Titre : Malika Nassim au Caravansérail
Auteur : Alana Chantelune (alanachantelune@caramail.com)
Beta-readeuse : Angharrad, super sympa de sa part, et avec des commentaires pertinents en plus !
Résumé général : Malika Nassim, une fillette tunisienne de douze ans, apprend qu'elle est une sorcière et qu'on l'attend au Caravansérail, l'école de Magie, où son mystérieux oncle Hichem est professeur.
Résumé du chapitre précédent : Malika est une fillette de onze ans et demi qui apprend qu'elle est une sorcière. Son oncle Hichem, professeur au Caravansérail, l'école de Magie du Maghreb, vient la chercher pour lui expliquer ce qui s'est passé quand elle était bébé et pour lui faire découvrir le monde de la sorcellerie. Il l'emmène faire ses achats de la rentrée.
Disclaimer : Sans J.K. Rowling, je n'aurai jamais écrit tout ceci. C'est à elle, à elle seule que je le dois. Je n'ai donc aucunement le droit de gagner ma vie avec cette histoire, bien que j'adorerai !!
Note : oui, les premiers chapitres sont ennuyeux. Ca commence à se débloquer à partir de celui-ci.
Conseils : Evidemment, pour la scène de la Médina Magique, la pétillante musique de "Diagon Alley" ! Attention, je trouve que la version du CD est édulcorée par rapport à la version du film.
Présentation des personnages :
Malika Nassim : héroïne de notre histoire. Onze ans et demi, elle apprend qu'elle est une sorcière. Volontaire, très excitée par ce qui lui arrive, elle souffre toutefois de l'attitude de sa famille.
Hichem Nassim : Mystérieux oncle de Malika, prof de Magie. Séparé de sa famille depuis des années.
Les parents de Malika : tiennent un restaurant. Si le père semble regretter la mésentente survenue avec son frère, la mère reste très hostile à la magie.
Youssef : 18 ans, grand frère de Malika. Le plus amical de tous dans la fratrie.
Samira : 16 ans, grande sœur de Malika, au caractère bien trempé.
Kader : 14 ans, jeune frère de Malika, et son tortionnaire. Un vrai sale gosse, celui-là!
Naïma : 9 ans, petite sœur de Malika. La chouchoute de la famille, une peste en puissance ?
Titus : le vieux chien de la famille Nassim. Brave bête crasseuse qui roupille tout le temps.
Chapitre quatre : La Médina Magique
Le lendemain, quand Malika fut réveillée par sa petite sœur, qui avait bien sûr claqué la porte en allant aux toilettes, elle eut un instant d'hésitation. Puis elle se souvint de ce qu'il s'était passé la veille.
Son oncle…
Un magicien, un sorcier…
Et elle, une sorcière !
Avec une blessure magique !
Elle avait du mal à admettre cette situation. Et puis, quel genre de magie pouvait-on bien faire ? Elle n'avait même pas vu son oncle faire de la magie. Il avait une baguette, oui, mais… Elle n'avait rien vu de magique.
Cela dit, réfléchit-elle, la vague sur le port et l'arrivée du faucon avaient indubitablement quelque chose de magique…
Non, c'était une blague !! Tout ça n'était qu'une mauvaise blague…
Mais le souvenir du visage de ses parents le soir précédent chassa sa piètre tentative de se convaincre que la magie n'existait pas. Ses parents y croyaient. Ils en avaient vu, et ils n'étaient pas fous, et ils ne rigolaient pas avec ça. Son estomac se tordit en repensant à ses parents. Est-ce qu'ils la détestaient pour cela ? Est-ce qu'ils allaient l'abandonner, la confier à cet oncle mystérieux juste pour ça ?
Naïma revint paresser dans son lit en chantonnant. Cela brisa ses pensées angoissantes, et elle constata que si son estomac se tordait, c'était d'abord parce qu'elle avait faim. Elle alla donc s'habiller dans la salle de bain, et en profita pour faire un brin de toilette. Comme ça, elle serait prête quand le voudrait l'oncle Hichem.
Quand elle descendit dans la cuisine, elle était la seule habillée. Samira et sa mère étaient en robes de chambre. Elle prit son petit déjeuner avec un "bonjour" timide, rendue avec réserve. Deux tasses vides dans l'évier indiquaient que son père et son oncle avaient déjà prit leur petit déjeuner. Les trois femmes mangèrent dans un silence tendu, se jetant des regards en biais.
Enfin, comme Malika avalait sa dernière bouchée, Hichem entra dans la pièce.
"Malika ?" demanda t-il. "Tu es prête ?"
Il était tel que la veille. Il n'était pas à proprement parler étrange, mais risquait d'attirer les regards. Enfin, pas tant que ça, d'autres personnes en ville portaient des djellabas un peu comme ça. Même certains touristes, d'ailleurs.
Malika hocha simplement la tête, de nouveau intimidée par cet homme grand et… Altier ? Oui, c'était le bon mot pour le décrire… Pas hautain, mais noble, et comme distant par nécessité, car on sentait qu'il était aussi affable… Mais il n'inspirait pas l'amitié immédiate. Plutôt le respect. Quel genre d'homme était-ce ? Comment avait-il vécut son entrée dans la magie ? se demandait Malika, en le suivant, laissant sa mère et sa sœur les regarder partir avec une expression ambiguë. Malika eut soudain l'horrible idée qu'elle n'allait jamais rentrer chez elle, qu'elle allait être enlevée et emprisonnée… Pouvait-elle faire confiance à cet homme dont elle ignorait tout ?
Comme s'il avait sentit ses angoisses, arrivé devant la porte, Hichem se tourna vers elle, lui sourit, et dit simplement : "Allons !"
Ils prirent le bus pour se rendre dans le centre de Tunis. Ensuite, Malika suivit son oncle dans le souk qu'était la Médina. Comme d'habitude, une foule de personnes se pressaient dans ces rues étroites. Les touristes étaient nombreux ; des allemands en short suivaient un guide qui se cassait la voix à décrire les mosquées, des anglais et des danois se pressaient devant les innombrables boutiques, un groupe d'étudiants français trottinait derrière leurs professeurs qui clamaient qu'ils seraient en retard pour visiter le port de Carthage, une famille américaine se prenait en photo…
Les boutiques de souvenirs pullulaient, les restaurants aussi, et Malika ne voyait vraiment pas où on pourrait trouver une boutique magique.
Et puis, finalement, après avoir tenté de ne pas perdre son oncle dans la cohue, celui-ci s'arrêta si brusquement qu'elle se cogna à lui.
Entre une boutique et une petite mosquée, il y avait une porte de métal sombre aux motifs particulièrement exubérants de lignes, de plantes et d'arabesques. Mais elle était vieille et rouillée, et semblait condamnée ; Malika pouvait voir le mur de pierre qui continuait derrière. On avait juste laissé la porte pour faire joli.
Elle était déjà venu à la Médina et ne l'avait jamais remarquée, d'ailleurs.
Mais son oncle se tourna vers elle.
"C'est là." dit-il simplement.
Alors, il fit discrètement sortir sa baguette dans sa manche en toucha la poignée de la porte. Il la rangea aussitôt, et tira le verrou.
Et la porte s'ouvrit sur une rue.
Malika ouvrit la bouche de stupeur. Cette porte ne devait donner sur rien, elle l'avait vu… Mais son oncle la poussa en avant, et la porte se referma sur eux.
Malika découvrit le plus stupéfiant endroit qu'elle ait jamais vu. Une arche, au-dessus de sa tête, portait une inscription :
"Médina Magique"
De chaque côté de la rue qui s'étalait devant elle en serpent, très différente par là des rues quadrillées de l'ancienne cité romaine qu'était Tunis, se tenaient de petites boutiques renfoncées, comme dans la Médina qu'elle venait de quitter.
Mais ces boutiques ne contenaient pas de babioles pour touristes, oh non… C'était des boutiques telles que Malika n'en avait jamais vu. Et si autant de monde se pressait que dans l'endroit qu'ils avaient quitté, ces personnes était sans aucun doute d'un autre monde… Des hommes et des femmes vêtus de robes et de larges turbans ou chapeaux allaient et venaient, traînant, qui des enfants portant les mêmes robes bizarres ou parfois des vêtements "normaux", qui un chien multicolore, qui un tapis volant sur lequel était chargé ses courses…
D'un geste doux, son oncle la poussa en avant, avec un léger sourire, un peu nostalgique :
"Ferme la bouche, voyons…"
Mais elle était trop ahurie pour dire quoi que ce soit, et elle le suivit dans la rue en jetant sans cesse des regards de droite à gauche.
A sa droite, l'enseigne d'un salon de coiffure-barbier représentait le visage d'un sorcier peint dont les cheveux et la barbe changeait continuellement de coupe ; à sa gauche, une vitrine présentait toute sortes d'ustensiles d'astronomie. Ensuite, venait un marchant de chaudrons, et aussi une boutique de foulards et de chapeaux, tous plus incroyables les uns que les autres ; on les aurait cru sortis d'un livre d'histoire ou de contes de fée.
Puis, ils passèrent la boutique d'un apothicaire, qui présentait dans sa vitrine quantités de bocaux aux substances étranges. Malika eut le temps d'apercevoir quelques étiquettes comme "épines de porc-épic", "sève de palmier", "dents de cobra", "feuilles d'Aconit" ou "bave de Veracrassse".
La rue débouchait sur une vaste esplanade, croisement de quatre rues, au milieu de laquelle se tenait une fontaine, que l'on atteignait en descendait cinq ou six marches. Elle représentait un roi et une reine, entouré d'animaux inclinants humblement la tête, portés sur un tapis par quatre génies, grimaçants mais serviles, qui crachaient des jets d'eau, tout comme les sceptres que tenaient le roi et la reine. Les statues étaient de métal noir luisant, et le sol de la fontaine était couvert de mosaïques. La cour carrée dont elle faisait le centre était remplie de sorciers et sorcière qui discutaient, et même de cinq ou six enfants qui jouaient avec un drôle de petit ballon marron, de forme sphérique, qui semblait se mouvoir de lui-même. Ce n'est qu'en passant devant eux que Malika vit que la chose était en fait un animal…
A leur gauche, une grande librairie prenait la place de deux magasin : "Au Codex Infini". A leur droite, offrant de nombreux sièges et des parasols, se trouvait un restaurant, "Le Bien-Repus", où une foule de clients profitaient de la situation agréable de la terrasse du restaurant, donnant sur la fontaine. Derrière celle-ci, à l'autre bout de l'esplanade, Malika distingua une imposante bâtisse, qui ressemblait exactement à un temple romain, aux colonnes majestueuses. Au fronton, en lettres d'or, était inscrit "Banque Gringott". Un autre gros bâtiment se trouvait à côté, séparé par une des quatre rues ; il avait, lui, la forme arabisante d'une mosquée : "Bibliothèque magique de Tunis" s'inscrivait en lettres austère et écaillées, sous un haut minaret qui comportait aussi un cadran solaire assez simple, loin du cliquant de la banque.
Mais elle ne put tout voir car son oncle l'emmena directement dans une boutique de vêtements "Les Sœurs de l'Aiguille", à gauche de la fontaine. Des robes de sorciers étaient en présentation dans la vitrine. Les mannequins de tissus bougeaient, prenant des poses qu'ils ne cessaient de modifier. Une des robes était vraiment superbe : une tenue d'apparat de brocart rouge moiré, rehaussé de fils d'ors, de bandes pourpre et brunes. Une étiquette indiquait : "Eruption, création de Sonia Doigts-de-Fée. Réservée." A coté, trois autres robes, deux de femmes et une plus petite, de couleur ocre, essayaient de ne pas se faire prendre la vedette. La plus petite portait l'étiquette "Uniforme du Caravansérail."
Quand ils entrèrent dans la boutique, Malika vit une dizaine de personnes qui examinaient les différentes tenues présentées, ou descendaient de l'étage au-dessus, les bras chargés de vêtements, dans un brouhaha chaleureux. Trois enfants, accompagnés de leurs mères, subissaient tant bien que mal les essayages des vendeuses. Un homme, apparemment employé du magasin, parlait très sérieusement avec deux clientes.
"C'est vraiment formidable pour elle. Elle est très généreuse de nous laisser l'exclusivité de quelques modèles alors qu'elle présente ses collections à Paris, maintenant. Vous savez qu'elle part aux USA pour une tournée le mois prochain ? Oui, sa nouvelle collection Automne-Hiver… Ma belle-mère en est tellement fière..."
"Evidemment, il y a de quoi… Et sa cousine qui est si belle dans ses robes… C'est vrai qu'elle travaille aussi pour des couturiers Moldus ?"
Malika ne suivit pas le reste de la conversation. Une jeune femme se présenta à eux, détailla Malika du regard, et demanda s'ils venaient pour des uniformes.
"Exactement." répondit l'oncle Hichem.
Malika fut emmenée d'une main ferme par la jeune femme qui avait juste terminé avec une famille. Elle poussa Malika dans une cabine, et lui passa une robe ocre qu'elle sortit d'une rangée d'uniformes de toutes tailles. Son oncle s'assit sur un tabouret en soupirant, essayant de ne pas se faire marcher sur les pieds par les autres clients.
"Première année ?" demanda la vendeuse, en tournant autour de Malika, plantant des aiguilles dans la robe.
"Heu, oui…"
"Impatiente, hein ? Ne bouge pas..."
Un mètre ruban volait autour de Malika en prenant ses mesures. Elle osait à peine bouger et essayait de le suivre des yeux.
"Voilà…C'est bien… C'est ma grand-mère qui a refait les uniformes du Caravansérail, il y a maintenant, oh, quarante ans ? Lève un peu les bras… C'est un peu terne, mais ça vaut mieux à cause du soleil. Et puis il y a toujours les turbans à personnaliser, tous les écoliers font ça… Ne bouge pas… Je me souviens, j'avais monté une vraie petite entreprise comme ça, quand j'y étais… La tête bien droite… J'ai eu des ennuis, mais mon père a dit que j'avais ça dans le sang… Histoire de famille, on est tous plus ou moins dans la confection, même mon cousin qui fait des tapis… Ma grand-mère et sa sœur ont fondé cette boutique… Attention, je fais l'ourlet…"
Le babillage de la jeune femme ne cessa que lorsqu'elle ordonna à Malika de ne plus bouger du tout. Elle pointa sa baguette sur la fillette et un instant, Malika eut peur. C'était la première fois qu'elle voyait de la magie directe, et c'était sur elle qu'on l'utilisait ! La vendeuse marmonna quelque chose et aussitôt, la robe se réajusta d'elle même.
"Parfait, tu peux la retirer !"
Quand elle sortit de la cabine, elle se dirigea vers la caisse, et Malika et son oncle la rejoignirent.
"Mesure relevées, trois modèles plus chaussures, un manteau et deux foulards, livraison dans quarante-huit heures, quel nom, quelle adresse, autre chose ?" pépia-t-elle en notant très vite sur son carnet de vente les informations qu'elle dictait.
"Malika Nassim, 28 rue de la Petite Montée, à Tunis. Ce sera tout, Madame, merci." répliqua son oncle d'un air amusé.
A ce nom ou à cette voix, la jeune femme leva la tête, stupéfaite.
"Oh ! Professeur Nassim ! Je ne vous avait pas reconnue !!" balbutia t-elle, rosissant légèrement.
"Cela fait plus de dix ans, c'est vrai…"
"Oh, mais… Je ne vous aie absolument pas oublié… Je… C'est votre fille ?" demanda t-elle le souffle court, les yeux écarquillés sur Malika.
"Ma nièce."
"Oh… Et bien… ravie de vous rencontrer, Mademoiselle… Heu…"
"Mes félicitations pour votre mariage, au fait. Je l'ai lu dans le journal."
La jeune femme devint encore plus rouge.
"Oh… Merci… Professeur…"
Hichem Nassim posa en évidence sur le comptoir une petite pile de pièce d'or.
"Bonne journée." salua-t-il et il entraîna Malika derrière lui, laissant la jeune femme éberluée, mais Malika l'entendit interpeller son mari et leurs clients :
"Par la barbe de Mathusalem, chéri, c'était Hichem Nassim et…"
Ils se retrouvèrent sur la place, toujours aussi pleine de monde.
"Bien." commença son oncle. "J'avais prévu ces dépenses, pas besoin d'aller à la Banque. Tes tenues seront livrées chez toi. Maintenant, il faut nous occuper du reste. Tu as ta liste ?" demanda t-il en haussant un sourcil.
Malika hocha la tête, fouilla dans sa poche et lui tendit le parchemin. Tandis qu'il le lisait, elle l'observa. Son oncle semblait être connu… La vendeuse avait été une de ses élèves, donc?
"On va faire les boutiques d'abord, on verra les livres en dernier, c'est le plus lourd à transporter. " conclut son oncle après avoir visualisé la liste.
En sortant sur la place, Malika parvint à voir les enseignes des autres magasins: une autre échoppe d'apothicaire, un peu plus luxueuse, apparemment ; un magasin de bijoux, "Les Fils de Lune" ; une boulangerie ou quelques enfant achetaient des glaces ; une animalerie, "L'Arche de Noé", dans laquelle elle mourrait d'envie d'aller faire un tour ; un grand magasin de tapis et balais ; et un magasin général, "Chez Banthar et Ben".
Ce fut dans ce grand magasin qui regorgeait de produits les plus divers et s'étalait sur deux étages, que Malika et son oncle devaient se procurer une balance, des fioles et des bocaux, des encres, des plumes, des stylets, des craies, une ardoise et des rouleaux de parchemins, tout le matériel nécessaire à l'entrée dans une école de Magie. Ils ne restèrent qu'au rez-de-chaussée, au grand dépit de Malika, car c'était à l'étage que se trouvaient les vrais objets magiques, et pas seulement les fournitures classiques, tant que des parchemins et des stylets puissent être considérés comme des fournitures "classiques"…
Tandis qu'elle choisissait un lot de plumes dans un rayon du magasin, détaillant chaque étagère avec des yeux gourmands, elle heurta un garçon qui avançait dans le sens contraire. Elle fit tomber ses stylets et les plumes, et lui ses rouleaux de parchemins.
"Tu peux pas faire attention !" grogna le garçon d'une voix courroucée.
Si elle n'avait pas été dans un état second en découvrant ce nouveau monde, Malika lui aurait vertement rétorqué que lui non plus ne regardait pas où il allait. C'était un garçon d'environ son âge, aux cheveux ondulés et courts, au nez droit et aux sourcils épais qui lui donnaient un air ténébreux. Elle ramassa ses plumes en toute hâte, encore étourdie par tout ce qu'il avait à voir dans le magasin. En voyant son air perdu, le garçon, qui portait un pantalon bouffant et un long manteau brodé, eut une grimace interrogative.
"T'es jamais venue ici ou quoi ? D'où tu sort ?"
"Je suis venue acheter mes affaires scolaires." répliqua Malika qui n'aimait ce ton, qui lui rappelait trop celui de Kader.
"J'aurai pas deviné !", fit l'autre, sarcastique, toujours avec une moue méprisante.
Malika le foudroya du regard.
"T'es de chez les Moldus, toi." affirma encore le garçon, en examinant son pantalon de toile léger et son tee-shirt de son air méprisant qui ne plaisait pas du tout, mais alors pas du tout, à Malika.
"Et alors? Ca fait quoi ?" dit-elle effrontément en serrant ses plumes et ses stylets contre elle.
Il lui faisait vraiment penser à son frère, celui-là!
"Alors ceux qui viennent de chez les Moldus, ce ne sont pas de vrais sorciers.", trancha l'autre en la regardant comme si elle sortait du caniveau.
Malika était choquée par de tels propos. Qu'est-ce qu'on en avait à faire de venir de chez les Moldus ? Son oncle aussi venait de chez les Moldus !
"Malika ? Tu as tout trouvé ?"
Son oncle, justement, surgit derrière elle, les bras chargés.
Et le visage du garçon se décomposa. Malika aurait éclaté de rire si elle n'avait pas été si furieuse. Mais cela lui donna beaucoup d'allégresse, de voir ce gamin hautain se ratatiner comme un fruit sec.
"Pro… professeur…" balbutia-t-il.
"Ah… Bonjour, monsieur… Thanekhros, c'est ça ?"
"Oui. " souffla le garçon en tâchant de rester calme.
"Malika, et les parchemins, tu les as ?"
Malika repéra les rouleaux de parchemins un peu sur la droite, après les plumes et les stylets. Elle en saisit un lot et se retourna vers son oncle.
"C'est bon."
"Alors allons-y."
Malika suivit son oncle, qui fit un signe de tête au garçon, qui avait l'air à la fois gêné et stupéfait, tout en essayant de rester le plus hautain possible. Malika lui lança un regard méprisant, et suivit son oncle, le nez en l'air, tandis que le garçon les suivait des yeux, une grimace sur le visage.
"Qu'est-ce qu'il t'a dit ?", demanda brusquement son oncle quand ils sortirent du magasin.
Malika fut surprise. Son oncle ne s'était pas révélé très causant jusqu'à présent.
"Que ceux qui venaient de chez les Moldus n'avaient rien à faire chez les sorciers.", expliqua t-elle avec une note d'angoisse dans la voix.
"Il y en a qui pensent ça. N'y fait pas attention. Ils n'en valent pas la peine. Ce n'est pas parce qu'un sorcier est né de parents Moldus qu'il n'est pas un vrai sorcier. La preuve, regarde-moi." lui lança-t-il avec le premier vrai sourire qu'elle lui vit. "Allons, maintenant, le nécessaire à potions."
Ils retournèrent à la boutique de l'apothicaire qu'elle avait vu en entrant dans la Médina Magique. Ce faisant, elle vit le nom de la large rue par laquelle ils étaient arrivés : "Route des caravanes". Elle se demanda comment des caravanes pouvaient bien passer ici.
Après avoir acheté toute une série de bocaux et sachets de substances magiques "standard" comme disait son oncle, celui-ci l'emmena dans la boutique d'astronomie. Il y avait tant d'astrolabes, de globes célestes, de cartes de ciel et de télescopes que cela faisait tourner la tête de Malika. Au plafond, elle vit des globes lumineux qui bougeaient. En fait, elle comprit qu'il s'agissait d'une représentation lumineuse du système solaire, qui flottait tout seul sous un plafond aux décors des constellations de l'antiquité grecque.
Son oncle lui acheta un télescope et un globe céleste.
Ensuite, ils entrèrent dans la boutique de chaudrons. Jamais Malika n'aurait imaginé qu'il y eut pu avoir tant de sortes de chaudrons : en fer, en étain, en argent, en or, des grands, des petits, des énormes, des miniatures, des pliables, certains avec des étiquettes particulière : "touillage automatique", "sans feu", "contenance infinie", "option anti-débordement" ou "Nouveau ! Chaudrons-trotteurs !". Ces derniers ne cessaient de gigoter, semblait-il pour trouver une position plus confortable à leur empilement les uns sur les autres. Divers ustensiles de cuisine étaient aussi proposés.
Malika eut bientôt entre les mains un chaudron de taille individuelle standard. Elle y fourra ses autres achats, et suivit son oncle qui se dirigeait de nouveau vers la place. Mais cette fois, il se rendit vers la rue qui donnait sur la droite de la place. Elle était plus étroite que celle d'où ils venaient, orientée au Sud, mais était également sinueuse, comme si l'architecte qui avait dessiné les rues de la ville était ivre quand il avait fait son travail. Les boutiques étaient un peu plus petites. Malika vit le nom de la rue sur un panneau : "Rue des Sentinelles". Elle se demanda quelles pouvaient bien être ces sentinelles.
Une échoppe intitulée "Barberousse, entretien d'objets magiques, spécialiste en réparation" laissa sortir un chaudron de métal qui courait aussi vite que lui permettait ses trois pieds. Malika sursauta de surprise, et se recroquevilla près de son oncle, qui posa sur son épaule une main rassurante. Le chaudron les dépassa, et un homme bedonnant surgit derrière lui en rouspétant, tandis qu'une femme, très soucieuse et très maquillée, portant une robe verte pleine de frou-frou et un grand voile transparent de la même couleur, s'exclamait à la porte du magasin : "Oh, je vous l'avait dit, je ne comprends pas comment on en est arrivé là, je suis sûre que c'est la faute des enfants, un chaudron si pratique d'habitude !!!"
Ils laissèrent l'homme et sa cliente courir après le chaudron récalcitrant.
"Ca devait arriver, avec ces nouveaux Chaudron-Trotteurs." soupira son oncle. "On veut faire n'importe quoi avec la Magie et on ne se rend pas compte qu'on risque de provoquer des complications… Enfin… Le Ministère aura bientôt ce nouveau problème à résoudre…"
Ils passèrent devant une vitrine qui présentait des épées brillantes, des poignards aux formes complexes, et des armes de toutes sortes et qui était en fait la devanture d'une "Armurerie Magique de Carthage". Malika ne put s'empêcher de penser que les prix étaient prohibitifs, même ne connaissant pas la valeur de l'argent sorcier (des Mornilles, des Noises et des Gallions, comme elle avait vu son oncle payer). La rue comportait aussi une toute petite boutique avec une enseigne luisante "Brickébrock, conseils en démarches moldue", une sorte de bar discret d'où émanait une douce musique, un magasin de verreries absolument enchanteresses (Malika aurait bien voulut y entrer), et une boutique un peu moins attirante, "Vaudou pour Marabouts". La porte de cette boutique s'ouvrit, laissant sortir une sorcière dodue, aux cheveux grisonnants serrés en chignon, les bras chargés de sacs qui s'arrêta en les voyant.
"Hichem !!! Que fais-tu donc là ? Je t'aurais cru en train de profiter d'un repos bien mérité… Ne me dis pas qu'ils t'ont envoyé t'occuper d'une nouvelle ?" s'exclama t-elle, scandalisée en remontant d'un froncement de nez ses lunettes ovales qui glissaient. "Tu en as assez fait il y a quelques jours ! Bonjour, Mademoiselle, je suis Faizia Chamaniak, votre futur professeur d'Incantations et Rituels." dit-elle à Malika d'un ton vif et autoritaire.
"Malika Nassim, professeur." se présenta celle-ci.
La femme la regarda d'un drôle d'air, et se tourna, choquée, vers son oncle.
"Hichem ? Tu as une fille ? Depuis quand ?"
"C'est ma nièce, Faizia." sourit l'oncle Hichem.
"Oh ! Je vois !" fit-elle d'un hochement de tête appréciateur.
"Que fais-tu avec tout ça ?"
"Ne m'en parle pas !!! Tu sais que nous avons un nouveau professeur de Vaudou ? Hé bien j'ai été chargé de m'occuper de faire le ménage dans les affaires de notre ancien collègue…"
"C'est à l'Intendance de faire cela !"
"Mais notre chère amie est aujourd'hui au Ministère pour la Commission Annuelle avec Ben Romdane et Batoul. J'espère qu'ils nous auront ces fonds pour rénover les bassins… Donc, c'est moi qui me suis occupée du ménage et de refaire les stocks. Heureusement que j'ai de la main d'œuvre…"
Elle fit un signe de tête à un jeune homme qui sortait de la boutique, les bras chargés de paquets. Il était de type européen, avait des cheveux mi-longs d'un roux sombre et brillant, et un demi bouc. Il devait avoir une vingtaine d'années. La peau de son visage était d'un rouge vif et il pelait du nez, malgré le chapeau à larges bords, du style ancien colon, qu'il portait sur la tête. Il avait l'air morose, même sous ses lunettes de soleil.
"Thomas, comment allez-vous ? Vous n'avez toujours pas trouver de solution pour ces coups de soleil ?"
"Hélas, professeur Nassim…" fit-il avec un accent à couper au couteau. "Une minute de trop au soleil sans crème et voilà le résultat… Je crois être condamné à me faire griller à chaque fois que je mets le nez dehors… Au fait, mes félicitations. Vous avez fait les gros titres."
L'oncle Hichem eut un geste agacé.
"Rien que du battage médiatique. Nous étions cent-douze sur le coup. En Angola ou en Italie, ce sont M'Barak ou Allegra qui ont du se faire encenser…"
"Ne dis pas n'importe quoi, tout le monde sait qui était le meneur de l'expédition." coupa la femme.
"Je m'en passerai bien !" répliqua Hichem, irrité.
La femme et le jeune homme eurent un air déconcerté.
"Oh, non, tu te fais du mouron à cause de ce que Lothar et sa clique ont fait comme vagues ? Ils ressortent ces vieilles histoires et ces calomnies pour te discréditer, c'est tout !", s'emporta le professeur. "Personne ne s'en soucie, surtout pas nous à l'école… Enfin, la plupart d'entre nous…" fit-elle, gênée.
"Je crois que tu ne réalises pas vraiment…" soupira Hichem. Il s'arrêta et haussa les épaules. "Bien, nous allons vous laisser. Nous devons acheter une baguette."
Le cœur de Malika battit plus fort à ces mots. Une baguette magique… Ils s'éloignèrent, alors que le jeune homme à la tête d'écrevisse jetait un œil intéressé à Malika.
Ils arrivèrent devant une boutique sans vitrine. La devanture portait une grande inscription peinte : "Belbourdon, baguettes et bâtons magiques"
La porte grinça quand ils entrèrent, et une clochette tinta. La boutique était encombrée de boites oblongues pour baguettes. Une banquette de vieux cuir semblait être là pour les clients, mais elle était recouverte de boîtes, elle aussi. Derrière un comptoir, une femme à l'allure mystérieuse leva les yeux d'un cahier de compte. Son visage ridé se tordit en un sourire. Ses yeux noirs, mi-clos, semblèrent briller.
"Mais qui vois-je…", murmura t-elle. "Maître Nassim, auriez-vous des réclamations à nous faire ? Chéri… Viens donc voir qui est là…", appela-t-elle en direction d'un couloir derrière elle.
Dans un bruit de fouillis, un vieil homme apparut. Il avait sur la tête un étonnant assortiment : une sorte de casque avec moult verres grossissants. Il tenait à la main une pièce de toile dans laquelle reposait une plume sombre. Il remua du menton en voyant Hichem.
"Tiens donc… Le héros national… Quelle bonne surprise… Désolé, je suis sur un gros travail… Ma fille et moi avons ramené il y a quinze jours des ventricules de cœur de dragon… et aussi des plumes de griffon… Toute une histoire pour ne pas se faire dépecer en les obtenant… De très beaux spécimens… Ce n'est plus de mon âge, mais elle est vraiment habile dans ce genre de choses… Quel bon vent vous amène ?", dit-il d'une voix rauque et affaiblie en s'approchant.
"Ma nièce, Malika."
"Vous avez une nièce…" murmura le vieil homme de sa voix à peine audible, cassante et si peu agréable à entendre. "Etonnant… Je me demande…"
"Ca, c'est ma partie, mon cher.", intervint la vieille femme. "Viens ici, mon chou… Voyons donc…"
Elle quitta son comptoir et prit le menton de Malika dans ses mains. Elle plongea son regard dans celui de Malika et celle-ci ne put réprimer un frisson, mais ne baissa pas les yeux. Elle avait l'impression que cette femme cherchait à lire en elle…
Au bout de quelques secondes, la vieille sourit et commença à mesurer Malika à l'aide d'un mètre ruban. Elle s'attacha surtout à la longueur de ses doigts, leurs écartements et la circonférence de ses poignets. Mais le mètre prit aussi sa taille, celle de son bassin, l'écartement de ses yeux… Tout seul, tandis que sa propriétaire tournait autour de Malika d'un air songeur. Son mari regardait la scène d'un air très intéressé. L'oncle Hichem avait réussit à asseoir une fesse sur la banquette surchargée.
"Bien, bien… essayons… Plume de phénix et acacia, 18,5 centimètres."
La vieille dame tendit à Malika une baguette torsadée comme une corne de licorne, sortie d'une boite poussiéreuse. Malika la prit respectueusement, et la fit tourner dans sa main, la contemplant d'un air ravi. Mais presque aussitôt, elle sentit sa médaille la gêner, la gratter sous son tee-shirt. Elle fit un geste pour la mettre par-dessus celui-ci, mais son oncle, qui la regardait avec une grande attention, intervint, arrêtant son geste :
"Malika !" la prévint-il. "Je crois que cette baguette ne convient pas."
La vieille dame avait déjà ouvert une autre boite et le regarda d'un air mécontent.
"Maître Nassim, je connais mon métier, merci…" fit-elle d'un ton renfrogné. Elle retira prestement la baguette à Malika pour lui en fourrer une autre dans les mains, lisse et droite, tandis que le regard de son mari allait de l'un à l'autre avec une expression curieuse.
"Crin de licorne et baobab, très rigide, puissante, 29,75 centimètres… Allons, faites là bouger…"
Malika continua à agiter le poignet sur une impressionnante quantité de baguettes. L'une d'elle lui plut particulièrement, une drôle de baguette en bois de poirier étrangement biscornue (1), en zigzag, contenant une plume de griffon, mais "elle ne convenait pas", comme disait la vieille femme. Par contre, une autre, mince et longue en bois rouge, lui glissa des mains, et elle craignit de l'avoir abîmée en voyant Madame Belbourdon se précipiter pour la ramasser. Il y en eut beaucoup d'autre. A force, elle avait mal à la main. Sa médaille la démangeait vraiment, mais elle s'était habituée à ce frottement. Et puis soudain, elle sentit que le morceau de métal devenait doux et agréable comme du coton. Au même moment, la baguette qu'elle tenait en main lança des paillettes de lumières arc-en-ciel. Le vieil homme et sa femme eurent un regard de connivence satisfait.
"Bien, bien… Ce sera donc cette baguette…" murmura la femme en se caressant le menton. Son mari eut un regard vers Hichem et ajouta de sa voix ténue :
"Une famille surprenante, décidément…"
Madame Belbourdon retourna à son comptoir et déclara simplement ;
"Ca fera huit Gallions d'or."
L'oncle de Malika paya, salua, puis sortit de la boutique, et Malika le suivit, en se rendant compte trop tard qu'elle n'avait pas écouté les caractéristiques de sa baguette. Elle avait simplement remarqué que c'était une baguette qui comportait des sortes de fines gravures, arabesques compliquées incrustées dans le bois.
Mais trop de questions tournaient dans sa tête, et elle ne savait laquelle poser. Qu'avait donc fait son oncle quelques jours avant et qui semblait impressionner tant de monde, au point de l'appeler "héros national" ? Qu'avait voulut dire le vieux fabricant de baguette par "famille surprenante" ? Pourquoi sa médaille l'avait-elle démangée ? Et pourquoi le vieux couple l'avait-il regardé d'un air si bizarre ?
"Et si nous allions manger un morceau avant de finir tes courses ?" proposa son oncle.
Encore perturbée, elle ne put que hocher la tête. Cet homme l'intimidait énormément, bien qu'elle ne soit pas du genre timide. Elle pensait qu'ils iraient au grand restaurant sur la place, "Le Bien-Repus", mais son oncle entra dans le petit bar qu'ils avaient croisé précédemment : "Le Dragon rouge". L'enseigne représentait un dragon rouge (qui ressemblait plutôt à un lézard sortant d'hibernation, malingre et décoloré) crachant des flammes (des vraies).
La douce musique qui émanait de l'endroit provenait d'instruments enchantés qui jouaient sur une petite scène : des tambourins, une grosse flûte indienne, une sorte de harpe et une série de clochettes. Une dizaines de tables collées les unes aux autres remplissait le petit espace. Un jeune couple bavardait tranquillement, les yeux dans les yeux, deux femmes en uniformes bordeaux et vert avalaient rapidement leurs assiettes, un vieux couple dégustait des gâteaux, et un homme à l'air austère fumait une longue pipe dans un coin sombre. Au bar, il y avait trois personnes en plus du tenancier.
Une femme, la tête recouverte d'un fichu brodé, vint les installer à une table et leur proposa le menu. Malika ne connaissait pas tous les plats proposés, et, prudemment, choisis une brick simple (elle fut très soupçonneuse quand aux bricks "spéciale gobelin" avec sang et tripes, et la "gigotante" et au menu "spécial flambée du dragon") avec du riz et de la salade, suivit d'une sorte de fromage blanc avec des morceaux de fruits. Son oncle commanda un plat de mouton et de légumes, qui bizarrement avaient été recouverts d'épices… bleues. Malika s'abstint de poser des questions, et mangea tranquillement son menu, regardant avec ébahissement les instruments qui jouaient tout seuls.
"C'est bon ?" demanda son oncle.
Elle hocha la tête. Elle allait se décider à lui poser des questions sur sa baguette quand une voix retentit :
"Professeur Nassim ? C'est vous ?"
La jeune fille et son compagnon avaient terminé leur repas et s'étaient levés pour partir. Tous deux vêtus en sorciers, il devaient avoir dix-sept ou dix-huit ans. Elle avait des cheveux avec des mèches teintes en rouges, coupés au carré, un grand sourire et de larges boucles d'oreilles en forme de disque. Son petit ami était grand, un peu fort, et portait un anneau doré à l'oreille gauche.
"Oh ! Mademoiselle Arbib… Bonjour Monsieur Belkhacem!" répondit l'oncle Hichem en se levant.
Les deux jeunes gens avaient l'air ravis et un peu intimidés de le rencontrer ainsi.
"On voulait vous féliciter, vous savez… Cette expédition…" commença le jeune homme.
"Professeur Nassim !" s'exclama une des deux femmes en uniforme, au visage allongé et aux grandes dents, qui avait entendu les jeunes gens. "Ca alors, c'est un honneur de vous rencontrer… Mes félicitations… Et vous savez, je ne crois absolument pas ce que certains racontent, vous savez, ces a-ffreuuuuuuses insinuations dans le dernier "Echo Magique", c'est vraiment bas… Non, bien sûr comment peut-on vous accuser de telles choses ? C'est indigne, n'est-ce pas ?"
Sa collègue semblait plus réservée, mais tellement impressionnée qu'elle faillit faire tomber ses lunettes biscornues. Les clients du bar aussi murmuraient et regardaient à présent avec intérêt l'oncle de Malika, qui paraissait fort gêné.
"Merci... Mais excusez-moi, nous devons terminer notre repas et retourner faire des courses…Merci….Au revoir, jeunes gens, à bientôt."
Le jeune couple s'éclipsa de bonne grâce, intrigué toutefois par la présence de Malika, mais la dame en uniforme dut se faire rabrouer par son amie pour cesser de regarder le fascinant spectacle d'Hichem Nassim terminant son repas.
"Tu es célèbre, oncle Nassim ?" demanda Malika, une fois sortis du petit établissement, leurs emplettes à la main.
Elle avait entendu les clients se demander si elle était la fille du professeur Nassim.
"On peut dire ça." répondit-il d'un ton un peu exaspéré. "J'ai souvent aidé le Ministère dans des opérations difficiles, et cela se sait… Je suis aussi un combattant de haut niveau, et en tant que professeur de Défense Magique, je suis plutôt connu."
"Mais, de quoi ils parlent tous ? Tu as fait quelque chose de spécial il y a quelques jours ?"
"Oui, on peut dire ça. Mais je n'étais pas tout seul, c'était une opération internationale, quasiment. Bon, c'est vrai, j'étais chargé de la diriger, mais… Enfin, ce n'est pas important."
Pour Malika, c'était le contraire : son oncle était vraisemblablement quelqu'un d'important chez les sorciers. Elle comprenait maintenant la tête de ce garçon, Thanekhros… Et d'un autre côté, c'était quoi ces sordides accusations dont il était fait mention ? Son oncle devait être vraiment important, et donc ne pouvait échapper aux ragots…
Ils étaient de retour sur la grande place de la fontaine, et cette fois, ils allèrent directement à la librairie.
Il y avait des livres jusqu'au plafond, et une petite queue derrière la caisse. Malika sortit sa liste de fourniture, et ils mirent plus d'une heure à réunir tous les ouvrages demandés et à payer leurs courses.
Enfin, ils sortirent de la librairie bondée. Son oncle avait de nouveau été reconnu dans la boutique et avait du discuter, très aimablement avec plusieurs personnes. Malika se tourna vers son oncle. Ils avaient finit les courses, mais elle aurait bien aimé faire du lèche-vitrines, surtout au magasins d'animaux et dans les boutiques de bijoux, et découvrir les deux autres rues qu'elle n'avait pas visité. Mais quand elle lui demanda l'autorisation, son oncle secoua la tête.
"Tu as vu tout ce que nous trimballons ? Ce sera pour une autre fois, ne t'en fais pas. Cela va déjà être assez difficile de rentrer chez toi avec tout ça. Au fait, je te ferai parvenir ma vieille malle, ce sera mieux que des valises pour le voyage."
Ils prirent donc le chemin du retour, dans la rue tordue des caravanes, et se retrouvèrent devant la porte qui menait à la "Médina Moldue". L'oncle Hichem tapota trois fois la serrure, puis ouvrit la porte. Une fois qu'il l'eut refermée, elle sembla de nouveau n'être qu'un décor du mur, tandis que personne dans la foule autour d'eux ne semblait trouver leur arrivée bizarre.
Par contre, en attendant le bus et durant le trajet du retour, qui dura une bonne heure, de nouveau, certains passants regardaient avec un drôle d'air le chaudron rempli de livres que portait Malika.
Enfin il fallut monter la rue qui menait au restaurant des Nassim. La rue de la Petite Montée portait mal son nom : c'était une sacrée côte à monter, surtout quand on habitait vers le sommet de la colline, comme les Nassim. Il était près de cinq heures de l'après-midi quand ils s'arrêtèrent devant la porte de la maison, où Titus les accueillit en remuant la queue.
Il fut bien le seul.
Les Nassim regardèrent avec consternation les bras chargés de leurs fille. Sa mère apporta très vite un carton où elle fourra le tout, avant de le ranger en haut d'une armoire. Elle lui fit clairement comprendre qu'elle n'avait pas à y toucher avant son départ.
Son oncle discuta un peu avec son père, mais elle n'entendit que quelques éclats de voix. Son oncle quitta la maison sans même lui dire personnellement au revoir ; ce fut son père qui l'en informa. Et Malika se retrouva désemparée. Pour un peu, la journée qu'elle venait de vivre aurait put ne pas exister.
-Fin du quatrième chapitre-
Prochain chapitre : Les Flèches Rouges
Après d'horribles vacances chez les grands-parents, le père de Malika l'emmène en voiture jusqu'au lieu de départ du trajet vers l'école en suivant d'étranges flèches rouges. C'est à dromadaire et en tapis magique qu'aura lieu le voyage d'une journée entière. Et c'est sur une étrange route de sable rouge, que se fera le voyage de centaines d'écoliers vers l'école du désert.
(1) : j'ai pensé à la baguette magique du film "Willow"
Pour ceux qui ne savent pas ce que c'est qu'une brick : c'est une sorte de crêpe dure et salée dans laquelle on fait cuire de l'œuf assaisonnée de divers éléments : fromages, tomates, etc… Toutes les variations sont possibles. La pâte est croustillante, et c'est très bon.
Explication des noms :
M'Barak : Barak est le nom d'un des héros de la série de romans "La Belgariade", un colosse barbu qui frappe jusqu'à ce que l'obstacle soit vaincu. J'imagine bien M'Barak en sorte de soldat africain extrêmement courageux, un peu kamikaze…
Allegra : sonne italien, veut dire rapide, enlevé. J'imagine une femme vive, gracieuse et efficace portant ce nom.
Thomas : prononcer « Tomasse » en accentuant le o. Je ne sais pas si cette prononciation existe, mais Thomas est suédois, alors, il faut penser à son accent. Le prénom est celui d'un de mes petits cousins, mais aussi d'un copain. Il va devenir un personnage régulier de l'histoire.
Thanekhros: de Thanathos et Necros, deux mots qui se rapportent à la mort en grec et en latin (la Nécromancie est la branche de la magie qui permet de contrôler les cadavres, de créer des zombies, des liches et autres choses peu ragoûtante). "Thanos" était déjà pris par Arleston dans la BD "Lanfeust de Troy" et je ne veut pas de raccords, alors j'ai un peu traficoter...
Faiza Chamaniak : Je suis contente de ce nom-là !! J'ai collé les mots "chaman" et "maniaque" ensemble, ce qui reflète son caractère et son domaine de compétence. Le prénom signifie "Celle qui Réussit".
Nashida Arbib : Nashida veut dire "étudiante". Vous saurez le prénom de son petit ami plus tard.
Sonia Doigt-de-fée : pour une couturière, c'est un chouette nom, non ?^^
Belbourdon : j'avais même pas tilté l'analogie avec "Beaubâton"! Un bourdon est un gros bâton de mage dans le jargon du milieu (comme celui de Gandalf le Magicien), et bel, qui veut dire beau, donne une connotation noble.
Note : je tiens à hurler mon coup de cœur : Robin4, la merveilleuse auteur (hélas anglophone) qui déchaîne les "foules" en ce moment. Et ô joie, ses fics sont traduites en français :
"Promesses tenues" : un Univers Alternatif où Sirius était le Gardien de Secret des Potter, et s'est sacrifié. Voldemort est donc toujours là, et la résistance est difficile dans ce monde très sombre.. Mais Harry entame tout de même sa première année, un Harry très différent puisqu'il a toujours ses parents.
40 chapitres, et une suite lancée depuis peu, tout aussi palpitante !!! Un hommage à l'amitié des Maraudeurs.
"Je préfère la mort au deshonneur" : la 5e année d'Harry. Première fic de l'auteur sur Harry Potter, on sent déjà tout son talent ! Traduit par Izabel.
"Grim Dawn" : Je m'en occupe de celle-là ! Le 3e volume revisité : et si, en fuyant les Dursley, Harry avait été attaqué par des Mangemorts et aurait été secouru par Sirius ? Les choses auraient alors prit un autre cours…
Et en prime, un one-shot sur les Fondateurs… Superbe ! Que je vais bientôt traduire ! Qu'attendez-vous pour lire ses fics ?
Sinon, j'ai toujours besoin de noms pour peupler le Caravansérail !!! Aidez-moi !!! Que vous connaissiez l'arabe ou pas !
