In Stellis Memoriam
Disclaimer : In JKR honorem
Réponses et reviews :
Contente de vos visites, je suis ! Salut donc à Parvus Lupus, Alinem, Juliette, Alixe (c'est pas gentil de frimer que toi tu connais la suite...) et ceux dont j'ai perdu la review avec les vacances...
Contente de vous avoir surpris quand même (Vert surtout, j'adore surprendre Vert...)
Désolée que la localisation des toilettes soit hasardeuse (Lunenoire) – aïe !- ou que Tonks paraisse un peu trop OOC (Vert)... J'ai peur que ça ne soit pas parti pour s'arranger ça, autant le dire... Mais je tiens quand même à préciser que je ne l'ai pas tant vieillie que ça, trois ans tout au plus, Alana y a veillé...
Dédicace à tous les relecteurs de ce chapitre : Alixe, Titou, Alana et Vert - même si ce n'était pas la bonne version... Hem... - ainsi qu'à Antarès - avoir des compliments de quelqu'un dont on aime les fics c'est...
17 - Eveils
Harry jeta un dernier regard à Tonks avant de sortir à découvert dans la grande salle :
« Il s'appelait comment déjà ?»
La question sembla couper la respiration de la jeune femme qui dut se forcer à demander : « Volde... ?»
« Oui », confirma Harry d'une voix qui lui sembla curieusement détachée de lui-même. Un peu comme si quelqu'un d'autre que lui, Harry James Potter-Lupin, le faisait.
« Jedusor... Tom Jedusor. »
« Tom », murmura le jeune garçon.
« Harry, rappelle-toi », le pressa Tonks en prenant sa main. « Quoi qu'il arrive, ferme ton esprit et... »
«... ne regarde pas le Basilic », compléta Harry avec une once d'agacement.
« Quoi qu'il arrive », répéta Tonks fermement. Harry baissa les yeux. Elle avait peur pour lui. Il le voyait dans son visage, et lui... lui ne savait pas quoi en penser. Pas le temps décidément.
« Promis », dit très doucement Harry. Avec une dernière pression, elle lâcha sa main. Il aurait voulu dire bien des choses mais les mots lui parurent inaccessibles. Il inspira profondément et pénétra résolument dans la grande salle.
Ses pas alertèrent tout de suite Jedusor. Il l'entendit appeler immédiatement le Basilic à son aide. Son cœur s'emballa à cette pensée mais il s'obligea à l'ignorer. Comme Don Léandro lui avait appris, il débarrassa son esprit de sa peur, de ses émotions. Même les sensations de son corps perdirent en acuité. Il entendit la réponse du serpent et le glissement que faisait son corps contre les vielles pierres. Il continua d'avancer sans se retourner, sans s'arrêter, sans accélérer non plus. Il savait que Tonks le regardait. Il savait que le Basilic venait. Il savait que Cyrus allait reconnaître sa voix... et il n'avait pas d'autre choix.
Jedusor s'était détourné de Cyrus et le regardait avancer.
« Hé ! Tom ! » - cria-t-il.
Le fantôme - la résonance psychique, se corrigea Harry, s'obligeant à la lecture la plus froide et la plus attentive des événements. Moins qu'un fantôme ! – s'avança légèrement vers lui, visiblement sur ses gardes.
« Alors, Tom ! Tu ne me reconnais pas ? »
La provocation était-elle un bon début ? Au pied du fantôme qui l'examinait avec méfiance, Cyrus-Chien gémit faiblement en reconnaissant sa voix. Cyrus...
« Attends un peu... Bien sûr... Sûr de lui, arrogant... Comment en serait-il autrement ?... Oui...Potter... » - répondit Jedusor avec une visible fascination.
« Oui », confirma Harry. Son cœur échappa un battement à son contrôle et sa peau se hérissa. Il inspira profondément pour se calmer.
« Potter... approche, approche... que je te regarde... je disais justement à ton... au jeune Black que rien ne me ferait plus plaisir que ta présence... » - continua Jedusor.
Oui, pensa Harry, parle, parle...
« Alors, ainsi, c'est toi... Qui peut te croire si dangereux ?... Et là, c'est... »
Harry se retint presque de sourire. Tout le monde voulait voir sa cicatrice mais que Voldemort... enfin que 'la résonance psychique' de Voldemort veuille la voir... Il y avait là une dérision extrême... Sans doute Severus apprécierait à sa juste valeur, songea-t-il un instant -avant de se rappeler que s'il était là, seul avec Tonks face à cette horreur, c'était par la faute de l'inflexible Maître de Potions... Mais la voix du fantôme le ramena durement à la réalité du moment :
« Ainsi te voilà... après tout ce temps... Malgré tout... Ah toi et moi... et le jeune Black... nous pourrions faire de grandes choses, Harry... »
L'excitation de Jedusor était palpable, la proposition monstrueuse... De nouveau, Harry eut envie de vomir.
« Mais pourtant vous allez le tuer », répliqua-t-il du tac au tac pour le regretter aussitôt. Il ne faut pas qu'il pense à Cyrus... Il faut qu'il oublie tout ce qui n'est pas moi... Il faut qu'il relâche sa pression sur eux...
« Qui ? Ah, lui là... Non, je ne le tue pas : il se tue tout seul...Je lui ai laissé le choix... La jeune fille aurait suffi à me rendre ma puissance... Il s'est entêté. »
Derrière Harry, le glissement s'amplifia. « J'arrive, Maître... » - entendit-il, et il frissonna légèrement.
« Oh... » Trouve quelque chose Harry, trouve... « Et alors vous étiez dans ce vieux livre ? » Pas terrible mais ça fera peut-être l'affaire, espéra-t-il.
« Oui... C'est vraiment mon journal, tu sais, Potter... un romantisme de jeunesse, je le reconnais... et pendant longtemps j'y ai été un peu seul bien sûr... mais ma puissance a perduré, et c'est ça le plus important... »
Harry n'était plus qu'à trois mètres de lui et son cœur battait lentement mais fortement dans ses oreilles. Le journal de Ginny était derrière Jedusor, à vingt centimètre à peine des pattes arrière du jeune labrador noir gémissant qui défendait de son corps la jeune fille aux nattes rousses. Tiens le coup, Cyrus, tiens le coup...Ne pas penser à lui !
« Hum... Legilimens toi aussi ?... Décidément ce Lupin n'a pas peur de la puissance magique... Mais tu es moins solide que ce jeune Black. Je sens que tu t'inquiètes pour lui. » Jedusor désigna d'un geste de la tête Cyrus et Ginny. « Tu es aussi Animagus ? », demanda-t-il sur le ton de la conversation.
« Non... pas encore », dit Harry en faisant l'air de rien encore deux pas de côté. Le journal paraissait si proche et si loin en même temps. Comment faire ? A quel moment agir ? Il n'aurait sans doute qu'une seule opportunité... Tonks, Tonks...Que dois-je faire ?
« Pas encore ? », s'amusa Jedusor. « Et oui, des projets, évidemment... Des ambitions...certainement...Réfléchis, Potter, réfléchis... Tu veux qu'il vive ? Et toi, veux–tu vivre et réaliser ta puissance ? »
Harry leva les yeux pour la première fois vers Jedusor et s'étonna de son visage jeune et intemporel. C'était un jeune sorcier qu'il avait en face de lui, vêtu d'une version ancienne version de l'uniforme de Poudlard... Il revit de vieille photos dans la Salle des Trophées, des photos où Grand-père Albus portait des robes noires de professeur et ou Minerva n'avait pas encore de lunettes... Il était étonnamment peu différent de n'importe quel élève de sixième ou septième années aujourd'hui... Si ce n'est peut être l'avidité du regard, le détachement des paroles et la sécheresse des gestes... Ce Jedusor avait-il des amis, des frères, des sœurs, des gens qu'il aimait, se demanda Harry sans oser le dire à haute voix.
« Je veux qu'il vive », répondit-il à haute voix.
« Et que serais-tu prêt à faire pour qu'il vive ? », demanda le fantôme avec une franche curiosité. Le frottement des écailles contre les pierres se fit encore plus fort, et Harry dût lutter contre l'envie de voir le Basilic. Ignore-le, ignore-le... Tonks s'en occupe... Sans quitter Jedusor des yeux, il fit encore quelques pas vers Cyrus et Ginny, s'obligeant à ne pas regarder sa cible et répondit doucement.
« Beaucoup de choses... »
« Intéressant, intéressant... beaucoup de choses ? Pas 'n'importe quoi' hein ? Tu es un petit malin, Potter... tu es capable de maîtriser tes émotions... enfin presque... Je sens à quel point tu dois t'obliger à le faire... mais à ton âge, c'est pas mal, c'est pas mal... un réel potentiel... » - commenta Jedusor sur un ton appréciateur. En parlant, il se rapprocha de lui comme pour mieux l'observer. Il ne s'était jamais encore éloigné autant du Journal auparavant. Harry sentit son cœur taper contre ses côtes comme s'il voulait en sortir. Maintenant ?
« Je suis là, Maître », siffla alors le Basilic très près d'eux. Jedusor se tourna vers le monstre.
« Te voilà mon ami ! »- lui répondit-il. « Tu vas bientôt être récompensé pour ta patience ! » Quittant le Fouchelangue, il invita Harry à le regarder. « Vois, Potter, vois l'arme de Serpentard ! Belle... vive... puissante ! Et vois comme elle m'obéit... »
Maintenant, songea Harry. Maintenant, il est trop loin pour m'arrêter... Il est occupé... maintenant... Alors qu'il glissait sa main sous sa robe pour saisir le petit poignard sacré des Aurors, il vit la patte arrière de Cyrus se tendre et frapper le petit volume comme pour l'envoyer vers lui. Mais le chien était trop faible pour être efficace. Harry eut peur que Jedusor voit le geste et qu'il intervienne mais il continuait à discourir sur la beauté et la fidélité des reptiles. Harry se jeta alors de tout son corps sur le journal et mit toute sa force et son poids dans la lame qui transperça les pages de droite avec difficulté. Une fumée verte et âcre s'en échappa.
Jedusor hurla presque immédiatement, se tenant le côté droit : « Tue ! »
Harry sentit le Basilic se dresser sur les dalles mouillées derrière lui. Il s'obligea à ne pas y prêter attention, dégagea le poignard de la partie droite du journal pour poignarder à plusieurs reprises la partie gauche du journal. La fumée verte s'épaississait, lui brûlant les yeux et la gorge. Un claquement et une lueur rouge s'écrasèrent entre lui et le Basilic, effrayant l'animal alors qu'il allait se jeter sur lui... Tonks, comprit-t-il... Tonks... Et la certitude l'envahit. Tonks ne le laisserait jamais. Elle avait juré. Et Harry sut aussi qu'il n'en avait jamais douté.
Il abaissa de nouveau de toutes ses forces l'athamé sur le parchemin magique... Les nouveaux hurlements de Jedusor déclenchèrent une nouvelle attaque du Basilic... De nouveau, la fumée s'éleva en panache. De nouveau, des éclairs s'abattirent derrière lui et un hurlement inhumain s'ajouta aux cris de douleur et de rage de Jedusor...
« Mes yeux, mes yeux », siffla le monstre, et Harry pour la première fois osa se retourner.
L'énorme reptile se contorsionnait, se frappant de douleur contre les dalles de marbre... Le fantôme de Jedusor avait pâli et hurlait sa colère et ses malédictions mais trop faiblement pour qu'elles s'imposent aux cris du reptile blessé. Harry se jeta une dernière fois sur le journal, déchirant les pages et la couverture de son poignard, dispersant les morceaux arrachés dans l'air comme s'il craignait qu'il se reforme de lui-même. Un dernier cri accompagna la dissolution du fantôme, audible cette fois parce que les rugissements du Basilic blessé s'étaient eux même atténués. L'animal semblait ne plus avoir même la force de se contorsionner. Ses flancs se levaient et s'abaissaient avec précipitation. Harry entendit alors des pas qui ne pouvaient appartenir qu'à une seule personne. Il entendit le dernier sortilège, celui qui mit fin à l'existence du monstre. Tremblant, il se tourna alors vers Cyrus et Ginny. L'Animagus avait disparu et Cyrus gisait livide en travers du corps de Ginny, diaphane à force d'être pâle, les bras ouverts en croix. Ils ne respiraient que péniblement.
Les larmes brûlantes qu'il avait retenues avec obstination se mirent alors à couler le long de ses joues et il s'avança vers eux hoquetant leurs noms. Des pas coururent vers lui. « Harry ! » Au moment, où il s'effondrait en larmes sur le corps de son frère, il sentit les bras de Tonks se refermer sur eux. « C'est fini... Harry... C'est fini... »
Oo
Cyrus se réveilla le dernier.
Et nombreux furent ceux qui virent là encore un signe de cette étoile qui semblait toujours le protéger dans ses aventures les plus impensables. Une étoile bienveillante et fidèle qui semblait une nouvelle fois donner à d'autres le soin des explications.
Quand il se réveilla, Tonks avait ainsi eu déjà cinq jours pour raconter et re-raconter à Remus chaque seconde passée dans le labyrinthe souterrain. Cinq jours pour justifier et re-justifier chacune de ses actions et de ses décisions. Cyrus ne se réveilla ainsi qu'après qu'elle ait convaincu Lupin qu'il devait se réjouir qu'elle ait suivi Harry... après qu'elle ait réussi à le persuader de cesser de chercher UN coupable au fait, qu'une fois de plus, il ait failli perdre tous ceux auxquels il tenait... ou alors de le chercher plus loin qu'à Poudlard...
Harry, qui s'était réveillé un jour après Tonks, avait lui aussi déjà passé les jours suivants à discuter et re-discuter avec leur père de sa décision. Et aussi de celle de Ron... Cyrus se réveillait donc bien après que Remus se soit convaincu que Harry et Ron avaient sans doute pris des risques mais qu'ils les avaient mesurés... N'étaient-ils pas allés chercher Tonks ? Il se réveilla surtout après que Lupin ait déjà singulièrement épuisé sur Tonks et Harry ses besoins de discussion et de mise à plat.
Cyrus attendit aussi pour se réveiller que Rogue ait presque publiquement « envisagé qu'il n'avait peut-être pas porté toute l'attention qu'elle méritait à l'initiative » de son frère et de son ami. Ces excuses détournées avaient amené les larmes aux yeux de Harry et donné envie, pour la première fois depuis longtemps, à Lupin d'étrangler son adjoint... Certains pensaient que la décision d'envoyer McGonagall le remplacer auprès de la délégation de Poudlard à Beaux-Bâtons tenait lieu de représailles en la matière... De fait, le maître de Potions avait adopté un profil étonnamment bas lors de la dernière réunion de l'équipe de Poudlard, acceptant sans discuter la version officielle de Lupin à l'Ecole : Ginny et Cyrus avaient trouvé « par hasard » l'entrée de la Chambre des secrets. Grâce à Mimi-Geignarde, Harry et le professeur Tonks les avaient retrouvés alors que le Basilic allait les dévorer... Bien sûr, il y avait peu de chance que les Malefoy y croient, mais ils ne devaient pas se sentir tout de suite menacés par d'éventuelles représailles.
Cette version cadrait avec l'image de casse-cou de Cyrus, et tout le monde l'adopta et félicita Harry de son courage. Le prestige de la jeune professeur de Défense contre les Forces du Mal en était sorti renforcé lui aussi. Une sortie honorable pour une crise qui aurait pu tourner au tragique.
Cyrus se réveilla deux jours après Ginny - soutenir l'énergie vitale de son amie et la sienne avait grandement entamé ses forces magiques, avait expliqué Mme Pomfresh avant d'assurer à Lupin que le garçon n'allait plus tarder à revenir à lui.
Quelle qu'en soit la raison, il avait ainsi attendu, assez heureusement pour lui sans doute, que Molly Weasley - et toute la tribu du même nom - aient cessé de craindre pour la vie de sa benjamine. Quand il se réveilla enfin, son amie avait déjà pleuré et sangloté auprès de tous les adultes présents que tout cela était SA faute à elle... qu'elle n'aurait jamais dû cacher si longtemps le journal et ses effets... qu'elle aurait dû savoir convaincre Cyrus de s'y prendre autrement... Elle avait remercié Tonks, Harry et son frère avec effusion avant de quitter le château pour se reposer pendant dix jours dans sa famille et donner aussi l'occasion à ses parents de discuter avec elle de son imprudence.
Bref quand Cyrus se réveilla, Remus s'était déjà pénétré de l'idée que les choses avaient été embrouillées pour ceux qui les avaient vécues et que les responsabilités en étaient diluées. A force de discussions, de nuits blanches et de longues marches dans la forêt, Lupin s'était doucement persuadé qu'ils avaient été tous victimes d'une machination - aggravée d'une série de mauvaises décisions... C'était sans doute mieux pour Cyrus, mais bien sûr celui-ci ne le sut pas immédiatement.
Quand Cyrus se réveilla enfin, il faisait nuit et ceci ne l'aida pas à comprendre où il était. Il se réveilla comme saisi par une crainte diffuse et inexpliquée, comme s'il s'était su poursuivi ou menacé. Pourtant l'obscurité autour de lui était tranquille et silencieuse. Sous ses mains, il sentit des tissus souples et doux et des couvertures chaudes, des barreaux métalliques et froids... Aucune de ces sensations ne l'aide à mieux saisir ce qu'il faisait là et pourquoi il ne savait pas où il était... La tête lui tourna, et il referma les yeux.
Dans une demi-conscience, il se demanda alors s'il savait qui il était. Et, sans le vouloir, il posa la question qui ne pouvait que déclencher un profond désarroi intérieur. Les images les plus diverses s'imposèrent et se retirèrent formant un sarabande infernale dans son cerveau fatigué. Il se vit très petit dans une immense maison où le plafond paraissait aussi lointain que les étoiles. Un autre petit garçon était assis à ses côtés et pleurnichait. Une femme sévère leur parlait de la noble et ancienne famille des... Mais une autre image s'imposait et il courrait joyeusement dans les rochers au soleil avec un garçon aux lunettes noires et un homme châtain, presque blond... Les rochers disparaissaient et étaient remplacés par une rue. Il courrait après un petit homme blond et la rue explosait... « Tu es Sirius Black », dirent tour à tour des voix sévères et joyeuses, aimantes et coléreuses, jeunes et vieilles.
« Tu es Cyrus Lupin », dirent de nouvelles voix – dont celle du garçon aux lunettes noires... Et puis un homme grand aux cheveux noirs s'imposa et dit : « Tu es Sirius Black et Cyrus Lupin, et tu ferais mieux de te réveiller... » Il rouvrit les yeux dans une sorte de transe alors qu'une main fraîche et sèche se posait sur son front.
« Allons, Cyrus, allons... calme-toi... tout va bien maintenant... » La lumière s'alluma à coté de son lit et il vit le visage de Poppy arrachée au sommeil. « Nous attendions tous ton réveil... ça va ? »
« Je dors depuis longtemps... ? » - s'inquiéta-t-il. « Les autres ? »
« Ça fait cinq nuits, Cyrus... Ginny va bien, ne t'inquiète pas, elle est déjà rentrée avec ses parents... » L'infirmière lui prit le poignet et commença à lui prendre le pouls. Il se laissa faire trop faible pour même y porter une attention quelconque. Ginny...
Le souvenir revint. La salle immense, glaciale et souterraine. Le fantôme de Voldemort jeune et son ignoble possession de Ginny. Ses efforts désespérés pour l'empêcher de la vider de toute énergie...
« Ginny », soupira-t-il. Il se demanda ce qu'elle avait dit pour expliquer... Qui les avait trouvés d'abord ? Et ses parents ? Qu'est-ce que Molly pouvait avoir dit ? Son angoisse diffuse prenait corps de manière inquiétante.
« Ton frère s'est en bien sorti lui aussi, presque aussi bien que le professeur Tonks », continua l'infirmière d'une voix apaisante. Elle avait maintenant sorti un pendule pour continuer son examen. Une partie du cerveau de Cyrus lui rappela qu'elle évaluait ainsi la qualité de son énergie magique. Le reste de son esprit fut totalement imperméable à cette information. « Un dur à cuire ton frère... » - ajouta-t-elle sur un ton où la critique n'était pas absente.
Harry ? Tonks ? De nouveau sa mémoire fatiguée lui proposait des images sans suite. Il vit Harry dresser face à Jedusor... une image floue en noir et blanc... il vit la lame brillante d'un couteau... Mais Tonks... ? Tonks était là aussi ? Le vertige le reprit devant les implications.
« Bon... tu es faible mais entier... Je peux te laisser alors et aller prévenir ton père ? »
« Mon père... » - répéta le jeune garçon d'une voix vide. Ces mots firent d'abord venir dans sa tête l'image étrange d'un très âgé sorcier, très lointain et très sévère... qu'il ne fallait jamais dérangé... certainement pas au milieu de la nuit... mais cette image-là se fit bousculer presque immédiatement... un homme châtain et mince, au visage fatigué s'imposa... Il avait parfois l'air intransigeant, mais ses yeux riaient souvent... près de lui il se sentait protégé et compris. Il hocha prudemment la tête.
« Aurais-tu un peu peur de sa réaction, Cyrus ? », s'enquit l'infirmière. « Et bien, c'est heureux de savoir que tu as quand même peur de quelque chose ! Le pauvre homme ! Vous le ferez mourir à force ! Quand je pense ! Même le professeur Tonks ! »
Elle s'éloigna en marmonnant quelque chose sur la patience proverbiale de Lupin... Cyrus fut quelque peu rassuré de se souvenir que l'homme châtain souriant s'appelait Lupin... comme lui...
OOO
Quand Remus arriva à l'infirmerie, Cyrus s'était de nouveau assoupi. Il ne l'entendit pas s'approcher, ni s'asseoir sur le bord de lit. Il ne vit pas l'inquiétude, l'agacement et l'amour qui se mêlaient dans ses yeux d'ambre. Il ne sembla non plus sentir la main qui repoussait les mèches noires de son visage. Mais quand ses lèvres se posèrent sur son front, il sursauta.
« Papa », souffla -il et il se raidit contre les oreillers, gardant un silence profond que Lupin ne rompit pas tout de suite.
« Je suis désolé de t'avoir fait peur », dit légèrement Remus.
Cyrus eut un tout petit sourire. Il imaginait confusément combien son père, lui aussi, avait dû avoir peur. Quand était-il rentré de Beaux-Bâtons ? Quand avait-il été prévenu ? Qui lui avait dit ?
« Je... » - commença-t-il, mais les excuses, les questions, les explications lui parurent dérisoires. Il savait maintenant qu'il avait fait la plus énorme bêtise qui soit, sans doute aussi énorme que les plus mauvais souvenirs que lui avaient légués Sirius, et il ne voyait qu'une issue logique à cela. Et il eut soudain très envie que la tempête vienne, maintenant, qu'elle l'emporte et qu'il en sorte trempé, secoué, mais lavé... - si cela était possible - de toutes ses omissions et ses mauvaises décisions. Il demanda donc plutôt nerveusement : « Qu'est-ce que tu attends ? »
Les yeux de Lupin s'agrandirent d'une vraie surprise : «Pardon ? »
« Qu'est-ce que tu attends... » - répéta l'enfant avec un air boudeur. « Tu sais bien...les 'combien de fois t'ai-je dit...', les 'n'apprendras-tu jamais...', et tout ça ! »
Sa main, qui s'était levé pour dessiner dans l'espace la longue suite des reproches qu'il attendait, se reposa avec épuisement sur les couvertures. Le ton était quand même moins bravache qu'il l'aurait voulu.
Remus prit un air pensif :
« Oh... tu te sens coupable, je vois... Décidément... Nous sommes nombreux dans ce cas... »
Il compta sur ses doigts :
« Voyons... Harry, Ron et Percy pensent qu'ils ont failli à leur rôle d'aîné protecteur... Tu apprécieras peut-être que les jumeaux se soient abstenus d'une telle prétention... » Un sourire fatiguée traversa son visage alors qu'il passait au second doigt : « Molly se sent coupable de ne pas avoir vu au delà de la fatigue et de la réserve de Ginny...Arthur aussi j'imagine... » Il agita alors son majeur doigt : « Ginny pense qu'elle aurait dû mieux résister...au journal, à toi, au fantôme... » En sortant son quatrième doigt, il ajouta : « Tonks pense qu'elle aurait dû traîner Rogue avec elle et Rogue, écouter Harry... » Sa paume entière était maintenant ouverte.
Il referma le poing et posa de nouveau ses yeux bleus pâles sur son fils. « Moi bien sûr, je n'arrête pas de me dire que je n'aurais jamais dû cesser une seconde de te surveiller comme du lait sur le feu... »
Cyrus déglutit. On y venait. Leurs deux regards s'affrontèrent en silence.
« Tu es en colère. »
« Ah, ça serait tellement simple la colère... » - soupira Lupin. « Je ne dis pas que quand tout le monde à commencer à me raconter... quand j'ai commencé à me rendre compte... je n'ai pas été tenté. » Il regarda gravement son fils avant de préciser : « Bien sûr, je pourrais assez facilement être en colère parce que tu ne m'as pas fait assez confiance pour me dire ce qui s'était vraiment passé avec Drago... mais finalement, je suis plutôt triste... Je pourrais aussi être en colère parce que tu es allé te jeter tête baissée dans ce souterrain avec Ginny ... Mais c'est presque finalement la décision que je comprends le mieux... En colère... » - répéta-t-il. Il eut un geste fataliste. « Je suis au-delà de la colère... »
Cyrus ne sut pas trop quoi faire de cette réaction inattendue.
« Et donc ? », insista-t-il. Il voulait bien croire que Remus ne hurlerait pas mais il ne pouvait pas vraiment croire qu'il allait tirer un trait aussi facilement sur des évènements aussi graves. Mais Lupin le surprit de nouveau en le prenant dans ses bras et le serrant contre lui.
« Je vais commencer par te serrer dans mes bras... longtemps » Cyrus ne résista pas, il enfouit son visage dans la poitrine de Remus, souhaitant presque y disparaître. « Comme un petit garçon que tu es... »
Un petit garçon ? N'était-il pas surtout une source d'ennui pour tous ceux qui l'aimaient ? Il sentit ses yeux le brûler alors que chacun des principaux acteurs de sa vie passaient sous ses paupières closes.
Remus... Remus, qui l'avait sauvé, qui l'avait adopté, qui le protégeait à chaque instant et à qui, il devait le reconnaître, il n'avait pas fait complètement confiance... Harry... son frère... Et ce mot suffisait... Harry qui était venu le sauver... Harry qui avait enduré par sa faute des cauchemars pendant des mois... Ginny... Penser à Ginny et à tout ce qu'il lui avait fait subir le rendait malade...
Tonks... Un instant dans son esprit le visage de la jeune femme prit les traits légèrement différents de Laelia Coelho... Cette mère virtuelle qu'elle avait incarnée quelques jours dans la forêt amazonienne ... Cette mère qu'il avait vu mourir devant lui dans l'incendie de cette maison qu'on lui avait appris à considérer comme sa maison de naissance... Les effets de l'hypnose avaient beau s'être atténués avec le temps, Tonks avait beau être quelqu'un de différent de Laelia... Il savait que dans son cœur, il l'associait encore à cette image maternelle et aimante... C'était sans doute la raison pour laquelle il s'était si vite attaché à elle quand elle avait commencé à s'ancrer dans leur quotidien. Bien plus facilement que Harry, il le savait. Et maintenant Tonks l'avait sauvé... une nouvelle fois...
Il ne savait pas ce qui s'était passé mais il ne se sentait pas le courage de demander. Il n'avait pas encore envie de savoir ce que Harry et Tonks avaient pu endurer. A cause de lui. Il se blottit plus encore contre son père et soupira. Il aurait voulu que Tonks aussi soit là...
« Pardon », chuchota-t-il.
« Comme un tout petit garçon imprudent », répondit Remus sur le même ton.
« Je suis désolé », hoqueta Cyrus, des larmes brûlantes dégoulinant sur ses joues..
« Comme un petit garçon qui a dû avoir très peur. »
Le jeune garçon frissonna, incapable de mettre des mots sur ses sentiments.
« Comme un petit garçon que j'aime », termina Remus, et Cyrus ne sut rien répondre d'autres que : « Papa... »
L'infirmière s'avança alors vers eux.
« Professeur... » - chuchota-t-elle et leur tendit un gobelet métallique que Lupin prit.
« Ensuite, je vas m'assurer que tu prennes bien tout ce que Poppy te demandera de prendre » - dit Remus comme s'il avait toujours pensé que ce serait la suite logique de ce qui avait précédé.
Cyrus prit le gobelet sans rien dire mais ne le but pas.
« Allez... j'ai besoin que tu sois en bonne santé... » - insista encore Lupin. Ses yeux brillaient étrangement dans la lueur douce des veilleuses magiques de l'infirmerie.
Cyrus aurait bien voulu ne pas craquer le premier parce qu'il était sûr que le plus important n'avait pas été dit. Tout ce qu'il savait de Remus le hurlait. Mais il n'était vraiment pas en état de résister au silence moqueur de son père. Il but le gobelet et lui rendit en murmurant :
« Pourquoi ? »
Les yeux bleus pâles s'animèrent d'une lueur encore plus curieuse qu'auparavant :
« Pour qu'on règle nos comptes... Cyrus... pour qu'on règle nos comptes...»
OOOOo
La suite s'appelle assez logiquement : « Compte de Loup »... en ligne mardi prochain, juré, craché...
