Promesses tenues –

Disclaimer: JKR les créa. Robin4 leur inventa des aventures. Fénice lut et s'enthousiasma. Alana Chantelune décida de l'aider à traduire. Ainsi naquit la légende.

Snape sneered.

Sirius snorted.

Remus intervened.

Ce sont des phrases comme ça qui m'ont décidé à traduire cette histoire… J'espère qu'elles vous font pleurer de rire comme moi… (Fénice)

Désolée pour le retard… mais vous savez… la vie….

 Chapitre vingt-trois - À tout prix

Les cours continuèrent comme si rien ne s'était passé. Les professeurs avaient l'air légèrement tendu. La rumeur courut sans fin dans le château que le mystérieux sorcier qui se cachait dans l'Infirmerie n'était autre que Sirius Black. Celui qui venait de s'enfuir d'Azkaban et qui était maintenant au plus haut de la liste des ennemis de Vous-savez-qui. Certains pensèrent bien sûr que c'étaient des bêtises. D'autres, Harry compris, savaient. Il avait dû l'expliquer à Ron et Hermione. Mais George et Fred avaient deviné seuls. Et ce que les Weasley savaient, Lee le savait. Les Misfits étaient ainsi légèrement en avance sur les autres et se permettaient de rire quand Malefoy et ses amis affirmaient que nul ne pouvait s'échapper d'Azkaban.

Harry avait rendu visite à son parrain trois fois pendant cette semaine. La première fois avec Remus, puis tout seul. Sirius pouvait se montrer étrangement différent. Il y avait des fois où il pouvait rire et blaguer comme la première fois où Harry l'avait rencontré. Mais d'autres, il se faisait silencieux et hanté, ces yeux se faisaient distants et son esprit semblait pris au piège dans son propre enfer. Harry ne posait jamais de questions. Sirius ne disait jamais rien. Mais il était clair que le plus vieil ami de son père avait été dans un endroit où les cauchemars devenaient la réalité – voire pire – des endroits où les cauchemars auraient tenus du rêve. Malgré tout, la vie continuait à Poudlard. L'année scolaire continuait sa course tranquille. Les choses étaient aussi normales qu'elles pouvaient l'être au milieu d'une guerre entre la lumière et les ténèbres.

Mais un matin, un murmure traversa la Grande salle : le directeur entra, un autre homme à ses cotés. Il portait des robes d'un bleu si sombre qu'elles paraissaient noires. Il marchait en boitant légèrement, faisant porter son poids sur sa jambe droite. Il avait l'air toujours faible mais il avait retrouvé un peu ses couleurs et ses cheveux qui frôlaient ses épaules semblaient eux aussi plus nombreux. Son humeur semblait aussi s'être améliorée et on le voyait plaisanter avec naturel avec Remus.

« C'est lui ? » demanda Fred à sa droite.

Harry sourit. « Ouais »

Soudain son parrain sentit son regard et lui sourit. Harry lui répondit par un petit signe de la main. Mais le sourire de Sirius s'évanouit vite quand il échangea un regard empoisonné avec le professeur Rogue. Harry les observa avec intérêt. Même s'ils étaient du même coté, ils n'étaient visiblement pas des amis. Si un regard avait pu tuer, les deux seraient tombés au même instant – de même que tous ceux qui se seraient trouvé entre eux.

Rogue ricana

Sirius grogna.

Remus intervint.

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« Assieds-toi ». La brusquerie de la main qui éloigna la chaise de Sirius de la table donna toute la mesure de l'irritation de Remus. Le directeur – le faiseur de paix depuis leur enfance – s'était volontairement placé entre son vieil ami et son adjoint.

« Je ne suis pas un invalide, Remus » gronda Sirius. Mais il s'assit. Quand Remus avait cette expression-là, ça ne servait à rien de discuter.

« Non, mais presque, » lui répondit calmement son vieil ami. « Tu as eu de la chance de ne pas perdre cette jambe, tu sais ».

Sirius soupira. La fracture était compliquée et l'infection ancienne. Poppy avait Presque du lui couper. Le fait qu'il continue à boiter le rendait fou. « Je sais ».

« Comme c'est dommage » murmura Rogue à la gauche de Remus. Sirius n'en fut pas surpris mais le directeur se tourna violemment sur sa chaise pour jauger l'autre homme.

« Je ne supporterais pas que mon petit-déjeuner devienne une bataille » souffla-t-il. « Soyez civils ».

Aussi surprenant que ça puisse paraître, Rogue s'adoucit. Il fronça néanmoins les sourcils. « Je le ferai si ta tête brûlée d'ami accepte de ne pas me provoquer ».

Provoquer ? Sirius faillit exploser de rire mais il réussit à s'arrêter à temps. Il n'avait échangé qu'une poignée de mots avec Rogue en une décennie. Il n'avait pas l'intention de provoquer cet imbécile… en tout cas pas au petit-déjeuner. En outre, après dix années passées dans les mains de Voldemort, toutes les insultes et provocations infantiles de Rogue lui paraissaient tout à fait mineures. Il souleva un sourcil ironique.

« Avec plaisir ».

Le regard appuyé de Remus apprit à Sirius qu'il avait perçu les implications de sa réponse, à savoir : je te déteste sincèrement mais j'ai des problèmes plus importants que toi.

Sans rien n'ajouter, Rogue se tourna et se mit à discuter avec Mundungus Fletcher. Il cherchait visiblement à nier l'existence même de Sirius. Ce que ce dernier trouvait tout à fait souhaitable. Il avait déjà assez de mal à réapprendre à vivre sans devoir y ajouter un Severus Rogue.

Le petit déjeuner arriva en un clin d'œil fidèle à la réputation d'excellence des elfes de maison de Poudlard. Sirius aurait été content de toute nourriture pourvue qu'elle soit en quantité suffisante. Sa semaine passée à l'infirmerie, il avait redécouvert ce qu'était la nourriture. Ce que lui donnaient les gardiens de Voldemort à manger ne méritait pas ce nom. Et la richesse des mets de Poudlard était toujours un défi à son estomac encore fragile. Sirius s'attaqua donc à son petit-déjeuner avec précaution. Il écoutait le murmure des conversation de la Grande salle et s'étonnait de ce que le monde ait si peu changé en son absence.

Pendant les cinq années d'enfer qu'il avait passé à Azkaban – il avait eu le sinistre privilège d'y être le premier prisonnier de Voldemort – il avait fini par oublier que le monde extérieur existait. A la fin, il n'y arrivait plus… jusqu'à ce qu'il entende Peter. Une amertume insoupçonnée se répandit en lui. Pourtant il avait pardonné à son ami. Sans doute parce que les autres Maraudeurs avaient besoin qu'il le fasse. Peter avait fait le bon choix, même si c'était un peu tard. Sirius ne se sentait pas capable de refuser à ses amis que leur connivence soit de nouveau complète. Il ne pouvait pas se le refuser à lui-même. N'était-ce pas le souvenir de ses amis qui l'avait maintenu en vie toutes ces années, d'abord dans le domaine de Voldemort puis à Azkaban ?

En enfer.

Un frisson parcourut son échine. Sirius dut se battre pour le contrôler. Il ne voulait pas y penser. Pas maintenant alors que le soleil brillait et que les enfants riaient dans le réfectoire. Des rires, des espoirs, de l'innocence. Tout ce qu'on lui avait volé pendant trop longtemps. Il se demanda s'il en serait de nouveau capable un jour.

A certains moments, oui. Il s'était surpris à rire avec James, Remus et Peter le tout premier jour. Ils avaient été plus joviaux que lui mais il avait souri, sans se forcer. Ca devait être ça le pouvoir de guérison de l'amitié. Mais, malgré ces progrès, Sirius savait que ça ne suffisait pas. Il était loin d'être guéri et n'y arriverait pas avant longtemps. Il connaissait ses démons. Il avait vécu avec eux pendant une décennie.

Douleur.

En une seconde, il se retrouva là-bas.

« Dis-moi » demandait la voix glaciale. Mais, comme toujours, il refusait. Il devait être fort, pour ses amis, pour James…

« Dis-moi »

Douleur.

« Je ne trahirai pas mes amis ». La douleur de nouveau. Rien de neuf mais quand même. Son âme devait se battre pour ne pas céder sous l'assaut. Il pouvait résister. Il le devait.

Une main froide, si froide, passait sur son visage.

« Trahir ? Mais est-ce trahir quand vos amis vous croient mort ? »

« Sirius ? »

Il s'arracha à son souvenir d'un sursaut. Il secoua la tête. Il ne savait pas quand c'était. Un moment parmi des millions. Voldemort voulait tant trouver les Potter. Il le voulait toujours.

« Est-ce que ça va ? » La main de Remus se posa sur son épaule et Sirius dut se forcer pour ne pas tressaillir. Il devait réapprendre que tout contact humain n'amenait pas obligatoirement la douleur.

« Ca va » dit il doucement, repoussant encore une fois ses souvenirs. « Je pensais juste… »

« Bien sûr »

Question muette, offre sans parole. Nous sommes là si tu en as besoin disait le regard inquiet de Remus. Sirius se força à sourire pour rassurer son ami. Il savait. Il comprenait même. Mais il n'était pas prêt. Ca faisait trop longtemps. Remus pressa son épaule une fois, doucement puis le contact disparut. Remus connaissait les démons. Il combattait les siens tous les mois.

Le silence s'installa entre eux jusqu'à devenir inconfortable. Remus visiblement ne savait pas quoi dire, ne savait pas comment réagir face à lui. Et Sirius lui essayait de se souvenir comment se comportaient les humains. Ils étaient frères, oui. Mais un de ces frères était parti pendant longtemps. Quand il ne put plus supporter le silence, Sirius dit doucement :

« C'est bizarre » commença-t-il. « Tant de choses changent, et pourtant beaucoup restent à l'identique »

« Tout change mais pas toutes les choses » répondit doucement Remus. Ils avaient eu l'habitude de dire cela. Dans une vie qui avait disparu.

« J'espère » grommela Sirius.

Il ne faisait que picorer dans son assiette. Il savait qu'il aurait dû manger vraiment mais il n'avait pas faim. Pomfresh lui aurait fait la morale si elle avait vu le peu qu'il avait mangé. Heureusement pour lui, elle n'était pas dans la grande salle et Sirius pouvait se sentir libre. Il savait qu'il devait reprendre du poids ( et il l'avait même déjà fait en partie ), mais à ce moment-là, la vision des élèves souriants et rieurs – furtifs échos de son passé le plus heureux – lui coupait tout appétit. D'un certain coté, ça faisait du bien de voir que dans ce sombre monde, Poudlard restait Poudlard. Mais, d'un autre, quand il regardait la table des Serpentards, il se rappelait combien de ses camarades avaient choisi la voie des Ténèbres. Il ne pouvait s'empêchait de se demander combien de ces élèves feraient le même choix.

Il espérait qu'ils seraient peu nombreux mais il n'y comptait pas. Mais comme auparavant, Poudlard était un terrain neutre – fermement ancré dans la magie blanche mais aussi un lieu où l'on pouvait faire son choix. C'étaient ici qu'on choisissait sa vie. Le jour de son diplôme, Dumbledore n'avait-il pas dit : « aujourd'hui vous nous quittez pour rejoindre un monde très différent de celui que vous avez laissé il y a sept ans. Vous êtes des hommes et des femmes aujourd'hui et vous allez devoir prendre des décisions. Et un jour viendra, proche ou lointain, où il vous faudra choisir entre le juste et le facile… ».

Il avait choisi. D'autres aussi.

« Sirius ? » - demanda de nouveau Remus.

Il tourna légèrement la tête. « Oui ? »

« Je dois y aller, » répondit le directeur. « Severus et moi avons une réunion avec Croupton dans une demi-heure. »

« Croupton ?» demanda il, un peu perdu.

« Le vice-ministre de la magie »

Tant de choses avaient changé… « Qui dirige le département d'application des lois magiques, alors ? »

« Arabella Figg »

Moody était mort. Il le savait. Voldemort s'était fait un plaisir de lui annoncer ça personnellement, il y avait quatre ans maintenant. C'était même un de ses souvenirs les plus clairs à Azkaban. Avec la douleur. Le Seigneur des Ténèbres s'était toujours réjoui de la mort des forts Et Alastor avait été son mentor, des années auparavant. Les souvenirs… Il ne trouva que cette réponse : « Oh… »

« Est-ce que ça va aller ? » demanda Remus visiblement inquiet.

Une bouffée d'irritation. Pendant un instant, Sirius dut lutter contre le besoin de lui jeter de nouveau à la tête : « je ne suis pas un invalide, nom de dieu ! ». Mais il se retint. Remus demandait cela parce qu'il s'inquiétait. Sirius le savait. Ca n'aurait pas été très gentil de le lui reprocher. Qu'on s'inquiète pour lui paraissait si étrange… "Ouais, ça va aller".

« Tu es sûr ? »

« J'en suis sûr, Lunard » répondit Sirius mais une mise en garde brilla dans ses yeux. Il ne pouvait pas laisser Remus aller trop loin, quand même. Mais il se reprit un peu. « J'irai m'allonger après le petit-déjeuner, promis ».

Un sourcil s'arqua. Seul Remus était capable de rendre le doute si élégant et si poli.

« Vraiment. J'ai promis à Pomfresh… si je ne le fais pas, elle me jettera six sorts différents qui dureront jusqu'à dimanche » expliqua-t-il.

Remus sourit. « Oh, je vois ».

« J'imagine » grommela Sirius au moment où son ami se levait.

« Pouvons-nous y aller Severus ? » demanda poliment le directeur.

« Tout à fait » répondit sèchement Rogue. Remus dit au revoir à Sirius d'un signe de tête mais Rogue fit comme s'il n'était pas là. Tout n'avait pas changé finalement. Une sorte de sourire faillit s'installer sur le visage de Sirius mais il secoua la tête, questionnant lui-même son étrange sens de l'humour. Les dix années passées dans les mains de Voldemort avaient fait de lui un sacré cynique.

Petit à petit, la table des professeurs se vida. Il ne resta bientôt plus que Sirius, Chourave et Quirrell. Chourave n'avait pas grand chose à préparer dans les serres, pensa-t-il (comment préparer des plantes de toutes façons ?). Mais la pauvre femme dut se sentir seule car elle s'enfuit quelques secondes après le départ de Fletcher. Bien sûr, Sirius n'avait rien d'un bon animateur de conversation – tout plutôt que cela. Il avait trop à faire à laisser ses yeux errer dans le vague et à s'efforcer de s'habituer à la réalité. Quirrell, vu ses tentatives balbutiantes, n'avait pas beaucoup mieux à offrir. Après le départ de la morose directrice des Poufsouffles, plus rien ne vint déranger Sirius qui était seul à être assis au milieu de la table, Quirrell occupant le bout gauche. Rien de plus parfait, pensa-t-il.

Il s'attaqua de nouveau sans beaucoup d'enthousiasme à ses oeufs et décida qu'il avait besoin de plus de sel. Mais quand il s'empara de la salière, il découvrit à sa plus grande surprise qu'elle était singulièrement plus légère qu'avant. Il s'en était servie que quelques minutes auparavant. Elle était même vide. Sirius fronça les sourcils. Pourquoi moi? Avec un soupir, il se tourna vers Quirrell et remarqua qu'il y avait de fait une autre salière au bout de la table.

«Pouvez-vous me passez le sel, s'il vous plait? » demanda-t-il.

« Biienn suuuûr, » répondit le professeur. Sirius se demanda comment ses élèves arrivaient à apprendre quoi que ce soit de ces bégaiements. Il devait être impossible à comprendre… La salière vint néanmoins en glissant vers lui, propulsée par un rapide mouvement de baguette de Quirrell.

Des instincts qu'il croyait disparus se réveillèrent. Au lieu de prendre la salière dans sa main, Sirius plaça son verre de jus d'orange de manière à l'arrêter dans sa course. Un léger tintement clinqua lorsque la salière toucha le verre. Sirius dut s'obliger à se tourner comme si ne rien n'était vers le professeur de défense contre les forces du mal.

« Merci » dit-il poliment, alors même que ses instincts lui hurlaient de faire attention. Il sentit sa nuque se tendre. Prudemment, Sirius but une gorgée de jus d'orange avant de reposer le verre à sa première place. Un frisson parcourut son épine dorsale. Et il le sentit. Il sentit la magie noire. Il y avait été tellement exposé qu'il y était devenu extrêmement sensible.

De nouveau, son instinct fut plus rapide que son cerveau dépassé. A peine, le geste entra dans son champ de vision qu'il plongea de sa chaise sur sa gauche, espérant utiliser momentanément la table comme bouclier. Ses os encore fragiles protestèrent. Une lumière rouge zébra l'air au dessus de sa tête. Sa chaise explosa, projetant des éclats de bois dans tous les sens. Certains le touchèrent. Mais il n'y prêta aucune attention. Des étudiants hurlaient et criaient. Quirrell s'était levé.

Sirius s'était empire de la chaise de Remus et la lança sur lui de toutes ses forces. Vu sa faiblesse actuelle, elle n'aurait jamais pu atteindre Quirrell mais elle lui offrit une diversion. Le mangemort – car ce ne pouvait être qu'un mangemort ! – s'arrêta pour réduire en cendres le meuble qui l'attaquait. Mais il s'intéressa tout de suite de nouveau à Sirius. Oh merde. C'était son premier duel depuis dix ans et il n'avait même pas de baguette. Je suis plus que perdu. Le temps parut se suspendre. Il ne sentait plus aucune douleur. L'instinct et l'entraînement prirent le dessus.

« Stupefix ! »

Il roula sur lui-même, remerciant sa bonne étoile de ce que Quirrell visiblement n'avait pas l'intention de le tuer. La solide table des professeurs le sauva. Sans l'avoir consciemment décidé, Sirius s'était réfugié sous la table échappant ainsi à Quirrell pour un court instant. Au travers de la nappe blanche, il pouvait voir des pieds s'approcher du bout de la table. Il n'avait pas beaucoup de temps. Où dont étaient tous les autres ? Les étudiants restant devaient probablement les regarder. Ils n'étaient que des enfants. Et si un d'eux avaient eu l'idée d'intervenir, il aurait sans doute choisi le camp de Quirrell! Les dents serrées, Sirius pria instamment pour qu'ils restent où ils étaient.

Bien que ce ne fut pas le moment, une pensée s'imposa : Je vais tuer Rogue ! Tu parles d'un avertissement !

Grondant d'une façon peu éloignée de celle de son animagus, Sirius leva sa main droite et chercha à tâtons sur la nappe quelque chose qui aurait pu lui être utile. Il était maintenant prêt à utiliser n'importe quoi : des assiettes, des fourchettes ou un poivrier, sauf bien sûr cette infernale salière qui avait déclanché cette tourmente. Une partie de son esprit la soupçonnait d'avoir eu un autre dessein. Finalement, ces doigts affolés se posèrent sur quelque chose de dur et de cylindrique. Bois de hêtre, très dur, une vingtaine de centimètres. Ces doigts se refermèrent dessus. Son esprit se vida. Roulant sur le sol, Sirius se jeta comme un fou hors de dessous la table – elle ne pouvait maintenant que le gêner dans ses mouvements. Il attrapa au passage une assiette avec sa main gauche. Elle s'envola, avec le reste de son petit-déjeuner, vers Quirrell. Par une chance extraordinaire, elle le toucha en plaine tête avec ses œufs, son bacon, son toast et tout le reste. Le professeur grogna et sauta de coté, momentanément aveuglé et distrait. Le cerveau de Sirius s'échauffait alors qu'il reprenait une posture familière, accroupie, sa main gauche en avant et sa baguette prête contre son flanc droit. Malgré son caractère peu orthodoxe, il l'avait adoptée il y avait bien des années. Un sort, un sort, je dois trouver un putain de sort ! Sa mémoire lui sembla étonnamment vide. Il regarda avec une fascination idiote Quirrell faire disparaître les restes de son petit-déjeuner d'un autre bref mouvement de baguette. Celle-ci se tourna ensuite pour se pointer sur lui alors que son cerveau continuait à lutter pour faire revenir la magie qu'il n'avait pas utilisée depuis des années.

« Impedimenta !" Il y a quelques années, il aurait été bien plus créatif. Mais ce n'était pas le moment de faire chic. Quirrell fut stoppé au milieu de son mouvement mais il réussit à repousser le sort – ce qui n'avait rien d'extraordinaire pour un sorcier déterminé et entraîné. Mais le fait de le vouloir vivant semblait bien réduire les options du professeur. A moins que lui-même ait du mal à être original. « Stup.. »

« Everbero ». Pas le temps d'être gentil. La baguette de Sirius se leva et Quirrell fut projeté dans les airs et alla heurter le mur avec assez de force pour y laisser une marque. Il pensa qu'il devait être assommé mais il ne suffisait pas de le dire : « Experlliarmus ! »

La baguette de Quirrell vola instantanément dans sa main gauche sans que le professeur ne fasse un mouvement.   

Sirius se leva avec précaution. Il avait une conscience aigue de la douleur lancinante de sa jambe droite maintenant que l'affrontement était terminé. Il jeta un regard autour de lui mais le temps accéléra une nouvelle fois. Bang.

La porte menant aux appartements des professeurs, à sa droite, s'ouvrit brusquement devant Remus qui était suivi de prêt par Rogue et –Oh c'est vraiment ma journée – par Barty Croupton Père, le Vice-ministre de la magie. Remus et Croupton avaient leur baguette à la main, prêts à intervenir. Mais pas Rogue… Il comprit d'un seul coup. Le regard de Sirius descendit lentement sur la baguette qu'il tenait toujours dans sa main droite. Comme c'est intéressant… Il n'aurait jamais cru que la baguette de Rogue lui aurait aussi bien convenu. Bien sûr il ne se serait pas lancé avec dans des sortilèges compliqués… mais pour des choses simples.

Les yeux noirs de Rogue ne le lâchaient pas et Sirius fut sûr que ce n'était pas un accident. Et bien, ça prouvait qu'il était bien de leur coté, pensa-t-il avec un sourire forcé. Il soutint le regard de son ancien rival avec calme.

« J'ai bien peur que vous ayez oublié cela, Professeur » dit-il froidement, en luttant pour ne pas soulager sa jambe droite. La vie ne fait pas de cadeau, se dit-il sans gentillesse. Va falloir t'y faire.

« On dirait ». La voix de Rogue était plus que glaciale.

Sirius s'autorisa un léger sourire. « Je vous remercierai bien de me l'avoir prêter… même si je ne suis pas sûr que vous l'ayez fait exprès. »

« Ce n'était pas précisément mon attention » grinça Rogue mais Sirius en aurait presque ri. Oh, il détestait le bonhomme, et sans doute pour longtemps encore… mais il devait reconnaître qu'il avait un potentiel… Il n'avait jamais pensé que Rogue fut stupide… juste graisseux et insupportable.

Curieux comme certaines choses ne changeaient pas.

A sa droite, Remus demanda : « Ca va, Sirius »

Sirius prit son temps pour acquiescer. Il regardait Quirrell. « Ouais ». Ses yeux se rétrécirent et sa conscience sembla revenir. "J'ai besoin d'une baguette"

« Tu fais bien de me le dire » souffla Remus afin qu'eux seuls n'entendent. Sirius arracha ses yeux de corps inconscient de Quirrell et ils partagèrent un sourire. Mais le directeur se tourna vers Rogue et Sirius observa leur communication silencieuse. Les yeux de Remus se posèrent sur les étudiants et revinrent sur son adjoint qui acquiesça. « Je m'occupe d'eux ».

Sans même attendre la réponse de Remus, Rogue s'avança vers les étudiants et les renvoya en classe. Du coin de l'œil, Sirius reconnut Harry qui essayait de s'avancer, sans doute pour lui parler mais Rogue l'intercepta. Sirius fronça les sourcils un instant quand il reconnut l'intense dégoût mutuel dans les postures de Rogue et Harry. Mais il se força à l'ignorer. Harry était le fils de James et c'était presque normal qu'il déteste quelqu'un comme Severus Rogue. C'était quelque chose à laquelle on devait s'attendre. Mais Remus parlait et il reporta toute son attention sur lui:

« Que s'est-il pass ? »

« La salière » répondit Sirius sans trop réfléchir.

« Quoi ? » Son ami le regarda très bizarrement.

Sirius retourna vers la table à demi détruite, se détestant de devoir boiter pour le faire. Sa jambe semblait ravie de lui rappeler qu'il n'était pas encore guéri. Ses côtes brisées se mirent aussi de la partie. « Je lui ai demandé de me passer le sel » expliqua-t-il mimant la scène. « Je crois que c'est un portoloin »

« Ah… » Un bref mouvement de la baguette de Remus amena la salière flotter dans les airs. Aucun d'entre eux n'étaient assez bête pour la toucher. Ses yeux gris se voilèrent. « Il te veux plus que tout, Sirius ».

« Oui ». Sa gorge se serra soudain et des souvenirs sombres s'imposèrent. Pendant quatre années, il avait été un Auror et un bon. Mais il n'avait jamais été constitué une menace suffisante pour être sur la liste de Voldemort. Il avait aujourd'hui le sentiment étrange d'être toute la liste à lui tout seul.

La partie raisonnable de son cerveau lui rappela que cette seule idée aurait du l'effrayer. Mais il n'en était plus capable. Il était au-delà de ça, bien au-delà. Même avec les cauchemars qui le hantaient jour et nuit, avec ou sans Potion pour un sommeil sans rêve - ce qu'il n'avait avoué à personne et ce qu'il ne comptait pas faire – il ne pouvait plus avoir peur de Voldemort. Enfin, ce n'était plus cette peur paralysante. Ca n'avait plus rien de la terreur. Il détestait trop ce monstre pour cela. C'était peut-être stupide mais il n'y avait que deux issues à des années de douleur ou de torture : soit votre âme se brisait, soit votre peur se consumait.

Avec plus de lucidité que d'habitude, Sirius avait choisi la seconde. Il ne l'avait regretté que quand il avait compris qu'il ne pourrait plus jamais être le même homme. Il guérirait peut-être un jour. Il savait que c'était possible. Ou il n'y arriverait pas. Les deux étaient possibles à cause de Voldemort. Ses raisons de le haïr semblaient sans fin.

« Sirius ? Est-ce que ça va ? » répéta Remus, touchant doucement son épaule. Il se rétracta sans le vouloir. « Pardon… je réfléchissais ».

« Tu ruminais plutôt » lui fut-il répondu avec légèreté. Pourtant son ami avait l'air inquiet. Qu'il était difficile de cacher ce genre de choses à Remus !

« Aussi » Il essaya de se forcer à sourire mais échoua. Comme d'habitude. J'enrageais plutôt, se dit Sirius intérieurement.

« Allons dans mon bureau » dit doucement Remus. « Je crois que nous devons répondre à … certaines questions ».

« Oh ? » Un de ses sourcils se leva. Il remarqua alors l'air de défiance que prenait Crouch pour le regarder. Mais l'hostilité qui émanait de cet homme ne touchait pas Sirius. Après avoir du faire face à Voldemort, peu de choses pouvaient le faire. Crouch n'en faisait pas partie. « Allons-y ».

Le directeur, le vice-ministre et l'ancien prisonnier regagnèrent ensemble le bureau de Remus. Très peu de paroles furent échangé en chemin. Rogue dans l'intervalle alla enfermer Quirrell quelque part. Remus dut expliquer à Crouch avec un peu de rage qu'on pouvait lui faire confiance pour cela. Sirius fronça les sourcils. Il n'avait jamais pensé devoir partager quoi que ce soit avec le détestable directeur des Serpentards. Mais il semblait que Croupton n'ait confiance dans aucun d'eux. Ca n'avait rien de nouveau. Croupton avait toujours été un homme inquiet et suspicieux. Sirius l'avait appris en même temps qu'il était devenu un Auror. Mais Crouch eut la correction d'attendre que la porte se soit refermée et qu'ils se soient tous assis pour parler. « Je suis heureux de voir » remarqua-t-il avec acidité « que les batailles sont au menu du petit déjeuner à Poudlard ».

Remus se hérissa mais Crouch continua :

« Je me réjouis tout particulièrement de voir que vous avez entretenu la tradition établie par votre prédécesseur d'embaucher des Mangemorts comme professeur ». Ses yeux gris se posèrent sur sirius. « Je vois même que vous les abriter ».

« Pardon ? » Remus prononça le mot une demi seconde avant Sirius. Celui-ci se força à prendre une profonde inspiration et à se rasseoir avec un calme forcé. C'était la bataille de Remus… mais que dieu vienne en aide à ce salaud s'il allait trop loin.

« Allons, M. Le directeur » répliqua Croupton d'une voix cassante. "Vous ne pouvez pas honnêtement penser qu'un home puisse passé dix ans entre les mains du Seigneur des Ténèbres sans devenir l'une de ses créatures. Enfin, ajouta-t-il sombrement, s'il est même celui qu'il prétend être. »

Sirius sentit la colère s'emparer de lui mais il ravala sa réponse cinglante. Ces dix années lui avaient appris cela Elles lui avaient donné un contrôle de lui-même au-delà de ce dont il se serait cru capable. Il laissa sa colère mijoter à l'intérieur de lui. « Je suis » répondit-il très calmement « Sirius Black. Et non, comme vous l'avez si bien dit, une des créatures de Voldemort. Je ne suis pas non plus un mangemort ».

« Je croyais de plus » ajouta doucement Remus sans attendre « que vous aviez plus de confiance que cela sans les capacités de votre supérieur. Dumbledore a déjà certifié que tout ce que vous insinuez n'avait pas lieu d'être redout ».

Croupton planta un regard brûlant dans Sirius. « Je n'insinue pas qu'il y ait besoin d'un quelconque sortilège »

« Alors c'est tout simplement une question de confiance, n'est-ce pas ? ». Sirius soutint calmement son regard haineux.

« Je suppose que vous lui faites confiance exactement comme vous faisiez confiance à Quirrell ? » demanda le vice-ministre d'un ton cassant.

« Non » répondit calmement le directeur. « Je savais que Quirrell était un mangemort ».

« Quoi ? Et vous n'avez pas jugé bon de prévenir le Ministère ? C'était juste un détail sans doute ? »

« Je n'ai pas jugé bon de vous prévenir. C'est toute la différence ». Sirius ne put qu'apprécier le coup direct porté par Remus. Pauvre Croupton… mais son ami avait repris. « De plus, ça ne marche pas. Je doute que le Seigneur des Ténèbres se donnerait autant de peine pour capturer un des siens, si Sirius était un mangemort comme vous le prétendez. »

« Camouflage » gronda Croupton.

« Ca m'étonnerait. »

"Je suppose que vous savez tout de lui maintenant, hein, Lupin ? Nous devrions peut-être commencer à enquêter sur vous ».

« Des menaces en l'air, Croupton. Vous savez bien que vous n'irez pas très loin comme cela" répondit calmement Remus. Mais ses yeux s'étaient froncés et Sirius savait d'expérience qu'il ne fallait pas prendre un tel signe à la légère. Croupton n'y porta aucune attention.

« Je ne fais aucune menace » gronda le vice-ministre. « J'exprime simplement mon inquiétude quant à la direction de cette école ».

« Je dois donc me féliciter de ne pas travailler pour vous ».

« Poudlard est sous la juridiction du Ministère ».

« Tout à fait. Du Ministère et non de vous. Les administrateurs de l'école sont les seuls en position de me relever de mes fonctions. Mais il leur faudrait une raison de le faire. Ce qui n'est pas le cas. »

« Ne soyez pas si sûr qu'il n'y ait pas d'autres moyens, Lupin » gronda Croupton.

Les narines de Remus frémirent de colère au moment même où Rogue entrait dans le bureau.

« Je crois que je commence à comprendre ce que vous cherchiez en venant ici, M. Croupton. Je peux vous assurer qu'aucune de vos manœuvres contre Dumbledore ne réussiront. Et vous ne trouverez ici aucun soutien pour un tel projet. Ne soyez pas stupide ! Vous allez déstabiliser tout le monde magique par pure ambition personnelle ! »

« Comment osez-vous... » Croupton s'était levé.

« Comment j'ose quoi ? » demanda Remus avec emportement. Il s'était levé d'un bond lui aussi et ses yeux bleus foudroyaient Croupton.

Dans l'embrasure de la porte, Rogue s'était figé, sans doute sidéré par l'expression aussi rare que dangereuse de la colère du directeur. Le silence qui suivit fut tendu. Les deux hommes se dévisagèrent. Croupton ouvrit la bouche pour parler.

« Je pense que cet entretien est terminé, M. Le ministre » l'interrompit Remus. « Vous n'êtes plus le bienvenu à Poudlard ».

« Vous n'avez aucun pouvoir contre moi » répondit Croupton avec colère.

La voix de Remus se fit très douce. « Sortez ».

Le vice-ministre continua pendant un moment à le regarder puis il parut ne plus arriver à soutenir le regard implacable de Remus. Il sortit alors avec une envolée bruissante de robes, titubant de colère. Rogue sortit de son chemin avec son habituel rictus de dédain. Pour une fois, Sirius partageait son sentiment. Crouch essaya de claquer la porte derrière lui mais Rogue la rattrapa et la ferma doucement. Remus laissa alors échapper un soupir. Il cherchait à reprendre son calme.

« Rappelle moi » commenta Rogue avec philosophie, brisant le silence qui s'était installé, « de ne jamais te mettre autant en colère ».

« Ca ne m'arrive pas très souvent ». Remus passa une main lasse sur ses traits fatigués.

« Que s'est-il pass ? » demanda Rogue.

Remus soupira. « Assieds-toi donc Severus. C'est une longue histoire ».

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La semaine prochaine, retour de Julia et de Peter… Ca s'appelle Le juste plutôt que le facile…