Promesses tenues

Disclaimer :

Dans celui là encore, des passages que j'adore comme :

"I'm quite serious, Sirius."

"Changed you name, did you?" he riposted immediately. "Liked mine so much that you couldn't resist?"

Est-ce que je vous ais dit récemment combien je trouvais Robin géniale ? Oui ? Ah tant pis….

Je vais quand même préciser – que ceux qui le savant, que ceux qui l'ont lu milles fois, me pardonnent – « Sirius » et « serious » en VO, ça se prononce pareil. Allez traduire ça….

Texte relu par Alana Chantelune.

Chapitre vingt-six : Choix imprévus

« J'ai pensé « dit Remus au petit-déjeuner, « que puisque tu m'as privé de mon Professeur de Défense Contre les Forces du Mal, tu me dois une ou deux choses ».

Sirius grogna. « Tu sais bien que j'ai pas eu le choix ».

« C'est vrai mais comme Voldemort n'est pas là, il faut bien que je m'en prenne à quelqu'un ». Son ami eut un sourire rusé.

« Je vois «. Sirius sourit lui aussi, presque contre son gré. C'était de plus en plus facile à faire – enfin, parfois. Et bien qu'il n'ait presque pas dormi la nuit précédente, cette journée s'annonçait belle – surtout avec ce qu'ils avaient prévu pour ce soir.

Remus rit doucement. « Je m'en réjouis ».

« Vraiment. Et quelle est donc cette faveur que je vous devrais, ô Directeur sans peur et sans reproche ? »

Remus faillit s'étrangler en buvant son jus d'orange en entendant ça. Sirius sourit. Une fois qu'il eut repris le contrôle de lui-même, Remus leva les yeux au ciel. « Si tu continues à dire des trucs pareils, je vais renoncer à t'offrir un poste ! »

« Un poste ? » Il regarda son ami avec un air étrange. Qu'est ce qui prenait Remus ce matin ? Un poste ? Il devait être devenu fou.

« Oui, un poste », répéta l'autre avec douceur. « Le poste de Défense Contre les Forces du Mal, pour être précis. Il semble que les derniers évènements aient prouvé que tu étais assez qualifié ».

Sirius le dévisagea. Il cilla, tournant et retournant cette possibilité dans sa tête. C'était bizarre de s'imaginer devenir professeur – surtout quand il pensait à toutes les retenues qu'il avait accumulées ! Sans parler de toutes celles auxquelles il avait réussi à échapper simplement en n'étant pas pris. Remus avait toujours désiré devenir un professeur. Sirius n'avait jamais eu de mal à l'imaginer à Poudlard mais lui… la simple idée lui était complètement étrangère. Remus ne devait pas être sérieux. Il lui lança un sourire un coin. « Il me semble que tu passes trop de temps avec les mômes, ça t'a ramolli le cerveau ! »

« Je suis tout à fait sérieux, Sirius »

« Alors comme ça tu as changé de nom ? » riposta-t-il immédiatement. « Tu aimais tellement le mien que tu n'as pas pu résister ? »

Remus gronda. « Celle-là, il fallait que tu la fasses, hein ? »

« Tu m'as donné le bâton pour te battre » - reconnut-il.

« Ne change donc pas de sujet ». Son ami lui lança ce qui devait sans doute être son officiel « regard du directeur «, mais il ne fit que glisser sur Sirius sans l'atteindre.

« Moi, j'ai changé de sujet ? »

« Oui, sans aucun doute ! Espèce de malade mental ! » répondit Remus, exaspéré. « Ecoute, je suis… laisse tomber. Avec toi, je dois abandonner toutes mes phrases habituelles… C'est une offre sincère, Sirius. Ce n'est pas une blague. Je t'offre un travail. »

Pendant quelques instants, il ne put rien faire d'autre que le dévisager. Il lui fallut bien une seconde pour qu'il puisse simplement commencer à envisager la possibilité. Et ceci donna une drôle d'impression à Sirius. Essayer de s'imaginer en prof était difficile, même si la Défense Contre les Forces du Mal avait toujours été une de ses matières favorites. Les années qu'il avait passées à Poudlard avaient été les meilleures de sa vie. Et les retrouver comme cela était tentant et douloureux à la fois. Poudlard était ce qu'il avait de plus proche d'une maison. Y revenir pourrait s'en doute l'aider à guérir ses plaies encore béantes de son âme et de son esprit. Même s'il n'y rencontrait pas James ou Peter tous les jours. Quand il s'était échappé de Voldemort, Poudlard lui avait sembler le seul endroit possible pour aller – le château avait toujours été son port d'attache.

Sirius cilla et laissa son regard errer sur les centaines de jeunes visages qui prenaient leur petit-déjeuner dans la Grande Salle. Etaient-ils si différents de ce que lui et ses amis avaient été ? Ils vivaient dans un monde plus sombre mais pourtant il pouvait voir sur leurs visages les mêmes sourires et les mêmes rires. Comme lui, ils quitteraient un jour Poudlard et devraient affronter l'amertume de la réalité. Si personne n'arrêtait Voldemort, ces enfants entreraient bientôt dans la même guerre que celle qu'il avait menée, d'une manière ou d'une autre, depuis près de quatorze ans. Beaucoup feraient ici, à Poudlard, les choix qui détermineraient comment ils prendraient part à cette guerre, s'ils y survivraient ou s'ils y mourraient, de quel côté ils allaient se battre. Pour faire cela, ils avaient besoin d'être guidés et préparés par des gens comme Remus Lupin, qui s'inquiétaient de leur futur et de leur bien-être.

Il laissa lentement échapper la respiration qu'il avait retenue. Quand il était élève, il n'avait jamais vraiment respecté les professeurs. Il leva les yeux vers Remus et vit les yeux bleus profonds de son ami qui attendaient. Le choix lui parut d'abord difficile jusqu'au moment où il se souvint de ce qu'il avait été, de ce qu'il serait toujours. Il parla alors calmement.

« Je crois que je vais devoir refuser, Remus » dit gentiment Sirius. « Quelque soit l'admiration que j'ai pour ce que tu fais ici, mais si je sais combien ça aide notre cause, je ne peux pas accepter. Je ne peux pas me mettre de côté et apprendre à d'autres. C'est noble, c'est certainement utile, mais ce n'est pas pour moi. »

« Tu serais plus en sécurité ici, tu sais, » répondit très doucement son ami.

« Je sais », admit-il. « Mais je ne peux pas accepter de me laisser effrayer comme cela. J'en ai marre d'être une victime. Je veux rendre les coups. »

Remus se rembrunit. « Personne ne peut dire que tu n'en as pas encore fait assez, Sirius. »

« La guerre n'est pas vraiment une équation. » Il haussa les épaules. « Je ne sais pas vraiment comment te faire comprendre Remus. Je sais juste que je ne peux pas. Je dois continuer à me battre. C'est la seule façon que je connaisse de me prouver que je suis toujours celui que j'ai été. »

Le directeur lui lança un regard inquiet. Sirius essaya d'être plus clair.

« C'est comme si j'avais cette responsabilité… Je suis le même mais pourtant je suis différent d'avant… Quelque chose s'est passée, quelque chose dont je ne me souviens pas… Azkaban m'a changé. Je m'en rends compte chaque jour un peu plus. »

« Tu t'en rends compte ? »- demanda Remus avec inquiétude. « Qu'est-ce que tu entends par l ? »

« Je n'en suis pas très sûr. C'est quelque chose qui semble juste aux frontières de ma conscience, hors de ma portée. » Sirius haussa les épaules. Il ouvrit la bouche pour continuer de décrire ce sentiment mais ses souvenirs le prirent par surprise.

Des cris.

Des chaînes.

Il se bat mais ne se rappelle plus pourquoi.

Il a rarement été si fatigué. Ses souvenirs récents sont flous mais il sait d'une manière ou d'une autre que c'est l'affrontement de deux volontés et qu'il dure depuis un certain temps. Il sait aussi que ce n'est pas la première fois.

Une main blanche et fine dresse une baguette et la pointe droit sur le cœur de Sirius. Il serre ses bras autour de sa poitrine, fouillant au plus profond de lui pour rassembler de quoi résister. Il s'accroche à ses souvenirs, confus et presque oubliés, d'une autre vie, avant l'enfer. Après ce qui lui parut une éternité, la voix aiguë et froide articula avec précision.

 « Mandatus Prospicio Subigum ! »

Chaque mot le blesse et insuffle la douleur dans tout son corps. Un feu se met à brûler dans son cœur puis en déborde. Sirius se débat sans des chaînes à la recherche d'air et de contrôle sur lui-même. Instinctivement, il sait comment il doit se battre. Mais il ne comprend pas d'où lui vient cette connaissance. Ses sens lui disent que c'est de la magie noire, très noire et très ancienne. Mais il n'a jamais entendu ce sortilège avant. Il se bat de tout son cœur et de toute son âme. Il sait seulement qu'il doit le faire. Il doit oublier sa douleur et garder son esprit…

« Sirius ? »

La voix de Remus le sort brutalement de cette transe inattendue. Sirius secoue sa tête avec difficulté, ferme les yeux plusieurs fois pour repousser le souvenir. La main de son ami est soudain sur son épaule et la presse avec douceur. Sirius réalise alors qu'il tremble.

« Ca va ? » demande Remus avec calme.

Il avala sa salive. « Ca va » . Sa bouche est très sèche, très, très sèche. Il se demande pourquoi. « Juste un souvenir ».

« Tu es devenu plus blanc qu'un fantôme, Patmol ».

« Ca va aller. » Sirius repoussa ses pensées les plus sombres, il dut y mettre toute sa volonté. « Ca m'a pris par surprise. »

« Si tu es sûr… ? » La main de Remus se retira après une dernière pression amicale quand Sirius acquiesça.

« Est-ce que tu as déjà entendu parler d'une incantation comme 'Mandatus Prospicio Subigum' ? »

Le directeur fronça les sourcils. « Non, pourquoi ? »

« Je me demandais juste »

« Tu es sûr de ne pas vouloir penser plus longtemps à ma proposition ? » - demanda son ami. « Même pendant un petit moment… juste le temps que… tu ailles mieux ? »

« Comme Fletcher, tu veux dire ? » - demanda-t-il, désignant d'un signe de tête le professeur de métamorphoses plus loin à la table.

« Poudlard est un bon endroit pour guérir, Sirius. »

Il soupira. « Je sais. Mais je ne crois pas qu'il y ait d'autres moyens de combattre mes démons que de leur faire face. Je ne peux pas me cacher. »

« Je devais juste essayer, tu comprends. » Remus sourit très légèrement.

 « Je sais. Mais pourquoi ne proposes-tu pas ce poste à Dung ? Il est au moins aussi qualifié que moi, » fit remarquer Sirius.

« Il ne voudra même pas en entendre parler. Il ne veut pas s'occuper de Forces du Mal, » lui fut-il calmement répondu.

« Ah ». Une partie de Sirius ne pouvait pas reprocher cette décision à Fletcher mais une autre partie refusait de comprendre la peur. Fuir les choses, d'après lui, ne faisaient que les renforcer. Et personne ne pouvait fuir toujours Voldemort. « Je vois. »

« Oui » confirma Remus doucement. « Ca va pas être facile. J'ai bien quelques candidats mais aucun ne me plaît. »

« Oh. Qui par exemple ? » - demanda-t-il avec intérêt.

« Que des gens bizarres. Le fils de Barty Croupton, par exemple. Il travaille au Département des Mystères actuellement. Gilderoy Lockhart, mais je ne crois pas que j'arriverai à supporter un tel ego ici. Dolorès Umbridge a aussi fait acte de candidature. Cette bonne femme me donne la chair de poule. Elle a déjà créé que des histoires au Département des Catastrophes Magiques avec Cornélius Fudge. »

« Une fine équipe » - commenta Sirius plein de sarcasme.

Remus leva les yeux aux ciels. « A eux tous, ils n'ont pas une heure d'expérience en enseignement. Sauf si tu écoutes Lockhart, mais je ne crois pas un mot de ce qu'il dit. »

« Pourquoi ? » Le nom de Gilderoy Lockhart lui disait quelque chose mais il était sûr qu'il ne l'avait jamais rencontré – à moins qu'ils n'aient été ensemble à Poudlard.

« C'est un arrogant et un con pompeux. Voilà pourquoi, » répondit Remus sans cacher son dégoût. « Il n'y a pas une sorcière dans le monde magique qui ne s'évanouisse pas à son nom. J'ai entendu dire qu'il vient de publier un nouveau livre : « Moi, le magicien » ou quelque chose du même goût. Il a quatre ans de plus que nous. Un Poufsouffle – bien que je ne pense pas que ceux-ci le reconnaissent encore comme un des leurs. Tu as de la chance de ne jamais l'avoir rencontrer. »

« Je prends cela comme un conseil », répondit Sirius. « Alors comment vas-tu t'y prendre pour trouver quelqu'un ? »

« Je vais les voir tous les trois », dit Remus l'équitable. « Croupton junior vient aujourd'hui, Umbridge demain matin et Lockhart le jour suivant. Ca sera peut-être drôle. »

« Je parie. »

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James avala sa salive en regardant Arthur et Molly s'asseoir tous les deux à la table de sa cuisine. Il essayait de cacher sa nervosité mais sans succès et il le savait bien. Un déjeuner appétissant les attendait mais il ne ressentait aucune faim. L'idée même de manger soulevait le cœur de James.

« Où est Lily ? » - demanda soudain Molly.

« Toujours au travail. Dumbledore a une rencontre avec la Gazette des sorciers, elle ne pouvait pas partir. »

« Dommage », répondit Molly.

« Oui, » répondit doucement James. « Moi aussi, j'aimerais qu'elle soit là. » C'était un mensonge. C'était plus facile sans Lily. Il ne savait pas encore comment il allait leur dire mais il savait au moins que seul, il le ferait. Alors qu'il réfléchissait encore à comment il allait s'y prendre, Arthur prit un peu abruptement les devants.

« Quelque chose vous tracasse, James » dit gentiment le sorcier plus âgé. « Ceci n'est pas seulement une invitation amicale, n'est-ce pas ? »

Le plateau de la table ne lui avait jamais paru aussi intéressant mais il se força à lever la tête et à soutenir, tour à tout, le regard de Arthur puis celui de Molly. « Non » dit-il lentement. « Ce n'est pas seulement une invitation amicale. Je dois vous parler de Bill. »

Molly laissa échapper un petit cri. Arthur blêmit. James comprit qu'il aurait peut-être dû introduire le sujet autrement mais maintenant il n'avait plus le choix.

« Il n'est pas mort », précisa-t-il immédiatement. « Nous sommes au moins sûrs de ça. Mais l'Ordre ne vous a pas tout dit, pas tout ce qui s'est pass »

« Il n'a pas… il n'a pas reçu le baiser, n'est-ce pas ? » - murmura Molly.

« Non. » Autant que nous sachions, ajouta-t-il pour lui-même. A tout prendre James préférait mentir que dire la vérité puisque de toutes façons ils ne savaient pas. Il inspira profondément et continua. « On ne vous a pas dit pourquoi Bill a été capturé. »

 Ils lui jetèrent un regard d'incompréhension. Arthur prit très lentement la parole. « Bella m'a dit qu'il y avait eu un raid et qu'il avait commis une erreur… »

« Il n'y a pas eu d'erreur « James avala sa salive. Il avait toujours su que ça ne serait pas facile mais il avait été en dessous de la vérité. « Je l'ai envoyé à Azkaban. »

« Quoi ? »

« La capture de Bill faisait partie de l'opération Brise-glace que l'Ordre a commencé à préparer en septembre dernier. L'idée était d'infiltrer un sorcier à Azkaban, muni d'un Portoloin et d'une baguette bien cacher. Après une semaine, ces deux objets devaient apparaître et lui permettre de sortir ou d'en faire entrer d'autres. Quelque chose a merdé. La semaine s'est écoulée et nous avons recherché le portoloin mais il n'a pas été mis en service.

Ceci veut malheureusement dire que Bill a été découvert », continua James avec douceur. « Comment, nous n'en savons rien. Nous savons seulement que maintenant il ne peut compter que sur lui. »

Ils prirent cela mieux qu'il ne s'y était attendu. Mais le coup leur fit très mal. Molly et Arthur étaient cependant des gens solides et après quelques instants, Arthur retrouva sa voix : « Et maintenant ? »

« Nous continuons de chercher à entrer à Azkaban « répondit James. « Et nous pourrions bien y arriver bientôt… mais je ne peux rien vous promettre. Tout ce que je peux dire c'est que nous ferons de notre mieux pour le sortir de là. »

Molly avala sa salive et son expression suffit à James pour savoir que personne ne mangerait le déjeuner. « Bien « dit-elle doucement. « Je pense que c'est tout ce que nous pouvons demander, n'est-ce pas ? »

« Je suis désol », murmura-t-il. « J'aimerais tant pouvoir dire autre chose. » J'aimerais tant arrêter d'envoyer des gens bien au casse-pipe.

« Nous savons bien cela, mon ami. » Molly lui pressa le bras et il vit dans ses yeux briller des larmes qu'elle était trop fière pour laisser couler. « Et je suis sûre que Bill avait compris quels risques il courrait. »

James ferma les yeux et secoua doucement la tête. Il ravala sa propre émotion. « Oui, qui d'entre nous l'ignore ? »

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« Comment t'es-tu fait prendre, petit ? » lui demanda une voix écorchée.

Bill pensa que ça faisait qu'il avait découvert qu'il pouvait parler au prisonnier de cellule à côté de la sienne. Mais c'était en fait la première fois, qu'ils le faisaient. Après ce premier jour, Bill d'abord, puis son voisin, avaient été emmenés par les Lestrange. Ensuite, comme toutes les nuits, les Détraqueurs n'avaient cessé de se promener dans la prison. Après la torture, leur présence avait eu un effet catatonique sur Bill et avait contribué à lui faire perdre la notion du temps. Mais n'était-ce pas l'effet d'Azkaban lui-même ?

Il hésita avant de répondre. Un instant, il eut envie de dire la vérité – il n'avait plus rien à perdre, après tout. Voldemort savait déjà tout et avait mis fin à sa mission. Mais une partie de lui était incapable de la laisser sortir, elle ne voulait pas craquer, même après tout ce temps. Ca ne comptait pour personne sauf pour lui. Mais il devait se raccrocher à quelque chose.

« Un raid », répondit finalement Bill. « Dès le départ tout est allé de travers et j'ai fini par me faire prendre… »

L'autre toussa de l'autre côté du mur et ça ressemblait curieusement à un rire. « Si tu ne veux pas me dire, petit, dis-le. Tu n'as pas à inventer des mensonges. »

« Oh. Pardon. »

« Pas de quoi, » répondit Franck. « Dans un endroit comme celui-ci... c'est déjà bien de voir que tu continues de réfléchir… C'est déjà ça. »

« La connerie. J'ai joué au héros… » Franck toussa. « Mais j'ai sorti mon équipe de là en tout cas et c'est ce qui compte. »

« Ouais » reconnut-il doucement. Il se sentait étrangement libre sans les Détraqueurs – tous les jours, aller savoir pourquoi, ils disparaissaient pour un moment vers midi. Bill n'avait toujours pas compris pourquoi mais il n'allait pas courir le risque de voir s'envoler cette chance. C'était bien de retrouver son âme pendant un moment, fut-il très court.

Le silence qui suivit fut extraordinairement long puis Frank reprit la parole. « Donc… tu étais dehors plus récemment que moi. Quoi de neuf ? »

« Rien de spécial », reconnut Bill. « Ils essayent toujours de reprendre cet endroit. » Si Frank faisait partie de l'Ordre, il saurait qui 'ils' désignaient. Sinon, il penserait sans doute qu'il parlait du Ministère. Et de toutes façons, Voldemort le savait déjà. Bill trouvait difficile d'y accorder une quelconque importance.

« Ah. Dommage qu'ils ne se dépêchent pas un peu plus, hein ? »

« Ouais. »

Ils partagèrent comme des compagnons le silence qui suivit. Ils ne disaient rien mais étaient heureux de savoir qu'ils n'étaient pas seuls. Mais ils avaient besoin de parler, de se rassurer. De nouveau, ce fut Frank qui parla. Sa voix s'était faite très douce. « J'ai entendu dire qu'il y avait eu une évasion. »

« Une quoi ? » Le cœur de Bill se mit à battre dans ses oreilles. Etait-ce possible ?

« Ouais. Rodolphus Lestrange n'arrêtait pas de le répéter… tu en as entendu parlé ? »

« J'aurais aimé ». Il y avait donc peut-être un espoir… Bien que ce fût inutile, ses yeux se mirent à étudier les quatre murs humides de sa cellule pour chercher une sortie. Mais il n'y en avait évidemment pas. Il n'y en avait jamais eu.

« Dresse l'oreille. On sait jamais. »

Frank parut incapable de finir cette idée et Bill ne l'était pas plus. L'espoir était presque trop gros pour eux.

 « Ouais… On ne sait jamais. »

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Chez Salamander avait compté parmi les meilleurs établissements du monde magique depuis son ouverture en 1842. D'autres restaurants pouvaient prétendre être plus vieux, d'autres avaient des histoires plus illustres mais aucun n'était plus luxueux et n'offrait de meilleure chère. Cette magnificence justifiait des prix qui auraient vidé en une fois le coffre d'une famille pauvre. Mais il fallait s'y attendre. Le lieu seul – dans le plus profond de Londres à deux pas du Chemin de Traverse, expliquait qu'il fallait retenir pour aller chez Salamander des jours voire des semaines à l'avance. Mais toutes les vieilles familles avaient une table réservée.

Pourtant ce n'était pas tous les jours que les membres les plus éminents de deux des quatorze familles passaient en même temps les grandes portes d'ébène. Le maître d'hôtel se précipita d'ailleurs, ignorant les trois groupes qui attendaient poliment son attention, pour se porter à la rencontre des nouveaux arrivants. Au même moment, trois serveurs se dépêchèrent de préparer la meilleure table pour quatre, avec l'efficacité légendaire de Chez Salamander – celle que leurs clients venaient chercher.

« Monsieur Black, Monsieur Potter «, le maître d'hôtel fit une gracieuse révérence. « Bienvenus Chez Salamander ? Veuillez me suivre, je vous prie. Une table pour quatre ? »

Remus et Peter échangèrent des regards impressionnés mais James hocha seulement de la tête avec politesse. « Une table tranquille, si vous avez cela. »

« Bien sûr. »

Les Maraudeurs suivirent docilement leur guide, essayant d'ignorer les regards curieux mais circonspects des autres convives lorsqu'ils traversèrent l'immense restaurant. Ils arrivèrent à une magnifique table ronde en ivoire. Les chaises étaient couvertes de peluche violette et les couverts étaient d'or pur. L'ensemble faisait de l'endroit quelque chose de spécial et d'élégant, hors du temps. Au moment où chacun des sorciers atteint sa chaise, un serveur humain apparut pour l'aider à y prendre place, avec un sourire courtois. Chez Salamander s'était toujours enorgueillit de cette touche « humaine «. Dans le plus grand restaurant du monde magique, on se refusait à employer des trucs magiques.

Après avoir pris commande de ce qu'ils voulaient boire, les quatre serveurs disparurent.

« Waou », dit doucement Peter. « Cet endroit est incroyable. »

Remus leva un sourcil sceptique. « Je donnerai mon jugement quand j'aurai goûté la cuisine. »

« Allez, Lunard » rit James. « Tu peux pas dire que le service n'est pas fantastique. »

« Ca vous va bien de dire cela, Monsieur Potter, mais moi, je ne suis pas vraiment habitué à un tel traitement. » Remus ne put s'empêcher de rire doucement.

James rit. « Moi non plus! Je n'avais plus mis les pieds ici depuis mon seizième anniversaire. Tu sais bien que ma famille a renoncé à vivre selon son statut. »

« Les miens, au contraire, n'ont vécu que pour cela, » intervint sombrement Sirius. « J'ai été si souvent Chez Salamander que, passé un temps, je connaissais le menu par cœur. » Un demi-sourire fit ressortir tous les plis de son visage. « J'imagine qu'il a quand même dû changer en dix ans. »

« A peine, j'imagine. » James sourit en levant les yeux vers Remus. « Alors Lunard, est-ce que tu vas te décider à ouvrir ce menu ou as-tu décidé de signaler ton mécontentement en mourrant de faim ? »

Remus se rendit compte, avec un peu d'embarras que tous ses amis s'étaient déjà plongés dans leurs choix. Il haussa les épaules avec autodérision. « Je pense que je vais y jeter un œil. » Un rictus amusé finit par lui échapper.

A sa gauche Peter leva la tête. « Les prix sont astronomiques, James » dit-il tout bas. « Je veux dire, quand j'ai suggéré qu'on aille dîner tous ensemble, je ne pensais pas… »

« T'inquiète pas, Queudever, » répondit James avec légèreté. « J'ai… »

« Toi, tu ne vas rien faire » - l'interrompit Sirius. « C'est moi qui invite. »

« Sirius… » Les trois commencèrent en même temps, mais chacun des Maraudeurs s'interrompit en reconnaissant l'expression entêtée qui venait de naître sur le visage de leur compagnon.

« C'est mieux comme ça » dit-il gaiement. « N'essayez même pas de discuter avec moi. J'ai plus d'argent que je ne sais en faire... Plus que toi, Cornedrue, imagine… Et ça n'a servi à rien depuis dix ans, à part entasser de la poussière et des intérêts. Laissez moi donc faire cela pour mes amis, qui m'aident d'une façon que sans doute eux-mêmes ignorent. »

Les paroles de Sirius mirent du temps à pénétrer dans les esprits mais quand elles le firent Remus dut se retenir de le dévisager la bouche ouverte de surprise. Sirius ne s'exprimait pas souvent comme cela – même quand ils étaient jeunes. Et qu'il le fasse aujourd'hui, avec ces fantômes au fond des yeux, avait encore plus de prix. Sirius continuait pourtant de sourire alors que tous le regardaient en silence. C'était un vrai sourire et il alla droit desserrer le nœud qui bloquait la gorge de Remus. Les Maraudeurs attendirent calmement que les serveurs réapparaissent avec leurs consommations. Ils repartirent aussi vite mais aucun des trois ne lâcha Sirius du regard. Ils l'avaient déjà perdu une fois et l'avaient cru parti à tout jamais. Ils leur semblaient qu'ils ne venaient seulement maintenant de comprendre qu'ils l'avaient retrouvé.

Sirius leva son verre très haut. « Laissez-moi proposer un toast. »

« A l'amiti » dit-il doucement. « Aux liens qui ne se brisent pas. Aux frères qui restent ensemble – quoi qu'il arrive – jusqu'à la fin. »

« A l'amiti » reprirent ils, le saluant de leur verre.

A ce moment, tout s'unit. Les dix années de séparation furent réduites à néant. Chacun portait toujours les cicatrices de la perte, des choix et des erreurs mais la distance introduite avec la fin de leur enfance avait disparue. Jamais plus l'un d'entre eux serait assez seul pour servir de cible aux Mangemorts. Jamais plus l'un d'eux disparaîtrait sans que les autres mettent le monde en péril – et eux même – pour le retrouver. Jamais plus, aucun des Maraudeurs ne serait seul contre l'adversité. Ils avaient refait la boucle. Il leur avait fallu perdre, pleurer et retrouver l'un d'entre eux pour le faire. Ils avaient de nouveau dix-sept ans. Ils étaient de nouveaux inséparables et inamovibles. Jusqu'à la fin. Ils ne se sépareraient plus jamais.

Les quatre glasses se touchèrent dans un doux clic. Ils pensèrent tous à cette poignée de main, dans un étroit passage secret, il y avait bien des années. Remus sourit en buvant une gorgée. Ses souvenirs semblaient se refléter dans les visages des autres. Il leva son verre une nouvelle fois.

« Aux Maraudeurs » dit-il. « Qu'ils règnent longtemps. »

Des sourires immenses lui répondirent et les verres s'entrechoquèrent une nouvelle fois. « Aux Maraudeurs ! »

« Maintenant » intervint Peter avec un sourire. « Mangeons ! »

« Tu sais, Queudever, ça fait longtemps que je n'avais pas entendu une meilleure idée, » déclara Sirius en retournant une nouvelle fois au menu. En riant doucement, Remus suivit son exemple. Quand il eut enfin fait son choix, un serveur apparut magiquement à ses côtés et lui demanda :

« Qu'aimeriez-vous manger ce soir, M. Le Directeur ? »

Remus eut un petit sourire – un peu surpris de se voir si connu. Bien sûr, il n'aurait pas dû s'en étonner. Si le fait que Dumbledore l'ait choisi comme professeur de Défense Contre les Forces du Mal pour Poudlard, il y avait des années, n'avait pas été suffisant pour le faire connaître du monde magique, son accession au poste de directeur l'avait fait.

L'agitation qu'avait provoqué l'adoption d'une législation favorable aux loups-garous (élargissant aussi les droits des centaures, des peuples marins, des elfes de maisons et de tous les autres êtres magiques), sous la pression de Dumbledore au Ministère, avait aussi amené Remus à être connu comme le plus célèbre représentant de sa condition. S'ils n'avaient pas été en guerre, de nouvelles lois auraient d'ailleurs déjà été adoptées. Mais ce qui l'avait été aidait déjà Remus à ne plus être considéré comme un monstre effrayant. Il n'était plus qu'une anormalité de la nature, plus ou moins reconnu comme un être humain sauf au moment de pleine lune.

Il donnas a commande avec un sourire poli, heureux de constater que le serveur n'avait pas l'air mal à l'aise face à lui. Quand tous les serveurs furent partis, James regarda Peter. « Alors, pourquoi voulais-tu qu'on mange ensemble ? »

« Ce n'est pas que ce soit une mauvaise idée, mais tu avais l'air de dire que tu avais une autre raison », se moqua Remus.

Peter sourit légèrement. « Vous me connaissez tous trop bien. »

« Tu n'es pas à l'aise Peter. » On pouvait faire confiance à Sirius pour ne pas s'embarrasser d'enjolivements et pour aller droit au but. « Qu'est-ce qui ne va pas ? »

« Et bien… Je suppose que je voulais juste vous dire les choses avant que vous ne les lisiez dans le journal demain matin. » Peter haussa les épaules.

« Qu'est-ce qu'on va lire dans le journal ? » Un poids de plomb venait d'apparaître dans les tripes de Remus. Les autres, il le vit bien, avaient l'air tout aussi inquiets.

« J'ai accordé une interview à Eric Dummingston ce matin, » répondit calmement leur ami. Il inspira profondément – avec un petit tremblement – avant de continuer. « L'article sera dans l'édition de demain de la Gazette du Sorcier. J'y reconnais ouvertement être un Mangemort et… et j'y renonce publiquement à Voldemort. »

Malgré toutes leurs années de vie commune, Remus n'avait jamais vu ses amis si silencieux. Ce fut James, finalement, qui prit la parole.

« Tu sais ce qui va se passer maintenant pour toi, n'est-ce pas Peter ? »

« Je vais devenir la principale cible de Voldemort depuis l'évasion de Sirius, oui, je sais. » Peter eut un sourire un peu fanfaron. « Mais je devais le faire. Je ne veux pas être un espion et je ne veux pas seulement me cacher. » Ses yeux verts étudièrent leurs visages avec désespoir, à la recherche de leur soutien. « Je veux faire une différence. »

Ses mots réveillèrent un écho sans l'esprit de Remus. Combien de fois les avait-il déjà entendus? De sa part, de celle de Sirius ou de James… jamais de Peter. Peter n'avait jamais été capable de surmonter sa timidité naturelle et de ressentir le besoin pressant de se battre… Jusqu'à aujourd'hui. Que pouvait-on répondre face à un tel courage inattendu ? Remus ne trouvait pas les mots mais il savait que Peter avait besoin de leur approbation, de leur soutien. Il aurait tant aimé trouver les mots que son ami avait besoin d'entendre.

Ce fut Sirius, qui était à sa droite, qui frappa son épaule et dit : « Et tu vas en faire une, Peter. Je n'en doute pas une minute. »

« Moi non plus » acquiesça Remus, retrouvant sa voix. C'est alors que James rit doucement.

« Félicitation mon vieux » dit-il avec un petit sourire. « Tu vas entrer sur la fameuse liste des plus personnes les plus recherchées par Voldemort. Demain matin, je suis sûr que Skeeters va commencer à évaluer combine de temps il te reste à vivre. »

Devant l'air abattu de Peter, Remus mit un coup de poing dans le bras gauche de James. « Ne t'inquiète pas. Il blague. »

« C'est ce que dit le seul Maraudeur qui n'est pas sur la liste « grinça Sirius. « Tu prends du retard, Lunard ! »

Remus leva les yeux au ciel. « Merci bien, je n'ai pas besoin de cet honneur. »

« Mais cette liste existe », intervint James. « J'ai le numéro deux, juste derrière Dumbledore, mais Sirius est en train de me piquer ma place et grâce à toi, je vais peut-être descendre à la quatrième place ! »

« Ce n'est pas très drôle, James » - souligna Peter.

James haussa les épaules. « Rigole sinon ça te tueras… Moi je préfère rire. »

« Moi aussi, » acquiesça Sirius doucement.

Leurs plats arrivèrent et la conversation prit un ton plus léger. Ils se rappelèrent leurs jeunes années, leurs blagues et leurs amis. C'était étonnant de voir leurs années s'envoler… même les rides de Sirius s'amenuisèrent et ils le virent rire et s'amuser sans arrière-pensée. Remus ne l'avait pas vu aussi détendu depuis dix ans. Il y avait des moments où la lumière qui irradiait des yeux de Sirius retrouvait la pureté de sa jeunesse – vierge de l'enfer que Voldemort y avait mis. Le regarder se disputer avec bonne humeur avec James – évidemment ils parlaient de Quidditch, leur éternel et principal sujet de discorde – c'était comme revoir le passé.

« Tu devrais voir Harry jouer, » conclut James. « Il est incroyable, absolument incroyable. Je n'ai jamais vu un attrapeur comme lui. Oublie ce Bulgare – c'est quoi son nom déjà, Drum ? Quelque chose comme ça. Harry est simplement génial. Tu dois le voir pour le croire. Dis-lui, Remus. »

Le directeur de Poudlard rit. « Pour une fois, Sirius, James n'est pas juste en train de se vanter de son fils. Harry est plutôt incroyable. »

« Et son nom est Krum, au fait » intervint Peter. Le regard vide de James l'obligea à préciser. « L'attrapeur bulgare. Il s'appelle Krum, pas Drum. »

« Oh, c'est vrai. Mais qui s'intéresse à la Bulgarie de toutes façons ? » demanda James. Les autres rirent.

« Je n'aurais jamais cru qu'un jour je verrai James Potter se tromper à propos de Quidditch, » se moqua Sirius. « Il était temps. »

« Oh, ça va, hein ! »

« Bonsoir, messieurs ». Une voix s'introduit soudain dans leur conversation et tous les quatre se tournèrent vers M. Salamander en personne. Après quelques instants de silence surpris, les Maraudeurs réussirent à reprendre leur savoir-vivre et lui retournèrent ses salutations.

« Avez-vous été satisfaits du service et du repas ce soir ? » demanda Salamander.

« Oui, merci « répondit Remus. « Tout a été parfait. »

« Si vous avez besoin de quoique ce soit d'autres, faites le nous savoir, » continua le propriétaire du restaurant avec un sourire. Une fois que James l'ait eu assuré qu'ils n'y manqueraient pas, Salamander commença à partir mais il s'arrêta pour s'incliner devant Sirius. « Nous sommes heureux de vous revoir, M. Black, vous nous avez manqué. »

« Merci » répondit calmement Sirius et Salamander s'éloigna.

« Vous parlez d'un service » remarqua Peter.

« Tu t'attendais à quoi à la table d'un Black et d'un Potter ? » se moque Remus. « Ils feraient des révérences à l'envers si on leur demandait. »

Sirius étouffa un éclat de rire. « Vous auriez dû les voir le jour où j'ai amené Julia ici… »

Il s'interrompit, lui-même surpris de ce qu'il venait de dire. Une expression extraordinaire traversa son visage et une nouvelle lumière brilla dans ses yeux.

Remus se retint de parler et il put voir que James et Peter faisaient de même. Comment pouvaient-ils annoncer à Sirius la vérité sans briser ce qu'il restait de son cœur ? Il leur était revenu, enfin. Il commençait à revivre, enfin. Et ceci pouvait tout casser. Malheureusement, Sirius avait remarqué l'expression dure qu'avaient prise ses trois amis.

« C'est une Mangemort, n'est-ce pas ? »

Sa voix semblait venir d'outre-tombe. Son visage qui semblait si lumineux l'instant d'avant, s'assombrit. Il était très pâle, touché au cœur. Remus ne put s'empêcher de penser à combien l'espoir était une chose fragile.

 « Oui, » répondit James très calmement. Remus vit quelque chose de curieux traverser son visage. « C'est une Mangemort. »

Sirius ferma les yeux. Son visage devint livide mais quand il les regarda de nouveau, il semblait résigné. « Bien « dit-il très lentement. « Je suppose que ça n'a rien d'étonnant. »

« Parles-en avec Rogue », dit impulsivement Remus. Les mots semblaient s'être échappés de sa bouche avant qu'il n'ait eu la moindre chance de les mesurer. L'envie de rendre l'espoir à Sirius avait balayé toute précaution. Il précisa précipitamment face au regard perdu de son ami. « C'est son ami, Sirius. C'est lui qui la connaît le mieux. Il y a peut-être des choses que l'on ne sait pas. »

« Que veux-tu dire ? »  demanda Sirius.

« Excusez-moi, M. Black, mais M. Salamander a pensé que vous voudriez voir cela immédiatement. » L'arrivée du maître d'hôtel coupa Remus au milieu de sa phrase. Sirius prit l'exemplaire de la Gazette du sorcier qu'il lui tendait. C'était apparemment l'édition du soir. Le visage de Sirius se figea en lisant la première page. Entre temps, James remercia le maître d'hôtel qui se retira, laissant les trois amis s'interroger.

Sirius finit par lever les yeux du journal – des yeux hantés. Son visage s'était fermé. Sans un mot, il passa la Gazette à James à sa gauche. Ses yeux s'agrandirent de colère en lisant le titre. Mais Remus ne lâcha pas Sirius du regard et il vit celui-ci poser son menton dans sa main et soupirer. Quand James lui tendit le journal, Remus le mit à sa gauche afin que Peter puisse lire en même temps que lui.

L'évadé d'Azkaban est près de craquer.

Par Rita Skeeter, Correspondant spécial.

Des yeux hantés dans un visage bien trop maigre, Sirius Black refuse toujours de parler de son expérience. Le sorcier jadis connu pour son charme n'est que l'ombre de lui-même. Il a perdu beaucoup de poids et il marche avec une canne – sans doute pour le reste de ses jours. Ses yeux sont éteints et il est vite distrait. Des amis proches disent qu'il a l'air d'un cadavre ambulant.

Il a pourtant été un Auror réputé et un sorcier d'exception. Mais Black est maintenant silencieux et retiré, hanté par ces dix années passées dans les mains de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Dire-Le-Nom. La nouvelle de sa miraculeuse évasion avait fait le tour du monde magique, semant l'espoir. Mais les experts de St-Mungo, l'hôpital pour les blessures et maladies magiques, disent de ne pas trop espérer de Black pour l'instant.

« Black souffre sans aucun doute de dégâts psychologiques majeurs, lié à son internement à Azkaban « explique Horace Funderbuke, le guérisseur en chef du Département de santé mentale de St-Mungo. A ce stade, il serait irresponsable d'attendre trop de lui. Ce dont à aujourd'hui le plus besoin Black est de conseils pour retrouver une activité professionnelle. «

Beaucoup d'entre nous restent sceptiques face à la soudaine évasion de Black. Est-il vraiment ce héros si vite célébré ? Les nombreux témoins de l'incident d'hier sur le Chemin de Traverse ont souligné la présence de James Potter, le célèbre Auror, qui accompagnait Black. C'est sans doute lui qui a jeté tous les sortilèges nécessaires pour combattre deux Mangemorts.

Des sources proches de Black confirment ces témoignages. Black serait en ce moment incapable de soutenir l'effort de guerre contre celui Dont-on-doit-taire-le-nom. Il est en permanence sujet à des troubles de la mémoire et des cauchemars. Il semble encore avoir du mal à assurer seul sa vie quotidienne. On peut donc légitimement s'interroger sur sa santé mentale après tant d'années passées entre les mains du plus grand Mage noir de l'histoire, sans parler de l'effet des Détraqueurs d'Azkaban.

Si on peut toujours envisager que Black finisse par jouer un rôle dans la guerre, il est clair qu'il n'y prend aucune part à présent et qu'il aura du mal à être ce symbole d'espoir que quelques-uns ont cru bon de mettre en avant.

Remus leva les yeux pour voir que James était mécontent. Le silence perdura le temps que Peter finisse l'article. Il avait toujours été, des quatre, le plus lent lecteur. Finalement Peter posa la Gazette et jura tout bas. Ils se tournèrent tous vers Sirius. Le temps que Remus lise l'article, le visage de Sirius était passé de hanté à en colère. Ses yeux bleus se rétrécirent.

« Est-ce que vous trouvez que j'ai l'air fou ? » demanda-t-il avec aigreur.

« Des amis proches, mon cul ! » gronda Peter. « A qui donc a-t-elle parlé ? A Rogue ? »

« Même lui n'aurait pas dit de telles conneries. » James secouait la tête. « Je pense qu'elle a tout inventé. »

Remus dévisagea calmement Sirius. « Est-ce que ça va ? »

« Ca va. « Il passa avec irritation ses mains dans ses cheveux noirs qui lui arrivaient aux épaules. « Enfin, à part que je suis fou, incompétent et vide. « Il eut un sourire sans vie et haussa les épaules. « Elle en a au moins un sur trois, c'est pas si mal ! »

« N'essaie même pas d'en rire, Sirius », dit James avec inquiétude et Remus vit Sirius se forcer à sourire.

« Désolé mon vieux… je crois que je suis un peu amer. »

« On le serait à moins » dit calmement Peter. « Surtout après ce torchon ! »

Sirius haussa de nouveau les épaules. « Je suis bien content que James lui ait pris sa Plume Papote. »

« J'aurais dû faire plus » répondit James mais Sirius lui fit signe, de la main, d'oublier ça. Son visage était toujours marqué par la colère mais on pouvait voir qu'il réfléchissait.

« Alors ? » demanda Remus. « Qu'est-ce qu'on va faire ? »

« On ? » - répéta Sirius, sceptique.

« Tu crois pas qu'on va te laisser te venger de cette chauve-souris tout seul, non ? » demanda Peter.

« Risque pas » commenta James.

Remus sourit. « Impossible. »

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Plus de Julia ? Ca vient, ça vient…