Résumé du chapitre précédent : Malika fait la connaissance, lors du voyage vers l'école, de Laïla et son frère Tabet et de Rokhaya, une étudiante. A l'école, elles sont aidées par Meriem, dans la même madrasa qu'elles, qui devient leur amie. Mais tout le monde a une attitude étrange avec Malika parce qu'elle est la nièce d'un professeur, et les trois gamines se brouillent avec des filles d'une autre madrasa : Najîba, Zâfira et Ghizlène.
Disclaimer : L'univers magique tel qu'il est conçu ici appartient à J.K. Rowling. Certaines créatures et créations, et quelques personnages sont à elle. Tout le reste est à moi, et je n'en tire aucun autre profit que vos commentaires et mon plaisir.
Note : reveanne, encore… Elle a fait un adorable dessin de Malika et Laïla confrontées à Najibâ, Zâfira et Ghizlène !! J'adore comment elle a rendu les uniformes, même si je voyais les robes un peu plus longues… Les couleurs, les poses, c'est trop mimi !!! Merciiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !
Courez voir son site, ses dessins sur Hamtaro le hamster à Poudlard sont trop mimis et hilarants !!
Sinon, il va encore y avoir du retard pour le prochain chapitre… J'ai du mal avec Batoul Usulizz, et j'ai pas encore parlé des cousins de Meriem… Ha, ceux-là… Ma version des jumeaux Weasleys, en plus inconscients, en fait… Meriem et surtout Rachida ne valent pas mieux d'ailleurs… Et puis, me direz-vous, et le mystère ? Il vient quand ?
Il vient, il vient…
Note bis : je crois que je vais appliquer les codes arabes au Caravansérail : il n'y a pas de vouvoiement en arabe, donc prof et élèves se tutoieront… Qu'en pensez-vous ?
Conseils musique :
Pour les cours et leur descriptif : Shakespeare in love
El Nazed : Je lui aie trouvé un thème personnalisé !!! Vous voyez la série télé japonaise Escaflowne ? et bien, c'est le morceau de musique un peu arabisant et rythmé qu'on entend quand Dryden le marchand part dans ses délires, ou quand Van affronte llen dans les Guymelef pour la première fois, avec les soldts qui font des paris. C'est entrainant, et ça correspond au ton pompeux d'El Nazed.
Visite du Caravansérail : j'imagine une version plus douce du thème principal de Stargate.
Les bains : une musique dynamique du Monde de Nemo, au début, avec les scènes de la vie sous-marine, je pense que ça conviendrait. Je suis ouverte à toute suggestion.
Sur le conseil de reveanne, la présentation des personnages est ici annulée.
***
Chapitre neuf : Les Maîtres du Caravansérail
Le lendemain, quand Malika s'éveilla, elle fut un peu désorientée. Dans la pénombre, elle vit des raies de lumière chaude. Elle se redressa un peu : elle n'était pas dans son lit. Elle était ailleurs que chez elle. Et puis, en deux secondes, tous lui revint : le voyage, le Caravansérail, son lit, le bureau et la chaise tout près. Mais quelle heure était-il donc ?
Elle s'assit dans son lit, encore à moitié assoupie. Que faire, alors ? Elle décida de regarder par la fenêtre pour se donner une idée. Elle se leva et tira le grand rideau de son lit.
Une lumière tamisée traversait les rideaux des fenêtres. Malika bailla. Son regard alla se poser au-dessus de la cheminée, où le feu était mort.
Il était huit heures moins le quart.
Elle avait tout son temps avant neuf heures et quart !! Bien décidée à se remettre au lit et à en profiter (elle sentait encore les kilomètres parcourus dans le sable dans tous ses muscles !), elle se retourna vers son lit quand quelque chose de velu lui frôla la jambe. Elle eut un sursaut et contint un cri d'effroi, mais elle eut un soupir amusé en voyant ce dont il s'agissait.
Apparemment, Luron avait eut envie de faire une petite promenade ! Il se dressa sur ses pattes et lui lança un petit couinement interrogateur.
Malika l'attrapa prestement et il se mit à ronronner.
"Tu t'es perdu, Luron ?" chuchota t-elle. "Le lit de Meriem n'est qu'à deux pas. Mais on va attendre qu'elle se réveille, d'accord ? Tu vas rester avec moi, en attendant. Mais pas de bruit, hein ? Je n'ai pas de dames, par contre."
Elle s'assit sur son lit avec le rat, qui semblait très content d'être avec quelqu'un qu'il connaissait. Malika joua un moment avec l'animal, s'amusant à le laisser rouler sur ses bras, le rattrapant, le faisant glisser sur les draps. De toute évidence, il aimait bien ça, car il revenait toujours vers elle pour glisser de nouveau, et ronronnait de contentement.
Au bout d'un moment, Malika laissa le rat rouler sur le lit, et elle prit son livre "Astronomie et Astrologie, l'étude des étoiles" pour se distraire. Luron vint pour regarder attentivement les pages, et elle se demanda un instant s'il savait lire ou ne faisait que regarder les images, ou encore essayait de faire son intéressant. Elle n'avait pas encore lu la partie sur les phénomènes stellaires particuliers, et ce ne fut qu'à la fin du chapitre sur les comètes qu'elle se décida à sortir de son coin, quand elle commença à entendre des voix dans le dortoir..
Plusieurs filles s'étaient levées, et certaines bavardaient très doucement dans la salle de bain ou devant le feu. Malika s'habilla et rendit son rat à Meriem, qui était assise sur son lit, bavardant avec deux filles assises sur le tapis près du feu. Elles s'appelaient Nilopher Kun Gout et Sarah Heinmann. La première était une fille ronde, la coupe au carré, avec un air un peu asiatique, et elle portait des lunettes rondes. La seconde avait des cheveux assez clairs et un nez busqué.
Malika suivit leur conversation sur leurs familles. En fait, Meriem parlait surtout de la sienne. Outre sa sœur et son frère aîné, elle avait à l'école trois cousins, sans compter ceux qui avaient quitté l'école et ceux qui n'y étaient pas encore.
Laïla finit par les rejoindre, la tête endormie, baillant largement.
"S'lut… Ca va ? Il est quelle heure ?"
"Bientôt l'heure. On s'est déjà habillé… Tu devrais te dépêcher." répondit Malika.
Quelques-unes des premières années s'étaient déjà rendues dans l'Antichambre des filles, et à neuf heure et quart, elles étaient toutes prêtes. Des filles plus âgées les saluaient dans l'antichambre quand elles passaient.
"Salut Meriem !" fit une fille de cinquième année entourée d'une demi-douzaine de camarades.
"Rachida ! Les filles, voilà ma sœur, Rachida !"
Rachida Arbib ressemblait beaucoup à sa sœur cadette ; elles avaient les mêmes joues rondes et le même nez grec ; toutes deux avaient les cheveux soigneusement tirés en arrière. Mais Rachida portait des lunettes, et Meriem n'était pas aussi mince que sa sœur.
"On vous laisse." dirent les filles de cinquième année quand Rokaya et Rawiya se présentèrent. "A plus tard!"
Descendues dans le Foyer, les filles rejoignirent les garçons de Charmarîn. Tout n'allait pas pour le mieux : Ismen Canasta et Thomas Mayefer faisaient une leçon de morale à des garçons de deuxième année qui avaient eut la mauvaise idée d'ensorceler les toilettes des première année et les avaient inondées. Ils n'étaient pas parvenus à stopper les robinets, et les plus jeunes avait découvert un début d'inondation dans leur dortoir au réveil.
Tandis qu'Ismen poussait de grands cris, Thomas se contenta de déclarer d'un ton nonchalant :
"Belle preuve de talent pour une rentrée, n'est-ce pas ?"
Les rires des première année et des autres élèves présents dans le Foyer laissèrent les quatre garçons bien dépités.
Vers neuf heures et demi passées, les étudiants descendirent donc avec leurs protégés et prirent soin de leur donner des repères pour se rendre au réfectoire.
"Attention, ne prenez pas ce boyaux." disait Rawiya. "Il n'a jamais la même longueur, et peut se révéler être un raccourci, ou une galerie d'un kilomètre."
"Par-là, c'est la bibliothèque." indiquait Thomas de sa voix tranquille en désignant un escalier. "Vous pouvez en retrouver le chemin en suivant les petites chouettes gravées, leur bec indique la direction. La chouette était le symbole de la sagesse dans la Grèce Antique."
Sur les tapisseries, les fresques, les tableaux ou les bas-reliefs, les personnages les saluaient.
Les élèves de première année se retrouvèrent dans le réfectoire, à moitié plein. Les tables étaient recouvertes de pains chauds et croustillants, de fruits, de lait et de thé chaud, et de tout ce que l'on attend d'un petit déjeuner. Ils bavardèrent joyeusement, se demandant ce qui les attendait pour le reste de la journée, et ce qu'on allait bien leur dire de nouveau dans l'amphithéâtre.
Enfin, à dix heure et quart, les étudiants les pressèrent de terminer, et les conduisirent de nouveau au grand amphithéâtre. En chemin, ils croisèrent le fantôme d'un vieil homme à bésicles qui les salua d'une voix enrouée. Mais le souvenir de la Dame Aux Epées, la veille, leur ôta tout sentiment de stupéfaction.
Par réflexe, les premières années reprirent la disposition de la veille, par madrasa, même si leurs aînés étaient absents. Les étudiants s'assirent comme la veille au premier rang.
La vice-directrice apparut sur scène, suivie de quelques étudiants dont Ismen Canasta, les bras chargés de documents.
Les première année firent silence à leur arrivée.
"Bien." commença sans préambule le professeur Usulizz, et elle fit apparaître d'un coup de baguette magique une table où poser les papiers et une chaise pour elle même. "Nous allons commencer par distribuer les emplois du temps et le règlement."
Aussitôt, un étudiant de chaque madrasa prit une pile de document et alla les distribuer aux élèves concernés.
"Comme l'école dispose d'une salle faisant office de planétarium, il n'y a qu'une soirée par mois, pour chaque classe, consacrée à l'étude du ciel pratique. Les dates, sauf modification exceptionnelle, sont toutes déterminées à l'avance. Ces séances se déroulent sur la Terrasse Céleste, n'oubliez pas d'apprendre le chemin avant votre séance."
Malika eut vite en main son emploi du temps et son exemplaire du règlement. Elle examina rapidement ses horaires. Hum, elle commençait assez tôt tous les matins… Mais elle avait de longues plages libres soit le midi, soit le soir…
"C'est quoi les Cavernes Arboricoles ?" souffla Laïla.
"Oh, non, on a Défense Magique avec les Manticoran… Enchantement avec les Ambrilys, bon… Potions avec les Sandrelûn… Faune et Flore Magique avec les Mirajaâd… On est tout seuls en Rituels et Incantations ?" marmonnait Meriem.
"ET VOUS ETES PRIEZ D'ECOUTER CE QUE JE DIS !"
Au rugissement de l'enseignante, tous les élèves levèrent le nez de leur emploi du temps.
"Comme vous le remarquerez, vous êtes associés à une autre madrasa pour quatre matières principales, et seuls pour une cinquième. Les matières annexes, tels les cours de Vol et l'Etude des Astres sont enseignées uniquement par madrasa, où avec l'ensemble des élèves de l'année en ce qui concerne l'Histoire et Théorie de la Magie, dans cet amphithéâtre. Les fournitures et les livres nécessaires à chaque cours sont indiqués, vous n'avez donc aucune excuse pour les oublier."
Le professeur Usulizz fit une pose.
"Certaines matières ne vous seront accessibles qu'à partir de la troisième ou de la cinquième année. D'autres sont des options à choisir en troisième année. Pour cela, vous pourrez demander conseils aux étudiants et aux élèves plus âgés pour les choisir. Mais vous n'avez pas à vous en préoccuper pour le moment.
"Chaque cours comporte deux notes, une acquise d'après vos résultats de l'année, l'autre sur un examen final. A la fin de votre quatrième année, puis de votre septième année, vous passerez deux grands examens, qui seront tous deux déterminant pour votre futur. "
"En ce qui concerne le règlement intérieur, à présent : vous devez savoir qu'il est interdit de se déplacer dans l'enceinte du Caravansérail après 22 heures, hormis pour les élèves ayant cours pratique d'Etude des Astres, qui ne doivent bien sûr que retourner à leur dortoirs. Vous n'avez en outre pas l'autorisation de pénétrer dans le Foyer d'une autre madrasa que la votre, les gardiens y veillent."
Malika supposa que chaque Foyer avait son gardien, comme Vermillon était celui de Charmarîn. Mais elle se demanda si il était très fiable, car le renard rouge n'avait pas l'air très redoutable…
"Dans chaque Foyer, une liste des objets interdits et des règles de l'école est fixé, comme vous en avez reçu un exemplaire. L'utilisation de la baguette magique est interdite dans les couloirs, ainsi que celle de tapis et balais en dehors des heures de cours, des activités ou des temps libres encadrés par les étudiants."
Il y eut un léger marmonnement de mauvaise humeur, mais l'enseignante ne sembla pas s'en formaliser.
"Il existe un tableau d'honneur dans cette école. Chaque fois que vos efforts le mériteront, vous recevrez une étoile, qui sera porté à l'actif de votre madrasa. Par contre, vous recevrez aussi des blâmes pour tout manquement à la discipline. Ces résultats sont rendus publics chaque samedi, ainsi que les noms des élèves ayant reçu un blâme."
Il y eut une vague de malaise. Les paroles de la vice-directrice étaient très claires cela signifiait exposer les torts de la personne à toute l'école. C'était une grande humiliation, pour l'élève et pour sa madrasa.
Le reste de la matinée passa très vite. Le professeur Usulizz résuma le règlement intérieur, puis les étudiants leur firent une visite guidée de l'école.
Visite qui se poursuivit l'après-midi ; de plus, chaque club ou activité avait monté un stand d'accueil dans les salles d'un grand couloir. Hormis le Quidditch, les clubs étaient obligatoirement ouverts à tous les élèves. Les anciens élèves et les étudiants étaient là pour présenter leurs activités et attirer les nouveaux. Certains, comme les trois garçons du club de photo, étaient carrément inquiétants dans leur enthousiasme.
"Aller, inscris-toi, tu verras, c'est génial, on fait des trucs super… On participe au journal de l'école, mais on fait aussi des trucs plus expérimentaux… Avec les potions, on obtient des spectrographies étonnantes…" répétait un cinquième année de Mirajaâd aux yeux globuleux, tirant les premières années par la manche, ce qui ne leur donnait qu'une envie : s'enfuir.
Certains professeurs se joignaient parfois aux stands pour discuter avec les élèves ; les filles se pressaient en masse aux différents cours de danse, les garçons d'origine Moldue se rejoignaient aux clubs de foot. Malika prit soin d'ignorer Najîba Hôdesan et sa bande. Etonnamment, les équipes de Quidditch des cinq madrasas, réunies dans une même salle en compagnie de quatre étudiants, restaient lugubres et silencieuses. C'était pourtant là que la plupart des élèves se pressaient.
Tandis qu'elle écoutait une étudiante filiforme expliquer les règles du Quidditch, Malika entendit Thomas Mayefer interroger un grand et solide étudiant aux cheveux châtains en bataille :
"T'as fait comment, Wolfgang ?"
"Sortilège de Silence et confiscation des baguettes." répondit l'autre en relevant fièrement ses lunettes métalliques sur son nez.
Thomas rigola doucement.
Malika sortait de la pièce, les bras chargés de prospectus divers qu'elle avait accumulé à chaque stand, quand elle sentit un frisson lui parcourir le dos, et elle se retourna brusquement.
A l'embranchement d'un couloir, derrière de nombreux et bruyants élèves, un grand homme la fixait intensément. C'était un des professeurs, l'africain à la robe sombre. Il avait un air sinistre, mais dès qu'elle se retourna, il la quitta des yeux et disparut dans le couloir.
Malika eut une sensation désagréable, mais essaya de se convaincre que ce n'était que de la curiosité de la part de cet enseignant.
Elle finit par rejoindre Meriem et Laïla qu'elle avait un moment perdu de vue. Au bout d'un moment, elles rejoignirent un groupe de garçons de leur madrasa qui entourait Hakim Tilibari. Celui-ci les ramena au Foyer de Charmarîn, et ils furent vite rejoints par les autres premières années, ramenés par petits groupes par les autres étudiants.
"Bon." Déclara Rawiyâ dans le vacarme du Foyer. "Et si on vous montrait les thermes ?"
Les élèves levèrent le nez de toutes les feuilles qu'ils avaient posé sur les tables et les tapis, indiquant avec excitation aux autres où ils voulaient s'inscrire.
"Ca vous dit un vrai bain ? Aller, la visite guidée n'est pas finie !"
Dans un fatras de feuilles et de conversations, les premières années se rendirent dans leur dortoir chercher leur affaires.
Les filles de première année de Charmarîn suivirent les étudiantes avec leurs nécessaires de toilette. Elles descendirent plusieurs escaliers pour se retrouver au niveau du sol, et avancèrent dans les couloirs de la partie la plus importante du Caravansérail. Les murs étaient lisses et les portes formaient des arches élégantes. Elles atteignirent un couloir sombre où se détachaient deux lourdes portes, indiquant l'entrée des bains. Les étudiantes désignèrent celle des filles et entrèrent.
A l'intérieur, une vaste antichambre était couverte de mosaïques bleues, vertes et blanches. Le règlement était écrit en mosaïque noires sur le mur, en dessous d'une horloge, elle aussi de mosaïque, qui fonctionnait vraiment : les carreaux changeaient de couleur pour faire avancer les aiguilles ! Quelques bancs étaient disposés là, pour permettre d'attendre ses amies retardataires.
Les filles suivirent les étudiantes et gagnèrent une pièce chaude et ornée de la même façon que l'antichambre, où plusieurs filles de quatrième année se dévêtaient. D'innombrables petits casiers couvraient les murs : ils servaient à ranger chaussures et robes.
Avec animation, les filles se mirent en sous-vêtements, leurs affaires à la main, et passèrent dans les salles de douches, puis dans les bains proprement dits.
Tout était décoré de mosaïques représentant des scènes marines, des poissons, des algues, des dauphins, des tortues, et même des sirènes, qui bien évidemment bougeaient quand il leur en prenait l'envie. Des globes lumineux éclairaient les pièces, envahies d'une légère vapeur d'eau. Il y avait plusieurs bassins, pas assez grands pour être qualifiés de piscines, mais assez pour barboter à son aise. Dans le grand bassin central en forme de fleur, une fontaine de dauphins de bronze lançait des cascades d'eau sur plusieurs baigneuses, des filles de quatrième et septième année. On ne pouvait savoir de quelle madrasa elles appartenaient : au hammam, on laissait tout signe distinctif à l'extérieur.
"Les arches fermées par des rideaux de cordelettes mènent aux saunas, à la chambre froide, à des douches à savons, ainsi qu'aux toilettes. Vous avez toute la place pour installer vos serviettes et vos affaires sur les bancs sur les côtés." expliqua Râwiya. "Ici, c'est un lieu de détente, il est interdit d'y amener ses querelles. C'est une règle très importante : on n'a pas le droit aux disputes, ici."
Malika et les autres passèrent une bonne heure à se prélasser elles furent vite rejointes par les filles de première année de Mirajaâd et de Sandrelûn ce n'est qu'au moment où elles pliaient bagages qu'elles virent arriver les filles de Manticoran, Najîba et sa bande en tête, droite et arrogante.
Heureusement, la présence des étudiantes empêcha toute autre démonstration d'hostilité que des regards noirs entre les deux trios de filles, et Najîba dut suivre les étudiantes chargées de son groupe avec un sourire hypocrite sur le visage.
Les filles de première année de Charmarîn quittèrent toutes ensembles le hammam. Elles étaient onze au total. En s'aidant les unes les autres, elles retrouvèrent le chemin de leurs locaux.
Sur une fresque, elles entendirent de drôles de bruits. Ca ressemblait à des paroles suivies de longs gémissements.
En s'approchant un peu plus près, elles découvrirent une représentation d'une oasis, avec ses petits palmiers, ses herbes hautes, son étendue d'eau, quelques rochers. Mais les animaux censés s'y abreuver et se nourrir des fruits qui poussaient là étaient tous regroupés sur les bords de la fresque, l'air craintif, voire en colère.
Assis à une petite table, les pieds barbotant dans l'eau, au milieu de la tapisserie, El Nazed le Fourbe était occupé à écrire. Il levait la tête et déclamait des mots incompréhensibles car étirés de façon excentrique :
"Ooooooooooooh GGGraaaaaAAAAaaaannnd MaîîîîîîîîîîîîîîTTTRReuuuuuuuuuuuh IncoooOOMensuuurAA-Haaaaaaaaableeeeeuh, El Na-Aa-Aa-Aa-Azed, tu es le pluuuuuuuuuus NoooOOOooooooBBBBBleeeeeu-heeeuh…, non, la rythmique n'est pas bonne ici…"
Posées sur la table, il y avait ses chaussures : des babouches richement ornées, avec des petits disques dorés accrochés tout autour, qui devaient tinter allègrement quand il marchait ; le plus ridicule, c'était toutefois l'extrémité des babouches, qui faisaient une spirale digne des pires caricatures de babouches! Elles devaient également sacrément remuer quand il marchait. Il ne manquait plus qu'un grelot au bout pour en faire des pantoufles d'elfes du Père Noël que l'on représentait dans les livres Moldus.
Le petit sorcier s'aperçut qu'on le regardait avec des yeux rond et des bouches rieuses.
"Hé bien, jeunes impertinents, on ne se découvre pas devant les gens ? On ne salut pas ? On ne s'incline pas devant ses illustres aînés ?" ronchonna t-il d'un air vexé et supérieur.
"Pardon, Maître El Nazed," fit Faroudjia avec une expression retenue, "nous nous demandions quels étaient ces bruits. Que faîtes-vous donc ici-bas ?"
Laïla se cachait derrière Malika pour étouffer son rire dans son sac qu'elle en venait à mordre.
Mais El Nazed, aux paroles un rien respectueuses de Faroudjia, s'était levé, gonflé d'importance.
"Ah, je savais que mon génie poétique et épistolaire toucherait les cœurs !! Ma magnifique voix vous a guidés jusqu'ici, touchés par les Dons Divins que la Nature m'a octroyé !! Sachez, jeune gazelle, que je suis ici à composer une ode à ma gloire, pour remplacer certains de vos refrains niaiseux qu'il vous arrive de débiter dans les couloirs. Oh, vous les avez appris de vos aînés, vous n'êtes pas fautifs, mais il suffit de changer ces paroles, et voilà !!!"
Les filles contenaient difficilement leurs rires.
"On dirait que vos vers ne plaisent pas à tout le monde !" pouffa Meriem.
El Nazed eut un regard dédaigneux vers les animaux : antilopes, gnous, dromadaires, chacals, aigles et fennecs le regardaient d'un air fâché, mais n'osaient avancer.
"Voyons, comment ces créatures inférieures pourraient-elles seulement effleurer la subtilité de la création humaine !! Ils sont déjà chanceux de pouvoir admirer un génie tel que moi au travail !! Ils devraient se prosterner à mes pieds au lieu de me grogner dessus. GlOOOOOoooooOOOIre au GééééEEEEEEENiiiiiheuh d'El NaaaaZèhèdeuh, carrrrrrrR il est MaaaaGNiiifiiiHiqueuh !…"
Les animaux prirent une mine angoissée. De toute évidence, les déclamations étaient une vraie calamité à leurs oreilles, et les élèves n'avaient pas besoin de plus d'échantillonnage de ses prouesses d'orateur pour les comprendre. Une telle poésie était une torture pour les oreilles, mais en plus déclamée avec une voix si criarde…
A présent, les jeunes filles riaient en se cachant la bouche.
Mais survint un petit singe dans la fresque : il bondit en haut d'un palmier et commença à pousser des cris en pointant El Nazed du doigt.
"Ah ! Impudent ! Comment oses-tu m'interrompre !"
El Nazed lança un caillou en direction du singe. Mais la pierre ne fit que la moitié du chemin prévu et tomba lamentablement dans l'eau de l'oasis.
Le singe continuait à s'agiter et à montrer du doigt. Il semblait appeler ou attendre quelqu'un.
C'était le cas.
Un gros rhinocéros surgit d'un coin de la fresque.
El Nazed devint blanc.
Les élèves retinrent leur souffle.
Le rhinocéros gratta le sable.
El Nazed lâcha sa plume et son parchemin.
Le rhinocéros baissa la tête, cornes en avant, pointées sur El Nazed.
Celui-ci poussa un petit cri et saisit ses babouches, comme si c'était un talisman et les serra contre lui, comme un nounours. Il tremblait tellement que les colifichets de ses chaussures faisaient un petit tintement.
Le rhinocéros chargea !
Les filles poussèrent un cri !
El Nazed tenta désespérément de se cacher derrière sa petite table, ou de s'en faire un bouclier.
Le rhinocéros la percuta et la brisa sous le choc, et le pauvre El Nazed fut envoyé valdinguer de l'autre côté de la fresque. Le petit singe applaudit en ricanant. Le sorcier avait l'air très secoué, mais le plus drôle fut quand il reçut la bouteille d'encre sur la tête. Il poussa alors un cri de rage et de désespoir et s'enfuit de la fresque sans demander son reste ni son parchemin, serrant toujours ses horribles chaussures contre lui.
Les gamines pleuraient de rire. Les animaux de la tapisserie, de leur côté, faisaient la fête au rhinocéros et au petit singe, qui paradaient devant l'oasis.
Ce fut d'un cœur léger que Malika et ses camarades rentrèrent pour raconter les déboires d'El Nazed le Fourbe à leurs camarades masculins et au reste de leurs condisciples de Charmarîn. Ce fut un joyeux sujet de conversation au réfectoire !
C'est donc de très bonne humeur que Malika se sentit prête à affronter les prochaines semaines de cours.
Malika apprit bientôt à se repérer dans le vaste palais de pierre, et très vite, comme ses camarades, elle intégra les habitudes du lieu : revêtir l'uniforme le matin, arranger son foulard selon l'humeur du jour ou selon le temps qu'ils passeraient au soleil, en hidjab, attaché en turban, ou recouvrant entièrement le cou et les bras ; prendre sa place au réfectoire au petit déjeuner ; se ruer aux bains dès la fin des cours ; aller vagabonder autour du Caravansérail, au milieu des plantations, pour jouer avec les chiens, ou s'affronter à escalader certains rochers ; se rendre en cours sans se perdre dans les multiples salles de classe…
Dans les couloirs, elle s'était vite fait repérer, et dès le premier jour, de nombreux élèves vinrent avidement lui demander confirmation de sa parenté avec le professeur de Défense Magique Avancée.
"Hey !" l'interpellèrent trois filles de cinquième année alors que Malika attendait devant une salle de cours. "C'est vrai ce qu'on raconte ? Tu es la nièce d'Hichem Nassim?"
Malika poussa un soupir.
"Oui."
"Oooh…" firent les filles en la détaillant de la tête aux pieds.
"Vous l'avez vue, vous êtes contente ? Vous pouvez la laisser, maintenant !" décréta Laïla.
Malika et Meriem lui jetèrent un regard, mi-amusée, mi-réprobatrices. Les cinquièmes années eurent une moue méprisante.
"On ne t'as pas sonné, gamine !"
Heureusement, la porte de la sale de classe s'ouvrit à ce moment-là, et le professeur El Galad, chargé de l'Etude des Astres, apparut :
"Entrez, les enfants ! Hé bien, Mesdemoiselles, vous allez être en retard, pourquoi vous attarder ici ?" dit-il d'une voix douce à l'adresse des trois filles.
Elles maronnèrent des excuses et se pressèrent de filer. Les premières années de Charmarîn entrèrent dans la salle de cours.
C'était une vaste pièce au plafond en coupole, d'une matière grise un peu brillante. Entièrement hermétique, la salle n'avait que deux portes et n'était éclairée que par des globes lumineux qui flottaient en l'air ou étaient posés sur les nombreuses étagères qui se disputaient la place sur les murs avec des dizaines de cartes du ciel, de calendriers compliqués et de tables de calcul. De nombreux autres objets étaient rangés : des boussoles, des astrolabes, des télescopes, des compas et toutes sortes d'objets fascinants… Le cour promettait d'être l'un des plus magiques !
Mais les élèves découvrirent que l'Etude des Astres ne consistait pas seulement à regarder les étoiles et apprendre le nom des constellations ; il s'agissait également de connaître les influences de chaque étoile, de chaque planète selon leur place dans le ciel, et celle-ci se modifiait durant l'année. Très vite, l'enseignement devint aussi contraignant qu'un autre.
La majeure partie de ce cours avait lieu dans cette classe, surnommée la Coupole, le mardi après-midi et le jeudi matin. Le cours nocturne n'était pas prévu avant la fin du mois. Malika n'aurait jamais pensé associer l'Astronomie et l'Astrologie aux mathématiques, mais les élèves devaient apprendre le maniement d'astrolabes et de grilles de calculs compliquées pour prévoir le temps. Il n'y avait pas d'étude du ciel diurne pratique, seulement de la théorie (il est difficile d'avoir de grandes variétés de l'état du ciel et des nuages dans le désert). En fait, le cours rassemblait énormément de notions les plus diverses.
Meriem, par son côté commère, s'intéressait plus à toutes les histoires relatives aux légendes et aux nom des étoiles ; Malika se débrouillait mieux avec les calculs. Laïla, elle, ne trouvait au ciel qu'une utilité décorative.
"Vivement qu'on ait de vrais cours avec de la vraie magie !" marmonna t-elle.
Le professeur El Galad était un vieil homme qui aurait tout à fait eut sa place dans un conte de Mille et une Nuits : il avait les cheveux blancs, un visage sans barbe mais avec peu de rides et encore beau malgré son grand âge ; de petits yeux perçants, un sourire léger, et une voix douce et profonde. Posé, tranquille, il contait plutôt qu'il ne récitait ses cours, et il y avait quelque chose de fascinant à l'écouter et à le regarder s'égarer dans de grandes envolées lyriques. Par contre, le vieillard passionné de calculs astronomiques perdait l'ouïe, et il était parfois difficile de lui poser des questions. De même, certains élèves préféraient discuter que d'écouter le cours, au grand déplaisir de ceux qui le suivait avec attention.
En fin de compte, le sobriquet de "Vieux Mystique" entendu dans les couloirs lui allait comme un gant.
Trois fois par semaine, ils étudiaient les plantes et les animaux magiques avec le professeur Tyjde Roso, dans les jardins de l'école ou dans les Cavernes Arboricoles, de grandes salles emplies de végétations, où il faisait frais et où l'on pouvait reconstituer magiquement des conditions de vie moins difficiles et plus variées que le désert. C'était une indienne d'âge mûr, d'une grande distinction, toujours vêtue de saris magnifiques et de bijoux étincelants lors des repas, mais parfaitement à l'aise dans ses tenues de travail ternes et sales. Elle ne craignait ni la terre, ni les poils des animaux. Elle était aussi autoritaire avec les élèves qu'avec les bêtes, et était très précautionneuse, parfois carrément maniaque.
Malika retrouva le professeur de Rituels et Incantation, Faiza Chamaniak qu'elle avait croisé à la Médina Magique, dès le lundi matin. Deux fois par semaine, les élèves devaient apprendre par cœur les gestes et surtout les paroles précises pour effectuer un rituel. Parfois, Malika pensait que ce cours aurait du être un cours de chant ou de danse, ou même de calligraphie ou de culture générale. C'était un enseignement plaisant, mais monotone au début, car le professeur était extrêmement rigoureux et exigeait la perfection chez ses élèves. Laïla n'aimait pas beaucoup les séances d'Incantations, car elle chantait faux, et cela s'entendait. Le professeur le lui reprochait souvent en haussant les épaules par dépit. Elle faisait des remontrances à tout le monde, et seul son humour permettait aux élèves de supporter sa recherche de l'excellence.
Les Charmarîn étant seuls durant ce cour, elle pouvait s'occuper d'eux avec plus d'attention. Il ne fallut pas longtemps aux élèves pour constater que c'était un bon professeur ; exigeante, rigoureuse, elle était aussi juste et amicale. Elle était exactement le genre de professeur qui pousse ses élèves à faire de leur mieux. La nature de l'enseignement avait de quoi surprendre à première vue :
"Un Rituel ne s'emploie pas dans chaque Sortilège. Il y en a des plus ou moins longs, de plus ou moins importants. Le Rituel de Pluie est sûrement le plus difficiles ; il faut une semaine pour correctement le préparer, et nécessite vingt-quatre sorciers pour être efficace au maximum. Mais ce sont les Rituels d'Invocation et de Protection qui sont les plus courants. Vous apprendrez l'Invocation en cinquième année, quand vous aurez parfaitement assimilé les bases de ce cour. L'Invocation peut en effet être très dangereuse."
Ce qui surprit le plus les élèves, ce fut la perspective s'apprendre des Rituels de Cuisine ou de Jardinage… Ils apprenaient donc par cœur des gestes et des paroles simples pour protéger tiroirs ou journaux intimes, des formules de bénédictions et de protection pour les animaux et les enfants, puis des Rituels plus importants de protection magique. La théorie prenait une grande place dans ce cours, et chaque rituel avait une histoire longue comme le bras à connaître sur le bout des doigts pour être en mesure d'en apprécier tous les variantes et les subtilités.
Cela nécessitait parfois l'usage de la baguette magique, mais pas toujours. Le véritable enseignement au maniement de la baguette magique avait lieu avec le professeur Fènomaine, une vieille sorcière aux cheveux courts, vive et enjouée, au débit de parole très rapide. Elle allait tellement vite qu'elle oubliait parfois de prendre sa baguette, justement. Elle houspillait les élèves trop lents à son goût, mais en contrepartie inondait chaque petite avancée par des déluges de félicitations ; ce qui était aussi exaspérant que les remontrances, en fin de compte.
Meriem s'était jointe au duo de Malika et Laïla dès le deuxième jour, le plus naturellement du monde. Parmi les autres filles de sa classe, c'était avec elles que Malika avait tissé le plus rapidement des liens. Bien sûr, elle apprenait à connaître les autres, mais la vivacité de Laïla et la bonne humeur de Meriem collaient parfaitement avec son caractère optimiste et fonceur. Laïla donnait toutes les informations qu'elle avait glané auprès de son frère, et Meriem apportait toutes les précisions possibles sur le monde de la Magie.
Malika attendait avec impatience le cour de Potion, une matière qui lui inspirait des remèdes miracles ou autres fioles aux contenus époustouflants. Il était donné par le professeur Arbib, un sorcier qui avait environ la trentaine, portant une moustache qui ne cachait pas une allure un peu juvénile.
"Il fait partie de ta famille ?" demandèrent Malika et Laïla à Meriem en s'installant sur les bancs de la salle de cours.
"C'est mon cousin. Il n'est en poste que depuis trois ans. On passe le temps à lui faire des blagues… Il est rigolo!"
Pourtant, Malika ne trouva pas le professeur rigolo. Il avait perpétuellement l'air de mauvaise humeur et menaça dès le début du cours de donner de sévères punitions à ceux qui troubleraient son enseignement.
Quand il fit l'appel, le premier nom fut celui de Meriem. Il pinça des lèvres en le prononçant
"Ar…bib, Meriem…"
"Oui, Nadjib…"
"PROFESSEUR ARBIB !!!!" tonna le professeur en s'étranglant à moitié de rage.
Meriem, qui avait gaffé sans le vouloir, mit la main devant sa bouche.
"Pardon, Nadji… heu, professeur Arbib."
"Je ne tolèrerai aucun débordement, c'est clair, Arbib ?"
"Oui, Na… professeur Arbib."
Dans la classe, certains pouffaient, et Malika se tordait les lèvres pour résister. Laïla, elle, s'était caché derrière son chaudron pour rire à son aise. Le professeur eut un regard inquiet sur sa classe et continua d'une voix énervée à faire l'appel. Enfin, il se racla la gorge et vint se planter debout devant son bureau, les bras croisés, pour se donner de l'importance.
"L'art des Potions est un des plus élémentaires de la sorcellerie. Il vous faudra rigueur et patience, méthode et discipline pour cette matière. Aussi, j'attends de vous des élèves calmes et obéissants. Je ne veux pas d'accidents malheureux dans cette classe par la bêtise ou l'inattention de l'un d'entre vous !" déclama t-il avec véhémence.
Malika et Laïla étaient un peu surprises par tant de force dans le discours. Sans doute voulait-il effacer le petit accrochage avec sa cousine. Mais il était vrai que certains chuchotaient déjà dans le fond de la classe, et Meriem avait du mal à cacher son sourire.
"C'EST COMPRIS ?" rugit l'enseignant.
Les deux filles et les trois garçons qui papotaient dans leur coin sursautèrent, et baissèrent la tête en murmurant "Oui, Professeur."
Le professeur Arbib regarda la classe d'un regard qu'il voulait menaçant mais qui était plutôt inquiet.
Il se lança dans la description un peu nerveuse d'une Potion de Gonflement, et les élèves mirent la main à la tâche. Sans aucune raison, le chaudron d'un garçon de Sandrelûn se mit à bouillir trop fort. Avant que le professeur ait put faire quelque chose, de puissantes explosions envoyèrent la substance voler dans tous les coins, et si les élèves réussirent à se protéger avec leurs foulards ou sous les tables, le pauvre professeur en reçut un jet en plein visage.
Immédiatement, il se mit à gonfler de partout, et sa tête ressembla à un horrible mélange entre un ballon et une patate. Et c'est en trébuchant sous les rires des élèves qu'il parvint à regagner son bureau et à s'asperger d'antidote.
Le devoir sur les règles de sécurité en matière de Potions qu'il donna aux élèves ne suffit pas à les chagriner après cet épisode. Ils retirent une chose, toutefois : en Potions, mieux valait se draper intégralement dans son foulard. Ca donnait une tête de médecin Moldu craignant une contamination quelconque, mais au moins, on était protégé.
Le cours d'Histoire de la Magie fut par contre un réel traumatisme.
Le mardi matin, l'ensemble des élèves de première année s'était réuni dans le grand amphithéâtre, où ils avaient passé la Cérémonie de Répartition. Les bancs des gradins étaient à présent devancés par de minces tables de bois. Un grand tableau noir s'étirait sur la scène mais il n'y avait pas de chaire pour le professeur, ni chaise ni table.
Le grand amphithéâtre était à peine rempli en comparaison de la foule d'étudiants qui y avait siégé quelques jours avant. Mais quand tous les élèves de première année furent entrés, cela constituait tout de même une foule bruyante.
C'était la première fois qu'ils se voyaient tous ensemble, et chacun essayait de reconnaître les élèves qu'ils avaient vu précédemment. Malika, Laïla et Meriem s'assirent à peu près au milieu des gradins, à côté d'autres filles de leur classe et de garçons du cours de potions. Malika remarqua que le timide Fadel s'était assis au deuxième rang, sur le côté. Personne n'avait pris place au premier rang, juste sous le nez du professeur.
"On a trois fois Histoire et Théorie de la Magie par semaine." grimaça Laïla en consultant leur emploi du temps. "Heureusement que ces cours s'amenuisent en troisième année."
"Qui est le prof ?" demanda Malika.
"Il paraît qu'elle est horrible." souffla Laila, un peu inquiète.
"Quoi, vous ne savez pas qui est la vieille Lillith ?" s'étonna Meriem, qui avait un regard apeuré.
"Non. Mon frère ne m'a pas dit… Pourquoi ?"
"Mais enfin !! C'est une..."
La voix épouvantée de Meriem fut coupée par un cri horrible qui résonna dans l'amphithéâtre. Les élèves se turent brusquement, tournant la tête pour en trouver l'origine. Le cri se répéta alors, un cri rauque et aigu, comme celui d'un terrible rapace avide de sang. Il venait d'au-dessus de leurs têtes, et les élèves levèrent les yeux.
Une énorme forme sembla tomber à travers le puit du plafond. Elle surgit de la Coupole, s'agrippa un instant à une stalactite, reprit son élan, et tomba dans un bruissement de plume sur un amas de roc en haut des gradins.
La créature était de taille humaine, mais n'était certainement pas humaine. Elle était vêtue d'une grossière robe de toile brun foncé. Deux grandes ailes d'un gris sombre se détachaient derrière son dos. Le duvet continuait sur ses épaules et une partie de son cou. Ses bras squelettiques étaient terminés par des mains griffues. Elle ne portait pas de chaussures, car ses jambes couvertes de plumes se terminaient par de puissantes serres aux griffes noires et acérées comme des couteaux. Son visage hideux était celui d'une vieille femme déformée, à la bouche tordue et au nez crochu comme un bec d'oiseau. Ses cheveux filasse dégoulinaient sur son visage, masquant à peine ses horribles yeux jaunes. Elle ouvrit la bouche et laissa échapper un feulement en englobant la salle de son regard, découvrant ses crocs aiguisés.
"…harpie." gargouilla Meriem qui tremblait, et Malika et Laïla n'en menaient pas large non plus.
Devant l'apparition de ce monstre, des élèves hurlèrent et certains firent mine de s'enfuir
"SIIIIIIIILENCEEEEEEEE, JEUNES AVORTONS !!!!!" rugit la harpie d'une voix stridente.
Les élèves s'immobilisèrent, tétanisés, le regard fixé sur la créature.
"Chacun à sa place, et en silence, ici, la dissipation n'est pas tolérée! !" gronda t-elle d'une voix crissante.
Les élèves, blêmes, commençaient à comprendre que c'était ça, leur professeur d'Histoire et Théorie de la Magie. Ils se rassirent timidement, et le professeur descendit d'une démarche chaloupée les marches vers la fosse, jetant des regards féroces aux enfants, qui ne pipaient mots. Elle se mouvait difficilement, un peu comme un canard. Les élèves se resserraient sur les bancs lorsqu'elle passait à proximité d'eux. De temps en temps, elle poussait de petits feulements menaçants, scrutant les élèves comme un troupeau de moutons sur lesquels elle brûlait de fondre pour prendre son repas.
Elle atteignit le dernier gradin. D'un bond, elle sauta, se propulsa en l'air, plana un instant en ouvrant ses aigles, et se retrouva sur la scène. Elle se tourna vers ses élèves.
"Je suis le professeur Lillith. Pour ceux qui ne l'auraient pas remarquer où ne comprendrait pas ce qu'ils voient, je suis une harpie. J'enseigne dans cette école depuis bien avant la naissance de vos grand-parents. J'ai vu défilé plus d'élèves qu'aucun autre enseignant, donc n'essayez pas de me faire perdre on temps ou de me mener en bateau. J'exige le plus grand sérieux dans ce cours. Je vous conseille fortement, petits bébés, de ne jamais me faire perdre patience, car mes instincts étant ce qu'ils sont, je ne voudrais pas me retrouver en train de dévorer les entrailles de l'un de vous. Cela ferait désordre…" ricana t-elle avec un sourire torve, et elle fouilla dans sa poche pour en sortir un petit serpent qui gigotait. Elle le mordit goulûment et le déchira en deux. Il y eut des cris de répulsion tandis qu'elle mastiquait la chair de l'animal, contemplant avec satisfaction les élèves terrifiés. Puis elle enfourna le reste du serpent et l'avala d'un coup.
"Bien sûr je n'ai encore jamais dévoré personne en 147 ans d'enseignement, alors vous ne devriez pas avoir de souci. Bien sûr, avant d'être professeur, c'était autre chose..." dit-elle avec un sourire narquois (qui fut plutôt une grimace, la rendant encore plus affreuse si c'était possible). "Restez tranquille, suivez le cours et nous devrions suffisamment nous entendre pour des humains et une harpie."
Avec un hurlement de rapace, elle s'élança en l'air et plan jusqu'à une grosse stalagmite vers la gauche de la salle où elle se percha.
"Sortez tous vos livres. Ce premier cours sera consacré à l'Histoire de l'Institution où vous étudiez. Puis nous étudierons cette année les grandes figures de l'Histoire Magique, et ce dès vendredi prochain. Le cour du mercredi sera quand à lui exclusivement basé sur la Théorie de la Magie, vous saurez donc quel livre amener pour chaque cours."
Elle fronça ses yeux vitreux tandis que les élèves ouvraient précipitamment leur sac. Elle poussa de nouveau son horrible cri rauque et s'envola pour atterrir juste derrière Malika et ses amies, ses serres féroces plantées sur la table devant deux garçons qui s'étaient mis à parler et qui sursautèrent à son arrivée. Elle se pencha vers eux et découvrit les crocs. Les deux garçons en étaient paralysés de peur. Malika les reconnu comme étant du groupe de Manticoran, et plus particulièrement deux qui traînaient avec Najîba Hôdesan. Les griffes du professeur avaient déchiré les parchemins des garçons et l'un d'eux avait même une légère estafilade à l'avant-bras.
"Ne jamais me manquer de respect de cette façon, jeunes vermisseaux. Est-ce clair ?"
Terrifiés, ils ne purent que hocher la tête, incapables de détourner le regard de ces horribles yeux jaunes.
Lillith eut un sourire cruel, puis s'envola de nouveau, retournant à sa chaire, et commença à dicter son cours. Sa voix rauque n'était pas très agréable, mais elle rendait son cours dynamique et finalement assez intéressant. La désagréable manie qu'elle avait de bondir d'un emplacement à l'autre, se focalisant parfois sur un petit groupe d'élève, était par contre très perturbant. Les élèves soumis à son regard, terrifiés, s'efforçaient de prendre leurs notes le plus parfaitement possible mais ne pouvaient s'empêcher de trembler, rendant leurs copies des plus malaisées à relire.
Le cours eut pour sujet l'évolution progressive du Caravansérail, de plaque tournante du commerce sorcier dans l'antiquité, en zone d'échange de pratiques magiques au Moyen-Age, puis en véritable institution scolaire au quinzième siècle. Il ne fut pas très marquant pour les élèves, car ceux-ci étaient trop terrifiés par la présence du professeur. Les jours suivants, les élèves durent apprendre une longue liste de sorciers et sorcières célèbres qui avaient marqué l'histoire, en confondant El Nazed le Fourbe et Ben Nazeth l'Enlumineur. Le cour du mercredi était quand à lui encore plus intéressant et plus périlleux ; en effet, en Théorie de la Magie, Lillith passait plus de temps à poser des questions aux élèves. Qu'on y réponde ou pas, cela flanquait la frousse d'avoir les terribles yeux jaunes rivés sur soi. Le professeur essayait de faire sortir du crâne des élèves tous leurs préjugés sur la Magie, expliquant les caractéristiques de la baguette magique ou l'absence de Magie chez les Moldus. Fréquemment, elle avalait tout crue des morceaux de viande faisandée qu'elle gardait dans ses poches, ou pire, des rats ou des serpents qu'elle avait capturé juste avant le début du cour. Malika comprenait pourquoi on ne la voyait quasiment pas au moment des repas, et comme disait Meriem, c'était tant mieux.
"Ca te couperait l'appétit, sinon. Tu l'imagines dépecer un lapin encore vivant à la table des profs avec ton assiette fumante devant toi ? Béééééé…"
La terreur constante du cours d'Histoire de la Magie en faisait donc le moins aimé de tous, mais Malika découvrit le jeudi suivant que le cours de Défense Magique, un de ceux qu'elle attendait le plus impatiemment, serait pour elle le pire de tous.
Il ne fallut qu'un seul cours pour comprendre que Batoul Usulizz, leur professeur de Défense Magique, mais aussi leur vice-directrice, avait une sérieuse dent contre elle.
Ou plutôt contre son onle...
- Fin du chapitre neuf -
Prochain chapitre : Conflit nocturne
La découverte des cours et des professeurs se poursuit. Malika se révèle étonnamment douée en Vol sur Tapis et en escalade. En défendant Fadel, un garçon de leur classe, Malika, Meriem et Laïla s'attirent de nouveau les foudres de Thanekhros…
Explication des noms :
Thaquib El Galad : Un clin d'œil à l'œuvre de Tolkien. En effet, le dernier grand roi des elfes s'appelle Gil Galad (on le voit brièvement dans le 1er film du Seigneur des Anneaux, derrière Galadriel qui regarde son anneau dans un des premiers plans, puis massacrant des orcs avec Elrond et Elendil, dans la bataille contre Sauron. Ce n'est pas montré dans le film, mais il se fait tuer par Sauron lors de ce combat.)
Gil Galad est son nom sindarin (langue elfique la plus commune), alors qu'il appartient au peuple des Noldors et s'appelle en fait Ereinon. Gil Galad signifie "Etoile rayonnante". Par contre, "étoile" se dit en langue noldo (la langue elfique plus noble et moins connue) : "el" (comme dans le nom d'Elrond, qui veut dire "voûte étoilée")
J'ai donc remplacé la traduction sindarine du mot "étoile" par la traduction noldo.
Ce nom va très bien au prof d'Etude des Astres, car il a, comme les elfes, la tête dans les étoiles… Je voulais en faire un personnage un peu "elfique", sage et évaporé...
Malika ne le sait pas, mais il a du sang de Vélane. Son prénom, Thaqib veut dire "Etoile Filante".
Batoul Usulizz : Batoul signifie "Vierge Ascétique", ce qui indique son caractère dur et décidé. Son nom de famille se décompose comme suit : "Usul" = "le pilier" dans le livre de Science-Fiction "Dune" (c'est le surnom du héros) et "izz" = "puissance". Je voulais marquer le pouvoir du personnage, tant par sa force de caractère que par sa position dans l'école.
Faiza Chamaniak : voir chapitre 4
Nadjib Arbib : le prénom signifie "studieux". Je l'imagine comme une version de Percy moins ambitieux, plus empoté, et plus explosif. Le drame de sa vie est d'avoir à enseigner à ses cousins (après avoir eut pour élèves ses plus jeunes frère et sœurs).
Fènomaine : alors elle, elle est française. Le nom, c'est évidemment le mot "phénomène" déformé !
Tyjde Rozo : suffit de lire, c'est une tige de roseau !
Lillith : selon les écritures anciennes, ce serait la première femme d'Adam, avant Eve, qui serait devenue la première démone. Un personnage assez sinistre, quoi. Ca colle avec la prof, je la voit comme une pure terreur dans l'école, qui a parfois du mal à ne pas se jeter sur un petit première année pour le bouffer…^^
Ben Nazeth l'Enlumineur : c'est un ancêtre de Yasmina Ben Nazeth, la co-directrice de l'Institut de Jérusalem (qui apparaît dans le premier chapitre). Je souhaitais lui donner une ascendance noble, pour ne pas la confondre avec El Nazed ! Quand au terme d'enlumineur, j'ai juste pensé aux moines du Moyen-Âge. Pas de rapport, mais je trouve ça mignon.
Sarah Heinmann: le prénom est celui d'une amie. Le nom est allemand, je l'ai piqué au manga Monster, un petit chef d'œuvre. J'imagine Sarah ayant des ancêtres juifs-allemands ; c'est pour ça qu'elle a des cheveux qui tirent vers le blond.
Nilopher Kun Gout : le prénom signifie en arabe "Lotus Bleu", le nom se lit "qu'une goutte". Elle est thaïlandaise par son père (sorcière des deux côtés). Le nom me fait penser aux gouttes de pluie sur les fleurs de lotus….
Réponses aux reviews :
Ben, y'en a pas eut beaucoup pour ce chapitre, je suis un peu déçue…
Je remercie donc reveanne, qui a reçut le titre fort envié ( ? Titre envié ?? Z'êtes sûrs ?) de groupie n°1 d'El Nazed le Fourbe. (El Nazed va être insupportable quand il saura ça…)
Je remercie aussi la psychopouët, elle m'a fait plein de reviews, elle a eut du cran de s'avaler tout ça d'un coup ! ^^
Merci à fenice, si tu savais comme je me casse la tête et commment j'angoisse, j'ai l'impression d'en dire trop et pas assez à la fois.
Un coucou à Lunenoire !
Hello Alixe, j'espère que cette histoire te plait toujours !!
Et revoilà Loo-Felagund (au fait, Finrod est un de mes personnages préférés du Silmarillion !!^^), merci de cette longue review ! Le Coffripon est tout bêtement un objet vivant. Un coffre en bois animé par la magie, quoi ! Un garçon rejoindra le petit club de Malika… j'espère qu'il ne souffrira pas trop ! J'avoue que pour les madrasas, y'a du laisser-aller… Je n'ai pas trop envie de me casser la tête, en fait… Vive le mystère, la meilleure des excuses !
Et j'avais oublié Tsukino la dernière fois, merci de ton message !
Mirabelle P : chouette, une nouvelle lectrice !!!!^^ Qui promet des dessins, en plus !! (YYIIIIIIIIAAAAAAAAAAAHHHH, alana tombe de sa chaise). Mais c'est vrai que j'ai du mal à caractériser Malika… Aller, j'ai encore plusieurs chapitre pour en faire une personnalité bien trempée ! Et t'en fait pas, t'en trouvera des défauts, c'est bien normal…
Le concours : ben, personne n'a trouvé… Et El Nazed a fait sa deuxième apparition ici, alors que je n'ai pas encore rédigé la suivante. Bon, voilà : Dans ma fic "Sorcier International", un des articles est consacré à El Nazed en tant que personnage de la littérature. L'auteur des Aventures d'El Nazed le Fourbe, Youssef Haleur, a écrit d'autres livres, dont… Les contes du renard rouge. C'est vrai, c'est mince, mais j'ai imaginé que Haleur était aussi à Charmarîn dans sa jeunesse et qu'il a compilé toutes les histoires de Vermillon…
D'autre part, le Caravansérail sera encore à l'honneur dans un article de "Sorcier International", on parlera des Directeurs, et le père de Najîba fera une apparition…
Je prépare aussi deux articles sur les Cracmols…
