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Le commissaire poussa la porte de la maison s'attendant à un brouhaha monumental qui l'animait depuis l'arrivée de Laurent. Étonnamment, ce n'était pas des voix qui envahissaient l'environnement mais des pleurs. Il accrocha son manteau dans l'entrée et tomba sur Emma dans le salon, sa fille dans ses bras.
« Salut ! lâcha Antoine. Eh bah… C'est la grosse crise… constata-t-il d'une voix douce en s'approchant de la petite en larmes.
- Ça fait une heure que ça dure… Impossible de la calmer. Je sais plus quoi faire ! lâcha-t-elle désespérée.
- Tu veux que j'essaye ? proposa-t-il.
- Tiens… accepta-t-elle en glissant sa fille dans les bras d'Antoine.
Doucement, le commissaire la berça tout en s'autorisant à lui parler tendrement. Instantanément, la petite cessa sa crise de larmes.
- Eh bah tu vois !
- Alléluia ! s'écria Emma. Faudra que tu me donnes ton secret… Y a qu'avec toi que ça marche…
Antoine rigola en gardant la petite dans ses bras.
- T'es toute seule ?
- Non ! Ils sont dehors…
- Ok… Bah si tu veux je la monte pour essayer de l'endormir…
- T'es sûr que ça t'embête pas ?
- Mais non… Au contraire… lâcha-t-il en entendant le rire de Laurent à l'extérieur. Allez… On va aller faire dodo avec papy Antoine ! déclara-t-il en montant les escaliers. »
Fatiguée, Emma s'éclipsa et rejoignit le reste de la tribu sur la terrasse, laissant son beau-père endormir sa fille. Il arriva dans sa chambre et déposa la petite sur la table à langer.
« Tu l'as mis dans le congélo ta fille ou quoi ? On l'entend plus ! plaisanta Léo.
- Léo… répondit sa mère d'un ton las.
- Non ! Elle est partie dormir dans les bras de papy Antoine.
- Il est rentré ? s'étonna-t-elle.
- Papy Antoine ? répéta Laurent en s'emportant. Pardon ?
- Bah oui, répondit Candice. Tu veux qu'elle l'appelle comment ?
- Bah son prénom c'est très bien hein ! Jusqu'à preuve du contraire, c'est moi son grand-père.
- Oui bon on va pas se battre pour une histoire de surnom… lâcha Emma. Ce qui compte c'est qu'elle se soit enfin calmée. Il est rentré y a dix minutes et il a proposé de la monter… Vu comment elle était bien, j'ai pas osé dire non !
- Mais c'est dingue ça ! À chaque fois c'est pareil… Dès qu'on la met dans ses bras, elle pleure plus…
- Ouais alors qu'avec moi, elle pleure… C'est ça ?
- Papa… répondit Emma d'un ton las avant d'encercler son cou.
- Je vais jeter un œil en haut ! annonça Candice en souriant avant de grimper à l'étage. »
Silencieusement, Candice grimpa les escaliers et se pointa devant la porte à moitié fermée de la chambre. Elle s'apprêtait à l'ouvrir lorsqu'elle entendit Antoine parler. Elle se ravisa finalement et s'appuya contre le mur pour l'écouter.
« Hein que tu préfères papy Antoine à papy Laurent… hein… Eh oui ! Allez ! Viens là ! déclara-t-il en l'installant dans ses bras. Tu veux une petite histoire ? Oui !? Alors papy Anoine va te raconter une p'tite histoire. Continua-t-il avant de lui déposer un bisou sur son front. Alors c'est l'histoire d'un petit garçon un petit peu malheureux parce que ses parents s'occupent pas trop de lui… du coup le petit garçon fait plein de bêtises… Ah ! Ça te fait sourire ça hein… alors le petit garçon grandit et il réussit quand même à devenir un grand policier. Et un jour, il rencontre une madame policière… bon au début ils s'aiment pas trop parce qu'elle est un petit peu chiante mais… c'est vrai qu'elle est quand même très très craquante… confessa-t-il avant de l'embrasser à nouveau sur le front. Tu gardes le secret mais j'ai craqué dès le début… C'est son sourire je crois ! Ouais… Mais tu sais que t'as le même… Puis tu as ses yeux aussi… tout bleus… la petite se mit à gazouiller. Si je te jure ! … Et tu vois, maintenant le petit garçon qu'était malheureux, bah il est heureux… et amoureux surtout…
- Ohhhhhhhh… laissa lâcher Candice avec émotion.
Pris sur le fait, Antoine se retourna brusquement.
- Mais t'étais là ?
Candice acquiesça en souriant avant de venir enlacer son compagnon par la taille.
- Mais je parlais pas de moi hein…
- Ah bon ? Alors pourquoi t'es tout gêné ?...
- Mais je suis pas gêné…
- Hein qu'il est tout rouge papy Antoine ? … T'as vu comment elle te regarde ? Elle est fascinée !
- Ouais je sais… Je fais souvent cet effet… répondit-il fièrement.
Candice éclata de rire.
- Crâneur ! »
Le silence s'installa doucement, laissant place à l'émotion. Antoine continuait de bercer la petite sous la supervision de Candice qui avait posé sa tête sur son épaule.
« Vous allez me manquer… lâcha-t-elle les larmes aux yeux.
- Ohhh ! répondit-il le cœur serré. T'inquiète pas, on viendra te voir. Hein c'est vrai qu'on ira voir mamie ! T'as vu, elle sourit…
Candice acquiesça en silence avant d'observer son compagnon déposer la petite dans son lit. Il mit la berceuse en route et se retourna vers la commandante dont les larmes étaient au bord du précipice. Il s'approcha et la prit dans ses bras.
Bah alors mon amour…
- J'ai envie de rester là… avec toi…
- Eh… commença-t-il en chuchotant à son oreille. On a encore du temps avant ton départ, hein ? Donc on va profiter tous ensemble…
Antoine la sentit acquiescer en ravalant ses larmes.
- Oui mais… après ?
- Arrête de penser à ça… répondit-il pour changer de sujet, ne sachant pas quoi répondre. Allez sèche-moi ces larmes ! Après Laurent va dire que je te fais pleurer… continua-t-il en essuyant ses larmes de ses deux mains. »
Toujours dans leur bulle, le couple se résigna finalement à descendre pour rejoindre le reste de l'équipe en bas.
« Ah bah enfin ! s'écria Laurent.
- Décidément… Je sais pas comment on va faire sans vous… déclara Sacha.
- Ça va ! C'était un coup de chance ! Ça marchera pas à tous les coups… pesta Laurent, visiblement agacé de ne pas être au centre de l'attention.
- Ah non mais à chaque fois c'est pareil ! répondit Sacha. Dès qu'on la pose dans ses bras, elle dit plus rien. C'est magique !
- Suffit d'être calme et doux… osa répondre Antoine sans prétention.
- Ouais… marmonna Laurent. Bon ! On passe à table ?
- Allez ! déclarèrent-ils en chœur. »
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Alors que la chambre conjugale était plongée dans la pénombre, Candice, profondément endormie se retourna brusquement avant d'ouvrir grand les yeux. Perturbée, elle se tint le front avant de regarder l'heure sur son réveil qui affichait 4h34. La commandante se retourna vers son compagnon toujours dans les bras de Morphée. Elle le contempla en souriant avant de se défaire de la couverture et de quitter la chambre en silence. Perplexe, elle se dirigea vers la table du salon étonnamment illuminé en plein milieu de la nuit.
« Tu dors pas ? demanda-t-elle avec étonnement à son ex-mari.
- Toi non plus visiblement… répondit-il en souriant.
- Non… J'ai… J'ai fait un cauchemar…
- Ah oui ? Laisse-moi deviner… J'étais dedans ? plaisanta-t-il.
- Même pas !
- Et… Ça a un rapport avec ton état d'hier soir ? hésita-t-il en lui servant un verre d'eau.
- De quoi tu parles ?
- Arrête Candice… Même si on est plus mariés je te connais… J'ai bien vu que t'étais pas dans ton assiette hier soir !
Gênée, la commandante haussa les épaules.
- Marseille… chuchota-t-elle en buvant une gorgée.
- Quoi ? C'est pour ça ? lâcha-t-il dans un éclat de rire.
- Rigole pas… C'est un gros changement hein… se justifia-t-elle avec amusement.
- Mais t'as quitté Singapour pour venir ici, du jour au lendemain, avec quatre enfants, alors que tu travaillais plus… Là, tu vas débarquer à Marseille, toute seule, pour faire le même job… C'est rien à côté…
- Toute seule… répéta-t-elle en baissant la tête.
- Ah d'accord… Il est là le problème…
- Bah oui…
- Mais les enfants sont grands, puis ils viendront te voir ! »
Dans la chambre, Antoine finit par ouvrir un œil, alerté par des bruits venant du salon. Il fronça les sourcils en constatant que Candice avait déserté la pièce et tendit l'oreille afin d'entendre la conversation.
« Mais oui mais… commença-t-elle les larmes aux yeux. Je vais même pas profiter de ma petite fille…
- Eh bah comme ça on sera deux… De toute façon ton mec a déjà pris ma place…
- Arrête… Elle sera toujours ta petite-fille…
- Bah c'est sûr que si vous vous séparez un jour… Y aura plus que moi… lâcha-t-il en riant.
- Pourquoi tu dis ça ? demanda-t-elle angoissée en triturant sa bague.
- Non mais je dis ça comme ça… On sait pas de quoi l'avenir sera fait… Ça se trouve tu vas tomber amoureuse d'un marseillais sur le Vieux Port…
Candice éclata de rire
- T'es con…
- Puis si jamais tu te sens vraiment seule… Et si tu me détestes pas… Tu pourras toujours venir frapper à ma porte…
- C'est gentil… répondit-elle en baissant la tête avec émotion. Bon… Je… J'vais aller retrouver mon… mon MEC comme tu dis… Merci… chuchota-t-elle en souriant.
- Bonne nuit… »
Souriante, Candice réajusta ses bras sur son peignoir et fit demi-tour jusqu'à sa chambre. Elle entra en silence et constata qu'Antoine avait toujours les yeux clos. Elle referma la porte en silence et se glissa derrière lui en prenant le soin d'embrasser son épaule avant d'encercler son torse. Son compagnon ouvrit les yeux sans bouger et la laisse faire, lui faisant croire qu'il n'avait jamais quitté les bras de Morphée.
