Chapitre sept : la mort de l'âme.
Yoh prit une profonde respiration et ouvrit les yeux. La fenêtre ouverte donné sur la fin de soirée, dévoilant le ciel étoilé qui s'étendait aussi loin qu'il pouvait voir. Allongé sur son lit, c'était peut être la dernière fois qu'il regardait les étoiles dans ce monde.
-Tu es prêt, Yoh ? demanda Silva.
-Oui, assura celui-ci.
-Tu...Tu es vraiment sûr de...
-Vas y Silva !
Silva ferma les yeux et inspira profondément. Puis il leva les mains au plafond et récita une prière dans la langue natale des pache que Yoh ne comprit pas. Ses mains se mirent alors à briller d'une lueur inquiétante, et toute la lumière de la pièce sembla être aspirée par cette lueur. Puis, doucement, Silva descendit ses mains et les plaqua sur le corps de Yoh : une sur la poitrine, une sur le front.
-Que ta volonté s'accomplisse Great Spirit, et que l'âme de ce garçon vive le plus grand des voyages !
La lumière quitta les mains de Silva et se dissolva peu à peu dans le corps de Yoh. Celui ne sentit qu'une douce chaleur l'envelopper et relâcha sa respiration qu'il avait retenue jusqu'alors.
-C'était pas si terrible, dit il avec soulagement.
Silva lui sourit tristement et dit d'une voix faible.
-Je te guiderais. Que ton voyage commence.
Le cœur de Yoh lui sembla cesser de fonctionner. Il le sentit tout d'abord frapper violemment contre ses côtes, puis peu à peu, il se calma, jusqu'à ne plus battre du tout. Yoh tenta en vain d'aspirer de grande goulée d'air mais cela ne servait à rien. Alors son corps sembla se détacher d'une partie plus fine de lui, plus fragile, plus faible. Et Yoh se vit flotter au dessus de la pièce.
-Suis le vent, Yoh, suis le !
Yoh entendit ces paroles comme une souffle de vent. La voix lui disait quelque chose mais il ne savait plus à qui elle appartenait. Il devait répondre à un appel qui le pressait à présent.
Viens ! Viens à moi !
Alors Yoh commença à dériver dans le vide, comme mû par un mouvement incontrôlable. Peu à peu, il découvrit des paysages qu'il n'avait jamais vus et s'enfonça de plus en plus loin dans ces paysages inconnus. Yoh voyait des choses qu'il n'avait encore jamais vues. En fait, il les sentait plus qu'il ne les voyait. Il faisait partie de la nature et de ce qui la compose. Mais la voix était toujours là.
Viens, viens. Plus vite.
Inexorablement, il du accélérer peu à peu pour finalement revenir dans un village qui éveillait en lui des souvenirs, mais dont il ne parvenait pas à retrouver le sens. Pourtant, il savait qu'il avait déjà vu ce village.
Viens, oublie. Viens !
Alors il accéléra et tout devint flou. Il accéléra encore et encore et se retrouva là où se trouvait son but final. Il se trouvait devant une immense colonne blanche. L'arrivée de tout les voyages. La quête ultime pour tous les gens comme lui. Le Great Spirit. Et il fut aspiré à l'intérieur.
Silva enleva ses mains du corps du garçon et se frotta les yeux.
-Bien, il y est arrivé.
Il se leva et sortit. Manta faisait les cent à l'extérieur. N'y tenant plus, il se précipita sur la porte et heurta de plein fouet le pache qui sortait.
-Comment va-t-il ?
Silva soupira de fatigue.
-C'était épuisant, mais il a passé la première partie de son voyage. Je ne peux plus rien faire pour lui. Il est le seul à pouvoir faire quelque chose à présent. Tout dépend de la force de son âme.
Yoh sentait qu'il ne pouvait pas lutter face à ce courant impétueux qui l'emmenait toujours plus loin vers le cœur du gigantesque fantôme. Pourtant il voulait rester ici, revenir à la vie... Il retrouvait peu à peu sa conscience. Mais il ne pouvait rien y faire, il ne pouvait pas lutter. Le tourbillon des âmes le poussait chaque fois qu'il essayait de s'enfuir. Et tout d'un coup, le vent cessa, le tourbillon aussi. Il se trouvait au cœur du Great Spirit.
-Alors c'est toi, dit une voix grave et chaleureuse. Bienvenu.
-Euh...Merci, répondit Yoh.
-Tu ne peux pas rester, reprit la voix, car tu es encore en lien avec la vie. Cependant, en arrivant ici, tu as atteint ton but. Je vais exaucer ton souhait car ton cœur ne dépend ni du bien ni du mal. Comme moi, tu es victime et spectateur. Mais tu souhaites le bien et tu te bats pour ça. Tu as déjà reçu ma bénédiction, il y a de cela déjà longtemps. Reçoit donc aujourd'hui ce que tu cherches.
Yoh voulu le remercier, mais aucun mot ne sortit de sa bouche. Alors qu'il essayait de crier, sa tête se mit à lui faire mal. Très mal. Plus que jamais. La mort venait le chercher de nouveau. Comment pouvait il mourir sous forme de fantôme ? Impossible. Et pourtant la douleur était bien là, bien réelle. Elle empira ainsi jusqu'au point de non retour et Yoh sombra dans le néant.
Il ne se réveilla que bien plus tard. Il sentait pourtant son corps battre, sa force émaner de son corps et son esprit filait d'une impression à l'autre. La vie. Elle était de nouveau en lui. Mais il n'avait pas atteint son but.
-Dommage, se dit il à lui-même.
Alors il leva les bras et regarda ses mains. Elles lui semblaient différentes. Plus épaisses, plus grandes et plus fortes aussi. Son regard remonta sur ses bras et son torse. Tout en lui était plus grand, plus fort.
-Bizarre, se dit il.
Il se leva et s'approcha d'une glace pendue au mur. Alors son regard croisa celui du miroir.
-Im...Impossible !
Le Yoh du miroir semblait avoir plus de vingt ans. Comment était ce possible ? Il avait abandonné le casque de son baladeur, arborait de longs cheveux bruns et son regard reflétait la force et la confiance. Yoh se toucha le visage et resta muet.
-Mince alors !
On frappa soudain à la porte et Yoh s'approcha pour ouvrir. Il découvrit derrière la porte une Horohoro de vingt ans. Il était plus vieux aussi. Lui aussi arborait des cheveux longs, mais de couleur bleu ciel. Il portait la tenue de cérémonie des Aïnous et portait une boucle d'oreille à l'oreille droite.
-Horo ? Qu'est ce qui nous arrive ?
-Comment m'as-tu appelé ?
-Mais par ton prénom, Horohoro !
-Allons dépêche toi un peu, et arrête de blaguer. Mon nom, c'est Ryhaku et tu vas vraiment être en retard si tu continues, Juza.
-Horo, qu'est ce que tu dis ? Comment tu m'appelles ?
-Juza, ça suffit. Je m'appelle Ryhaku, pas Horo-truc. Allons viens. Tu vas être horriblement à la bourre.
-Mais à la bourre pour quoi, bon sang ?
-Tu es bizarre ce matin. Tu sais bien que tu es en finale du shaman-fight, Juza. Et tu te battre contre Shoan !
Yoh resta impassible et du avancer quand Ryhaku le poussa jusqu'à la porte.
-Allons, presse toi un peu !
Yoh avança à contre cœur, renonçant à comprendre. Ils avancèrent ainsi à travers divers couloirs que Yoh n'avait jamais vu et s'approchèrent d'une porte immense quand Yoh -ou Juza, il ne savait plus qui il était- fut percuté par quelque chose et tomba à la renverse.
-A...Anna ? Mais tu es folle ???
Réalisant son erreur, Yoh se protégea le visage et attendit la baffe. Mais elle ne vint pas.
-Qui es Anna ? Moi c'est Meimon et tu le sais !!! Bonne chance et sois prudent Juza !!!
Elle l'embrassa sur la joue et reparti en courant. Yoh se releva tant bien que mal et resta abasourdi. Ryhaku s'approcha, le remit sur ses pieds en soupirant et le poussa vers la porte, qui s'ouvrit à son approche. La lumière l'aveugla et il se protégea les yeux de la main. Il entendait des hourras monter des alentours et se douta qu'il était sur le ring du shaman fight.
-Juza, arrête de faire l'idiot. N'oublie pas que c'est Shoan, ton adversaire !
Une porte s'ouvrit en face de lui de la même façon et un homme entra. Yoh ne voyait pas son visage, qui restait dans l'ombre, mais il reconnut l'arme qu'il tenait.
-Non...Non !
C'était la lance de Bason. L'homme avança encore et découvrit son visage. Yoh se tenait face à Ren, âgé aussi de vingt ans, un sourire aux lèvres et les cheveux noué en catogan derrière la nuque. Il pointa son arme sur Yoh et dit :
-Juza, mon ami, c'est l'heure du combat final !!!!
