Titre : Le Caravansérail
Auteur : alana chantelune (alanachantelune@caramail.com)
Résumé du chapitre précédent : Quelques mois après la disparition de Voldemort, un sorcier du nom d'Ichem Nassim affronte un certain Belzeth, visiblement Mangemort, pour récupérer un mystérieux anneau. La maison familiale en est presque détruite, et la nièce d'Ichem, âgée de quelque mois, est touchée par le combat. Ichem est aidé par de grands sorciers, membres de l'Ordre de Merlin : son ancien maître Mohamed Ibn Romdane, directeur du Caravansérail Yasmina Ben Nazeth de l'Institut de Jérusalem et Albus Dumbledore, directeur de Poudlard, en Angleterre, qui trouve que cette histoire ressemble à celle du petit Harry Potter.
Note de l'auteur : Bon, le premier chapitre était très court, je vous l'accorde. Celui-ci aussi, il ne sert qu'a poser le décor. Les chapitres vont s'allonger au fur et à mesure. N'hésitez pas à m'écrire, j'ai besoin de critiques pour me perfectionner.
Je tiens à remercier énormément ma beta-readeuse, Angharrad, qui a déjà pas mal de choses à faire sur ses propres fics et traductions, et qui a accepté ce boulot supplémentaire !!! En plus de la correction, elle m'a rassuré sur certains axes de l'histoire et ses commentaires m'ont été très bénéfiques !!!
Comme j'ai toujours pas écrit le chapitre 18 des enfants de la licorne (mais il est tout prêt dans ma tête ! Juré !), je met celui-ci… Les enfants de la licorne reviennent la semaine prochaine, promis !
Disclaimer : Le passage obligé ! ! Alors voilà, Harry Potter et Albus Dumbledore, tout comme le monde des sorciers, ne m'appartiennent pas, je n'ai aucun droit sur eux et ne retire aucun bénéfice en tapant des fics. D'abord, jamais je n'aurais autant d'imagination que la grande J. K. Rowling qu'on ne remerciera jamais assez d'avoir inventé le petit sorcier. Le Caravansérail et tous les autres sont à moi…
Conseils : Beuh, pas de conseils de musique cette fois, ou alors, la chouette musique du seigneur des anneaux, quand les hobbits sont poursuivit par le fermier, au début du premier film, pour l'épisode de la vague.
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Chapitre deux : Une vague s'abat.
La famille Nassim vivait à Tunis, et tenait un bar-restaurant dans le quartier populaire et touristique de Sidi Bou Saïd. Onze ans s'était écoulés depuis « l'incident ». Rien ne semblait s'être passé. Et la petite Malika avait grandi sans aucun problème ou signe particulier. La famille Nassim avait vu l'arrivée d'une petite Naïma et la vie s'écoulait. Le restaurant marchait bien, et le travail ne manquait pas.
Malika et ses frères et sœurs avaient grandis dans leur maison, blanche comme toutes les autres du quartier (avec une porte bleue particulièrement originale dans ses sculptures), en fait un restaurant qui avait appartenu au frère du grand-père et que le père de Malika avait repris quand celui-ci était décédé d'un accident cardiaque. La famille vivait à l'étage. Les enfants avaient la chance d'avoir des fenêtres qui donnaient sur la mer.
La maison n'était pas particulièrement grande ou petite, mais avec cinq enfants, il y avait de l'animation, sans compter les deux perruches qui gazouillaient dans une cage dans le salon et le vieux chien Titus qui ressemblait plus à paillasson qu'à autre chose, et qui ne faisait rien d'autre que dormir sur le devant de la maison, ou suivre Malika, qu'il semblait préférer aux autres. Sans doute parce qu'elle lui offrait régulièrement des gâteaux.
"T'es encore là, Sac-à-puce ?"
Kader, le plus jeune garçon de la famille, avait résolument décidé de baptiser le chien ainsi, et souvent on suivait son exemple dans la famille, sauf parfois Malika et son père, qui avait vraiment de l'affection pour l'animal. Chaque jour, à l'heure creuse, une fois le travail terminé et en attendant le service du soir, le père de Malika s'offrait un thé en fumant une cigarette et en lisant le journal, profitant de la terrasse quasiment déserte à cette heure-là en semaine. C'était son moment de détente à lui, et il ne fallait pas le déranger.
Et Titus venait immanquablement s'asseoir à ses pieds, la tête sur ses genoux, tranquille, attendant sagement qu'il lui gratte les oreilles d'une main distraite. Il n'allait retrouver sa place devant le restaurant que lorsque son maître se levait. Ce rituel était inébranlable et quelque part, on sentait que monsieur Nassim en retirait de la fierté. Titus savait parfaitement qui était le chef de famille. Mais la mère de Malika avait aussi révélé, un jour, que son époux avait toujours voulu avoir un chien quand il était enfant…
Elle râlait souvent à propos du chien, mais elle l'aimait bien aussi car elle n'oubliait jamais sa pâtée, et prenait soin de lui choisir de beaux restes de la cuisine. Il était brave, le Titus, même s'il n'était pas beau avec son poil beige terne et son air perpétuellement fatigué. Parfois, il se réveillait et semblait même un peu intelligent, quand il s'agissait de manger, bien sûr. En tout cas, Malika aimait beaucoup plus Titus, même s'il n'avait rien à voir avec les fidèles chiens des héros de la télé, que les deux idiotes de perruches (Fifi et Mimi) gagnée un jour par sa grande sœur à la fête de l'école et qui faisaient des saletés partout. Mais bon, sa mère, elle, les trouvaient adorables.
A onze ans et demi, Malika se sentait un peu brimée par ses parents. Un peu enfermée, à l'écart, ou surprotégée. C'était un sentiment tout à fait injuste, sa sœur Samira le lui avait dit lors d'une discussion sur le sujet, et elle le reconnaissait, mais elle ne pouvait s'empêcher de penser que ses parents ne la considérait pas avec la même affection que les autres.
« Tu cherches des raisons de t'apitoyer sur toi-même ! » avait dit Samira. « Oui, Naïma est la chouchou, mais ne te prends pas la tête. Est-ce que je le fais, moi ? C'est normal, elle est la plus jeune. »
Le frère aîné, Youssef, avait 18 ans et devait entrer à l'Université à la prochaine rentrée. Il rêvait d'aller en France pour étudier et travailler. Son grand espoir était de décrocher une bourse. Sa sœur Samira, 16 ans, souhaitait également poursuivre des études elle avait déjà visité la France à l'occasion d'un voyage de classe, mais elle avait un but réel dans la vie : elle voulait être pharmacienne. Elle aimait les sciences et la techniques, mais n'aimait pa strop les responsabilités humaines qu'impliquait le rôle de medecin. Elle se voyaity plutôt gestionnaire de santé ou travaillant dans l'industrie pharmaceutique. Samira était une jeune fille très terre-à-terre, stricte et pointilleuse sur tout, voire tyrannique, y comprit sur son maquillage et ses vêtements qu'elle choisissait avec soin, mais aussi très patiente. Youssef était grand, énergique, mais renfermé, et avait souvent du mal à garder son calme quand il était frustré par quelque chose, ce qui arrivait souvent.
Tous deux aidaient régulièrement leurs parents au restaurant, même si de violentes disputes éclataient parfois pour des histoires de disponibilités. L'un et l'autre aimaient sortir avec leurs amis et cela ne cadrait pas avec l'activité du restaurant, surtout durant les vacances, où la clientèle affluait. En effet, ils devaient aider leurs parents dès qu'il n'y avait pas école, les plus jeunes étant généralement envoyé chez leurs grand-parents à Bizerte « pour ne pas les avoir dans les pattes ».
Le vrai problème de la famille s'appelait Kader. A quatorze ans, il préférait largement traîner avec ses potes plutôt que d'aller à l'école et commençait à tremper dans de petits trafics de jeux vidéos et de piratage du web. C'était avec lui qu'il y avait le plus de problèmes. Et celle qui en pâtissait le plus était Malika. Kader était effronté et insupportable. Il pouvait se montrer très gentil à l'occasion, surtout avec ses grand-parents et son frère aîné, mais il détestait qu'on lui fasse des reproches, même quand il était en tort. Il était trop orgueilleux pour les reconnaître. Toutefois, son caractère fort séduisait ses parents, et en tant que plus jeune garçon, on avait tendance à lui laisser la bride le cou.
Quand à Naïma, c'était la petite dernière et la chouchou de la famille. Même Youssef et Kader étaient gentils avec elle et oubliaient ses caprices tellement elle était mignonne. Et elle l'était. Absolument adorable, elle promettait d'être une vrai beauté. Elle était aussi parfaitement consciente de ce statut de chouchou et de petite dernière et en profitait. A son âge, jamais ses parents n'avaient été aussi tolérant sur bien des points, songeait Malika. Elle jalousait sa sœur à propos de l'affection de ses parents, mais en avait pris son parti, comme le reste de la fratrie.
Il y avait aussi les cousins ; deux garçons et une fille, qui habitaient de l'autre côté de la ville, et qu'on voyait quasiment à chaque week-end. L'aînée aurait bientôt quinze ans, et l'un des garçons avait presque l'âge de Malika, mais il préférait traîner avec Kader. Et plus petit, lui, cherchait davantage la compagnie de Malika que de Naïma, même s'ils avaient le même âge, ce que Malika comprenait très ben… Sa petite sœur avait vraiment des goûts de petite fille, (fringues, poupée et stars de la chanson) et son petit cousin semblait plus vif et plus mûr que celle-ci. Leur père dirigeait une petite entreprise de confection.
Il y avait une autre tante, mais celle-ci était veuve et sans enfants. Infirmière, elle avait finit par s'installer chez ses parents, à Bizerte.
Il y avait aussi un oncle, mais on en parlait très peu… C'était bizarre d'ailleurs. Il semblait que l'oncle Hichem s'était brouillé avec la famille. Pourtant, lorsque le père de Malika parlait de son frère aîné, à propos de leur enfance, il y avait un peu de ressentiments dans sa voix, mais aussi des regrets. Sa mère, par contre, semblait totalement négative vis-à-vis de cet homme qu'on avait quasiment jamais vu. Samira ne s'en souvenait pas, et pour Youssef c'était très vague.
"Il était gentil. Je crois qu'il s'amusait à me faire rire, il m'avait offert des animaux en bois magnifiques, un vrai cirque, avec la tête qui bougeait, et les accessoires en métal, je ne sais plus où ils sont mais je les adorais… Naïma pourrait jouer avec... Mais non, elle préfère les poupées et le maquillage ! Ha, ha ! Je ne sais pas de quoi il a l'air maintenant… Il ressemblait beaucoup à Papa, physiquement parlant. Mais il était aussi plus calme, réservé… Un peu bizarre…"
A part cet oncle mystérieux, il n'y avait rien de particulier chez les Nassim.
Sauf cette cicatrice bizarre sur la poitrine de Malika.
En-dessous du cou, elle n'était pas très grande ; on aurait dit une déchirure ou une étoile. Sa mère lui avait dit que c'était une griffure de chat. Mais elle devenait visible dès que Malika portait un débardeur ou un haut avec un col en V, alors elle portait une jolie médaille qui la cachait. D'ailleurs Malika portait toujours cette médaille argentée. Elle l'avait depuis toute petite. Un porte-bonheur acheté par ses parents. Elle y tenait beaucoup et la portait tout le temps. Sa mère lui avait fait plusieurs réflexions les fois où elle l'avait oublié. Elle semblait se sentir responsable de la cicatrice et ne voulait pas qu'on la voit. Alors Malika prenait bien soin de toujours la porter pour faire plaisir à sa mère.
Ce jour là, il faisait très chaud. Forcément, c'était le plein été. Malika était allée en catastrophe faire des courses pour ses parents. Le dernier sac de sel s'était renversé par la maladresse du cuisinier, et il en fallait rapidement avant le service du soir. Malika revenait donc du magasin, un sac de trois kilos à l'épaule, grimaçant à l'idée de grimper les rues de la colline de Sidi Bou Saïd.
Malika Nassim était une fillette carrée. Tout chez elle était carré. Son visage, son corps, ses mains, son menton. Ses gros sourcils noirs souvent froncés lui donnaient un air maussade et elle coiffait toujours ses longs cheveux noirs un peu ondulés en une grosse natte. Elle ressemblait plus par là à ses frères qu'à ses sœurs, plus en formes rondes, surtout sa petite sœur Naïma, si jolie. Mais Malika avait de grands yeux noirs et intelligents. Studieuse, elle était du genre à travailler à fond ce qui l'intéressait et faire juste ce qu'il fallait pour le reste. Elle aimait le sport, et espérait faire de l'athlétisme au collège, ou de la gymnastique. Elle adorait grimper sur les éléments comme les barres asymétriques, la poutre ou le cheval d'arçon. Elle aimait aussi grimper sur le toit de la maison en s'accrochant aux fenêtres et aux gouttières, suivant l'exemple de ses frères et s'attirant les cris effrayés des voisines et les remontrances de sa mère. Elle aimait bouger, et espérait vraiment trouver un sport où elle s'impliquerait à fond. Peut-être serait-elle vraiment douée ? Assez douée pour intégrer un cursus national, et devenir une véritable athlète ?
Elle rejetait généralement ses rêves en se concentrant sur des tâches plus sérieuses. Aujourd'hui, le problème s'appelait (encore) Kader. Car Malika était sa tête de Turc préférée. Et Kader savait qu'elle était allée faire des courses. Elle l'avait vu s'esquiver avec ses copains quand elle avait reçut les instructions de son père. Elle décida de passer par le port plutôt que par la rue commerciale, car le temps était vraiment magnifique.
Tant pis si il fallait monter la centaine de marches qui ramenait en haut de la colline, elle aimait vraiment le vent du large et la mer.
En longeant les jetées du port de plaisance, elle vit quelque chose qui lui arracha une grimace. Sur la digue, il y avait un groupe d'ados. La bande de Kader. Il avait du deviner qu'elle préférerait passer par là. Elle savait très bien ce qui allait arriver.
Ca ne manqua pas. Quand son frère l'aperçut, il l'apostropha.
"Malika ! Oh ! T'était où ?"
Comme si ce crétin ne le savait pas.
"Au courses.", répondit-elle avec brusquerie en continuant son chemin.
Il fallait qu'elle le dépasse et qu'elle s'éloigne vite. Mais il vint vite vers elle et marcha un peu devant elle.
"Hé, file-moi de la thune, file-moi la monnaie, j'en ai besoin."
"Non !"
"Hé, j'suis ton frère, vas-y, file-moi des sous !"
Il s'était mis devant elle, lui barrant le passage. Ses quatre copains l'avaient suivi et se tenaient un peu en retrait.
"Non, c'est à maman. T'a qu'à lui demander, de toute façon, je sais qu'elle voudra pas !"
Elle regretta immédiatement d'avoir été si hargneuse. Il n'allait pas apprécier et se servir de ce prétexte. Elle tenta de passer, mais d'un pas il l'en empêcha.
"Hé, tu te calme, c'est pas grave, tu diras que tu l'as perdu, file-moi un peu d'argent !"
"Non ! Laisse-moi, faut que j'y aille !"
"Quoi, c'est si important ? T'as quoi là-dedans ?"
D'un geste vif il lui arracha le sac et le lança à un de ses copains, qui le lança à un autre. Ils s'amusèrent à se le repasser.
"Arrêtez ! Rend-le moi, Kader, on en besoin de ce sel !"
"Donne-moi des thunes alors, c'est rien, quelques dinars !"
"Non ! C'est pas notre argent ! »
Elle essayait vainement de récupérer le sac qui volait d'un garçon à l'autre, ceux-ci s'amusant fort de ce jeu stupide. Malika savait que l'argent n'était qu'un prétexte de Kader, l'embêter était son but principal.
"Ho ! Ho ! Attention ! Il pourrait tomber dans la mer !" fit un des garçons avec un gros rire en agitant le sac au-dessus de l'eau.
"C'est pas grave, y'a déjà plein de sel !"
Ils rirent et continuèrent leur manège en se moquant de Malika.
Personne ne comprit ce qui se passa à se moment là, et certainement pas Malika.
La mer était d'huile.
Pourtant, venue d'on ne sait où, une énorme vague surgit et s'écrasa sur la jetée, trempant les cinq garçons de la tête aux pieds.
Ce fut si soudain et si inattendu que pendant quelques secondes, nul ne dit mot. Et puis Malika éclata de rire, vite imitée par trois hommes assis sur un banc quelques mètres plus loin.
Laissant son frère et ses amis stupéfaits, elle récupéra son sac un peu mouillé tombé au pieds des garçons et cria "Bien fait !" avant de reprendre sa route en courant. Aucun n'eut la présence d'esprit de lui courir après, bien trop étonnés par ce qui leur était arrivé.
C'est avec allégresse que Malika entreprit l'éprouvante remontée vers Sidi Bou Saïd. Le sac lui paraissait moins lourd après cette revanche inattendue.
C'est avec gaieté qu'elle aida à la maison, en racontant à tout le monde ce qui s'était passé. Kader essaya bien de rentrer discrètement, mais il fut repéré et subit les railleries de tout le monde, et les remontrances de ses parents. Pour une fois, il avait tellement honte, qu'il ne trouva pas grand-chose à rétorquer et alla s'enfermer dans sa chambre. Sa mère ne se priva pas toutefois de lui reprocher d'avoir mouillé le sac.
Alors que Malika répétait l'histoire à sa sœur, elle lui ordonna même de se taire. Quand Malika voulu tout de même finir, elle se fit réprimander de la même manière que son frère, et son père se joignit à sa mère pour exiger de ne pas en reparler.
"Pas besoin de répandre ça partout, compris ?" fit-il avec une voix sévère.
Et dans les jours qui suivirent, ils furent bien plus sévères que d'habitude avec leur fille. Quelle injustice ! C'était Kader qui ne faisait que de l'embêter ! Comme si c'était sa faute à elle s'il avait été trempé ! Sa mère s'acharnait contre elle, elle en était persuadée. Et son père le savait, et il laissait faire…
Elle passa une bonne partie de la journée dans son coin, avec Titus qui se dorait au soleil. Malika aimait les animaux, et se sentait plus calme en leur présence. Parfois, elle avait l'impression de les comprendre, lorsqu'elle les regardait profondément dans les yeux. Ils venait spontanément vers elle, et elle devinait souvent ce qu'ils voulaient : quand Titus voulait sortir de la maison (il n'aboyait jamais et ne manifestait jamais ses envies comme les autres chien, en gémissant ou grattant à la porte), quand elle savait que ce chien-là ne voulait pas être approché, quand cet oiseau avait faim, où quand le chat d'une de ses camarade s'était planté une écharde dans un coussinet.
Mais là, même de rester à côté de Titus à regarder la mer ne la calma pas. Elle savait qu'elle ne l'emporterait pas au paradis, que son frère n'en resterait pas là.
Kader en profita quelque jours après pour l'embêter alors qu'elle faisait ses devoirs de vacances dans la cuisine. Il se mit à lui poser des questions idiotes, à prendre sa feuille pour la critiquer, et inévitablement, elle se mit en colère et cria.
"Fous-moi la paix, crétin !"
"Malika ! Je ne veux pas t'entendre jurer ainsi !" s'exclama sa mère qui était dans le couloir.
"Mais c'est Kader, il n'arrête pas…"
"Peut-être, mais ce n'est pas une raison ! Kader, file, t'as rien à faire là ! Tu ferais bien de te surveiller ma fille, car avec un caractère comme le tien, tu n'auras que des problèmes !"
Kader obéit promptement, un petit sourire aux lèvres. Malika avait envie de pleurer. Pourquoi sa mère était-elle si dure avec elle ? D'accord, parfois elle s'énervait et faisait des colères terribles… Combien de fois elle ne s'était pas jetée toutes griffes dehors sur Kader ? Mais c'était toujours quand elle était poussée à bout. Une ou deux fois à l'école elle s'était battue avec des filles qui l'avait un peu trop embêtée. Et bien sûr, cela lui avait valu de sévère remontrances de la maîtresse ET de sa mère. Mais pourquoi défendre Kader qui était si insupportable ?
Le lendemain, alors qu'elle était dans la cuisine à mettre la table pour tout le monde, tandis que sa mère faisait la cuisine, survint un événement incroyable. Dehors, un cri retendit. Un cri d'oiseau. Dans un coup de vent, un faucon s'engouffra par la fenêtre ouverte et se posa sur la table, au milieu des assiettes et des couverts.
Il avait les plumes beige clair. Il poussa un petit cri et se dandina sur la table. Malika et sa mère ne dirent rien, trop stupéfaites par cette arrivée si soudaine, si irréelle. Dans ses serres, il y avait une lettre. Ce fut l'entrée de Naïma et Samira qui fit bouger les choses.
"Maman ? C'est quoi ça ? Qu'est-ce que ça fait là cet oiseau ?"
Malika haussa les épaules, ahurie. Mais sa mère agrippa le bras de sa fille aînée.
"Va chercher ton père, vite !"
"C'est juste un oiseau…"
"VA CHERCHER TON PERE IMMEDIATEMENT !"
Samira, effrayée, s'exécuta. Le cri de sa mère avait attiré Youssef et Kader, qui entrèrent à leur tour dans la cuisine.
"Maman ?" demanda Youssef.
"Hé ! C'est un pigeon voyageur, il a une lettre !" fit Kader en se dirigeant vers l'oiseau qui attendait toujours, posé devant Malika.
"Tu ne le touches pas !" cria sa mère.
Il y avait quelque chose d'effrayant dans sa voix, et le garçon s'arrêta. Ce n'était pas souvent que sa mère criait comme ça. Le faucon s'approcha à petit pas de Malika qui eut un mouvement de recul. Il dressa sa patte plusieurs fois, dans un geste gracieux, essayant de lui tendre la lettre, et la reposa pour retrouver son équilibre. Apparemment, il attendait qu'on le décharge de son message. Mais Malika n'osait bouger. Le visage de sa mère était tellement tendu…
Samira revint avec leur père. Il ne montra aucune surprise en voyant l'oiseau sur la table. Celui-ci eut un petit cri dans sa direction. Il resta un instant à l'entrée de la cuisine, sans bouger. Puis il s'avança vers la table, tendit la main et regarda l'enveloppe de papier jaunie.
Il resta immobile, les yeux fixés dessus.
-Fin du deuxième chapitre –
Prochain chapitre : L'Oncle Mystérieux
L'oncle Hichem arrive pour prendre en main l'éducation de Malika. Il va lui révéler d'étranges choses sur sa médaille et sur le passé.
