Promesses tenues
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Désolé Crys, bref retour des Misfits, tiens bon.
Merci à tous les encouragements !
Chapitre Vingt-Six: Mystères
Le silence des couloirs était presque surnaturel. Malgré le temps passé à explorer Poudlard à des heures indues, les Misfits trouvaient cette nuit sensiblement différente. Le château avait quelque chose de spécial cette nuit-là, quelque chose qui leur disait qu'ils auraient dû choisir un autre endroit pour leurs frasques. A tout autre moment, ils auraient ignoré le sombre pressentiment qui s'immisçait dans leur esprit. Mais cette nuit, après déjà un échec dans la mise en place d'une blague à leur actif, ils commençaient à penser à rentrer dormir.
Juste pour cette nuit.
Hermione leva les yeux au ciel. « Si tu m'avais écouté dès le début, Ron, nous ne serions même pas là. Je t'avais bien dit que dans « L'histoire de Poudlard », ils disent que les escaliers sont contrôlés grâce à une magie très ancienne au château lui-même… »
« Je sais » aboya Ron. « Tu n'arrêtes pas de me le dire ! »
« Elle a raison, Ron » souligna Lee. « Si tu avais fait plus attention à ce qu'elle avait dit, nous aurions pu réfléchir à une autre blague au lieu de te suivre ».
Harry avala sa salive. Il n'avait pas plus écouté Hermione – après un moment tout le monde avait appris à fermer ses oreilles pendant ses longues dissertations sur L'Histoire de Poudlard. Mais, comme l'idée à la base de leur plaisanterie avortée venait de Ron, c'est lui qui était tenu responsable. Il ne trouvait pas ça très juste. Mais quand la dernière expérience de Ron avait tourné au désastre, tous les Misfits l'avaient traîné dans la boue. C'était comme cela que ça marchait. Il mit cependant un point d'honneur à intervenir. « Bon alors, qu'est-ce qu'on fait maintenant ? Ca paraît une vraie perte de temps de passer la nuit debout à ne RIEN faire ! »
Il était tard. Les Misfits avaient déjà perdu deux heures à essayer en vain d'enchanter les escaliers pour qu'ils deviennent des véritables toboggans pour tout Serpentards qui s'y aventureraient. Minuit était maintenant passé depuis longtemps. Ils n'allaient pas beaucoup dormir et tous pensaient qu'à tout prendre ils auraient dû utiliser ce temps pour faire quelque chose. Aucun d'eux n'avait réellement fait attention au calme quasi-surnaturel. Tous avaient pensé sans oser l'avouer à haute voix l'avoir imaginé. Poudlard était surnaturel de toutes façons. Le château était vieux, après tout, et personne n'en connaissait tous les secrets. Même les Misfits.
Des pas résonnèrent sur les sols en pierre du château. Les six Misfits échangèrent des regards surpris. La carte du Maraudeur, quelques minutes auparavant, leur avait permis de localiser Rusard, Hagrid et tous les professeurs. Aucun d'eux n'aurait dû être capable d'être ici dans le couloir du troisième étage en si peu de temps. Rapidement, les six fauteurs de trouble plongèrent dans la cachette la plus proche une petite pièce à leur gauche dont la porte grinçait. Hermione murmura un sortilège pour les faire taire mais malgré tout, on les entendit. Ils retinrent leur respiration.
Harry sentait son cœur battre dans sa poitrine. Ils n'avaient vraiment pas besoin de se faire prendre si près des vacances de Pâques. Il n'avait aucune envie d'être en retenue quand tous les autres élèves se prépareraient à rentre chez eux. Bien sûr, il savait que Remus ne ferait jamais rester des élèves pendant les vacances en punition mais des retenues pendant les deux dernières semaines de classe n'avaient rien de bien tentant. Et il a fallu que j'oublie la cape, hein ? se morigéna-t-il. Bravo, Harry, Bravo.
Les Misfits s'enfoncèrent un peu plus dans l'ombre de la petite pièce – un endroit où, à bien y réfléchir, Harry n'était jamais venu auparavant. Ils échangèrent des regards d'espoir. Bien sûr, Lee ne put s'empêcher de jurer tout bas, murmurant quelque chose à propose de cette pièce qui n'avait pas d'autre issue que celle par laquelle ils étaient entrés. Mais personne n'y prêta attention. Peut-être que qui que ce soit ne les avaient pas entendu…
La porte grinça et Harry sentit son cœur s'enfoncer dans sa poitrine.
« La première règle du fauteur de trouble est de ne pas se faire prendre », remarqua alors une voix étrangement familière. La faible lumière du couloir arriva presque jusqu'à eux. Les Misfits s'enfoncèrent encore un peu plus dans l'ombre, espérant encore – contre toute logique – qu'on n'allait pas les remarquer. S'ils ne répondaient pas, l'homme allait peut-être partir. Et Malefoy deviendra un elfe de maison amoureux des moldus en grandissant, pensa Harry avec sarcasme. Bon. On va pas y échapper. La silhouette floue du grand sorcier était maintenant visible sur le bas de la porte.
« La deuxième règle, bien sûr, est de ne pas choisir une cachette avec une seule sortie quand on se fait prendre ».
Harry arrêta de respirer et il savait que les autres faisaient de même. Cet homme disait peut-être cela au hasard…
« Vous pouvez sortir maintenant » dit légèrement Sirius Black. « Tous les six ».
Lee grommela quelque chose tout bas, quelque chose que sa stricte mère n'aurait jamais laissé passer. Après une hésitation, Harry décida pourtant de sortir de l'ombre pour affronter son parrain qui venait d'entrer dans la pièce et de refermer la porte derrière lui. Les yeux bleus de Sirius ne le lâchaient pas. D'un léger mouvement du poignet et d'un sortilège murmuré, il illumina la pièce avec un léger sourire.
« Sirius ! » s'exclama Harry avec soulagement. Avec tous les adultes présents à Poudlard, c'était un grand coup de chance d'être surpris par son parrain. Sirius était sans doute le seul qui ne les dénoncerait pas.
« Coupable ! » répondit son parrain.
Harry se rembrunit. « Mais que fais-tu ici ? »
« Je me promène ». Ces yeux bleus pétillèrent mais malgré tout, Harry sentit sous cette apparence quelque chose de plus profond et de moins joyeux. « Comme vous, je suppose. Après le couvre-feu, bien sûr ».
« Vous allez nous dénoncer, M. Black ? » demanda Hermione après un instant d'hésitation.
« Vous dénoncer ? Pourquoi ferai-je une chose pareille ? » demanda Sirius. « Et ne m'appelez pas M. Black. Ca me fait me sentir vieux ». Son regard glissa sur eux six pour finalement revenir sur Harry. « Alors, est-ce que tu vas me présenter tes compagnons de crime, Harry, ou est-ce que je dois deviner ? ». Son sourire s'élargit un peu. « Voyons… les jumeaux… évidemment ce sont Fred et George Weasley… ce qui fais de toi, Ron. Hermione Granger, c'est facile, c'est la seule fille. Et voici, Lee Jordan, le portrait de son père… Les Misfits sont un groupe très vari ».
« Tu lui as parlé de nous ? » demanda George à Harry dans un souffle. Mais avant que Harry n'ait pu balbutier une réponse, Sirius gloussa.
« Bien sûr qu'il m'a parlé de vous ! Je ne suis pas comme votre directeur, moi, je n'ai aucune inclination pour les règles… Où croyez vous qu'il ait trouvé cette merveilleuse idée de mélanger les portraits, que vous avez mise en œuvre l'autre jour ? »
Harry sourit de soulagement mais ses amis le dévisagèrent.
« C'était votre idée ? » réussit à dire Fred. Il se tourna vers Harry. « Mais tu nous avais dit que c'était ton père. »
« En fait, je vous ai dit que cette blague avait déjà été faite. Et que mon père y avait participé mais ce n'est pas lui qui m'en avait parl ». Harry sourit. Cinq jeunes paires d'yeux se tournèrent vers son parrain qui leur répondit par une parodie de révérence.
"Mister Patmol, à votre service."
Lee siffla. « C'est vraiment vous. »
« Bien sûr que c'est moi ! Harry ne vous l'a pas dit ? »
« Si…si » Lee haussa les épaule et Harry rit doucement.
Le silence qui suivit fut néanmoins difficile à briser. Les compagnons d'Harry étaient ravis de rencontrer le quatrième Maraudeur mais aucun d'eux ne semblait capable d'oublier pourquoi il était là. Même à cet instant, derrière le sourire léger et les mots joyeux, Sirius semblait porter en lui de sombres ténèbres. Moins que la dernière fois que Harry l'avait vu, peut-être, mais son regard était toujours aussi hanté. Parfois ses yeux semblaient partir très loin. Harry y sentait des traces de démons venus de son passé récent et il savait que malgré la confiance en lui que Sirius affichait, il était loin d'être guéri. Hermione finit par demander :
« Pourquoi êtes vous ici ? »
« Je me promène » répondit le parrain d'Harry d'une façon si distante que son filleul comprit qu'il n'arrivait pas à dormir. « Quand j'ai entendu tout le bruit que vous faisiez à vous six, j'ai décidé d'aller voir si la nouvelle génération de fauteurs de trouble à Poudlard valait les Maraudeurs ».
« Nous sommes meilleurs » répondit immédiatement Ron.
Sirius rit. « Vraiment ? »
« Enfin, on se fait moins prendre » répondit Harry. Grandir nourri des aventures des Maraudeurs ne l'aidait pas à faire des déclarations aussi bravaches que Ron. Mais il savait qu'ils n'étaient pas mauvais.
Son parrain acquiesça. « Ton père m'a dit qu'il t'avait donné sa cape. Mais nous non plus nous ne nous faisions pas trop prendre pendant notre première année… les ennuis viennent plus tard quand tous les professeurs se mettent à vous surveiller ». Il sourit légèrement. « Bien sûr, ces temps ci le directeur s'appelle Lunard… »
« Il nous faudra bien ça si Rogue se met à nous courir après… » dit sombrement George.
« Tu parles » approuva Ron, « il nous déteste ».
« Je vous crois. Rogue a toujours été l'empêcheur de tourner en rond… Il l'était quand nous étions élèves, je ne vois pas pourquoi ça changerait »
« Vous êtes allé à l'école avec lui », demanda Fred avec une soudaine curiosité.
« Malheureusement », répondit sèchement Sirius.
Hermione fronça des sourcils en le regardant. Les autres rirent. « Vous savez, il est plutôt tard… »
« Allez Hermione » rétorqua Ron. « Sois pas si casse-pieds »
« Il n'est pas si tard » avança Lee. Sirius sourit.
« En fait, je vous conseillerais d'écouter la voix de la raison » répondit-il d'un ton léger. « Je sais que Rusard n'est pas dans cette partie du château en ce moment… »
Harry regarda George qui regarda sa montre. Les Misfits se consultèrent du regard. « Vous devez avoir raison » répondit le troisième année à contre cœur. Les Misfits n'avaient rien de paranoïaque ou d'inquiet. Mais comme tout bon sorcier ou toute bonne sorcière, ils étaient un peu superstitieux. Leur score ce soir était de zéro à deux. Leur première blague n'avait pas marché et ils s'étaient faits prendre. Une troisième tentative paraissait risquée. S'ils avaient si bien réussi jusqu'à présent c'était justement parce qu'ils étaient ni stupide, ni imprudents.
Les Misfits dirent rapidement au revoir à Sirius en lui promettant de venir discuter avec lui un jour. Apprendre la vérité sur les exploits des Maraudeurs faisait saliver Fred et George d'anticipation. Lee, celui qui savait se déplacer avec le moins de bruits d'eux tous, partit en reconnaissance dans le couloir. Il revint dire qu'ils pouvaient y aller. Avec le moins de bruit possible, les Misfits sortirent de la pièce. Ils n'avaient pas fait dix pas que Harry s'arrêta.
« Je vous rattrape » dit-il. « Je veux demander quelque chose à Sirius ».
Avant que les autres n'aient pu objecter, Harry partit en courrant dans la direction que son parrain avait prise. Sirius se retourna quand il le rejoignait. « Quelque chose ne va pas, Harry ? »
Harry ralentit. « Je me demandais juste si on pouvait parler une minute ».
« Bien sûr ».
Ils marchèrent dans un silence confortable alors que Harry cherchait comment mettre des mots sur ses pensées. Ce faisant il ne put s'empêcher de remarquer que son parrain marchait toujours en boitant légèrement, se reposant de manière presque imperceptible sur sa jambe gauche. Les couloirs étaient très silencieux et cela contribuait à rendre la présence de Sirius presque irréelle. De temps à autres, ces yeux tourmentés jetaient des regards nerveux autour de lui et renforçaient encore le caractère douloureux de son maintien. Harry songea à combien de temps son parrain avait été parti. Et ça n'aidait pas. A la différence de Remus ou de Peter, Sirius était quelque chose de nouveau dans sa vie et il n'était pas très à l'aise pour lui poser des questions.
« Qu'est-ce qui te tracasse ? » demanda Sirius tirant brusquement Harry de sa rêverie.
Il inspira profondément. « Je me demandais ce qui c'est vraiment passé avec le professeur Quirrell il y a deux jours. Je veux dire, c'est sûr que c'est un Mangemort mais pourquoi a-t-il agi à ce moment l ? Et comment a-t-il fait pour ce cacher tout ce temps à Poudlard ? »
« Tu te poses les bonnes questions, Harry » dit Sirius doucement. La chaleur de sa voix fit rougir légèrement Harry. Son parrain hésita un instant avant de reprendre. « Pour ta première question… il faut mieux un ennemi que tu connais qu'un ennemi que tu ne connais pas. »
« Tu veux dire… ? » Harry s'interrompit lui même. Pourquoi en dire plus, la vérité éclatait devant lui.
« Oui…Pour le reste…' » Sirius haussa les épaules. « Voldemort veut me reprendre »
Ses paroles firent frissonner Harry. Il avait grandi en entendant prononcer le nom du Seigneur des Ténèbres par ses parents mais c'était étrangement différent d'entendre Sirius le faire. Sirius avait passé dix années entre les mains de Voldemort et il n'en avait pas peur. Pourtant des sorciers qui ne l'avaient jamais même entrevu étaient terrifiés à l'idée de dire son nom. Harry avala sa salive. Il sentait que ce genre de courage n'était pas facile à acquérir.
« J'aurais voulu faire quelque chose » dit-il sombrement, parlant sans trop se rendre compte des mots qui sortaient de sa bouche. « Mais c'était si confus, tout est allé si vite. Tout le monde criait et quand j'ai enfin pu m'approcher, tout était fini ». Son visage s'illumina un peu. « Tu a vraiment été très rapide ».
Sirius grommela. « Je m'en suis sorti mais je manque vraiment d'entraînement ».
« Je t'ai trouvé génial ». Il sourit mais haussa les épaules. « Je continue de regretter de n'avoir rien pu faire ».
« C'est gentil d'avoir essayé mais c'est sans doute pas un mal que tu n'ai pas pu ».
« Pourquoi ? » Il essaya de masquer son mécontentement mais Sirius sembla l'avoir entendu. Il s'arrêta et regarda Harry de toute sa hauteur.
« D'abord, Harry, tu dois comprendre que la dernière chose dont tes parents ont besoin ait que Voldemort s'intéresse à toi, » répondit très sérieusement son parrain. « Ils ont passé de très longues années à te protéger et plus on l'empêchera de se rappeler qui tu es, mieux ce sera ».
« Mais, tu… »
« Je suis un adulte, Harry, et je doute que Voldemort puisse me haïr plus qu'il ne le fait déj ».
« Tout le monde dit tout le temps que je suis trop jeune » répondit-il avec une amertume que Sirius ne méritait pas vraiment. Mais le regard qui lui répondit était grave.
« Peut-être que c'est vrai » répondit-il doucement.
« J'ai onze ans ! »
« Et alors ? » demanda son parrain. « J'ai trente-deux ans. Pourtant il y a une foule de choses que j'aurais aimé être trop jeune pour connaître ». Il toussa puis sourit légèrement. Son expression était de nouveau hantée. « Profite de ton enfance tant que tu peux, Harry… Dieu sait qu'elle finira bien assez tôt. Je sais que tu t'impatientes, que tu en as assez de ne pas savoir, mais tes parents se battent pour te protéger… pour que ta génération n'ait pas à mener la guerre que la mienne doit mener. »
La tristesse et le vide qui marquaient les yeux, comme ses paroles, calmèrent Harry. Quand ses parents disaient que c'était pour le protéger ce n'était pas la même chose que quand ça venait de Sirius. Il avala sa salive. Il venait de se rappeler que Sirius avait failli mourir pour protéger sa famille.
« Je suis désol » dit-il doucement.
« Tu n'as pas à l'être les enfants sont impatients » répondit plus légèrement son parrain. « C'est ce qui les fait grandir ».
Harry acquiesça et changea de sujet en réfléchissant aux paroles de Sirius. « Tu faisais partie de l'Ordre, Sirius ? »
« Tu n'es pas censé être au courant, Harry ».
Il eut un petit sourire. Quelque chose dans sa voix disait à Harry que Sirius n'en était pas surpris.
« Oui, j'en faisais partie » reconnut Sirius avec un sourire. « Il y a longtemps »
« Tu vas en être de nouveau ? »
« Je ne sais pas. Pour dire la vérit » ses yeux s'assombrirent. « Certains doutent qu'on puisse me faire confiance. »
Harry eut l'air choqué. « Pourquoi ? » demanda-t-il.
« Personne ne s'est jamais enfui d'Azkaban avant », répondit Sirius. « Le peu qui ce soient jamais échappé des griffes de Voldemort n'ont jamais réussi à le faire sans dégâts… La plupart ont été corrompus ou retournés pour le servir. »
« Mais le professeur Fletcher a réussi, lui, non ? »
Sirius secoua la tête. « Avant la guerre, Mondungus Fletcher était l'un des hommes les plus avenants et les plus insouciants que je n'ai jamais rencontré. En fait, il n'était même pas encore un Auror quand moi j'y suis entré. Il a passé plusieurs années dans des milieux moins soucieux de la loi. Il n'est devenu un Auror que quand les choses ont commencé à devenir grave. Ces expériences l'avaient changé… je suis sûr que tu peux t'en rendre compte. »
« Ouais ».
« On l'a sauvé et ceci en a rassuré plus d'un. Ils pensent que Voldemort ne l'aurait jamais laissé partir ».
La voix de Sirius était plus qu'amère mais Harry ne savait pas quoi lui répondre. Ils reprirent leur chemin en silence. Il réfléchissait à ce que Sirius venait de dire. Il s'agaçait toujours d'être considéré comme trop jeune pour faire quelque chose mais il n'avait jamais réfléchi avant aux raisons du silence de ses parents. Il n'avait jamais réfléchi qu'aux raisons officielles et au fait qu'il n'avait que onze ans. Harry avait toujours su que ses parents étaient très engagés dans la lutte contre Voldemort mais ils ramenaient rarement du travail chez eux et n'en parlaient presque jamais avec lui. Ca l'avait toujours énervé mais Harry savait qu'ils l'aimaient. En fait ces parents lui avaient toujours paru trop protecteurs.
« Et bien, et bien, et bien… qui voil ? »
Sirius et Harry se tournèrent d'un bond en entendant la voix sèche et sarcastique. Harry remarqua combien son parrain se tendait en croisant le regard du professeur Rogue. Leur inimitié avait l'air mutuel. Les yeux de Rogue se rétrécirent et il prit un air de dédain.
« Quelle surprise » continua-t-il avec acidité. « Potter se promène après le couvre-feu, encouragé sans doute, par son irresponsable de parrain. »
« Quelle surprise de voir Servilo mettre son nez dans les affaires des autres » rétorqua Sirius.
Les yeux sombres de Rogue s'enflammèrent. « Tu n'arrivais pas à dormir, Black ? » demanda-t-il, avançant vers eux d'un air menaçant, ses robes balayant le sol autour de lui. Elles étaient différentes de celles qu'il portait habituellement, remarqua Harry, sans pour autant y trouver une autre signification. « Certains démons te hantent, peut-être ? »
Harry se rembrunit ? Comment Rogue pouvait-il oser se moquer du temps que Sirius avait passé à Azkaban ? Cet homme n'avait-il donc aucun sentiment humain ? Ne pouvait-il pas au moins respecter ce que Sirius avait endur ? Il allait répondre vertement quand la main de son parrain se posa brutalement sur son épaule pour l'en dissuader. Sirius était devenu très pâle. Tout son corps était tendu de colère et son emprise sur l'épaule de Harry était si forte qu'elle en était presque douloureuse. Les yeux qu'il posait sur l'autre sorcier étaient sombres et hantés. « J'imagine » dit Sirius avec hauteur, « que tu n'as jamais eu le même problème »
Rogue pila. « Toi » cracha-t-il, « tu ne peux même pas comprendre ce que je fais ».
« Non ? » rétorqua Sirius. « Un élève s'y tromperait peut-être mais moi je reconnais la robe que tu portes ».
Une robe de Mangemort ! Les yeux de Harry s'étaient agrandis sous le choc et il se souvint où il les avait déjà vues. Mais il n'aurait jamais pensé que Rogue aurait eu le culot de les porter dans Poudlard. Le directeur-adjoint ne parut pas cependant surpris que Sirius les ait reconnu. Même si ça ne lui plaisait pas. Ces traits se crispèrent de colère. « Mais toi, toi entre tous, tu devrais comprendre que c'est nécessaire ».
« Comme si ça suffisait à excuser les choix que tu as fais » gronda Sirius. « Mais je comprends autre chose, Rogue. La première est que tu devrais plutôt aller à l'infirmerie avant de t 'écrouler ».
« Le temps passé à Azkaban a plutôt altéré ton sens de la répartie » dit Rogue en levant les yeux au ciel. Harry confus regarda Sirius.
« Pas assez pour que j'oublie les effets secondaires du sortilège Endoloris ». Ses yeux bleus se centrèrent sur Rogue. « Des traits pâles, des mains tremblantes, des pas incertains… »
« Ma santé ne te concerne pas ! » Il enfouit ses mains dans ses robes avant que Harry puisse décider si elles tremblaient. Il était nettement plus pâle qu'à l'ordinaire.
« De fait, j'aimerais n'avoir jamais à m'inquiéter pour toi » acquiesça Sirius. « Mais je suppose que certains ne partageraient pas cet avis, si tu vois ce que je veux dire ».
« Je vois tout à fait »
« Alors, arrête de faire l'imbécile et de rester là à te disputer avec moi », répondit le parrain d'Harry avec un sourire peu gentil. « Je suis presque sûr que tu as des choses plus intéressantes à faire ».
« Je suis tout à fait capable de soigner un sortilège Endoloris », aboya Rogue avec irritation.
« Et moi, non ? »
Les deux sorciers se dévisagèrent pendant un long moment, avec une haine réciproque évidente. Finalement, l'instinct de conservation de Rogue sembla se réveiller et il commença à s'éloigner. Il lança par-dessus son épaule : « Emmène donc ce sale gamin loin de ce couloir avant que je ne retire cinquante points à Gryff… »
Et il s'effondra.
+++
James n'adorait pas les réunions tard le soir mais il devait reconnaître parfois leur utilité. Un bref regard à la pendule murale d'Arabella lui apprit qu'il était près de dix heures – l'heure à laquelle il avait promis à Lily qu'il serait sans faute à la maison. Mais il en avait presque terminé. Si rien d'imprévu n'arrivait – comme une visite surprise de Barty Croupton Sr, qui semblait prendre ces temps-ci un intérêt malsain à tout ce qui touchait la division, James pensait qu'il serait capable de rentrer à l'heure à Godric Hollow et de dormir ailleurs que sur son canapé.
« Il est dix heures » dit Arabella doucement.
James soupira. « Ouais. Toute cette excitation autour de l 'évasion de Sirius m'avait fait espérer qu'on ait une chance, mais… »
Il haussa les épaules et sa supérieure acquiesça. Il y avait trop de mais, trop de choses ne s'étaient pas déroulées comme prévues. Ils savaient tous les deux le prix des faux espoirs. « Je trouve difficile de croire que il sera capable d'agir après une semaine de plus dans cet endroit », confirma-t-elle. « Malheureusement, le fait que nous n'ayons pas entendu parler de lui veut sans doute dire que son Portoloin et sa baguette ont tous les deux été confisquées ou détruits. L'opération brise-glace a échou ».
« Nous étions si près », gémit doucement James. « Si près… »
« Oui, nous n'étions pas loin » acquiesça-t-elle froidement. Ses yeux brillèrent cependant avec une émotion qui révélait que son apparent détachement était un mensonge.
La frustration monta en lui avec l'inquiétude envers un homme qu'il avait considéré comme un ami. Tu l'as envoyé là-bas, dit une petite voix déplaisante dans la tête de James. Tu avais tellement confiance dans ton grand plan que tu as envoyé Bill à Azkaban, où il va mourir. Comment vas-tu pouvoir annoncer à Arthur et Molly que tu leur as perdu un autre de leurs fils ? Ses entrailles étaient gelées. « Je veux savoir pourquoi », lança James avec colère. « Qu'est-ce qui a merd ? Nous savons qu'il avait réussi à les faire entrer et ces sortilèges ne pouvaient pas être détectés – alors comment Voldemort a-t-il fait pour savoir ?
« On peut penser que Weasley a craqu »
« Pas Bill, » l'interrompit James. « Il est meilleur que ça. »
« Tout le monde peut craquer à Azkaban » rappela son ancien Mentor. « Quelle autre explication y aurait-il ? »
« Nous avons été trahis ».
Le bureau de Bella se fit très froid et il avala sa salive. L'Ordre avait déjà eu à faire à des espions et des traîtres auparavant. Quel que soit leur impact, ça ne modifiait jamais ce qui était mis en jeu et ce que pouvait détruire une trahison. La Directrice de la mise en œuvre des lois magiques répondit sombrement :
« Par qui, James ? Nous étions si peu à savoir… qui pouvons-nous accuser ? Vous, moi ? Ou Dumbledore ? Pourquoi pas Lily ? Mondy se serait plutôt couper lui même le pied et Severus lui-même n'était pas au courant – pour sa propre sécurité. J'ai du mal à croire que Weasley ait pu craquer, vu les circonstances. Mais la liste des suspects est très courte, non ? »
« Il y a quelque chose qu'on ne voit pas » marmonna James.
« Sans doute » acquiesça Arabella calmement. « Mais une fois de plus, c'est toujours comme ça ».
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La première chose qu'il vit en ouvrant les yeux fut le visage de Remus Lupin. Des cheveux châtains, des yeux bleus et une expression soucieuse penchés sur lui, couché – il s'en rendit brusquement compte – sur son propre lit.
« Ne me dis pas qu'il est l » gronda immédiatement Rogue.
« Non, il n'est pas l » répondit le directeur avec un soupir presque imperceptible. Mais son acquiescement ne cachait pas son agacement.
« Bien ». Il essaya de s'asseoir mais il rencontra la main de Remus qui le força à se rallonger.
« Cependant » reprit celui-ci avec sévérité. « Tu as eu de la chance que ce soit Sirius qui t'ait trouvé. Un autre n'aurait peut-être pas eu la présence d'esprit de t'amener ici. »
« Il est entré dans mes appartements ?» demanda Severus. La vision de ses sortilèges de protection battus en brèche et de ses appartements dérangés l'assaillit immédiatement. Ce n'était pas difficile d'imaginer le chaos qu'un homme comme Black porterait dans le sanctuaire d'un homme qu'il détestait depuis si longtemps.
« Bien sûr » répondit Remus d'un ton égale. « Comme moi, dès qu'il a envoyé Harry me chercher. Je dois aussi dire que Sirius a été assez malin pour ne pas chercher à lever lui-même tes sortilèges de protection – surtout que je connais tous les mots de passe ».
« Et bien. Quelle surprise ». Rogue leva les yeux au ciel. Il avait dû s'empêcher de prononcer les paroles qui lui venaient à l'esprit : Je ne savais pas qu'il pouvait se montrer intelligent. Malheureusement, Remus avait appris à bien le connaître.
« Severus… »
Il reconnut la mise en garde dans sa voix mais l'ignora. Il lança au contraire au directeur son regard le plus irrité. « Est-ce que je peux me lever maintenant ? »
« Non » Remus eut l'air d'avoir d'autres choses à dire mais Severus reprit plus vite.
« Quelle heure est-il d'ailleurs ? J'ai des cours à préparer... »
« J'en suis sûr » répondit l'autre avec sa putain de voix calme. « Mais je veux d'abord savoir ce qui explique que tu te sois écroulé dans le couloir au beau milieu de la nuit ».
Rogue savait que ce n'était pas la peine de discuter quand il employait ce ton là. Mais il n'avait jamais prétendu être poli – même avec ses propres amis. Surtout après une nuit comme celle-là. « Qu'est-ce que tu crois qu'il s'est pass ? » demanda-t-il avec amertume.
« Peut-être devrais-je reformuler ma question et demander pourquoi Voldemort était si en colère contre toi » répondit Remus avec calme. Severus n'avait pas souvent réussi à le tromper et il semblait que cette fois serait comme les autres. Rogue soupira.
« Black » cracha-t-il et il observa avec curiosité la réaction des sourcils châtains.
« J'avais cru comprendre que tu pourrais présenter la baguette comme un 'accident' » dit le directeur.
« C'est ce que j'ai fait », reconnut-il en bougeant légèrement quand la douleur traversa sa poitrine. Sa vision s'embrumait mais il serait mort plutôt que de l'admettre. Ce n'était après tout qu'un effet courant du sortilège Endoloris. Il en avait déjà supporté de pire. Bien des fois.
« Il t'a cr ? »
Rogue haussa les épaules et le regretta immédiatement. « Je suis vivant, donc il semble que oui ».
Remus se rembrunit mais ne rétorqua rien. Lui aussi savait que ce serait peine perdue. « As-tu appris quoi que ce soit d'utile ? »
« A part le fait que le Seigneur des Ténèbres veut toujours ton stupide copain plus que tout ? » demanda-t-il sèchement. Il soutint le regard de Remus. « Je continue de penser que Black ne nous dit pas tout ».
« Il dit qu'il ne se souvient pas, Severus. »
« Je sais », Rogue lutta contre l'envie de lever une nouvelle fois les yeux au ciel. « Mais, crois-moi, le Seigneur des Ténèbres ne fait jamais rien sans raison. Là, il est obsédé par le besoin de capturer Black – vivant si possible. Et ce n'est pas sa méthode habituelle, comme tu le sais. Il y a autre chose et je pense que ce connard sait ce que c'est. »
Les yeux de Remus se rétrécirent. « Il n'a aucune raison de mentir ».
« Vraiment ? »
« Non, vraiment ». La voix du directeur devint froide et dure. « Je sais que tu ne l'aimes pas Severus, mais Sirius n'a jamais été autre chose que loyal envers l'Ordre. Tu le sais. Et Voldemort ne se donnerait pas autant de mal pour le capturer q'il était une taupe. »
« Je n'ai jamais dit qu'il était une taupe », rétorqua Rogue sans beaucoup de vigueur. La colère brillait dans les yeux de Remus et ce n'était pas quelque chose qu'il était habitué à subir. De plus, il ne pensait vraiment pas que Black soit une taupe. Toutes les preuves disaient le contraire. Mais quelque chose sonnait faut dans toute cette histoire. Pourquoi était-il le seul à le voir si clairement ?
« Non, mais tu l'as insinu ». L'autre sorcier le dévisageait avec tellement d'intensité qu'il ne put que se recroqueviller. Donc je ne lui fais pas confiance pensa Rogue avec irritation. Et je n'ai aucune raison de le faire. Mais le directeur avait reprit de sa voix calme et posée habituelle ce n'était que parce qu'il le connaissait si bien que Severus pouvait voir combien il se contrôlait. « Je le crois. Si Sirius dit qu'il ne s'en souvient pas, il ne s'en souvient pas. Et je suis sûr qu'il y a une raison au fait que Voldemort le veuille avec autant d'intensité mais, sauf si tu arrives à le découvrir, nous devrons simplement attendre ».
« Génial », aboya Rogue. « Mais si ça finit mal, ce ne sera pas de ma faute ! »
« Je ne dirais jamais cela ». Il y avait presque quelque chose de serein dans la voix de Remus.
« Sais-tu quelque chose que je ne sais pas ? » demanda-t-il. La douleur et la fatigue le rendaient irritable et sa tête lui tournait.
« Non » lui fut il répondu très naturellement. « C'est juste que je connais Sirius Black ».
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Note de Fénice la traductrice : Le dernier échange est un peu intraduisible parce que Robin joue sur les différents sens du verbe to know – savoir et connaître… Juste pour dire que rien ne remplace jamais la VO.
