Whatever I've done
I did it for love
I did it for fun
Couldn't get enough
I did it for fame
But never for money
Not for houses
Not for her
Not for my future children
Until now...

One more Hour – Tame Impala

Paper Planes – M.I.A

Pyroinesis - 7Chariot

Sunrise – A million in vermillon

Spiracle – Flower race

Young & Unafraid – The Moth & The Flame


Pékin, 26 avril 2030, 15h35, heures de Pékin

Rose n'était pas bavarde de nature. Nilam détestait parler pour ne rien dire. Allénore préférait laisser aux autres le soin de converser.

Alors il ne restait plus que Louis, Scorpius et Albus, coincé entre les deux blonds qui n'avaient jamais réussi à bien s'entendre.

Les trois jeunes femmes, couvertes de leurs capes de voyage et avançaient dans les rues, en direction de leur hôtel. Allénore triturait nerveusement ses bracelets, signe évident que quelque chose n'allait pas. Louis fronça les sourcils, les sens en alerte, prêt à intervenir pour calmer une éventuelle crise d'angoisse, une peur panique ou le poison du doute qui sommeillait toujours en elle. Il observa Rose prendre Allénore par le bras et marcher côte à côte. Les deux amies évoluaient en parfaite synchronisation, comme elles l'avaient fait depuis qu'elles se connaissaient, des couloirs de Poudlard, jusqu'à ceux du Ministère de la magie. Rose et Allénore avaient toujours avancé l'une avec l'autre, en lisant le même roman, le même manuel, en écoutant les mêmes chansons sur le même vieux téléphone… Et il n'y avait jamais que Nilam pour les empêcher de se manger un mur en pleine face, de rentrer dans un autre élève ou de tomber en se prenant les pieds dans les marches. Albus était souvent plongé dans ses pensées, Scorpius évoluait toujours les yeux baissés et Louis… Louis riait ou se moquait bien trop de sa cousine et de sa meilleure-amie pour se priver de leurs cascades. Puis, une fois amoureux d'Allénore, c'était plutôt lui qui se prenait les murs de l'école, à observer d'aussi près sa démarche et à écouter son rire et sa voix envoutante…

Quand il les voyait comme ça, Rose et Allénore, Louis se disait que les choses n'avaient pas changé entre elles, entre eux tous en fait.

Sauf que ce n'était pas le cas. Pas vraiment.

Entre les trois hommes, le silence était pesant. Albus exprimait rarement les pensées négatives qui pouvaient l'assaillir. En vingt-quatre ans, Albus ne s'était presque jamais plaint, n'avait jamais piqué de gueulante envers qui que ce soit, même envers James, qui était probablement la personne qui agaçait le plus Albus… Et Louis savait qu'Albus avait un problème avec Allénore. Elle le lui avait dit. Elle l'avait ressenti, grâce à son pouvoir de polyglomage, mais n'avait rien dit, rien fait, incapable de déterminer comment crever l'abcès entre Albus et elle.

– Vous ne savez pas dans quoi vous avez mis les pieds, marmonna Louis.

Scorpius fronça les sourcils, mécontent, comme à chaque fois que Louis prenait la parole ou se donnait le privilège de respirer le même air que lui.

Il avait franchement envie de lui en coller une parfois.

– On la connaît aussi bien que toi, fit l'ancien Poufsouffle sur le même ton.

– Vous ne la connaissez pas comme moi, pas comme ça, pas quand elle est… en chasse.

Pas quand elle était capable du pire pour le meilleur.

Ils ne connaissaient pas Mistinguette.

– Vous n'êtes pas prêts à la voir ainsi.

– Et tu l'étais toi ?

Louis cilla. Il s'était attendu à ce que ces mots soient de Scorpius, mais ils venaient en réalité de son cousin, qui marchait les mains derrière la tête, en sifflotant jusqu'à maintenant.

– Quand tu t'es rendu compte qu'elle était Mistinguette, cette espionne qui s'était bien foutue de ta gueule pendant des semaines, t'étais prêt ?

– Je n'avais pas vraiment le choix…, grommela Louis.

– De ce que j'en sais, tu as été infect avec elle, après que tu aies su, termina Albus en ignorant la réponse de son cousin. Ce que je peux comprendre, je ne te jette pas la pierre. Mais tu as peur de quoi, exactement ? Qu'on agisse comme des connards, comme tu as pu le faire ?

Albus n'aimait pas le mensonge et les non-dits. Il aimait l'Histoire et la vérité.

Une partie de lui en voudrait probablement toute sa vie à Louis d'avoir été si méchant avec Allénore et de ne pas avoir eu foi en elle dès le début.

– Elle n'est pas qu'une amie pour nous. On a grandi tous les quatre, Rose, Scorpius, elle et moi, ensemble, avec nos noms, nos histoires… Elle est notre famille.

– Vous êtes franchement prêts à la voir torturer quelqu'un ? À la voir briser des baguettes magiques parce qu'elle l'a tellement fait, lorsqu'elle était chez les Autres, que c'est presque un réflexe pour elle maintenant ? A l'observer porter le masque de Mistinguette, à être si froide, si impitoyable ? A la découvrir en train de lutter pour ne pas se jeter sur une dose de conscidisti, ne pas vomir d'effroi, ne pas fuir ? Est-ce que vous êtes vraiment prêts à accepter le fait qu'elle n'est pas comme vous l'imaginez ? Qu'elle se sent monstre parfois et que oui, elle peut agir tout comme, frôler les limites du bien et du mal, et que l'aimer elle, c'est aimer ça aussi.

Albus n'avait plus rien à dire.

Ce qui était assez rare, parce qu'Albus, lui, aimait beaucoup, beaucoup, beaucoup parler.

– Allénore n'a jamais été comme je l'imaginais, parce qu'elle est réelle, je la connais et je ne l'ai jamais fantasmée ou idéalisée, contrairement à toi.

– La Allénore que tu connaissais est réelle mais elle n'est pas complète, insista Louis. Tu ne connais que cette version d'elle qu'elle voulait vous faire aimer, celles sans toutes ses cassures, fissures et brisures. Elle voulait vous montrer tout ce qui brille en elle. Pas ce qu'il y a de plus terne.

– Tu racontes des conneries, intervint enfin Scorpius.

Il bouscula Louis en lui passant devant. Il se mit à sourire, presque avec tendresse. Il aimait la loyauté de Scorpius envers Allénore. Loyauté qu'elle critiquerait probablement si elle en avait pleinement conscience…

– Il n'y a toujours eu que toi, pour voir seulement ce qui brillait en Allénore.

Louis émit un rictus. C'était sûrement un peu vrai… Avant en tout cas. Pour autant, Scorpius ne pouvait se rendre compte de l'ampleur des mensonges d'Allénore et de tout ce qu'il ignorait chez elle. Il voulait seulement protéger Allénore, et ses amis. Les protéger eux, et leur relation, si précieuse à leurs yeux.

Louis se disait souvent qu'à sa place, Scorpius aurait mieux agit que Louis, en apprenant que Mistinguette était Allénore. Il n'aurait pas été en colère, il ne lui aurait pas fait mille reproches, il ne l'aurait pas harcelé jusqu'à ce qu'elle lui rende ses souvenirs et il l'aurait écoutée, patiemment. Ce que Louis avait été incapable de faire…

Dans ses moments de doute, Louis oubliait que seul lui aurait été capable de secouer Allénore et de lui rappeler qui elle était vraiment.

Alors oui, peut-être que Louis avait tort de craindre ainsi que ses amis se détournent d'Allénore…

Lui, il en était bien retombé amoureux malgré tout…

– J'espère que tu n'auras pas peur d'elle après tout ça, reprit Louis en repassant devant Scorpius.

Avant que ce-dernier ne se jette sur Louis pour l'étriper, Albus attrapa fermement le bras de son meilleur-ami.

– Laisse-le.

Albus détestait les conflits. Il lâcha son emprise sur Scorpius qui plissa consciencieusement le tissu de sa veste où brillait toujours l'écusson des Poufsouffle. Albus regardait le ciel gris de polution de la capitale chinoise. Il était dans ses pensées. Scorpius ne connaissait que trop bien cette expression.

– Tu crois qu'il a raison ?

– Oui, chuchota Albus.

Scorpius n'avait même pas précisé en quoi Louis pouvait bien avoir raison.

Mais oui, Albus en était sûr : Allénore était une sorte de monstre. L'autre vérité dans tout ça, était que même si elle en était effectivement un, Albus n'en avait pas peur. Parce qu'Allénore était son amie. Son amie menteuse, son amie qui jouait avec la vérité, son amie qui continuait de se défiler devant eux, son amie qu'il devait protéger de tout… Mais son amie tout de même. Son amie gentille. Son amie bienveillante et intelligente. Son amie marrante. Son amie gourmande. Son amie.

– Et je ne sais pas si nous sommes effectivement prêts à le constater, termina Albus.

– Alors pourquoi es-tu venu ?

– Pour la même raison que toi.

L'amour. L'amitié. La loyauté.

Monstre ou pas…

– J'espère qu'on trouvera vite ce putain reflet de mes deux, grogna Scorpius.

– Moi aussi.

Non pas parce que la perspective de croiser ne serait-ce que le reflet de Han Derrick les enchantait. Mais parce qu'il avait besoin de réponses et que cette aventure, à défaut d'Allénore elle-même, allait les leur donner.

Pékin, 26 avril 2030, 17h48, heures de Pékin

Allénore et Louis s'étaient discrètement éclipsés et éloignés du groupe. Nilam et Albus marchaient un peu plus loin, vers le marché couvert de Pékin, où la potionniste refaisait le plein de ces potions de farces et attrapes qu'on ne trouvait qu'en Chine. Scorpius évoluait derrière Rose, qui découvrait l'endroit pour la première fois.

Elle s'arrêta un instant, en regardant songeusement un couple, en train de graver leurs prénoms dans l'écorce d'un cerisier.

– Ne me demande pas de faire la même chose, grimaça Scorpius.

C'était bien trop niais, même pour eux.

– Non, je m'étonnais simplement du fait qu'il était un peu flippant de savoir que certaines personnes se baladent avec des couteaux dans leurs poches…, observa Rose.

Scorpius se mit à sourire. Évidemment que Rose songeait à cela… Scorpius aimait que ses pensées ne soient jamais prévisibles, et qu'elle se pose toujours des questions sur lesquelles peut de personnes s'interrogeait.

– Le cerisier est un bois capricieux, très rare, dans la fabrication de baguettes magiques. C'est un bois particulièrement apprécié par les élèves de l'école japonaise de magie Mahoutokoro, où les possesseurs d'une baguette de cerisier bénéficient d'un certain prestige. Les occidentaux ont tendance à voir dans le cerisier un arbre frivole et purement ornemental à cause de ses fleurs roses mais les baguettes composées de ce bois possèdent pourtant un pouvoir mortel, particulièrement si leur cœur est un ventricule de dragon. Ces baguettes conviennent plutôt aux sorciers avec une grande maîtrise de soi et doués d'une force mentale hors-du-commun…

– La baguette d'Allénore est en bois de cerisier.

– Sauf que c'est un crin de licorne à l'intérieur. Ce composant offre peu de puissance magique et c'est le bois, qui doit donner à Allénore toute sa force dans ses enchantements et sortilèges.

– Mais…

– Elle est nulle en défense contre les forces du mal. Les baguettes au cœur de licorne sont en règle générale les plus difficiles à mettre au service des Forces du Mal. Elles ont aussi du mal à les combattre. Ce sont les plus fidèles et elles restent habituellement très attachées à leur propriétaire d'origine…

– Donc ce n'est pas de sa faute si Allénore est d'une nullité incroyable contre les forces du mal ?

– Oh si. Ce n'est pas à cause de sa baguette… La baguette de mon père a un crin de licorne, et pourtant, il a été l'un des meilleurs Aurors de sa génération avant de démissionner. Celle de mon oncle Charlie aussi, ainsi que celle de Neville Londubat… Tous très bons en défense contre les forces du mal… Les baguettes ont certaines prédispositions, mais les sorciers les façonnent en les utilisant. Ce qui est particulièrement fascinant avec les baguettes ayant un coeur composé en crin de licorne et qu'elles sont portées à la mélancolie si on les malmènent gravement, ce qui signifie que le crin peut "mourir" et qu'il faut alors le remplacer.

Rose s'était attendue a ce que la baguette d'Allénore fonctionne moins bien, avec tout ce qu'elle lui avait fait subir. Quelques abandons prolongés, une infidélité forcée lorsqu'elle était Mistinguette… Rose savait que sa meilleure-amie avait régulièrement jeté sa baguette derrière elle avec rage. Manifestement, elle ne semblait pas lui en tenir rigueur : Allénore n'avait jamais été aussi proche de sa baguette. Ses créations de papiers, ses enchantements… Tout lui obéissait au doigt et à l'oeil.

– Les sorciers chinois adorent se servir de cœurs rares, comme du corail, des poils zouwu, des plumes d'occamy… Il y a un fabriquant de baguettes, dans la corporation internationale, qui cherche à composer des cœurs hybrides…

– Hybrides ?

– Il a tissé à l'aide d'une moustache de fléreur, une plume de phénix avec un ventricule de dragon. Tout son village a failli exploser.

Et Rose disait le tout avec une fascination telle, que Scorpius était obligé d'avoir, à la fois peur, et une admiration sans limite.

– Euh… Tu ne t'amuserais pas à faire ce genre de petites expériences chez nous, n'est-ce pas ? bredouilla-t-il avec inquiétude.

Il n'était jamais trop prudent de poser la question : Scorpius connaissait Rose et il n'était pas tout à fait déraisonnable de s'informer de ses intentions à ce sujet.

– Bah tu vois le trou qu'il y a eu au plafond, en juin dernier ? demanda innocemment Rose. Ce n'est pas Gribouille qui l'a fait.

– Sans blague…

Ça, Scorpius s'en doutait déjà. Lorsqu'il était rentré un soir, complètement épuisé après un énième entraînement avec Emmalee, qui à l'époque lui menait encore la vie dure, et qu'il avait trouvé cet immense trou dans le plafond, Scorpius s'était contenté de soupire. Il avait observé Rose et Albus, allongés sur le dos en plein milieu du salon, les mains croisés sur le ventre, en train de contempler le désastre. Le tout en se goinfrant de chips à la crevette, se servant tour à tour dans le bol qu'ils avaient tout de même prit le temps de préparer. Quand il avait demandé des explications, Albus, la bouche pleine, avait répondu que le trou était déjà là lorsqu'il était rentré. Rose, elle, avait rougi et pointé du doigt le chat d'Allénore. Sûrement mécontent d'être accusé à tort, Gribouille avait refusé les caresses de Rose pendant au moins une semaine, jusqu'à ce qu'elle le fasse plier avec une double ration de pâté au saumon.

Bien sûr qu'elle avait menti…

– J'ai peut-être essayé d'utiliser une bouture de filet du diable comme cœur pour une baguette…, termina Rose.

– Ah.

Scorpius était encore à peser le pour et le contre… Rose était brillante. Un peu inconsciente mais indéniablement brillante. Cependant, il prit rapidement sa décision : il était normal de s'inquiéter.

– J'ai réussi figure-toi.

Scorpius sourit, fière d'elle.

– Pardon, rougit-elle. Je me vante.

Il se pencha pour embrasser son front.

– J'aime quand tu parles de tes réussites.

Rose cilla, le visage neutre. Scorpius comprit qu'il avait dû dire quelque chose de travers, pour qu'elle se mette ainsi à analyser ses paroles…

– Et quand tu parles de tes échecs aussi, cela va de soit ! crut-il bon d'ajouter. J'aime quand tu parles. Tout simplement.

Rose se mit à sourire et glissa sa main dans celle de Scorpius.

– On va enfreindre beaucoup de règles, commença-t-il prudemment en changeant de sujet. Tu es prête ?

Rose se mit à mâchouiller ses lèvres pleines.

Elle avait toujours eu un problème avec l'autorité et n'aurait probablement jamais eu une seule retenue de toute sa vie si elle n'avait pas été amie avec Albus, Scorpius et Nilam. Rose était du genre à suivre les règles et à engueuler elle-même l'arbitre qui laissait passer la faute d'un joueur de sa propre équipe lors d'une partie de Quidditch. Elle l'avait déjà fait. Contre Nilam. Qui avait donné un coup de poing magistral à Poesy Fortarôme, capitaine de l'équipe des Poufsouffle. Rose avait fait arrêter le match et Nilam avait manqué de la tuer. Scorpius et Allénore avait dû séparer leurs deux amies. Albus, lui, avait prit des photos. « Pour la postérité » avait-il déclaré…

Si Allénore était du genre à elle aussi, suivre le règlement et les lois à la lettre, elle n'était jamais contre l'idée d'enfreindre celles qui lui paraissaient injustes et infondées. Rose, affirmait quant à elle que la loi était la loi, et qu'elle la suivrait gentiment, mais non sans se battre et manifester tous les jours de la semaine au Minisitère de la magie, pour qu'elle soit réformée. Ce qu'elle avait fait la semaine dernière en s'enchaînant avec d'autres manifestants aux cheminées du Ministère pour protester contre la hausse des taxes d'achat de poudre.

Allénore était une révolutionnaire. Rose, une réformiste.

Aller contre les règles mettait Rose dans un état bien trop anxieux.

– Je préfère être là. Je sais que c'est ce qu'il faut faire. Si Han Derrick est effectivement en vie, Allénore et Louis vont avoir besoin de nous.

– Et s'il ne l'est pas ?

– Alors on aura profité de ce petit voyage tous ensemble, et c'est tout ce qui compte. Tu sais…, murmura-t-elle près de son oreille. Tu devrais peut-être parler de ce qui se passe avec ton père en ce moment. Allénore et Albus s'inquiètent et Nilam dit que tu es plus étrange que d'habitude, ce qui venant d'elle, suppose qu'elle s'inquiète également.

– Tu savais que mon père avait demandé une dispense de siège lors de l'audition d'Allénore devant le Magenmagot, juste après la mort de Richards ?

Ils ne disaient jamais « son père » en parlant de Richards. Associer Richards à Allénore sonnait comme une trahison pour eux. Pourtant, Scorpius y pensait souvent : elle était sa fille et rien ne pouvait changer cela.

– Ma mère s'est elle aussi retirée, lui fit remarquer Rose.

– Pour toi. Mais je doute que mon père ait eu cette sensibilité. Il ne l'a pas fait pour ça… Il l'a fait parce qu'il savait que sa position ne serait pas en faveur d'Allénore et que si je venais à l'apprendre, je lui en voudrais.

– Donc il l'a fait pour toi…, insista Rose.

Dans le bureau de son père, bien avant leur dispute, Scorpius était tombé sur un dossier à charge, contre Allénore, tentant de l'inculper pour toutes ses mauvaises décisions et pour ses liens avec certains trafiquants de créatures magiques. C'était comme ça, qu'il avait apprit qu'Allénore avait été addicte au conscidisti : les rapports médicaux confidentiels, obtenus sûrement illégalement par son père, étaient si épais que Scorpius n'avait pu les prendre de ses deux mains. Il avait parcouru les descriptions des blessures physiques et des maléfices qu'on avait jeté à Allénore, les prises de sang pour analysé certaines maladies qu'on lui avait transmises et auxquelles Scorpius n'avait rien compris. Scorpius était reparti, l'air de rien, rejoindre sa mère et Rose dans le petit salon, en train de prendre leur dessert. Il était revenu avec l'album photos que son père l'avait envoyé cherché et il n'y avait eu que Rose, pour se rendre compte de la pâleur soudaine de Scorpius.

– Tu crois qu'il aurait pu faire condamner Allénore ? l'interrogea gravement Rose.

Scorpius haussa les épaules. Il n'était sûr de rien et surtout pas de la probité de son père. Il fourra ses mains dans ses poches et caressa du bout des doigts l'écrin. Ses yeux s'écarquillèrent et il se mit à sourire un peu plus. Il en dessina le contour, essayant de se rappeler des mots qu'il avait en tête chaque fois qu'il pensait à ce qu'il ressentait pour Rose.

Peut-être était-ce le bon moment ?

– Rose ?

Elle se tourna vers lui, faisant voleter ses longs cheveux roux indisciplinés et à ses yeux pétillants, Scorpius fronça les sourcils.

– Oui ?

Adorable, maligne, très maligne, mais décidément incapable de mentir. Elle avait rivé ses prunelles sur sa main, toujours dans sa poche, qui tenait l'écrin, comme si elle savait.

Mais probablement parce qu'elle savait.

Les joues de Scorpius se mirent à rougit et ils échangèrent un regard. Un simple regard. Elle savait. Il savait qu'elle savait et elle savait qu'il savait qu'elle savait.

C'était un peu tordu, certes, et pourtant très clair dans leurs deux têtes.

Rose savait que Scorpius comptait la demander en mariage et son coeur était sur le point d'exploser de trouille.

Rompre le plus terrible des maléfices, se retrouver encerclé par mille inferis et protecteurs de tombeaux, risquer sa vie, être enfermé dans une vieille maison hantée et piégée par une multitude de mauvais sorts… Tout ça, faisait nettement moins peur que l'idée de Rose sachant qu'il allait lui poser la question qui lui brûlait les lèvres depuis des mois.

– ROSE ! ROSE !

Rose ne répondit pas tout de suite à l'appel d'Allénore. Quelques secondes passèrent, durant lesquelles ils continuèrent de se regarder, elle, avec une impatience et une excitation trahies par ses minuscules sautillements, et lui avec appréhension et égarement, curieux de savoir comment diable Rose avait-elle pu deviner ses intentions.

– ROSE ! ROOOOOSE !

Scorpius adorait sincèrement Allénore. Mais à l'instant même et alors que l'interpelée se détournait de lui, il aurait étripé sa meilleure-amie à mains nues.

Rose se hissa sur la pointe des pieds et sourit en trouvant le visage d'Allénore qui cherchait son regard. Elle lui fit signe de la rejoindre en agitant la main.

Rose trottina jusqu'à la polyglomage, sans lâcher la main de Scorpius. Il était, sans aucun doute, une personne avide de contact, bien que très réservé quand il s'agissait de les initier. Ça ne le dérangerait pas de tenir la main de Rose dans la rue, ou de la laisser s'asseoir sur ses genoux devant les autres, dans un bar où ils devaient se battre pour trouver des chaises de disponibles. C'était sa façon de lui montrer qu'il l'aimait et Rose, avec le temps, avait soupçonné qu'il s'agissait davantage que cela.

Scorpius n'avait pas grandi dans un foyer où l'on se faisait des câlins, des embrassades, des bisous ou de longues déclarations. Rose savait qu'aujourd'hui, il en avait besoin et devait constamment être rassuré sur l'amour et l'affection que les autres lui portaient. Il avait compris que pour Rose, qui n'avait jamais eu aucune difficulté à exprimer ses émotions et ses sentiments, les caresses, les baisers, le touché, étaient des démonstrations d'affection et qu'elle se nourrissait beaucoup de ceux des autres. Alors, il les lui donnait sans compter. Et ça avait fini par devenir une habitude, un besoin pour lui aussi.

Lorsqu'ils arrivèrent à la hauteur d'Allénore, ils se rendirent compte qu'elle était seule et qu'elle admirait les pierres précieuses et semi-précieuses qu'une sorcière présentait à son stand. Toutes deux échangeaient en chinois, avec animation et entrain.

– Ce serait génial pour tes recherches, non ? indiqua Allénore à Rose en sautillant avec enthousiasme. C'est de la très bonne qualité, elles ont été extraites il y a moins d'un an et n'ont pas été taillées !

Rose joignit ses deux mains, les yeux encore plus brillant.

– C'est merveilleux !

– Je pense qu'on pourrait même en ramener à Beth Carrow, proposa Allénore.

Scorpius fit la moue. Les plans d'Allénore pour séduire le nouvel entourage de Rose étaient assez évidents : après l'attaque de Londres, Rose, Nilam, Albus et lui s'étaient rapprochés d'Emmalee Zabini et de Beth Carrow, à qui ils avaient pourtant mené une guerre sans fin lorsqu'ils étaient tous à Poudlard. Les liens qui s'étaient tissés entre eux s'étaient davantage renforcés lorsque Citlali Tucker, amie de longue date des deux anciennes Serpentard, avait officialisé sa relation avec James Potter. Lorsqu'elle était réapparue, Allénore avait dû se faire à l'idée que leurs « ennemies jurées » d'hier, étaient maintenant de bonnes copines et qu'ils avaient désormais tous pris l'habitude de se retrouver au salon de thé tenu par Beth…

Allénore n'était pas douée pour se faire des amis. Elle était méfiante, réservée et apeurée. En revanche, elle aurait tout fait pour plaire à Rose, Albus, Nilam et Scorpius. Même accepter que Beth Carrow lui tire les cartes et lui dise d'une voix fantomatique de faire attention à l'heure si elle ne voulait pas se retrouver avec de la purée dans les cheveux. Prédiction qui, d'après Allénore, ne voulait strictement rien dire. Elle avait levé les yeux au ciel avant de s'en aller vers Emmalee, en grande discussion avec Citlali.

– Tu sais que tu n'as pas besoin de faire ça ? glissa Scorpius à l'oreille de la brune. Beth t'aime bien. Elle dit que tu es marrante…

Allénore grogna en faisant semblant d'admirer les barrettes à cheveux scintillantes dont les pierres finement taillées apportaient en fonction de leur nature, l'amour, la fortune, la richesse ou tout l'inverse.

– Les malédictions traditionnelles chinoises portent beaucoup sur les pierres précieuses et semi-précieuses. Les sorciers chinois ont appris à trouver et exploiter le pouvoir de ces pierres… Et Rose s'y intéresse. Je le fais pour les recherches de Rose.

– Bien sûr, s'adoucit Scorpius.

– Il y a de la kyanite ! Elle stimule le mental et est une excellente pierre pour stimuler les dons divinatoires ! énonça Rose. Il faut que j'en prenne. Oh et la turquoise ! ajouta-t-elle devant les pierres bleue. Elle aide à trouver la beauté dans les endroits les plus sombres. C'est la pierre des âmes voyageuses ! Elle irait bien à Louis et Scorpius…

Elle était définitivement ravie et fit le tour du stand, pour prendre des obsidiennes, protectrices, qui renvoyaient les énergies négatives à la source, des améthystes, pour les guérison et l'apaisement…

– Je crois que je vais essayer de fabriquer des baguettes magiques avec… Les pouvoirs des pierres sont très minimes, mais quelques sorciers chinois savent en tirer les fils et les rendre assez puissants pour qu'ils aient de réels effets. Il se raconte que 亶甲, le plus grand sorcier chinois, était capable de rendre létal n'importe quels cailloux, même aussi petit qu'un grain de poussière et de le glisser dans les poches de ses ennemis pour les maudire.

Scorpius se contenta d'opiner, mais Allénore, elle, ajouta qu'elle avait lu dans il ne savait quel manuel au nom compliqué et à rallonge, que l'art de tisser le pouvoir des pierres s'étaient perdus après la troisième guerre sorcières sino-japonaises. Elles partirent dans une discussion qu'il eut du mal à suivre tant elles allaient vite et débitaient à une vitesse incroyable toutes sortes d'informations … Les deux anciennes Serdaigle étaient des érudites et adoraient ces conversations vives et apprendre. Rose, avec détermination, semblait vouloir restaurer ce savoir et s'en servir.

Elle prit autant de pierre que possible et les fourra dans son sac de voyage. Allénore l'aida à négocier un bon prix et elle repartit rejoindre Albus, qui l'appelait à son tour. Scorpius lâcha à contrecoeur la main de la rousse en la laissant partir et ne sachant quoi en faire, la fourra de nouveau dans la poche de son manteau. Il se remit à caresser l'écrin, nerveusement.

– Tout va bien ? murmura Allénore avec inquiétude.

– Rose sait.

– Rose sait beaucoup de choses, le taquina son amie.

– Elle sait que je compte la demander en mariage.

Allénore pencha la tête sur le côté, les yeux curieux. Elle ne semblait pas surprise.

– Et tu le savais aussi, manifestement…

– Scorpius…

– Comment et depuis quand le sais-tu ?

Allénore était incapable de mentir à ses amis. Enfin, si… Elle leur avait menti sur son identité pendant des années, mais jamais elle ne se serait permise de mentir sur tous les autres sujets.

– Depuis septembre dernier, admit Allénore.

– Tu n'étais pas encore rentrée ! s'exclama Scorpius. Comment as-tu su… ?

Allénore secoua la tête. Il était compliqué d'avouer à son ami qu'elle avait entendu de la bouche de Ron Weasley que Scorpius avait demandé Rose en mariage alors qu'ils étaient en train de se battre à Londres contre les démonzémerveilles et les Autres… Tout ça pour qu'il perde la mémoire et ne se souvienne plus de rien.

– Ne me mets pas dans cette position, Scorp… Ce n'est pas à moi de te dire ce que je sais.

Rose lui avait fait promettre de ne rien dire.

– Mais tu sais, s'agaça Scorpius. Pourquoi tu ne me dis rien ?

– Ce secret ne m'appartient pas. Je ne prendrai pas le risque de me fâcher avec Rose.

– Et avec moi ?

Allénore posa une main réconfortante sur son épaule.

– Tu ne m'en voudras pas pour ça…

Elle avait raison. Pour autant, Scorpius la connaissait par coeur : il savait que s'il insistait, elle lui dirait ce qu'il voulait entendre. Seulement, il ne voulait pas la mettre dans cette situation, tiraillée entre son amitié pour Rose et son amitié pour lui. Non… Il ne lui ferait pas ça.

– On a tous des secrets ici, des choses que l'on ne se dit pas, n'est-ce pas, Scorpius ?

Il baissa les yeux, coupable. Il aurait sûrement dû lui parler de ces maudits sièges au Magenmagot, de son père qui avait tout un dossier contre elle et de tout le reste. Mais il n'osa pas, de peur de la blesser et de la voir s'effriter devant lui.

– Qu'est-ce qui ne va pas Scorpius ? l'interrogea Allénore. Je sens… ta nervosité et je ne sais qu'elle n'est pas liée à cette bague que tu transportes partout avec toi. Tu me caches quelque chose. Je ne te demande pas de me dire de quoi il s'agit. Tu as peur et … moi aussi j'ai peur. J'ai peur que tu aies peur de moi, ou de mes réactions. Tu es … l'un de mes meilleurs-amis. Quoique tu aies à me dire, tu peux le faire sans crainte.

Il haussa un sourcil, mettant en doute sa parole d'un sourire espiègle.

– Bon, je risque de me fâcher et d'être un poil en colère si ça ne me plaît pas, mais je n'arrêterai pas d'être ton amie ou de t'aimer pour autant.

Scorpius l'observa. Son amie avait toujours été douée avec les mots, surtout depuis qu'elle apprenait à se servir de ses dons de polyglomage… Et sa sincérité était touchante. Scorpius eut l'intime conviction à ce moment précis, qu'elle ne se détournerait jamais de lui, que même s'ils pouvaient se disputer, elle ne cesserait jamais d'être son amie... Et il se demanda également si Allénore, n'attendait pas ces mêmes mots en retour, si elle n'avait pas elle aussi cette peur, de tout leur dire et d'être rejetée, si elle n'avait pas ce besoin que lui aussi avait, d'être rassuré sur le fait de savoir qu'ils seraient toujours tous les quatre ensemble, Albus, Rose, elle et lui…

Allénore se fit plus grande pour recoiffer une mèche de cheveux blond sur le sommet du crâne de Scorpius. Un geste fraternel et tendre, qu'ils ne s'accordaient que lorsqu'ils étaient tous les deux, juste entre eux.

– On devrait aller rejoindre les autres, fit-il. J'ai faim. T'as pas envie de manger une pizza ?

– Manger de la pizza alors qu'on est en Chine ? Ce serait comme danser des claquettes sur du hip-hop… L'idée me plaît beaucoup ! sourit Allénore en partant devant lui d'un pas sautillants.

Il l'adorait.

Il était incapable de lui dire ce qu'elle voulait entendre. Il pensait ces mots, bien sûr. Allénore était… géniale. Elle était cette fille de onze ans qui s'était assise à côté de lui en cours, en ayant peur de lui, non pas parce qu'il était né Malefoy, mais parce qu'elle avait peur de tout le monde. Elle était celle qui avait cimenté leur amitié à tous les quatre, celle qui les faisait rire lorsque leurs noms devenaient trop lourds, celle qui les aimait pour eux, et rien que pour eux.

Cependant, Scorpius avait les mots de Louis dans la tête.

« Est-ce que vous êtes vraiment prêt à accepter le fait qu'elle n'est pas comme vous l'imaginez ? Qu'elle se sent monstre parfois et que oui, elle peut agir tout comme, frôler les limites du bien et du mal, et que l'aimer elle, c'est aimer ça aussi. ».

Et il s'en voulait de douter.

Scorpius avait toujours pensé que Louis était amoureux de l'idée d'Allénore. Mais en fait… parfois, Scorpius se demandait si ce n'était pas lui, qui était peut-être ami avec l'idée d'Allénore.

Pékin, 28 avril 2030, 00h48, heures de Pékin

– Je crois qu'il m'aime bien, minauda Allénore à l'oreille de Rose.

Celle-ci gloussa avant de laisser échapper un hoquet d'entre ses lèvres. Elle reprit une gorgée du liquide violet et pétillant et éclata grassement de rire.

L'ambiance était chaude et agréable. Les lumières orangées du bar, les nappes blanches et les fauteuils confortables aux accoudoirs sculptés en forme de dragon donnaient un charme au bar sorcier, le cinquième de la soirée que la bande visitait, dans lequel ils se trouvaient tous.

– C'est sûr que tu lui plais !

– Humm je sais pas, rougit Allénore. Tu crois que tu pourrais nous présenter ?

Nilam ricana derrière ses deux amies et renifla la boisson qu'elles se partageaient depuis le début de la soirée. Les deux amies étaient sans aucun doute, complètement saoules.

– Mais oui, Rose… Est-ce que tu pourrais présenter Louis Weasley à Allénore ? se moqua Nilam.

– Oh très certainement. Je vais faire ça !

– Attends, je ne veux pas voir ça… Imagine si je me fais des idées ? Peut-être que je ne lui plais pas ?

– Je suis presque sûre que tu lui plais beaucoup, continua de s'amuser Nilam.

Elle poussa Rose de la banquette et la fit se lever pour se diriger vers Louis, en pleine partie de Mah-jong sorcier. Il jouait avec ses tuiles, les faisant cavaler de doigt en doigt avec une assurance presque indécente. Associant tactique, stratégie, calcul et psychologie, Louis se prêtait à ce jeu depuis qu'il avait fait son premier voyage en Chine, dans le cadre de ses études de magizoologiste. Il s'y était découvert un certain talent. À l'instant même, il venait de constituer trois groupes de tuiles consécutives, dont les motifs fleuris s'étalaient sur la table.

Lorsque Rose toussota près de l'oreille de son cousin, celui-ci, concentré, détourna ses yeux de son jeu un instant :

– Un souci Rosie ?

– Allénore Rameaux.

Louis posa la tuile avec laquelle il était en train de jouer et se redressa. Il s'excusa auprès de ses trois autres adversaires et croisa les bras sur sa poitrine, en quête de sa petite-amie, qui avait plongé la tête sous la table d'en face et s'était cachée derrière son long rideau de cheveux châtains qui balayaient le sol. Il nota la présence d'une boisson violette sur la table, un élixir d'euphorie à l'écorce de cerisier… qui était connu pour plonger dans un état d'ivresse toute personne qui n'en respirerait seulement que les vapeurs.

Autant dire que pourquelqu'un comme Allénore, qui n'était pas habituée à boire de l'alcool, y'avait de quoi être complètement désinhibée en quelques gorgées.

– Qu'y a-t-il ?

– Elle voudrait bien sortir avec toi, gloussa une fois de plus Rose. C'est ma meilleure-amie, t'as déjà dû la croiser… Tu lui plais.

Louis écarquilla les yeux et prit une nouvelle tuile avant de se débarrasser de l'une de celles qui composaient son jeu. Il sourit de toutes ses dents, une main sous son menton, soudainement très pensif :

– Voilà qui me surprend …

– Tu veux que je vous présente ?

La boisson devait être sacrément bien dosée… Louis précipita son jeu. La partie était terminée et il coucha une à une toutes les paires qu'il avait réussi à constituer, avant de saluer ses adversaires. Il ne s'intéressa même pas de savoir s'il avait gagné et traversa la salle pour rejoindre Nilam et Allénore, toujours sous la table, les joues rouges.

Il s'accroupit au niveau du sol. Allénore était roulée en boule et leva un œil vers lui, avant de dissimuler son visage de ses mains.

– Est-ce que t'aimes l'eau ? lui demanda-t-elle timidement.

– Oui.

– Donc tu aimes déjà soixante-dix pour cent de mon corps, c'est chouette !

Louis écarquilla encore une fois les yeux.

– Je savais que cette phrase était nulle, je n'aurais pas dû écouter Nilam ! geignit Allénore.

Nilam, elle, se bidonnait.

– Alors comme ça, je te plais ? sourit-il.

Elle opina rapidement, avant de hoqueter plusieurs fois de suite. Une légère fumée violette sortie de ses narines et la fit rire. Louis fit glisser deux de ses mèches de cheveux derrière ses deux oreilles et arrêta de sourire face à ses prunelles dilatées.

– T'es vraiment parfait pour moi…, marmonna-t-elle.

Il se sentit rougir. Comme chaque fois qu'elle lui disait, comme chaque fois qu'elle le regardait ainsi…

– Tu ne le penses pas toujours, plaisanta-t-il pour dissiper le malaise.

– Il y a quelque chose chez toi…

Il se mit à triturer les piercings à son oreille droite et la laissa venir à lui, en marchant à quatre pattes, sous la table et sur le sol à l'hygiène plus douteuse de ce bar. C'était une image qui resterait très longtemps gravée dans sa mémoire…

– Mon coeur chante lorsque tu me regardes. J'aime ça.

Celui de Louis chantait aussi.

Lorsqu'elle disait des choses comme ça, il avait envie de l'embrasser jusqu'à en suffoquer. Il se disait même que ce serait une mort épique et digne de lui. Il plaça une main sur l'une des joues d'Allénore et colla son front au sien.

Bien sûr qu'il avait envie d'elle. Son souffle devenait court dès qu'elle était proche de lui. Il n'y avait que les caresses d'Allénore pour le rassasier. Et par dessus tout, il n'y avait que ses sourires pour lui mettre le coeur à l'envers.

– On devrait rentrer Allénore…

Comme si les effets de l'élixir venaient de dissiper, la jeune femme pâlit et frotta ses yeux, réalisant qu'elle se trouvait sous la table d'un table.

– On devrait, oui, accepta-t-elle.

– Je te raccompagne.

Fleur Delacour, la mère de Louis, ne s'était jamais trop mêlée des histoires de cœur de ses enfants. Encore moins de celles de son fils. Elle avait regardé les premières copines de Louis avec peu d'intérêt, bien qu'en leur réservant toujours un accueil poli et bienveillant lorsque son fils les lui présentait. En revanche, lorsque Louis avait invité Allénore pour la première fois à la Chaumière aux coquillages, alors qu'ils n'étaient que des amis, sa mère avait insisté pour qu'il la raccompagne chez elle, comme un « bon gentleman ». Fleur Delacour s'était entichée d'Allénore très vite et avait su bien avant Louis, bien avant Allénore, que quelque chose les lierait et que ce quelque chose imposait à son fils d'avoir de bonnes manières avec Allénore.

Alors, Louis raccompagnait toujours Allénore. Toujours.

Sinon, il sentait presque le regard foudroyant de sa mère, prête à le gronder.

Il fit donc sortir Allénore de leur cachette et fit signe à Nilam qu'ils rentraient à leur hôtel. D'un regard entendu, elle lui promit silencieusement de veiller sur Albus et Rose, qui s'étaient lancés dans un concours de cracheurs de feu amateurs sur le comptoir au fond du bar…

Nilam ne resta pas bien longtemps seule. Scorpius vint la rejoindre, un pli soucieux fendant son front en deux.

– Aucune trace de la serveuse de la dernière fois, celle qu'Allénore recherche.

– Elle est persuadée qu'elle savait quelque chose…, se rappela Nilam.

– Et personne n'a entendu parler de ce bar clandestin dans lequel nous étions. Bien évidemment… Nous avons eu de la chance de retrouver Louis si rapidement la dernière fois…

– C'est certain, approuva Nilam. Ça fait deux jours que nous sommes ici… Et on n'a toujours aucune piste, rien. Plus personne n'a peur de Mistinguette… Dans le monde des traffiquants, ils savent désormais qu'elle était une espionne et qu'ils ne peuvent pas lui faire confiance.

Allénore devait se sentir démunie… Depuis qu'ils étaient ici, elle s'était reposée sur son ancienne double identité pour trouver des indices et la trace de ce miroir où elle avait vu le reflet de Han Derrick.

– Allénore commence à péter un câble et même Louis ne sait plus vraiment comment la gérer : il lui a dit de se détendre et avec Rose elle a descendu toute une bouteille d'élixir d'euphorie ! Elles ne savaient même pas ce que c'était… Elles ont trouvé la couleur « jolie ». On ne peut pas les laisser seules toutes les deux plus de deux secondes sans surveillance !

Heureusement qu'elle était là pour ça… Et Nilam prenait cette tache très à cœur !

– Et tu les as laissé en boire ? fit Scorpius, un brin accusateur.

– Évidemment, répondit Nilam, presque offensée qu'il remette en question sa fourberie. Allénore n'a jamais autant ouvertement dragué Louis et Rose…

Elle mordilla ses lèvres, teintant ses dents incisives de noir.

– Quoi ? Qu'est-ce que Rose a fait ou dit ?

La rousse en question applaudissait Albus, qui venait de cracher un très long jet de flammes. Le jeune homme se mit à tirer une tête de six pieds de long lorsque le sorcier en face de lui, à la barbe légèrement roussie et fumante, commença à lui parler d'une voix assez menaçante.

Ni Scorpius ni Nilam n'intervinrent. Ils semblaient même plutôt amusés par la situation.

– Et il n'est même pas saoul, soupira la jeune femme.

– Il maîtrise la situation…

Et en effet, le cadet des Potter était en train de dédommager le pauvre homme, qui lui tapa amicalement sur l'épaule comme s'ils étaient de bons et vieux amis.

– Comment font-ils pour toujours se mettre tout le monde dans la poche ? se plaignit Nilam. C'est injuste…

– Oui, se contenta de soupirer Scorpius.

Mais l'un comme l'autre, ils n'auraient changé Albus ou Rose en rien. Scorpius garda sa baguette près de lui et sentit le poids de l'écrin de la bague de Rose dans la poche de sa veste. Nilam suivit son regard et leva les yeux au ciel.

– Va falloir que tu te montres courageux …

– Tu es au courant toi aussi, grommela-t-il.

– Tout le monde est au courant, Malefoy, lui confirma Nilam.

– Suis-je si prévisible que cela ?

Pourtant, il n'avait parlé de son envie de mariage qu'avec Albus, dont il n'aurait jamais mis en doute la loyauté ou la confiance.

– Non, je t'assure que non, assura Nilam.

Parce que faire sa demande alors qu'on risquait de mourir égorgé par un démonzémerveilles, c'était tout sauf prévisible.

– Vous me cachez quelque chose. Vous tous… J'ai remarqué vos regards fuyants et vos petites messes basses… Je pensais que…

Il pensait qu'ils avaient peut-être eu vent des rumeurs selon lesquelles Drago Malefoy allait céder son siège au Magenmagot. Pas que cela pouvait avoir un rapport avec la bague de fiançailles qu'il avait acheté neuf mois auparavant.

– Qu'est-ce que vous me cachez ?

– Tu as posé cette question à Allénore il y a deux jours. Je l'ai entendue en parler à Rose, et lui dire que tu commençais à flipper et que tu avais compris qu'on te mentait.

Scorpius avait toujours eu un peu peur de Nilam. De façon générale, Scorpius avait peur des gens qu'il ne parvenait pas à cerner. Nilam Wallergan faisait partie de ces gens-là… Imprévisible, tantôt joyeux, tantôt autoritaire, mystérieux et énigmatique.

– Pourquoi tu n'as pas insisté auprès d'Allénore ? demanda curieusement Nilam. Tu sais qu'elle aurait finit par cracher le morceau …

– Je ne veux pas qu'elle se sente coupable d'avoir trahis la confiance de Rose.

– Moi, je ne me sentirai pas coupable. Si tu me le demandes, je te répondrai.

Scorpius secoua la tête. Il n'était pas quelqu'un de courageux, cependant, il savait qu'il devait parler à Rose et lui demander de quoi il en retournait.

Nilam se mit à sourire, comme si elle appréciait les pensées secrètes de l'ancien Poufsouffle.

– On devrait rentrer…, observa Scorpius. On ne trouvera rien aujourd'hui.

– Ne sois pas si pessimiste…, sourit malicieusement Nilam. Regarde la fille, à droite. Elle ne te rappelle pas quelqu'un ?

Scorpius dirigea son regard gris acier vers l'endroit que venait de désigner Nilam d'un coup de tête. C'était une blonde aux yeux noirs, les cils rose et la bouche brillante et humide.

– C'est l'une des femmes qui étaient dans la bar clandestin.

– Et qui faisait du gringue à Weasley, confirma Nilam. Elle a changé trois fois d'apparence en moins de dix minutes. Je crois qu'elle se sert de multixir.

– Du multixir ?

– Le polynectar des pauvres, expliqua Nilam en haussant les épaules. Moins efficace, les effets sont moins bluffants et durent à peine plus de quelques minutes. Mais tu peux alterner plus facilement les changements de visage… Elle est interdite en Grande-Bretagne : cette potion est instable et a de très mauvais effets secondaires possibles. Une femme a eu la moitié du visage arraché à cause de l'un d'eux… Sainte-Mangouste n'a rien pu faire.

Nilam but une gorgée de son verre et lissa le tissu de la nappe avant de reporter son attention sur la blonde :

– Si elle ne change pas d'apparence d'ici seize secondes, c'est que cette personne est bien celle qui était avec l' ungaikyō de Louis…

Scorpius sous-estimait parfois beaucoup trop Nilam… La potionniste semit à compter à rebours et sourit, l'air triomphant lorsqu'elle arriva à 0 et que le visage de la blonde resta tel quel.

– Que fait-on ? l'interrogea Scorpius.

– À toi de me dire…

– On la piste. Pour ce soir… Allénore et Louis ne sont pas là.

– Je suis d'accord.

Scorpius lança un sort de traçage sur la blonde et se leva, pour prendre Rose par le bras. Elle geignit un peu, avant de se laisser faire. Albus et Nilam les suivirent de près et ils se mirent à marcher rapidement jusqu'à la place rouge, où se trouvait leur hôtel. Ils avaient pris deux chambres seulement, par soucis d'économie : la boutique de potions de Nilam venait tout juste d'ouvrir, Scorpius commençait à peine à gagner sa vie, et Rose gardait chaque mornille en vue d'ouvrir elle aussi, sa propre boutique. Quant à Albus, Louis et Allénore, ils étaient encore étudiants ou avaient repris les bancs de l'école… Lorsqu'ils rentrèrent dans l'une des deux chambres, ils trouvèrent Allénore, couchée sur les genoux de Louis, qui démêlait ses cheveux, passait son pouce sur ses tempes et caressait de ses doigts son front. Il la protégeait, avec ses caresses, avec ses doigts, avec ses murmures… La polyglomage avait un sourire satisfait sur les lèvres. Elle semblait en paix et lui, il lui chuchotait des mots.

Probablement ces « je t'aime » à la volée, que Scorpius détestaient…

– Je crois qu'elle a vomi tout l'élixir d'euphorie…, s'adressa enfin à eux Louis.

– Aaaaaah c'était ça la boisson violette, gloussa Rose.

Mais elle arrêta de rire en remarquant les joues rougies d'Allénore, encore mouillées.

– Cauchemar, expliqua faiblement Louis.

Rose poussa du lit les pierres semi-précieuses qui y étaient étalées et qu'elle avait taillé à l'aide de la magie. Elles tombèrent sur le sol et roulèrent. Elle fit signe à Louis de partir et il lui céda sa place en tenant précieusement entre ses mains, la tête de la polyglomage toujours endormie. Allénore grommela, avant d'accepter l'étreinte de Rose, qui l'invita à se glisser sous la couverture du lit qu'elles partageraient sûrement pour la nuit. Rose enleva la baguette d'Allénore de ses mains et la posa à côté de la sienne, sur la table de chevet.

– Nilam a peut-être une piste, lâcha prudemment Scorpius.

– J'ai retrouvé une femme… Une qui était avec l'ungaikyō, celui qui avait prit ton apparence. Elle sait surement comment se rendre à ce bar clandestin.

– Bien, opina Louis. C'est une bonne chose… On s'en occupera demain. Laissons ces deux-là dessoûler …

Ils approuvèrent, tous en silence. Nilam prit l'autre lit, en face de celui qui partageait Allénore et Rose. Elle embrassa rapidement Albus, qu'elle entendit éclater de rire derrière la porte de la chambre qu'il venait de fermer, lorsqu'elle jura de douleur d'avoir marcher sur les pierres précieuses de Rose.

Pékin, 29 avril 2030, 22h48, heures de Pékin

Albus Potter ne tenait pas bien l'alcool et n'en supportait pas le goût. Il lui suffisait de respirer au-dessus du goulot d'une bière pour chanter comme un marin pendant des heures. C'était principalement pour cette raison, qu'il ne buvait jamais. Et en ce moment même, il s'en félicitait grandement, surtout en voyant les têtes d'Allénore et Rose, qui n'avaient pas récupéré de la nuit dernière. Elles avaient passé la matinée à dormir, et l'après-midi à expérimenter toutes sortes de choses avec les pierres semi-précieuses de Rose et leurs deux baguettes… Lorsqu'une fumée opaque était sortie de la salle-de-bain dans laquelle elles s'étaient enfermées, Scorpius et Louis l'avaient défoncée, avant d'en découvrir une, les cheveux teints en vert et l'autre, un troisième bras sur l'épaule. Albus avait éclaté de rire et leur avait demandé de tenir la pause. Nilam avait sifflé d'admiration, en disant que ses deux amies, en lendemain de cuite, étaient quand même sacrément exceptionnelles. Les deux blonds leur avaient confisqué leurs baguettes et les avaient mises en sécurité – à comprendre ici que Rose et Allénore avaient été forcées de faire la sieste.

Et même maintenant qu'elles avaient dormi et mangé, l'élixir de la nuit dernière était si puissant, que les deux jeunes femmes se traînaient derrière leurs amis. Nilam, sa baguette pointée devant elle, suivait la piste qui les mènerait tous à la blonde de la dernière fois.

– Et qu'est-ce qu'on fera une fois qu'on l'aura retrouvée ? les interrogea tous Albus.

Nilam fit courir sa main libre dans les cheveux noirs de son petit-ami, tentative vaine mais délicieuse, d'y remettre un peu d'ordre.

– Tu pourras toujours te cacher derrière moi. Ne t'inquiète pas, je te protégerai.

Albus n'était pas du genre à servir le discours daté du « moi, homme viril, moi fort et puissant, moi protéger amis ! ». Et Nilam le savait, jouait un peu avec sa fierté, pour voir jusqu'où elle pouvait aller, pour trouver la limite d'Albus, le truc, mot, qui le vexerait un peu. Depuis qu'elle le connaissait, elle ne l'avait jamais ne serait-ce qu'effleuré.

Albus aimait que Nilam soit mille fois plus terrifiante et forte que lui.

– J'y compte bien. Même si j'ai toujours été meilleur que toi en Défense contre les forces du mal, répondit simplement Albus. Cependant, te mettre en première ligne est une très bonne stratégie : tu es bien plus effrayante que moi, tu les feras fuir…

Nilam le fusilla du regard et arrêta de mettre de l'ordre dans ses cheveux qu'elle se mit plutôt à les ébouriffer. Il l'embrassa sur la joue avant de se tourner vers Scorpius :

– On a un vrai plan ? Je veux dire… à part leur balancer Nilam à la tronche ?

– On l'interroge. On lui demande de nous faire entrer au Dragon rieur et on remonte la piste jusqu'à ce putain de miroir, grogna Scorpius.

Les rues de Pékin étaient presque désertes. La vie de la nuit n'avait pas encore débuté. Les couches-tôt étaient partis, mais les couches-tard n'étaient pas encore sortis. Alors ils déambulaient, presque seuls dans les grandes allées sorcières chinoises, débarrassées des stands des marchés itinérants qui les colorisaient habituellement.

Nilam baissa sa baguette au bout d'un moment et les observa tous tour à tour.

– La piste s'arrête ici, marmonna-t-elle.

Allénore fronça les sourcils et joua des coudes pour passer devant Nilam. Elle agita sa baguette dans les airs et la statue d'un immense lion s'anima devant eux. Ses longues dents de pierre craquelèrent et ses yeux allongés se mirent à scruter la personne qui l'avait réveillé.

– C'est un gardien, expliqua-t-elle. Durant les guerres sino-japonaises, ils protégeaient les sorciers chinois qui demandaient protection. La plupart ont été détruits, mais ils en restent quelqu'uns… Celui-ci est ici depuis la nuit des temps…

– Comment tu savais qu'il y en avait un ici ? demanda Scorpius.

Allénore mordilla ses lèvres et ses yeux plongèrent dans un vide infini, duquel personne n'aurait pas l'en tirer. Elle se mit à caresser sa main droite, celle qui avait tenu Jia Li jusqu'au dernier moment … Celle qui avait agrippé les doigts de son amie, même une fois son bras coupé par la porte du quartier général, qui s'est violemment fermée au point d'amputer Jia Li. Allénore commença à se griffer la peau, jusqu'à la faire rougir, la grattant avec force, comme si elle voulait s'en débarrasser et personne ne dit rien.

Elle n'avait jamais parlé de ça à personne et n'avait même jamais évoqué ce souvenir à Louis, qui avait pourtant été présent ce jour-là. En la voyant tenir sa main ainsi, il avait cependant compris où, ou plutôt vers qui, les pensées d'Allénore étaient tournées. Il s'approcha d'elle et l'obligea doucement à arrêter ses gestes qui commençaient à meurtrir sa peau. Il entrecroisa ses doigts avec les siens et la laissa respirer.

– J'avais réfléchis à des moyens pour nous mettre en sécurité de Han Derrick et de Richards, au cas où nous nous ferions prendre.

« Nous ». Jia Li et elle.

« Nous deux contre le reste du monde, Allénore », murmurait la voix de Jia Li dans la tête de la polyglomage.

Longtemps, elles avaient toutes les deux vécues en pensant mourir en présence de l'autre. Ça avait été le cas. Tout du moins pour l'une d'elles deux.

– Elle m'avait parlé des gardiens, répondit enfin Allénore.

Ils savaient tous qui était « elle », et comme un tabou, ne prononcèrent pas davantage son prénom.

– Alors, on ne retrouvera pas cette femme ? comprit Rose.

Allénore secoua fatalement la tête, avant de blêmir, apercevant une ombre menaçante derrière Rose, qui avançait de plus en plus. Il n'y avait que la baguette de Nilam pour l'éclairer. Le ciel était noir et opaque, empli de pollution et d'un air lourd et suffocant. Mais la silhouette continuait d'avancer sereinement. Puis lorsqu'elle fut assez proche, Allénore sentit l'odeur de la poudre bien avant d'entendre quoique ce soit. Elle identifia la forme du canon bien avant de reconnaître la blonde qui avait été en compagnie de Louis lorsqu'il avait été enlevé.

Elle transplana aux côtés de Rose, juste à temps, avant que le tir ne parte.


Think back on what you did
How you'd punk all the new kids
A new wave of exclusive
As if there's something new, kid