leur parler après que le pire fut arrivé chez sa tante bien aimée. En tant que Moldue, qui comprenait à peine que sa soeur était une sorcière, comment est-ce qu'elle pourrait arriver à reconnaître que son neveu mignon était devenu un monstre mythique auquel elle ne croyait même pas? Mais ne pas y croire ne l'empêcherait pas d'avoir des crocs pointus. Soit la morsure d'un petit louveteau ne transmettait pas le sort, soit les Moldus n'y étaient pas sensibles, mais elle ne s'était jamais transformée après que Remus la mordit, bien que la blessure lui donnât un mal de chien (si vous permettez l'expression) pendant quelques pleines lunes.

Sa mère prit Remus et déménagea à la campagne, en n'osant jamais rien lui dire : sur le départ de son père, sur son avenir à lui, si les transformations seraient plus faciles à supporter avec l'age ou s'il deviendrait de plus en plus monstrueux. Elle marchait à tâtons dans leur petite maison, comme s'il était un fantôme particulièrement troublé, et lui adressait la parole toujours à voix basse.

Il renifla encore, en se demandant où elle était—et arriva à deviner qu'on mangerait de l'agneau pour le souper. C'était sans doute son cadeau de fête; elle saurait bien qu'il ne mangerait pas de gâteau à cette phase. Il avait envie de descendre afin de lui dire de ne pas trop cuire la viande cette fois.

Mais c'était ses pas dans l'escalier. Elle ne montait jamais dans sa chambre. Remus se souvint soudainement de la lettre et la glissa sous le lit d'un coup de pied, puis se mit au lit, les couvertures sur la tête, en faisant semblant de dormir.

Elle pénétra avec hésitation dans la petite pièce à la porte cassée et aux murs défigurés. « J'ai vu la chouette, » dit-elle, la voix tremblante d'excitation.

Elle a vu la chouette. Ce qui voulait dire qu'elle pouvait voir la cabane. Qu'est-ce qu'elle ferait si elle le surprenait en train de se faire une sortie sous sa forme humaine? Lui arracher toutes les dents et l'envoyer à Azkaban, sans doute. Il grogna et n'écoutait guère ses phrases suivantes.

« Mais est-ce que tu ne comprends pas? Ça veut dire que tu es accepté, » elle expliqua avec une patience exagérée. « J'ai demandé, il y a deux ans, on m'a dit que c'était impossible... »

« Grrr.... » dit Remus.

Elle poussa un soupir, et il sortit la tête pour la voir regarder sa montre lunaire. Idiote! pensa-t-il. Cette fois je ne change pas lorsque la lune décroît.

« Mais ne veux-tu pas y aller? » demanda-t-elle. « Je veux dire, tu n'es pas obligé, mais tu pourrais être un grand sorcier... »

« Qu'est-ce qu'ils font lorsqu'un enfant meurt? » Il interrompit d'un ton cruel. « Ils oublient de rayer son nom de la liste dans ce cas aussi? »

« Tu n'es pas, » sa voix cassa, « mort, et tu ne sais pas ce qu'elle dit si tu ne l'as pas ouverte. S'il te plaît, laisse-moi l'ouvrir. Tu ne dois pas regarder si tu ne le veux pas. »

Il lui dit où la lettre se cachait, et elle la chercha comme si elle entrait dans la cage aux lions au zoo. Elle se retira vite vers le seuil, lui donna un regard nerveux, et ouvrit l'enveloppe.

J'irai au Canada, pensa-t-il. Rôder dans les forêts et attraper des chasseurs à castor par la gorge...

« Regarde! » cria-t-elle, le tirant guère de sa rêverie. « Albus Dumbledore est devenu le directeur! Il était mon professeur favori... il avait toujours une solution à n'importe quel problème, même s'il fallait contourner les règlements... » Elle tira trois rouleaux de parchemin de l'enveloppe, dont deux grands et un petit. Elle lut le petit, se mordit la lèvre inférieure, et relut à haute voix.

« Chère M. Lupin,

Je suis au courant de vos circonstances particulières, et je suis certain que nous pourrons nous y adapter sans compromettre ni votre sécurité ni celle des autres élèves. Si vous souhaitez aller à Poudlard, veuillez me contacter par hibou avant le 1ier août afin de finaliser les préparatifs.

Je vous prie de croire en mes sentiments distingués,

Albus Dumbledore

Directeur. »

Remus pensait des orignaux. Il resta immobile et refusa de répondre, sauf en grognant.

Sa mère poussa un grand soupir et rangea la lettre dans sa poche. « Alors, prends quelques jours pour y penser. »

Cet euphémisme était le plus proche qu'elle se soit jamais approchée à en parler.

Quatre jours plus tard, la lune était redevenue gibbeuse et Remus allait encore à l'école. (Il évitait d'y aller pendant une semaine entière depuis qu'il avait essayé de mordre un gars et le directeur avait appelé sa mère. Cette dernière avait failli s'évanouir lorsqu'elle avait entendu son surnom de « garçon-chien. »)

Il finissait maintenant son essai sur Proust, le dernier travail de l'année scolaire, pendant que sa mère tranchait des champignons et les arrangeait sur une feuille de papier afin de ramasser les spores. Elle avait cueilli des fraises aussi, qu'il grignotait en écrivant, en essayant de ne pas perdre trop d'encre. Ils avaient du papier Moldu, mais il utilisait toujours une plume.

Un soupir de sa mère le fit lever la tête, en aspergeant de l'encre sur son travail. Il s'attendait à ce qu'il y ait un problème avec les champignons—mais elle le regardait, lui.

« Il y a quelque chose qui ne va pas? » il demanda, un peu nerveux sous ce regard.

Elle se tordit les mains. Elle faisait beaucoup plus que son âge, grise et fatiguée—c'est de ma faute, pensa-t-il en se sentant coupable.

« As-tu pensé à—à la lettre? »

« Pas trop, » mentit-il.

« Chéri » -ça faisait des années qu'elle ne l'appelait pas comme ça!—« si Albus Dumbledore croit que ça va aller, tu n'as rien à craindre. Tu ne le connais pas, mais moi si : il est toujours juste, il se fie à ses élèves et les laisse penser par eux-mêmes... »

Très bien, mais ce vieux immangeable n'est pas seul à l'école, pensa Remus. Il ne pouvait pas s'imaginer dans un dortoir avec des enfants, des enfants humains, pendant une de ses phases bestiales. « Maman, je suis un monstre vorace assoiffé de sang, » ne dit-il pas, en se triturant les méninges pour une autre façon d'expliquer. « Mais si... tu me connais... pendant une semaine entière, des fois... » Toutes ses années à ne pas en parler le rendaient incapable de dire de plus. Puis il s'exclama, « J'essaie de faire des trous dans la cabane tout le temps! Même sous forme humaine! Il ne faut pas se fier à moi! » Avec la lune qui décroissait, la bête en lui n'avait guère la force de glapir.

Diane Lupin eut un sourire triste. « Je sais, mon chéri, je sais. Pourquoi penses-tu que la cabane se trouve si près de ma fenêtre? ... Et Dumbledore le sait aussi, j'en suis sure. »

Il fixa les yeux à son devoir pour ne pas pleurer, accablé par le savoir qu'elle savait plus qu'il aurait jamais imaginé. « Alors qu'est-ce que on va...? »

« Il y a une chambre quelconque pour toi, loin de l'école, d'où tu ne pourras pas sortir tout seul... C'est plus sécuritaire de ce qu'on a ici, sans doute. »

L'implication de ses mots le frappa enfin. « Tu a déjà parlé à Dumbledore, alors » dit-il, mais d'un ton joyeux, pas accusateur. Il se sentait excité malgré soi : sur quel sujet écrirait-il ses devoirs l'année prochaine?

Elle sourit, elle aussi. « Bien sûr. Je n'ai pas pu m'empêcher. Il veut toujours te parler—enfin, si tu veux... »

« Je veux bien, » Remus admit. « Plus que tout au monde. » Une idée horrible lui vint à l'esprit. « Mais savent-ils... sauront-ils... Seront-ils tous au courant? »

« Dumbledore m'a dit que ce serait ton choix. Tu serais assez loin pour que personne n'aperçoive. »

« Mon choix à moi? » Il eut un vrai sourire, en commençant à croire qu'il y aurait quelqu'un dans ce bas monde qui se fierait à lui. « Il a vraiment dit ça? Bien sûr que ce sera un secret! Je leur dirai... » il essaya de trouver quelque chose.

« Dis-leur que je suis malade, » suggéra-t-elle presque immédiatement. Remus se sentit coupable à son talent à elle de mentir pour lui. « Et si quelqu'un se rend compte que c'est toujours, euh, à la même phase, dis-lui que c'est moi qui suis le... »

« Maman! Le médecin t'a dit que je serais toujours un monstre, pas un menteur!» La farce plate mais choquante les fit éclater de rire.

« Oui, ne dis-leur rien, » elle se corrigea. « Laisse-les deviner, et ils l'expliqueront d'une façon qui leur sera convenable. »

Ensuite elle fit quelque chose qu'elle ne faisait pas depuis six ans : elle s'approcha de son fils, ébouriffa ses cheveux, et l'étreignit. « Tu seras un bon sorcier, » elle répéta, en essuyant les yeux. « Je suis si fière de toi. »

« Il me manque la pratique, tu sais, » il admit. « J'ai lu tous tes livres, bien sûr, mais on n'a pas de balai dans la maison... »

« Il y aura des enfants des familles Moldues qui ne sauront même pas qu'on peut voler à balai, » promit-elle.

Ils se remirent à rire. Son existence entière étant liée au monde des sorciers, Remus n'avait jamais imaginé la vie d'un enfant Moldu.

« Et tu sais... » Elle redevint solennelle, et se concentra à sa potion pour ne pas devoir lui regarder dans les yeux. « ...Si tu développes tes pouvoirs, ça t'aidera à lutter contre tes propres— ténèbres, j'en suis certaine. Tu pourrais même... je ne sais pas, trouver une cure ou quelque chose de pareil. Mais il faudrait que tu sois meilleur aux potions que moi, » elle finit avec un sourire, en indiquant les champignons. « Je ne peux même pas réussir à chasser les limaces du jardin. »

Remus eut l'air pensif. « Il faut des Amanita calyptrata pour cette potion-là, n'est-ce pas? » suggéra-t-il. « Ceux-ci sont des ocreata. »

« Vraiment? »

« Oui, regarde comment les capuchons sont striés? Ils devraient être lisses. Autant que je sache, au moins. » Il se mit debout à la recherche du livre.

Elle rangea son pilon et mit ses pieds dans ses souliers. « Tu veux nous promener dans la forêt, alors? Je vais te montrer où je les ai cueillis. Il fera jour pendant encore une heure. »

« D'accord, » Remus approuva, en sachant qu'elle voulait parler de Poudlard, mais en essayant de ne pas se laisser devenir surexcitée. Il n'avait même pas encore parlé à Dumbledore, et quelque chose en lui avait peur que le directeur ne soit rien de plus qu'un fou.

« Si le soleil se couche lorsque nous sommes dans la forêt, nous pourrions chercher des Armillariella aussi, » suggéra-t-elle. « On peut en faire une potion de luminosité, pour que n'importe quel objet devienne fluorescent. La dernière fois, elle n'a pas marché—mais si tu veux savoir, j'étais nulle en Potions. Sans doute parce que le professeur est toujours un Serpentard... »

Il écoutait pendant la promenade, silencieux mais captivé par les histoires des quatre Maisons, de Hagrid le jardinier, du château, et même du Chemin de Traverse où il était allé une fois mais dont il ne se souvenait pas. Elle refusa de lui dire comment marchait la Répartition, sauf pour dire qu'il s'agissait d'une « surprise magnifique. » En connaissant sa maman, ça pourrait dire chevaucher un hippogriffe pour échapper à un troll à deux têtes qui te poursuivait sur les champs lorsque tu avais les yeux bandés.

« Nous pouvons aller à Londres à la fin de l'année scolaire acheter tout ce qu'il te fera, » elle promit. « Que tu voies chez Ollivander!»

Mais il s'est arrêté d'entendre. La fin du trimestre serait dans trois semaines : gibbeuse croissante, encore une fois. « Euh, peut-être la semaine après, » il suggéra d'une très petite voix.

« Bien. Oui. » Elle essaya, mais échoua complètement, de cacher son choc et (oui) son dégoût.

L'abîme entre eux se rouvrit, et ils entrèrent en silence dans la forêt à la recherche des champignons.

Six mois plus tard

Diane Lupin grelottait dans ses vêtements Moldus sur la Voie 9 (un « jean »! quelle invention horrible) en attendant que les élèves apparaissent à travers la barrière pour leur congé de Noël. Ses yeux viraient instinctivement vers les enfants solitaires, ceux qui regardaient leurs propres pieds et hâtaient de rejoindre leurs parents. Un petit garçon pleurait sans cesse, le pauvre, mais elle devina pourquoi : son hibou était mort et raide dans sa cage. Il se promenait avec depuis une semaine, sans doute, à en juger par l'odeur. Un autre garçon était couvert de la tête aux pieds de bave épaisse et verte, mais il était blond et dodu, définitivement pas son fils.

Elle ne vit même pas le trio rieur avant qu'il faillît la heurter.

« Oh, mon dieu... » Remus riait à quelque chose que venait de dire son compagnon, écoutant encore pendant qu'il remplissait les mains de sa mère de boîtes. « Celle-là, c'est un cadeau pour toi, et ça—tiens Souricide, peux-tu? » Il lui donna le hibou. « Je m'occupe de la malle. Maman, c'est sérieux. »

« Qu'est-ce qui est sérieux? » demanda-t-elle, apeurée.

Le grand brun devant elle aboya de rire. « Moi, je suis sérieux. Sirius Black, enchanté. Lui c'est James Potter. Nous sommes tous des Gryffondor ensemble. »

Ce grand garçon poilu avait l'air assez canin, pensa-t-elle. Ce serait très facile de l'imaginer comme un gros chien noir... mais, non, ce n'était pas juste. Il était humain et il semblait être un ami de Remus. « Intéressant, » dit-elle. « Ton père et moi étions des Serdaigle. Tu es peut-être plus courageux que moi... »

« Ou moins intelligent, » Sirius suggéra.

Elle grimaça, mais bien que la pleine lune arrive dans trois jours, son fils ne fit qu'un petit sourire. « Moins intelligent? » il s'exclama. « Alors, Sirius, je pensais que cette huche à pain aurait dû se transformer en ours... pas en nounours! »

Sirius eut l'air un peu gêné. « Je t'ai dit, Severus a fait ça pour se venger du sortilège de rougeole! Et on sait bien auquel sujet tu échoueras. »

« Auquel ? » demanda Remus.

« Défense contre les garces du mal! » Il aboya encore.

« Où et Peter, d'ailleurs? » James demanda avec un air innocent.

« Que tu es méchant! » cria Remus. « Je ne sais pas où il se trouve... Peter? » il regarda autour de lui. « Peter! »

Le garçon à bave verte se traîna vers les autres, les yeux humides. « Euh, salut les gars... Les Serpentard... »

Les trois autres mirent leur main sur leur ceinture, puis se rendirent compte d'être habillés en Moldu et se mirent à rire.

«On va les avoir en janvier, » James promit. « J'ai déjà un plan. »

Diane chercha sa baguette dans la poche de son jean et débarrassa Peter de sa bave. Elle sentait les yeux des trois garçons rivés sur elle; trop tard, elle se souvint qu'elle était censée être malade. J'ai dû prendre une Infusion d'Infirme, pensa-t-elle, en jetant un regard vers son fils pour deviner si elle faisait une erreur fatale. Mais il semblait heureux et souriant, en ramassant toutes ses affaires dans sa malle pour leur voyage dans le train Moldu.

« Je suis ravie d'avoir fait votre connaissance, à vous tous » dit-elle, « mais il faut que nous courions à la Voie 3. On se reverra, je suis certaine. »

« Viens pour le réveillon, » James dit à Remus. « Nous ferons une grande fête... » Il dévisagea Diane avec curiosité, mais sans l'œil pénétrant de Sirius. Celui-là a de meilleures manières, pensa-t-elle, et il ne me rappelle pas un chien.

Miraculeusement, lorsqu'ils furent assis dans le train qui menait à leur petit village, la bonne humeur de Remus continua. Diane n'arriva pas à y croire, surtout quand la lune, presque toute ronde, se leva à l'est. Est-ce qu'il y aurait une éclipse?

Il lui racontait tout ce qui était passé, depuis la Répartition (« Tu m'avais fait peur! C'était juste un chapeau! ») aux cours, professeurs, et retenues avec Sirius. Il parla plus en deux heures qu'il avait fait pendant les six dernières années.

« Et alors... » il s'arrêta au milieu d'une phrase. « Alors, nous avons... » Il bâilla. «Bien. Oui. Je disais quoi...? »

« Euh... James veut devenir l'Attrapeur? » elle essaya, ayant prêté plus d'attention au changement de son fils qu'au contenu de l'histoire.

« C'est ça, et pendant son essai, le Vif d'Or... » Il bâilla encore et s'allongea sur son siège. Elle trouva une couverture qu'elle mit sur lui; il marmonna « J'allais te dire... » et s'endormit profondément.

Diane regarda par la fenêtre : au ciel, aux étoiles, à la lune qu'elle avait appris à détester... et puis se retourna encore vers son fils, qui dormait avec un sourire aux lèvres.

Son louveteau avait enfin trouvé sa meute.