Milady2 : Et oui, mais il va avoir du mal à sourire notre louloup, mais bon, on sait tous que ça va s'arranger -)
Strawberry : Pour répondre à ta question, je te renvoie à la fin de ce chapitre. En effet, il s'agit bien de cette citation, je la trouvais de circonstance (et en plus, même si c'est pas très gai, j'adore cette citation.) Et je continue… lol
Chapitre 9 : Soit comme un loup blessé…
Les cours de la semaine avaient démontré aux professeurs et autres élèves que Sirius et James étaient aussi brillants qu'indisciplinés, et ce dans toutes les matières, sans exception. Des professeurs d'ailleurs moins conciliants que Flitwick avaient mis en garde les deux perturbateurs de sanctions terribles s'ils ne se calmaient pas, mais ces menaces volaient très hauts au-dessus de leur tête et le corps enseignant ignorait encore qu'il n'était qu'au début d'une longue et pénible période de chasse vis-à-vis de ces futures têtes brûlées.
Ce n'était pas le cas d'une certaine jeune fille à la chevelure rougeoyante qui observait les moindres faits et gestes de ses camarades sans en avoir l'air. Elle sentait en ses condisciples la flamme de la jeunesse, plus vive qu'en n'importe qui d'autre. Elle savait que leur vivacité et leur culot n'avaient ou n'auraient pas de limite et que les braises dormant au fond d'un certain jeune garçon aux yeux mordorés ne demandaient qu'un souffle pour se raviver et ronfler comme les feux de l'enfer.
- Incroyable Lily ! T'y es arrivée du premier coup ! s'exclama Tara avec ravissement.
En plein cours de métamorphose, le cri de Tara fit se retourner les têtes des Gryffondor et Serdaigle réunis et Lily rougit au point de faire de la concurrence aux cheveux de son amie.
- En effet mademoiselle Evans, votre transformation est très réussie, constata le professeur McGonagall en montrant au reste de la classe l'aiguille qu'elle avait obtenue à partir d'une allumette. Je donne dix points à Gryffondor.
- T'es trop douée, ma Lily, s'enthousiasma Tara lorsque McGonagall s'éloigna pour passer dans sa classe.
- Oh… Euh… Ce n'est pas si bien, souffla Lily, plus confuse que jamais. Et puis tu y arrives presque, toi aussi.
- Presque ! releva Tara. C'est toute la différence ! Ma chère Lily, laisse-moi te dire que tu es destinée à devenir une grande sorcière… même si tu l'es déjà, ajouta-t-elle après un instant de réflexion.
- Arrête Tara, elle va finir par fondre tellement tu la fais rougir, rigola Morine Jonhson, une Serdaigle.
- Bah ! Faut dire ce qui est ! T'en dis quoi Fiona ?
La jeune Gryffondor haussa timidement les épaules.
- C'est vrai que tu es douée Lily. Et moi qui n'arrive qu'à lui faire prendre une couleur argentée, soupira la fillette en regardant son bout de bois.
- Fais voir comment tu t'y prends ? demanda Lily en perdant son air embarrassé, prête à l'aider.
Lily décida d'aider ceux autour d'elle à mieux maîtriser ce sort sans que personne ne remarque l'air fier et attendri de Tara, qui savait se faire très discrète.
En parlant de discrétion… Une brusque explosion retentit puis des rires fusèrent de l'autre côté de la classe. James Potter et Sirius Black, pliés en quatre, riaient comme des bossus alors qu'un Serdaigle était figé dans un geste pour prendre quelque chose, le visage noir de suie.
- Messieurs Black et Potter ! Qu'avez-vous fait ?
- Rien madame, on voulait tenter une expérience et Hargow s'est un peu trop approché de nous, répondit James entre deux rires.
Tara se tourna vers Remus, qui se mordait la lèvre inférieure afin d'éviter de rire. Un court moment, leurs regards se croisèrent et le jeune garçon baissa aussitôt la tête, n'ayant plus du tout envie de rire.
« Qu'est-ce que tu caches, Remus Lupin ? songea Tara. Je sens que ça me saute aux yeux, alors pourquoi est-ce que je ne trouve pas ce qui cloche chez toi ? »
- Cinq points en moins chacun ! s'écria la voix de McGonagall. Monsieur Easton, veuillez conduire M. Hargow à l'infirmerie pour soigner ses brûlures.
- Oh non ! Les dix points que tu as gagnés s'envolent, soupira Millea Stimpson, une Gryffondor blonde aux yeux gris clair.
A la fin du cours, les filles sortirent en discutant gaiement de ce premier cours de métamorphose, Tara dansant à côté d'elles sur une musique inaudible aux autres. Une seconde avant que ça n'arrive, une vague de grésillements traversa son cerveau et tout disparut autour d'elle.
Elle flottait dans un espace vide et un chant étrange s'élevait. Une licorne apparut devant elle et s'ébroua avant de se mettre à ruer. La créature mirifique s'effilocha alors en des volutes de fumées qui ne tardèrent pas à s'enrouler les unes dans les autres pour former cinq baguettes étincelantes qui se soudèrent en étoile et commencèrent à tournoyer. Elles allaient si vite que Tara n'aperçut bientôt plus qu'un disque flamboyant au centre duquel apparut le plus beau phénix qu'elle eut jamais vu. Mais il y avait quelque chose d'étrange dans cet oiseau légendaire, il était trouble, un peu comme si… il lui apparaissait dédoublé…
- Tara ! Tara ! Mais réponds-nous !
Elle secoua brusquement la tête et regarda avec innocence les quatre filles qui l'observaient, une inquiétude visible peignant leurs visages.
- Qu'y a-t-il ?
- Qu'y a-t-il ? répéta Océane Runaway, une brune aux yeux mauves, stupéfaite. C'est à nous de te demander ça ! Tu t'es arrêtée tout à coup et tu ne nous as pas répondu pendant près d'une minute !
- Oh ça ! dit Tara en balayant la question d'un geste de la main. Je réfléchissais à quelque chose, c'est tout. Waah ! Z'avez vu l'heure ? Si on va pas en cours, Fitevil va être furax !
Elle courut en avant tout en interpellant de ci de là certains élèves et Millea se frotta l'arrête du nez en secouant la tête.
- Je sens qu'on va en voir de toutes les couleurs avec elle, soupira-t-elle.
Lily, elle, ne répondit rien, la mine songeuse, elle suivait ses amies en regardant les reflets rouges qui ondoyaient devant elles et ne cessa d'observer Tara à la dérobée pendant le cours de défense contre les forces du Mal.
« C'est qu'elle est maligne en plus », pensa Tara en souriant intérieurement, parfaitement consciente du regard que posait Lily sur elle.
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Cela faisait près d'un mois que les cours avaient commencé, un mois que Remus évitait autant que possible ses trois camarades de dortoir, et il avait pu se rendre compte que ce n'était pas chose facile, loin de là.
D'abord, il était évidemment forcé de les retrouver dans le dortoir, le soir, aussi s'arrangeait-il toujours pour s'y trouver avant les trois autres et faire ainsi semblant de dormir lorsqu'ils arrivaient, et comme il était toujours le premier levé, il ne les croisait pas jusqu'au premier cours de la matinée, mais dans la journée, c'était une autre paire de manche.
Si Remus avait dû résumer le comportement de ses condisciples par un unique mot, il aurait choisi "harcèlement". Où qu'il aille, à quelle qu'heure que ce soit, il tombait systématiquement sur eux, même en dehors des cours. Remus était persuadé qu'ils s'étaient donnés le mot et que James était l'instigateur de tout cela. Peter n'avait pas l'air d'un meneur et Sirius se s'était pas intéressé à lui dés le départ, donc seul James avait pu les entraîner dans cette combine.
« Et tout ça à cause, encore, de ma sale habitude à me fourrer dans les affaires des autres, songea amèrement Remus, assis dans la salle commune, en retrait. J'aurai pu passer mon chemin, mais non ! Il a encore fallu que je vienne aider ! Je comprends mieux pourquoi le Choixpeau m'a mis à Gryffondor. »
- Hey ! Remus ! Regarde un peu ça ! Un parfait sortilège de lévitation combiné à un petit sortilège d'ouverture et…
Sous l'influence de James, une boîte vola jusqu'au milieu d'un groupe de seconde année en pleine discussion et l'Alohomora de Sirius la fit s'ouvrir brusquement, déversant un liquide visqueux sur les jeunes gens, qui se retournèrent avec fureur vers les deux coupables.
- Mais vous allez arrêter de… commença une fille avant de pousser un cri et de se mettre à se frotter avec vigueur.
- Ça gèle ce truc ! s'exclama un garçon avant de se précipiter devant la cheminée en essuyant le plus rapidement possible le liquide, vite suivi par les autres.
- Un petit gel gelant, dit James en adressant un clin d'œil à Remus.
« C'est pas vrai ! C'est une glu ce mec ! s'énerva Remus intérieurement. Va faire mumuse ailleurs, j'ai pas envie de te parler, tu le sais pourtant ! »
- Tu fais quoi ? demanda le brun en s'avançant vers lui.
Remus fronça les sourcils et se pencha un peu plus sur son devoir de potion. James y jeta un coup d'œil.
- De la bave de bigorneau, pas d'ormeau. Sinon, ta potion va devenir légèrement imbuvable.
Il le regarda un instant puis son parchemin, remarquant qu'il avait raison.
- Merci, grommela-t-il en corrigeant la faute.
- Ouais, j'ai remarqué que c'était pas ton fort, les potions, continua James alors que Sirius allait s'asseoir de l'autre côté de Remus.
- Moi non plus, remarqua Peter en faisant une moue.
- Oui, mais bon, toi, t'es mauvais partout, dit Sirius en haussant les épaules.
Peter rougit et baissa la tête.
- C'est justement pour s'améliorer qu'on est ici, ne put s'empêcher d'intervenir Remus, trouvant la remarque de Black assez déplacée.
Gardant les yeux baissés sur sa copie, il ne capta pas le regard victorieux de Sirius, ni le sourire amusé de James.
- Ben toi, ça va. Tu participes pas beaucoup en classe, mais t'as l'air doué quand même, d'après les notes que t'as eu.
- Surtout en défense contre les forces du Mal, on dirait que tu aimes bien cette manière, poursuivit Sirius.
- Je… C'est intéressant, murmura Remus, qui commençait à trembler.
Il se sentait nerveux, très nerveux. Dans deux jours, ce serait la pleine lune, et le loup prenait déjà de l'emprise sur lui, mais c'était autre chose… Il était moins présent au fond de lui, la créature se terrait plus qu'à l'ordinaire, sans que le garçon en saisisse la raison. Non, en ce moment, le problème était qu'il avait peur.
A force de le surprendre à tout bout de champ, de s'accrocher pour tenter de se lier avec lui, Remus ressentait un profond élan de sympathie vis-à-vis de ses trois camarades. Il avait envie de répondre à leurs appels, envie de discuter avec eux, de plaisanter et de rire de leurs blagues, mais il avait peur de ce qu'il en résulterait. Remus n'avait jamais été aussi perdu. Cela faisait quelques jours qu'il se livrait un combat mental pour savoir s'il devait, ou non, devenir ami avec eux.
Juste pour une fois, se laisser entraîner dans l'insouciance, être comme un garçon de son âge, en avait-il le droit ? Lui, un monstre ? Pouvait-il avoir une vie normale ? Bien sûr que non, mais il pouvait s'en approcher. Cependant, il ne voulait pas souffrir, il ne le voulait plus. Il avait depuis longtemps oublié ce que signifiait la confiance envers les autres.
- … parce qu'on savait déjà le faire, alors on en a appris un peu plus.
Remus leva la tête vers James, il n'avait pas entendu un traître mot du début de sa phrase.
- Faut dire aussi qu'on s'ennuie un peu en cours, soupira Sirius. Heureusement qu'on se documente un peu sur des sorts plus complexes.
D'accord, ils s'avançaient sur le programme, comprit Remus.
- Et vous avez appris quel genre de sort ? demanda Remus en oubliant un temps sa décision de ne pas suivre la conversation.
- Un peu de tout, on n'est pas très sélectifs, avoua James avec un geste vague. Tu veux essayer avec nous ?
- Ce serait… commença Remus avant de s'interrompre. Euh… non… non merci, ça va… Excusez-moi, je vais me coucher. Bonne nuit.
Il rangea précipitamment ses affaires et se dirigea vers l'escalier.
- T'avais raison, James, on va finir par l'apprivoiser, notre mur ambulant, entendit-il Sirius dire grâce à son ouïe plus développée du fait de la proximité de la pleine lune.
Il se mit en pyjama et s'assit sur son lit, les bras autour des genoux et sa tête reposant dessus. Ainsi, il avait vu juste, les trois autres Gryffondor avaient bel et bien élaboré un plan pour le faire céder. Il était la victime d'un véritable complot.
Il repensa aux lettres que ses parents lui avaient envoyés, comme quoi ils étaient fiers de son admission à Gryffondor, ils espéraient qu'il se sentait bien à Poudlard et qu'il s'était fait des amis, s'inquiétant de sa santé. Dans ses réponses, Remus n'avait fait que mentir : « J'espérais bien aller à Gryffondor et je suis très heureux que ce soit le cas… Poudlard est magnifique, je m'y sens comme chez moi…Je m'entends très bien avec mes camarades de dortoir et nous rigolons bien ensemble…Ne vous inquiétez pas, je ne me suis jamais senti aussi bien… » Pour les rassurer, pour qu'ils sourient et qu'ils s'imaginent que leur fils vivait enfin comme ils souhaitaient qu'il vive, tout simplement dans la joie.
Apprivoiser… Remus frissonna : Sirius n'imaginait pas à quel point le terme était approprié pour la bête qu'il deviendrait bientôt. Déjà, on aurait presque pu croire que la pleine lune était arrivée tellement sa clarté était forte mais Remus savait que ce serait pour dans deux nuits. Après-demain, il passerait sa première transformation à Poudlard, et cette perspective le terrorisait.
Flap ! Flap !
- Aaaaah !
Remus eut un mouvement de recul pour éviter la forme sombre qui l'attaquait et tomba au bas de son lit. James, Sirius et Peter entrèrent à se moment dans le dortoir et restèrent un instant surpris avant que James éclate de rire.
- Falke ! Laisse Remus tranquille petite peste ! lança-t-il affectueusement.
La roussette retourna vers son maître puis fit un virage serré et alla se pendre sur le baldaquin de Remus.
- C'est quoi ça ? s'étonna Peter.
- Elle s'appelle Falke, c'est ma chauve-souris. Mes parents ne voulaient pas que je l'emmène, mais on dirait que je lui ai manqué. Elle est intelligente d'avoir trouvé le chemin toute seule, ajouta-t-il, les yeux brillants de fierté.
- Une roussette, hein ? demanda Remus en se levant et en s'époussetant, mécontent de s'être ainsi effrayé.
- Ouais, et on dirait qu'elle t'aime bien, Remus, ajouta James en gloussant.
En effet, Falke était redescendue du baldaquin et s'agrippait maintenant au pyjama de Remus. Confortablement installée, elle commença à faire sa toilette.
- Tu pourrais pas la rappeler ? demanda Remus, de mauvaise humeur.
- Oh non ! rigola James. Vous êtes trop mignons tous les deux, un vrai petit couple.
Les larmes aux yeux, James était explosé de rire et Sirius n'était pas dans un meilleur état. Peter avait placé sa main devant sa bouche pour se retenir, les yeux fixés sur la chauve-souris qui, maintenant sa toilette finie, donnait des petits coups de langue à la main de Remus, qui tentait désespérément de la décrocher.
Au final, Remus ne put s'en empêcher et rejoignit les trois autres dans leur fou rire. Pendant quelques minutes, le quatuor fut incapable de prononcer la moindre parole tellement ils riaient et la roussette finit par aller se pendre au luminaire, énervée par tout ce bruit, lançant des regards offensés aux jeunes gens, qui ne firent qu'alimenter leur hilarité.
A bout de souffle, ils finirent par se calmer et James adressa un clin d'œil à Remus.
- Je savais bien que tu pouvais rire, remarqua-t-il malicieusement.
- Tu devrais le faire plus souvent, ajouta Peter, tout sourire.
La bouche à demi ouverte, les yeux grands ouverts, Remus fixait les trois autres avec incrédulité. Décidément, ses compagnons de dortoir étaient de drôles de phénomènes.
- Oui, sans doute, répondit-il enfin en laissant son regard dérivé vers la lune qui apparaissait derrière la fenêtre.
Un silence s'installa puis il souhaita bonne nuit aux autres et ferma les rideaux de son lit. C'était la première fois, depuis plusieurs années, qu'il riait de la sorte, il en avait oublié les sensations. Sans prévenir, des larmes coulèrent sur sa joue et il se recroquevilla sur lui-même en sanglotant. Il ne savait même pas pourquoi il pleurait, mais lorsqu'il s'endormit, une heure plus tard, il se sentait beaucoup mieux.
o
- Tu manges pas ce soir ? s'étonna James en voyant Remus passer devant la Grande Salle sans y entrer.
- Non, je… je ne me sens pas très bien, je vais aller voir Mme Pick.
Il s'éloigna d'un pas rapide pour pallier à toute question embarrassante. Depuis le soir où la roussette de James avait fait son apparition, Remus se montrait beaucoup moins froid avec ses camarades, tout en gardant néanmoins ses distances. Il leur était reconnaissant de l'avoir fait rire autant, mais il ne savait toujours pas s'il était prêt à accepter leur amitié. Le terme lui semblait si utopique…
- Ah ! M. Lupin, vous voilà, l'accueillit l'infirmière. Ça va aller ? Pas de signes inquiétants, des différences ?
« Signes inquiétants : j'ai l'impression qu'une bête grogne dans ma tête différence : je suis un loup-garou. »
- Tout est normal, Mme Pick, répondit Remus en baissant les yeux.
- Bien.
Il sentit une main se poser sur son épaule et capta le timide sourire se l'infirmière, assez surprenant chez elle. Elle retira sa main et attrapa une cape.
- Venez, suivez-moi.
Elle l'entraîna au fond de l'infirmerie et ils sortirent par un passage secret qui les amena de l'autre côté du château, ils durent faire le tour pour arriver jusqu'à l'entrée d'un tunnel, perdu au milieu de l'herbe.
- Le loup-garou pourrait sortir, remarqua Remus, la peur revenant dans ses entrailles.
- Il ne pourrait pas ouvrir la porte, lui assura Mme Pick.
- Le professeur Dumbledore aurait dû attendre que l'arbre soit livré, murmura l'enfant, au bord de la panique. C'est facile d'y entrer.
L'infirmière l'attrapa par les épaules et le regarda sévèrement.
- M. Lupin, personne ne s'aventurera ici cette nuit, d'accord ? Quant au saule, il arrivera dans quelques jours, alors arrêtez de vous faire du mauvais sang !
- Oui, madame, répondit Remus, aucunement rassuré.
Il sentit la main de l'infirmière trembler et comprit pourquoi en remarquant que le soleil descendait de plus en plus.
- Allons, nous devons nous dépêcher, dit-elle en le pressant vers l'avant.
Ils marchèrent un long moment dans un tunnel étroit puis débouchèrent à l'intérieur d'une cabane sommairement meublée.
- Le passage est bloqué magiquement, ainsi que les fenêtres et les portes. Je viendrais demain matin vous chercher.
Elle hésita un instant puis lui adressa un faible sourire.
- Bon courage, mon enfant.
Du courage ? En ce moment, Remus n'en avait pas une once dans les veines. Il était terrifié, terrorisé, mais il n'avait pas le choix, il ne pourrait pas y échapper. Remarquant un escalier, il monta à l'étage et pénétra dans la chambre où se trouvaient juste un lit et un placard vide. Il referma la porte derrière lui en la refermant à double tour puis fit glisser la clé sous la porte. Malgré tout ce que Mme Pick avait pu lui dire, il préférait prendre toutes les précautions.
Puis il s'assit dans un recoin de la pièce et attendit, tremblant.
Les derniers rayons du soleil frappèrent les persiennes de la cabane, s'infiltrant entre les lattes apposées aux fenêtres pour venir zébrer d'or le mur de la chambre. Remus laissa son regard se perdre dans les lignes dorées qui apparaissaient à travers la poussière en suspension de la pièce. Dernier espoir avant la nuit, il aurait tout donné pour capturer ces ruisseaux de lumière et les garder auprès de lui pour l'éternité.
Par réflexe, il leva la main pour saisir la raie lumineuse mais ses mains ne se refermèrent que sur du vide et tout fut bientôt plongé dans la pénombre. L'enfant avait peur, plus que d'habitude. Le lieu avait changé, les règles aussi, mais le loup, lui, était toujours le même.
Un nouveau rayon perça la barrière de bois et Remus se recroquevilla, la respiration tremblante. Le loup était là, tout près de lui, cela faisait trois jours qu'il le sentait prendre son emprise et son heure était venue.
Il ne vit pas l'intensité de l'argent augmenter alors que la lune entamait sa lente ascension déjà, ses sens se déboussolaient, ses yeux se brouillaient et la douleur ne tarda pas à faire son apparition.
Son sang devint glace et se figea dans ses veines avant de se transformer en une lave ardente qui embrasait son être jusqu'à la moelle. Ses os se tordirent et fusionnèrent, s'allongèrent en des crissements insupportables, se brisèrent puis se soudèrent tandis que ses muscles s'étiraient jusqu'à l'écartèlement et qu'un essaim de guêpes s'attaquait à sa peau.
L'humain poussa un dernier cri d'agonie qui devint grognement bestial lorsque le loup prit entièrement possession de son corps. Douleur, le loup s'y était habitué, enfermement, ça ne changeait pas sauf… une différence. L'odeur de la peur était plus présente que jamais, celle de l'humain, mais lui n'était pas là, où se cachait-il ? Réalisation, il n'était pas où il aurait dû se trouver, ce lieu lui était totalement inconnu, ses sons, ses odeurs. Comment était-ce possible ? On avait osé l'amener hors de son territoire.
L'odeur de la peur, l'odeur de l'inconnu et la rage emporta le loup-garou. Il se rua contre un pan du mur et le heurta avec fracas. Différence, la douleur, plus intense, plus vive, du sang qui coule dans sa gueule.
Sang, chasser, tuer. La créature a envie de sang et de meurtre, elle a besoin de chair. Elle se lancer une nouvelle fois contre le mur, puis une autre, complètement folle et désorientée. On lui a retiré son territoire, elle fera de celui-ci le sien, elle le marquera à la force de ses crocs et à la puissance de ses griffes.
Un craquement, le monstre se jette une fois de plus contre la porte, brisure, la porte est intacte, les os sont en miettes. La souffrance est présente mais le loup-garou n'y prend pas garde, sa patte avant droite pendante, il pousse un hurlement terrifiant.
L'humain est là, il sent son odeur, quelque part, tout près, sur lui… Alors, sans hésiter, la créature referme sa gueule sur sa patte blessée, arrachant une partie de sa chair. Ses griffes vont trouver son torse et creusent dix sillons formant une croix tandis que le loup rugit de douleur.
Un mouvement brusque, il tourne sur lui-même à une vitesse folle avec colère puis attrape sa cuisse entre ses crocs, griffe avec violence ses bras, son dos, fait gicler le sang sur les murs de la cabane, il dégouline dans sa gueule, l'excite de plus en plus dans sa violence et sa bestialité. Il cherche l'humain sur lui, l'humain en lui, il veut sentir sa chair, la lui arracher et s'en repaître.
Les hurlements et automutilations durèrent plusieurs heures, jusqu'à ce que le loup-garou s'écroule au sol, le souffle court et enragé, épuisé. Son corps n'est plus qu'un amas de sang séché et de chair mise à vif. La seule partie de son corps encore intacte est sa tête, seul endroit où l'humain n'était pas présent durant la nuit, ou alors si discret, si insignifiant, qu'il n'y prend plus garde depuis longtemps.
Après quelques temps, le chant d'un oiseau traversa la brume matinale et une pâle lueur pénétra dans la chambre. Le processus de transformation s'inversa, toujours la même douleur, toujours la même souffrance, mais cette fois, c'était à l'humain d'y faire face.
Remus voulut crier mais tout son corps lui faisait mal et il n'avait même pas la force d'ouvrir la bouche, alors il endura en silence le supplice, des larmes roulant sans retenue sur ses joues. Une différence, encore, lorsque la transformation fut finie. Plus de mal, plus de torture, le loup s'était tu mais ses mutilations avaient été pires que d'habitude. L'enfant ne pouvait pas le supporter, il sombra dans l'inconscience, mais même au-delà la douleur se faisait ressentir, lui rappelant que jamais il n'aurait de répit.
Il s'éveilla en sentant une brusque montée de la douleur et, cette fois, hurla, augmentant par la même la souffrance de ses côtes brisées. Une voix chuchota, non loin, mais il était incapable de la comprendre. Quelqu'un lui versa un liquide dans la bouche mais sa gorge sèche formait un barrage et il faillit s'étouffer. Finalement, quelques gorgées passèrent dans son corps et il ne sentit absolument plus rien, comme s'il n'avait plus de corps. La sensation était si agréable, il n'avait même plus le sentiment de respirer. Il se laissa délicieusement glisser dans cette demi-mort, il aurait voulu ne jamais en sortir.
Lorsqu'il se réveilla pour la seconde fois, il avait l'impression que seulement quelques minutes étaient passées car la lueur qui traversait les fenêtres de la pièce était celle de l'aube. Il mit un moment à comprendre qu'il se trouvait à l'infirmerie, dans un lit entouré d'un rideau. Il cligna des yeux et voulut se redresser mais retomba immédiatement, vaincu par la douleur.
- Ne bougez pas M. Lupin. Vous avez beau avoir dormi toute une journée, cela ne suffit pas à réparer les blessures de votre corps.
Toute une journée ? Alors un jour était passé depuis son précédent réveil ?
- Combien voyez-vous de doigts, M. Lupin ?
Remus se força à se concentrer sur la main de l'infirmière.
- Trois, murmura-t-il, réveillant une douleur à ses côtes.
- Bien. Les cicatrices ont toutes disparu, mais certaines resteront, comme vous le savez. Vous avez eu plusieurs côtes brisées, elles sont en train de guérir et… Votre bras et votre cuisse redeviendront normaux d'ici demain.
Il tourna difficilement la tête vers le bras qui le lançait et aperçut le trou qui s'y trouvait sous la marque des crocs. Mme Pick lui détourna la tête.
- Je suis obligée de laisser votre peau à l'air libre pour que la potion agisse. Ne vous inquiétez pas, ça guérira. Mais je ne peux vous donner une plus forte dose de potion de blocage des sens, cela annulerait les effets de celle de régénération. M. Lupin… Toutes vos transformations sont-elles aussi… ?
Elle ne termina pas sa phrase et Remus ferma les yeux.
- Non, souffla-t-il.
Non, ça n'était pas aussi terrible d'habitude, mais le loup avait été déboussolé par son nouvel environnement et s'en était lui-même fait payer le prix. Il sentit la main de l'infirmière sur son front puis ses pas s'éloignèrent. Il pensa à ses parents, il espérait que le directeur ne les préviendrait pas de la violence de sa transformation, il espérait pouvoir leur faire croire que tout s'était passé comme d'habitude.
Il serra ses yeux encore plus fort pour pouvoir mieux supporter la douleur induite par la potion de régénération. Tout cela ne s'arrêterait donc jamais ?
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Le lendemain, il se rendit à son deuxième cours de la journée et évita les regards insistant des autres élèves en s'asseyant le plus loin possible d'eux, mais il savait qu'il n'échapperait pas à un interrogatoire en règle.
Et en effet, dés que la cloche eut annoncé la fin du cours, ils se précipitèrent vers lui.
- T'étais passé où ? Nom d'un crapaud ! Quelle mine tu as !
Ses yeux étaient soulignés par d'immenses cernes noirs et il tremblait légèrement de fatigue. Ils sortirent de la salle de cours et Remus leur sortit l'excuse à laquelle il avait pensé.
- Moi ça va, j'ai juste veillé pratiquement tout le week-end.
- Pourquoi ça ?
- Ma mère est très malade, les guérisseurs ne savent pas s'ils pourront faire quelque chose, et elle a fait une crise dans la nuit de vendredi à samedi. J'ai dû aller la rejoindre.
« Pardon maman. »
- Tu ne nous avais pas dit que ta mère était malade.
- Je ne vois pas pourquoi je l'aurai fait, répliqua-t-il, sur la défensive.
- Peut-être, mais nous, on s'est inquiété, remarqua James, et McGonagall a rien voulu nous dire quand on l'a questionnée.
- Vous… vous êtes allés vous renseigner à mon sujet ? balbutia Remus en stoppant net.
- Ben oui, puisqu'on te trouvait plus, répondit Peter.
- C'est si surprenant que ça qu'on s'inquiète pour toi ? demanda Sirius en haussant un sourcil.
- Oui, murmura Remus. Je ne le mérite pas.
- Non mais qu'est-ce que tu racontes ! s'exclama James, ulcéré. Pourquoi tu le mériterais pas ? C'est pas parce que tu es un sacré solitaire idiot de première qui voit même pas le mal qu'on se donne pour lui arracher un sourire ou une parole qu'on t'apprécie pas.
- Bravo James, joli petit discours, commenta Sirius avec un demi sourire.
- Tu sais Remus, ajouta Peter, t'as pas à avoir peur de nous. On veut juste… on veut juste être tes amis.
Remus les regarda, sentant les larmes lui monter aux yeux. Il ouvrit la bouche et…
- Wahow ! C'est les démons de minuit les mecs (1) ! s'écria une Tara Milten survoltée en sautant sur Remus avant de se déhancher et tourner sur elle-même.
- Quoi ? demanda James en la regardant avec des yeux ronds.
- Pff ! Aucune connaissance moldue ! soupira Tara. Ça c'est de la musique, vous devriez essayer les gars !
- Moi j'adore ! confirma Lily. Ce groupe est excellent !
Les filles les entraînèrent dans leur conversation et Remus sourit intérieurement. Finalement, il avait bien le droit de se laisser aller. Il fallait juste qu'il soit prudent et fasse de son mieux pour que personne ne découvre son secret. Démon de minuit ? Sans doute cela le caractérisait-il, il faudrait qu'il demande à Tara de lui faire écouter.
(à suivre…)
(1) : Enorme parachronisme entièrement voulu ! La chanson « Les Démons de minuit » du groupe « Image » date de 1986 ! Mais je trouvais qu'elle se prêtait bien à la situation rapport à ce qu'elle raconte et de la remarque que je fais faire à Remus à la fin lol, et puis j'ADORE cette chanson -) (quand je vous disais que vous deviez sans arrêt m'excuser ! lol)
« J'ai besoin
De trouver quelqu'un
J'veux pas dormir
Je cherche un peu de chaleur
À mettre dans mon coeur
Ils m'entraînent au bout de la nuit
Les démons de minuit
Ils m'entraînent jusqu'à l'insomnie
Les fantômes de l'ennui »
Le titre du chapitre : « Soit comme un loup blessé qui se tait pour mourir, Et qui mord le couteau, de sa gueule qui saigne » Leconte de Lisle, Poèmes barbares.
Rien à voir avec des idées suicidaires ! Mais Remus souffre en silence pour ne pas attirer l'attention et préfère la solitude pour songer à ce qui peut s'apparenter à une "demi-mort" (du moins tant qu'il restera seul -) )
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Notes diverses (par rapport au Miroir de Parenze) :
° Non, Tara n'a pas le pouvoir d'empathie, contrairement à ce qu'on pourrait penser lorsque j'écris certains passages. Son pouvoir de voyance l'a juste dotée d'un sixième sens et le lien magique qui la relie aux quatre autres augmente sa perception vis-à-vis d'eux (bien que ce sixième sens puisse s'exercer sur les autres, elle est juste plus réceptive à Remus et Cie). Néanmoins, ce sixième sens est effectivement une sorte de genèse du pouvoir qu'aura Séléné (en fait, c'est la raison pour laquelle ce pouvoir disparu se réveille. Séléné n'héritera pas le don de voyance de sa mère mais juste les impressions qui y sont liés, les décuplant par la même et révélant le pouvoir d'empathie.) Voilà pour la petite info qui éclaire les lanternes -)
° Souffre Gerald Hargow ! Autant Peter, je me dois de rester impartiale vu que c'est pas mon perso, autant je peux faire vraiment ce que je veux de ce crétin première classe avec mention. (… que j'ai inventé... vilaine moi ! .)
