Blessé (2)


Quand Obi-Wan s'était réveillé, il n'avait aucun souvenir de ce qu'il l'avait mené dans un tel état. Il en savait pas s'il devait être soulagé ou inquiet concernant sa mémoire défaillante. Mais selon les Guérisseurs Jedi, il avait reçu de multiples blessures à la tête, notamment un traumatisme crânien qui était sans aucun doute la cause de sa légère perte de mémoire. Il avait des brides de souvenir, sur les assaillants, mais sans plus, il ne se souvint pas de l'intervention d'Anakin, encore moins de ce que leurs ennemis avaient voulu de lui.

Finalement, le Conseil, à sa grande surprise, décidèrent de ne pas insister sur le rapport de fin de mission. Rapport, écrit par Anakin, qui avait été archivé sans délai. C'était étonnant, en général, le Conseil vérifiait auprès du maître du Padawan des véracités des propos dans le rapport, et dans le cas où le maître ne pouvait pas le faire, si les détails étaient flous, et ça l'était, une enquête en interne pouvait être ouvert. Obi-Wan pensait que Maître Windu, qui gardait un œil sur les agissements de son troublant padawan, insisterait pour mener l'enquête, mais rien. Il avait accepté de clôturer la mission dans son ensemble.

Lorsqu'Obi-Wan demanda des informations auprès d'Anakin, ce dernier resta vague. Le jeune homme avait sauvé son maître et c'était tout ce qui comptait.

« Nous avons terminé notre mission, c'est le principal, avait-il dit pour terminer leur conversation.

Alors Obi-Wan n'avait pas insisté, il était vivant, Anakin allait bien, le Conseil était satisfait d'eux. Il avait confiance en son padawan, s'il y avait quelque chose d'important, il le lui aurait dit.

N'est-ce pas ?

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Ce qu'Anakin n'avait jamais dit, c'était qu'il les avait tué de sang-froid jusqu'aux derniers, les laissant dans un bain de sang.

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Quelques jours plus tard

« Anakin, je t'ai dit que je peux faire ça tout seul. » soupira Obi-Wan alors qu'Anakin essayait de réajuster les oreillers sur le canapé de leur appartement. Son Padawan lui suivait comme son ombre depuis qu'il était sorti de son lit médical pour rejoindre son appartement.

« Maître, je m'occupe de vous, comme à chaque fois que vous êtes malade, rétorqua le jeune homme avec un sourire chaleureux.

- Je ne suis pas malade, je vais bien, mes blessures sont quasiment guéris, dans une semaine, je pourrai reprendre nos entraînements.

- Rectification, vous pourriez commencer votre rééducation, vous avez eu des fractures, maître, même le Conseil a bien insisté sur ça ! »

Obi-Wan leva les yeux au ciel, légèrement agacé. Cela faisait presque trois jours qu'il avait quitté les Halls des Guérisseurs et son padawan ne lui laissait rien faire tout seul. Même prendre un bain, avait été compliqué. Il s'enfonça dans les oreillers, lâchant un soupire exaspéré.

« Et bien vivement que j'en finisse avec tout ça, je n'ai pas envie de t'avoir toujours autour de moi… »

A ces mots, Anakin se figea, à la grande surprise du maître Jedi qui ne s'y attendait pas, alors qu'il lui mettait une couverture sur lui. Il fronça les sourcils, ses lèvres légèrement tremblant

« Pourquoi n'acceptez-vous jamais mon aide quand vous en avez besoin ? rétorqua le jeune homme cachant difficilement son énervement.

- Parce que je n'en ai pas besoin, répondit Obi-Wan sérieusement préférant ignorer le changement de comportement de son apprenti, et je récupère tout aussi bien quand tu es loin de moi et…

- Très bien, maître, comme vous le voulez, interrompit sèchement Anakin en déposant durement une tasse de thé sur la table basse en face de Obi-Wan.

Le claquement du verre fit sursauter le Jedi, qui fronça les sourcils face au contrôle de la colère d'Anakin.

« Padawan, ce n'est pas parce que je…

- J'ai compris, continua Anakin sur le même ton que précédemment, vous ne voulez pas de mon aide, alors, je m'en vais.

- Quoi ? mais ce n'est pas… »

Il n'eut pas le temps de discuter plus longtemps avec le jeune homme, ce dernier avait saisi sa cape et s'était précipité dehors, laissant le Jedi complètement seul.

Au départ, Obi-Wan pensait que c'était une bonne chose pour Anakin de ne pas être constamment au chevet de son maître, il n'aimait pas l'attention qu'il lui offrait dans ces moments-là, c'était dérangeant pour lui, un disciple ne devrait pas soigner son maître, ça devrait être l'inverse. Il adorait Anakin, être à ses côtés en mission ou en repos, pourtant, il n'avait jamais voulu être un fardeau pour lui.

Mais après quelques minutes de réflexion dans sa soudaine solitude, il regretta ses paroles trop durs, peut-être avait-il blessé son padawan bien-aimé. Cette pensée lui fit mal au cœur, il avait toujours espéré qu'Anakin puisse comprendre son point de vue, mais il oubliait souvent que le garçon demandait constamment à être assuré, il était définitivement attaché à lui, de par le fait qu'il était venu au Temple à un âge trop avancé et qu'il avait perdu sa mère, en tant que figure affectif.

Son ventre se tordit subitement, il n'aurait jamais du rejeter Anakin, il ne faisait que l'aider en soit. Il n'avait rien fait de mal. Il était un mauvais maître et un mauvais malade. Il n'avait pas pris en compte l'état émotionnel d'Anakin, qui était juste inquiet pour lui, et n'avait été reconnaissant envers lui, pour lui avoir prodigué des soins. Et ce n'est que lorsqu'il était seul qu'il remarquait à quel point, Anakin était important pour lui, dans son quotidien et sa convalescence.

Il se leva alors de son canapé, ignorant ses muscles et ses os endoloris, déterminé à réparer ses erreurs. Il devait trouver son apprenti et s'excuser auprès de lui. Il avait besoin de rattraper sa bêtise et son égoïsme.

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Obi-Wan avait cherché pendant deux heures son apprenti dans tout le Temple, mais il ne le trouva pas. Personne ne savait où se trouvait Anakin, jusqu'à qu'un garde du Temple lui confirme que le jeune padawan est sorti à l'extérieur. Cela l'avait anéanti, car chercher Anakin dans tout Coruscant serait chercher une aiguille dans une botte de foin.

Alors il retourna dans ses quartiers, abattu et épuisé. Il aurait du se reposer normalement, sous une bonne couette et un thé bien chaud. Heureusement, aucun guérisseur, ni maître du conseil, n'avaient croisé son chemin pour le ramener de force chez lui, il avait fait attention à ne pas être vu.

Il s'attendait presque à voir Anakin chez eux, mais non. L'appartement était complètement vide, tout était comme il l'avait laissé quelques heures auparavant, rien n'indiquait qu'Anakin était revenu entre temps.

Alors il l'attendit, pendant longtemps, assez longtemps pour qu'il assiste au coucher du soleil dans son salon. Il tourna en rond dans l'appartement, rongé par l'anxiété, répétant des paroles d'excuse pour son padawan, puis souhaitant faire amende honorable, il se jeta dans sa cuisine, préparant les plats préférés d'Anakin. Il n'avait qu'une envie, c'était de lui demander pardon et quoi de mieux que de combler son padawan de mets qu'il aimait. Il en oublia presque son épuisement et ses douleurs causés par son agitation, qui était contraire à ce que les guérisseurs lui avaient prescrit.

Puis, quand il eut terminé et qu'il eut mis la table, il s'assit, tendu, sur le canapé, attendant les mains sur les genoux, le retour de son padawan. Il avait tenté de le joindre sur son comlink, mais Anakin l'avait laissé dans sa chambre, donc il était impossible de le joindre. Son Padawan avait déjà fait des nuits à l'extérieur et revenait toujours indemne, ce n'est pas aujourd'hui que cela allait changer. Il allait revenir, c'est certain, il n'aurait pas fuit juste pour de simples paroles en l'air.

Non ?

A cette pensée et probablement à cause d'un épuisement physique et émotionnel, son angoisse s'accroit alors, son cœur tambourinait dans sa poitrine, lui donnant des larmes aux yeux. Et si Anakin avait cru qu'Obi-Wan ne l'appréciait pas et avait fuit le Temple pour de bons ? Il était impulsif et très émotif, ce n'était pas impossible. Il pourrait croire que son maître n'avait jamais voulu de lui…

« Il faut que j'aille le chercher » souffla-t-il réalisant qu'il devrait faire vite s'il voulait retrouver à temps son padawan.

A peine, eut-il prononcé ces mots, que la Force semblait l'avoir entendu, car la porte de leur quartier s'ouvrit laissant entrer Anakin, le visage neutre et impassible. Obi-Wan se mit sur ses pieds, prêt à l'accueillir et à lui proférer des excuses dignes.

« Anakin, commença-t-il soulagé et heureux de le voir, où étais-tu ?

- Très loin de vous, marmonna-t-il sans le regarder, comme vous l'avez souhaité, mais j'ai tout aussi besoin de dormir alors je suis revenu.

- Ecoute, Anakin, je…

- Je n'ai pas besoin de reproches à nouveau, coupa Anakin en se dirigeant rapidement vers sa chambre, j'ai fait ce que vous m'avez dit de faire.

- S'il te plait, je suis désolé, je ne voulais pas te dire ça comme ça !

- Mais vous l'avez dit ! Vous êtes bien quand je suis pas là !

- Anakin, je le regrette, je ne le pensais pas…fit Obi-Wan sur un ton désespéré.

La situation lui échappait et sa fatigue l'empêchait de réfléchir correctement pour déballer tout son discours qu'il avait répété dans sa tête tout ce temps où il a attendu. Il ne savait même plus ce qu'il devait dire, juste qu'il devait s'excuser.

« C'était donc un mensonge ? répliqua Anakin froidement.

- Non ! s'écria Obi-Wan, je…ne veux pas être un fardeau pour toi, Ani, je…ne voulais pas que tu sois accroché à mon chevet alors que tu peux faire autre chose de plus intéressant. »

Il espérait que ces paroles puissent apaiser son apprenti troublé. Cependant, cela ne fit pas d'effet, au contraire.

« Alors, si un jour je suis blessé ou malade, vous me considérez comme un fardeau ?

- Quoi ? Non, bien sûr que non ! répondit Obi-Wan choqué, tu comptes pour moi, tu es mon padawan, je ne pourrai jamais…

- Alors c'est pareil pour moi, s'exclama Anakin en se tournant vers lui, vous n'êtes pas un fardeau, vous comptez pour moi, vous êtes plus qu'un maître pour moi !

- Anakin, c'est justement parce que je suis ton maître que c'est moi qui devrais prendre soin de toi, tu ne peux pas t'attacher à…

- Non, ça suffit ! Ne me dites pas ce que je dois ressentir ou faire ! pleura alors le jeune homme, est-ce mal de vouloir prendre soin de son maître ? Est-ce mal de vous aimer ? »

Cette dernière phrase laissa Obi-Wan sans voix. Anakin l'aimait ? Ce n'était pas uniquement qu'un respect envers un maître ? L'aimait-il comme un frère ou un père ? C'est ainsi qu'il le voyait ? Cela expliquerait cette attachement. Peut être avait-il remplacé sa mère toutes ses années après qu'il ait été séparé d'elle.

Être aimé était un concept difficile pour Obi-Wan. Il ignorait si Qui-Gon l'avait un jour aimé, il avait de l'affection, comme un maître pouvait en avoir pour son apprenti, mais y-avait-il un amour paternel ? Il l'ignorait, il ne savait pas ce que c'était.

« Je vous aime, maître, je me fiche de ce que vous pensez, mais je vous aime, sanglota le padawan.

- Oh, Padawan, je…suis désolé pour ce que j'ai dit, je…regrette tellement, dit-il alors la gorge nouée ému d'entendre ces mots si doux de la part d'Anakin.

Il lui tendit ses bras et Anakin s'y jeta sans ménagement, reniflant alors. Obi-Wan sourit alors, heureux de voir que tout semblerait rentrer dans l'ordre.

« Je t'ai préparé à manger, je sais que tu as faim, déclara-t-il après quelques minutes.

Obi-Wan repoussa tendrement Anakin, qui n'avait pas l'air de vouloir se séparer de lui. Il cligna des yeux quand il le conduit à la cuisine, dévoilant tous ses plats préférés.

- Tu as cuisiné ?

- Oui, pour m'excuser, j'ai été cruel envers toi, padawan et je me suis dit que cela pourrait te plaire en tant que cadeau d'excuse.

- Maître, vous n'auriez pas du…souffla Anakin.

- Quoi ? Tu as déjà mangé, c'est ça ? Oh, Force, j'aurai du m'en douter…tant pis, nous garderons ça pour demain et je… »

Il ne termina pas sa phrase, il tituba brusquement, un vertige le prit violemment et il aurait pu tomber au sol, si Anakin ne l'avait pas attrapé à temps.

« Maître ! Kriff ! Vous n'auriez pas du faire cela, vous devriez vous reposer ! le gronda ce dernier en le portant jusqu'à sa chambre pour l'allonger pour qu'il puisse se reposer complètement.

- Je t'ai cherché partout, Ani, je m'inquiétais, je voulais me faire pardonner, gémit Obi-Wan en lui attrapant le pan du col de sa robe.

Anakin eut un petit sourire affectueux, ses yeux brillants regardaient le maitre Jedi avec un amour si profond qu'il en rougissait.

- Maître, je vous pardonnerai, quoique vous fassiez.

A cela, Obi-Wan ressentit une chaleur au cœur, qui le fit frémir de bonheurs. Il avait un padawan adorable et si gentil avec lui.

Pour la énième fois de la journée, Anakin le borda à nouveau, s'assurant qu'il n'attrape pas froid, l'incitant à dormir.

- Et la nourriture ? s'enquit Obi-Wan.

- Je la mangerai, ne vous inquiétez pas, rit le jeune homme, je ne gâcherai pas vos efforts, maître. »

Il soupira de soulagement et, épuisé, il ferma les yeux, avant de lui poser une dernière question, que son esprit confus et fatigué ne cessait de se poser.

- Est-ce que tu m'aimes comme un frère ou comme un père, padawan ? »

Il eut un silence, puis une réponse :

« Je vous le dirai plus tard, reposez-vous, désormais. »

Obi-Wan s'endormit alors, ne se doutant pas un seul instant, que la réponse n'était pas dans sa question.