Chapitre 22: Flashback!
Ses paroles me glacèrent le sang. Ignorant son pistolet dirigé sur moi, je levai les yeux pour le regarder en face. Son sourire moqueur... La moquerie que j'avais entendue dans sa voix.
Un sentiment de rage et de trahison s'enflamma en moi. Ma blessure semblait se réveiller pour renforcer le foyer qui brûlait en moi.
Et je repensai, inévitablement, aux découvertes et aux conséquences de notre, non, mon enquête à Aomori.
Cependant, Genta avait déjà réservé les tickets pour notre car à destination d'Aomori, lorsque l'inspecteur Takagi et Miwako firent appel à moi. Ils avaient été hospitalisés suite à une explosion d'origine criminelle, et, la mère de Miwako n'étant pas au meilleur de sa forme, ils cherchaient quelqu'un pour s'occuper de Shuichi pendant les vacances scolaires jusqu'à ce qu'ils aillent mieux. Ne trouvant pas le cœur pour refuser (et avec l'accord de mes parents) je pris la décision d'amener Shuichi avec nous à Aomori. Nous eûmes de la chance, on n'eut pas trop de difficultés pour acheter un ticket pour Shuichi. Cependant le voyage à Aomori ne se fit pas sous le plus agréable des auspices, du moins pour moi... Mes pensées n'arrêtaient pas de retourner sur la dernière page de recherche que j'avais faite avant le départ. La page du département de police d'Aomori.
Je n'ai pas trop envie de détailler toute la longue procédure de recherche... En bref, les garçons recherchaient seulement cette personne qui avait disparu de nos vies... Pendant que moi, j'enquêtais sur les diverses informations que j'avais trouvées sur ses activités.
Non, ce n'était pas possible... Je ne voulais pas y croire. Mais tout y menait. Les témoignages, les faits divers, les fichiers scolaires.
Le fameux soir où tout s'était précipité, j'avais pris le risque de demander aux garçons de m'aider à suivre deux types un peu louches, dans l'espoir qu'ils nous mènent à lui. Bien sur, à la mention du mot louche, le sentiment un brin trop protecteur des garçons avait fait surface, et après moult et moult discussion, il fut décidé que je resterai à l'auberge, avec Shuichi, pendant qu'ils suivraient les deux hommes en question. J'étais soulagée d'avoir fait promettre à Shuichi de ne rien dire sur mes découvertes aux deux autres sans mon autorisation... S'il avait participé au débat, Mitsuhiko et Genta se seraient forcément doutés de quelque chose.
J'eût néanmoins un mal fou à faire comprendre à Shuichi qu'il devait rester alors que moi aussi je partais mener l'enquête. Et comme je l'appris par la suite, j'aurai du me douter qu'il imiterai l'exemple que je lui avais donné face aux garçons.
Cependant, malgré cela, je parti néanmoins la tête tranquille de ce coté là sur ma quête aux réponses. Je pu voir sans être vu les garçons commencer leur filature. Et j'allais les suivre lorsque... Un visage attira mon regard. Un visage familier, trop familier de par son absence. Il venait de sortir de la cabane dont les deux hommes «louches» étaient sortis. Il était accompagné d'un autre homme, plus vieux. Retenant ma respiration, je m'enfonça dans mon coin du mur, cachée, dieu soit loué, par une haie. Je ne pu m'empêcher de trembler en entendant l'homme plus âgé l'appeler, lui, par son vrai nom. «Je suis à Seattle, là...» Mon œil.Mais ce qui m'inquiétait surtout, ce n'était pas le mensonge... C'était mes soupçons, mes soupçons qui pesaient lourds sur son activité à Aomori. Le cœur serré, je pris ma décision. Je n'avais pas des doutes, j'étais certaine de ce que je trouverai si j'allais voir dans la cabane. Seul mes espoirs et mes rêves m'avaient permis de penser qu'il n'y était pas mêlé... Mais je ne pouvais pas l'accepter... Pas tant que je ne lui aurai pas demandé. Comme les deux hommes qu'avaient suivi Mitsuhiko et Genta, l'homme plus âgé et lui suivirent la route menant à la forêt. Le sol était boueux et glissant, à cause du crachin incessant des jours précédents. Il avait pris une lampe torche, et l'avait allumée afin que lui et son compagnon ne glissent pas par inadvertance. Je dus me contenter du couvert, et support, des arbres entourant le chemin, en me serrant les dents à chaque glissade, en espérant ne pas attirer leur attention. Après environ un quart d'heure de marche, ils s'arrêtèrent dans une petite clairière. Pendant que le grand, je crois qu'il se faisait appeler Baïkal, allumait sa cigarette, il s'asseyait sur un tronc d'arbre. Je m'arrêtai pour reprendre ma respiration. Ma tenue était encrassée de boue, et, dans le noir, nombre de branches avaient du égratigner mon visage. Après quelques bouffées, l'homme plus âgé ouvrit la conversation.
«Notre opération se passe sans anicroches.» Le jeune homme sur le tronc d'arbre acquiesça.
«Oui, bientôt on pourra tenter un marché plus grand, que dirai-tu de Tokyo?» «Tokyo, c'est vaste. Un endroit en particulier?» "Je pensai à Beika. Aprés tout..." Il laissa la fin de sa phrase en suspens. Son compagnon eut un rire. En laissant échapper un long filet de fumée blanche, il continua.
«Je m'en doutai un peu. Mais tu as raison, c'est un bon endroit pour commencer.» «Oui, surtout que j'ai un autre projet qui pourrai grandement bénéficier d'un séjour là-bas.» Une nouvelle hilarité chez son compagnon. Il ne broncha point. Baïkal fit tomber la cendre au bout de sa cigarette d'un geste du pouce. «Il nous faut cependant être plus vigilant concernant les fouineurs.» «Tu parles de ces deux lycéens de Tokyo qui sont venu poser des questions sur moi dans les environs? Pas de souci, je suis certain que les deux autres vont leur passer l'envie de chercher plus loin.» «Je l'espère bien.» Baïkal eut un sourire qui n'avait rien de convivial.
«Et pour la marchandise, tu t'es bien arrangé avec le camionneur?» «Oui, pas de souci. Il livrera la drogue à l'endroit convenu, et de la plus discrète des façons. Après tout, il n'a aucune envie de chercher plus loin que les billets qu'on lui a mis sous le nez.» Répondit-il, en remettant ses lunettes en place.
A ces mots, je me mordis la lèvre.
Il a fallu qu'il le prononce, il a fallu qu'il prononce le mot 'drogue'. Tremblante, je m'essuyai d'un revers de la main l'humidité que je sentais dans mes yeux. Une question me préoccupait l'esprit, plus que tout.
Pourquoi? Pourquoi?! Toutes ces années à résoudre des affaires criminelles entant que Détective Boy ne m'avaient pas laissée avec une vue naïve sur la drogue. J'avais fait face à des drogués, j'avais même vu une amie souffrir à cause du manque, et pire, j'avais vu un homme prêt à tuer pour cette substance illégale. Pourquoi a-t-il fallu qu'il dise ce mot?! Pourquoi a-t-il fallu qu'il affirme mes soupçons. Pourquoi?! Serrant des poings, je pris ma décision. D'un pas se voulant assuré, je m'aventurai dans la clairière. Je n'avais pas besoin de le faire mais je l'appelai tout de même par son nom.
Les yeux remplis d'incompréhension avec lesquels il me fixait ne fit rien pour améliorer ma peine.
«Quoi? Ne me dit pas que tu ne me reconnais pas! C'est moi, Ayumi. Ayumi Yoshida!» Une étincelle de compréhension éclaira son visage, mais il ne fait as mine de vouloir me souhaiter la bienvenue.
«Qu'est-ce que tu me veux?» Sa voix était froide, chargée d'hostilité.
«Explique moi...Pourquoi? » Lui répondis-je, ma voix avait du trembler, car il me jeta un regard... Son regard transperçant, avec lequel il semblait pouvoir tout lire.
Je fus surprise de le voir sourire à ce moment là. Son sourire était le plus troublant. Je l'avais cru changé, indéniablement perdu à nos yeux, mais il avait encore ce sourire... Ce sourire que j'avais vu souvent avant son départ, que j'avais appris à apprécier, ce sourire qui m'avait tellement manqué. Quelque part, au fonds de mon estomac, je senti un vide se créer.
«Je m'en occupe?» La voix de son compagnon vint interrompre notre échange.
Perplexe, je regardai de l'un vers l'autre, l'incompréhension se lisant sur mon visage. Son sourire si paisible autrefois, se transforma en un rictus de prédateur.
«Non, c'est mon affaire cette fois ci.» Il sortit un pistolet de sa poche. «Après tout, faut bien que tes 'leçons' servent.» Je fixai le bout de métal du regard, ne voulant pas y croire. Les flammes de la colère se rallumèrent en moi de plus belle. Je reculai de quelques pas, en murmurant le fond de ma pensée.
«Quoi? Que dis-tu, on ne t'entend pas?!» Fit il, moqueur. Je relevai mes yeux pour fixer les siens.
« Monstre.» Dis je. Le mot résonant avec force dans ma tête. «Après tout ce que tu nous avais appris, après tout... Argh, je ne peux pas y croire... Non, je ne veux pas.» «Que veux-tu...» Me répondit-il, un air cynique sur le visage qui ne lui ressemblait pas. «Toi, tu es toi, et moi, je suis moi.» «Tu n'es plus toi...» Dis je, en reculant a nouveau de quelques pas. «Du moins, tu n'es plus le toi qui aurait du être.» « Ce que tu dis est plus vrai que tu ne le penses.» Il leva son arme de façon menaçante.
Il n'oserait pas. Une partie de moi ne pouvait toujours pas y croire. La réalité de la situation échappait à mes sens. Non, il ne le fera pas! Persistai-je dans ma tête.
Mais néanmoins il le fit.
Un craquement sourd, suivi d'un sifflement vint prendre la place de la pluie dans mes oreilles. Une douleur inattendue me scinda, comme un éclair, le coté gauche. Mes pieds glissèrent dans la boue à mes pieds. Mon corps tomba lourdement sur le sol trempé. Il m'avait tiré dessus. Toute ma rage s'envola pour être remplacé par un sentiment de désespoir, ou un sentiment de vide, je ne saurai trop le décrire. Et avant de m'évanouir j'avais à nouveau entendu sa voix.
«On dirai que ce que je dois trouver me cherche moi aussi... Bien.» «Demain on se rends à Beika, Baïkal...» Et avec un rire moqueur, qui me semblait si inconnu, il termina.
«Je ne pense pas qu'on revoie cette fille à Tokyo.»
Et maintenant, je me retrouvai à nouveau devant son sourire moqueur, à la merci de son pistolet. Un sentiment de fatigue s'empara de moi.
«Eh bien, notre rencontre a un air de déjà vu...» Répondis je à son commentaire déplacé.
«N'est-ce pas...» Mes dents me donnèrent l'impression de grincer en prononçant la fin de ma phrase. «Conan Edogawa?» Une bien triste pensée me traversa l'esprit.
Comment ai-je pu espérer deux fois de suite qu'il se souviendrait de notre amitié?
