Chapitre cinq : départ
-bien récapitulons calmement ok ? dit Will.
Il semblait commencer à sérieusement s'énerver et il sentait son cœur battre fort contre sa poitrine.
-Alors pour commencer, Mary peut utiliser la magie des runes...
-Peut être que tout le monde peut le faire, le contredit Mary. Je n'ai fait que suivre le dessin en disant sa représentation à haute voix.
-Non, coupa Serafina. Tu as ce pouvoir, que tu le veuille ou non. Je n'aurais pas pu le faire, même si j'avais voulu, pas plus que tu ne pourrais réaliser un sortilège de sorcière.
-Ensuite, reprit Will, une carte du monde où apparaît une île inconnue, et enfin, cette île serait le pays de la Mort, c'est-à-dire notre destination c'est bien ça ???
Il était à présent hors de lui, mais ne savait pas pourquoi. Il avait pourtant vécu nombre d'aventure aussi bizarre que celle-ci lorsqu'il avait refermé toute les fenêtres !
-Calme toi Will, dit le Maître d'une voix ferme. Il semblerait que ce soit effectivement ce qui se passe.
-Mais Maître, commença Lyra. C'est impossible. Vous savez aussi bien que moi que cette île n'existe pas. Elle ne peut pas exister. Nos meilleurs marins ont parcourut les mers pour dresser les carets que nous connaissons, mais aucune de ces cartes ne la mentionne !
-Lyra as-tu entendu parler des Tourbîles ?
-Non, avoua cette dernière. De quoi s'agit il ?
-e sais que tu as reçu une éducation partielle, que Dame Hannah a essayer de combler au cours des deux dernière années. Mais tu n'as pas entendu parler des Tourbîles car il s'agit d'un mystère pour nous tous. L'Eglise a déclaré cette partie de la planète comme hérétique, et interdit d'être cité dans les écoles et les bâtiments publics sous contrôle de l'Eglise. Jordan y est bien sûr soumis mais à sa façon...
Il eut un clin d'œil complice avec Lyra et Will comprit que l'Eglise avait ici un contrôle pour le moins relatif.
-Toujours est il que ces Tourbîles ce trouve effectivement dans cette partie du globe terrestre. On ne connaît pas sa position exacte tout simplement car tous les bateaux qui s'en sont approchés ont disparus sans laisser de trace.
-Par ici dites vous ?coupa Mary. Will ça correspond plus ou moins à...
-Je sais. Le Triangle des Bermudes. Tu crois qu'il y a un lien ?
-C'est plus que probable, dit Mary.
-Les Tourbîles se représentent sous forme d'un gigantesque tourbillon qui aspire tout ce qui passe à proximité de ce passage. Ce qui se passe ensuite, personne ne le sait. Il est possible que le pays de ce Yambe-Akka soit ici.
-Bien. Nous partons demain matin, conclut Will. Il est temps de se reposer un peu. Merci pour votre aide Maître.
-Je ne peux que vous souhaiter bonne chance et prier pour vous, malheureusement.
-C'est plus qu'il n'en faut, assura Lyra. Vous avez fait beaucoup pour moi, merci.
Elle le serra dans ses bras et sortit ensuite de la pièce, suivie de Will, Mary et Serafina, qui rejoignirent chacun leur chambre. Le Maître resta encore un moment dans le Salon, contemplant le feu sans le voir, les yeux dans le vague.
-Ils vont risquer leur vie à nouveau.
Son daemon, un corbeau, se posa sur la tête du fauteuil.
-Oui, mais on ne peux rien y faire. Des forces supérieures au notre sont en marche.
Sur cette remarque de son daemon, le Maître se leva, éteignit le feu avec un pichet d'eau prévu à cette occasion et sortit de la pièce en silence. Ni lui, ni son daemon n'avait vu cette ombre cachée dans le coin le plus ombre de la salle, un sourire malveillant sur les lèvres. Doysa savait se rendre invisible quand il le fallait, du moins ne se faisait il pas remarquer, et aucune personne de la discussion de ce soir ne se doutait que l'assassin soit déjà sur place.
Doysa, le regard sur les braises encore rougeoyante, se pencha sur l'âtre et se saisit d'un tison brûlant. L'odeur de chair brûlée se répandit et il traça dans l'air immobile un dessin, une rune. Puis la rune se changea en un cercle où apparu le visage froid de son maître.
-Je suis à Jordan Collège maître. Dois je nous débarrasser immédiatement de vos ennemis ?
La voix froide et cruelle emplit la pièce.
-Non pas encore. J'ai encore besoin d'eux. Ils serviront ma cause sans le savoir, somme les anges le firent autrefois. Puis je répandrais le chaos grâce à leurs bêtises !!!
Il éclata d'un rire tonitruant et l'assassin traça une seconde rune, qui fit disparaître le cercle. Puis il quitta la pièce en silence en se glissant dans la pénombre de Jordan Collège où tous dormaient à présent.
Will s'agitait dans son sommeil. Il rêvait à présent d'un homme au visage couturé de cicatrice, penché sur son lit, qui traçaient des runes en psalmodiant des phrases incompréhensibles. En sueur, il se réveilla, se redressa et fouilla la salle du regard. Il vit alors deux yeux rouges et brillant, cruels, froids, briller dans la pénombre. Il se frotta les yeux pour se réveiller et regarda à nouveaux. Disparus. Il entendit alors Lyra hurler de toutes ses forces. Il sauta au bas de son lit et se rua dans sa chambre. La fillette, blottit contre Pantalaimon, pleurer à chaudes larmes.
-Qu'est ce qui se passe ? s'inquiéta Will.
Lyra leva des yeux chargés de larmes vers lui et dit d'une voix étouffée tandis qu'il la serrait dans ses bras.
-Je rêvais, un cauchemar, et en me réveillant, j'ai vu un homme penché sur moi. Le visage criblé de cicatrices, brandissant un couteau. Il avait un regard de fou, rouge, incandescent, cruel...
Sa voix se brisa et Will la réconforta en disant.
-Ce n'était qu'un cauchemar, rien qu'un cauchemar.
Pourtant lui aussi sentait au fond de lui une peur sournoise monter peu à peu. Il la repoussa et resta avec Lyra. Aucun d'eux ne dormit du reste de la nuit.
Le lendemain matin vint, apporta avec son soleil le réconfort pour les deux jeunes gens blottit dans le petit lit l'un contre l'autre. Quelqu'un frappa à la porte et Will, qui s'était finalement assoupi, s'éveilla. Il demanda alors, serrant son couteau au cas ou.
-Qui est là ?
-C'est moi, Mary.
Le garçon se détendit en entendant la voix de son amie et alla ouvrir la porte.
-Je ne m'attendais pas à te trouver là. Qu'est ce qui s'est passé ?
-Rien de grave. Un cauchemar commun, dit il d'un ton détaché.
Mary salua Lyra qui s'extirpait avec difficulté des draps. Will et elle se débarbouillèrent s'habillèrent en vitesse avant de descendre prendre le petit déjeuner, en compagnie de Mary et de Serafina. Puis ils ramassèrent leurs quelques affaires et partirent en direction du port, afin d'affréter un bateau pour leur expédition. Arrivé au port, ils aperçurent rapidement qu'une agitation inhabituelle secouait le peuple du port. Lyra s'approcha d'un garçon de St Mickael qu'elle connaissait et l'interrogea.
-Eh ! Qu'est ce qui se passe ici ?
-Oh salut Lyra. Ca va et toi ?dit il, ironique. Il se passe que des gitans sont venus accoster ici.
-Et alors ? Où est le problème ?
-Le problème c'est qu'ils ont avec eux une armée de sorcières !
Lyra sentit dans son dos Serafina se gonfler de colère et d'indignation.
-Et alors ? Les sorcières sont très gentilles !
-Tu rigoles ! Ce sont des démons oui !
Le regard du garçon se posa alors sur les compagnons de Lyra. Il passa de Will à Mary, puis il se posa sur Serafina. Ses voiles de soie noire volaient dans l'air frais du matin. Le garçon ne demanda son reste et s'enfuit alors à toute jambe.
-Venez, ordonna Lyra, empêchant ainsi Serafina de poursuivre le garçon pour lui tordre le cou.
Ils jouèrent des coudes pour s'approcher au plus près du quai et voir ainsi quelle peuplade de sorcière était venue jusqu'à Oxford. Lyra vit tout d'abord la péniche et elle s'arrêta sur place, incapable d'avancer plus.
-Qu'est ce qui se passe ? demanda Will.
-C'est la péniche des Costa !
Elle se rua jusqu'à la passerelle, poussant tout ceux qui lui bouchaient le passage, s'excusant quand elle pensait à le faire. Arrivé au bas de la passerelle, elle monta rapidement le pont et monta sur le bateau gitan, pour se retrouver nez à nez avec Farder Coram.
-Ca alors ! Mais c'est Lyra, feignit le vieil homme.
Lyra se jeta à son cou décharné, manquant de les faire basculer tout les deux par-dessus le bastingage. Le vieux gitan éclata de rire, imité en cela par une voix plus forte que Lyra reconnut aussitôt.
-Heureuse de vous revoir, Lord Faa.
Puis elle se jeta ensuite au cou du roi des gitans.
-Moi aussi je suis heureux de voir en pleine forme, petite. Comment vas-tu ?
-Très bien Lord Faa, et vous-même ?
-Oh ça va très bien. Mais je crois que nous devrions entrer en compagnie de tes amis pour discuter non ?
Lyra se retourna et vit que Will et les autres étaient montés à sa suite. Lord Faa les salua tous avec respect et les invita à entrer dans la cabine. Mais les hués du peuples d'Oxford continuait, et Will craignait que cela ne dégénère.
-Laisse moi faire, dit Mary.
Sans savoir vraiment comment, elle traça un sigle dans l'air qui brûla quelques instants en répétant un mot que Will ne saisit pas. Puis peu à peu, le peuple se divisa et s'écarta de la péniche, comme si elle était devenue inintéressante.
-Qu'est ce que c'était ? demanda le garçon.
-Une rune d'oubli. Ne me demande pas comment j'ai fait, je ne le sais pas.
Ils entrèrent alors en compagnie des gitans dans la cabine où les attendaient Tony Costa et d'autres gitans, au moins une dizaine, ainsi qu'une dizaine de sorcières.
-Ils se sont tous portés volontaires pour venir t'aider dans ta nouvelle aventure, expliqua Lord Faa devant l'air hébété de Lyra. Ce sont les survivants de notre dernière expédition dans le grand nord, et d'autres qui ont voulu se joindre à nous quand ils ont su que tu avait sauvé la vie de leur roi.
-Quand aux sorcières, dit Serafina d'une voix calme, c'est moi qui les ai fait venir. Hier, quand nous sommes revenu de notre aventure nocturne, j'ai envoyé Kaisa chercher quelques unes de mes sœurs les plus courageuses. Les survivantes de notre histoire il y a deux ans sont bien sûr venu, à ce que je vois, mais aussi quelques jeunes fougueuses, venu prêter main forte à celle qui a abattu l'horreur de l'Eglise. Nous te sommes toutes dévouées, termina-t-elle.
-Il en est de même pour moi et mes fidèles gitans, reprit Lord Faa.
Un terrible rugissement se fit alors entendre à l'extérieur, se répercutant dans le silence de la pièce, suivi d'un concert de rugissement moins puissant mais tout aussi effrayant au non- habitués. Lyra courut à l'extérieur et son regard se porta immédiatement là où elle savait trouver son ami de toujours. D'abord aveuglée par le reflet de la lumière sur l'armure du grand ours, elle dit d'une voix claire.
-Bienvenu à vous, roi Iorek Byrnison. A vous et à vos valeureux ours. Nous vous attendions pour la fête.
Puis elle sauta sur la passerelle qu'elle dévala pour se blottir dans la fourrure épaisse couleur crème de son vieil ami l'ours en armure. L'ours posa une de ses gigantesque patte sur la tête de la fillette et a serra contre lui.
-Bonjour, Lyra Parle-d'Or.
Puis il grimpa la passerelle en compagnie de Lyra et des ours venus avec lui, tandis que Tony Costa laissait échapper une phrase comique :
-Jamais ce bateau n'aura vu tant de têtes couronnées.
