Les rideaux rouges avaient été tirés et seule la lumière tremblotante d'une bougie diffusait quelques ombres. Brice monta les quelques marches qui menaient au studio de Sally et sonna à la porte. Comme personne ne lui répondait, il se pencha et colla son oreille contre le battant de bois. Un bruit d'eau ruisselait du côté de la salle de bain.
Soudain, la porte s'ouvrit et, comiquement, Brice atterrit le nez au milieu de la poitrine dénudée de la jeune fille. Celle-ci se couvrit rapidement d'une serviette tandis que le jeune homme reculait encore hébété. Il dévisagea Sally car elle n'avait pas l'habitude de cacher sa poitrine, bien au contraire. Il tenta de garder la tête froide comme il l'avait promis à Adam.
Il avait rencontré Sally dans une sorte de discothèque réservée aux jeunes de Spooksville. Selon la coutume, à 13ans, Brice voulait passer le cap avec une fille et Sally était réputée en la matière mais cela dit au bout d'un moment des relations humaines se formèrent aussi et, à l'arrivée d'Adam et Cindy, Brice et Tic-Tac, séparément, avait aider Sally à surpasser ses mauvaises habitudes et à supporter son redoublement.
Brice s'affala sur le lit couvert d'une sorte de velours pourpre et contempla le plafond tandis que Sally se changeait. C'est alors qu'il remarqua une grosse tache verte qui s'étendait en étoile légèrement au-dessus du sein gauche. Il se releva brusquement mais Sally était déjà en train de fermer la porte de la chambre. Le jeune garçon eut juste le temps d'envoyer un SMS à Cindy : po confiance en cop1 o coeur vert quand la jeune fille le fit retomber sur le lit, le chevauchant sensuellement avec un filet de liquide vert glissant de ses lèvres et s'épanchant dans la bouche de Brice. Il ne maîtrisait plus son désir et n'arrivait plus à se dégager quand une violente douleur à la poitrine le submergea le temps qu'il distingue Sally et lui-même le regardant d'un air satisfait.
Ailleurs
L'endroit était sombre et humide. Aucune lumière ne semblait leur parvenir autre que celle qui filtrait sous la lourde porte en acier. Sally secoua la tête de quelques coups rapides. Elle tenta de se remettre sur ses jambes mais, celles-ci étant attachées ainsi que ses mains, il en résulta qu'elle s'affala sur le côté et cogna quelque chose de mou et chaud.
Sally sursauta mais se blottit bientôt vite contre le corps de Tic-Tac qui semblait dormir. Elle avait un affreux mal de tête et son cœur la serrait. Une blessure coupait sur la blanche peau du ventre de la jeune fille. Elle était encore relativement fraîche. Sally se releva et commença, petit à petit à défaire ses liens. Quand elle eut fini, elle se dégourdit les jambes en ignorant la douleur qui lui sciait le flanc.
Elle se retourna vers le corps toujours immobile de Tic-Tac. Une profonde peine remplaça tout quand elle songea à Tira. Elle était en fait jalouse de cette dernière mais ne l'avouerai pour rien au monde. Sally entreprit de détacher les liens de son ami mais, quand ce dernier eu les mains et les pieds libérés, il la retourna violemment contre le sol sale et dur et l'empêcha de faire tout mouvement.
- Eh, Tic-Tac, qu'est ce qu'il te prend, lui demanda t-elle, suffocant sous le poids du jeune homme qui écrasait sa plaie. On pourrait peut-être remettre notre bagarre à plus tard.
- Qui es-tu ? Tu es venu hier et tu m'as piégé en créant une réplique de moi-même.
- J'ai été attaqué aussi bougre et, si tu bougeais de là, tu pourrais voir la lésion que t'as sûrement réouverte, gémit la pauvre jeune fille.
Tic-Tac relâcha son emprise alors légèrement pour vérifier les dires de sa prisonnière mais lui posa tout de même quelques questions avant de la libérer totalement :
- Qui est la fille que tu supportes le moins au monde ?
- Tira mais tout ça parce que tu es sorti avec elle juste après de m'avoir culbuter sans émotions, bougonna t-elle.
- Même
si t'exagères, quand cela s'est-il passé ?
-
Le lendemain soir du départ de la sorcière quand ce
stupide vaisseau nous a envoyé dans des lits différents.
Bon, tu me lâches et tu m'expliques ce qui nous a attaqué.
Tic-Tac s'adossa contre le mur laissant Sally examiner sa plaie qui saignait de plus en plus. Il n'avait pas la moindre idée de ce que ces créatures pouvaient être. En tout cas, le fait que Sally ait été attaquée en premier puis Tic-Tac appâté par la copie de Sally n'était certainement pas le fruit du hasard. Tic-Tac n'arrivait pas à distinguer plus des ¾ de la pièce surtout que ses verres étaient légèrement fêlés.
- Tu vois une sortie ? demanda t-il à la jeune fille qui venait de faire une sorte de bandage avec un bout de sa nuisette en lambeaux.
- Je serais parti depuis longtemps, marmonna t-elle.
- On était
pas censé enterré la hache de guerre ?
-
C'était pour éviter que tu me tues, crois pas que je
te pardonne, dit-elle, haussant le ton.
- Tu es
insupportable, je sais que je n'est pas été très
galant mais...
- Galant ! coupa t-elle, t'as dit que tu
m'aimais et, le lendemain, tu me renies, tu nies tout et tu
préfères les vierges comme Tira.
S'en suivit un combat de paroles acharnées où chacun s'exprimait enfin. Sally avait été trahie. Tic-Tac, effrayé. Sally l'avait aimé et l'avait perdu. Tic-Tac ne voulait pas perdre celle qu'il ne considérait que comme une amie... Quand soudain, ils se rendirent compte que des larmes coulaient le long de leurs joues. Profitant de l'obscurité de la nuit, il séchèrent discrètement leurs larmes et se rassirent.
Devant le ridicule de la situation, un rire tonitruant se fit entendre derrière la porte qui s'ouvrit alors sur Brice, torse nu.
- Brice !
s'écria Sally, menaçante, si c'est une blague,
c'est pas drôle du tout et t'as...
- Arrête, c'est
un des leurs, la coupa Tic-Tac en la ramenant auprès de lui,
regarde la tâche verte qui s'étale sur sa poitrine.
- Brice a toujours aimé les tatouages étranges, maugréa t-elle pour excuser son élan.
- Ah Ah Ah, les humains sont décidément des êtres pitoyables, sujets aux pires sentiments comme l'amour. C'est ce qui vous aura perdu et bientôt nous dominerons le monde.
- Eh oh, cœur de vert (je tiens à excuser ce pitoyable jeu de mot), tu vendrais pas la peau de l'ours un peu trop tôt, nos copains vont vous exterminer ! s'insurgea Sally.
- Vos amis ? Mais ils sont déjà en notre possession, leur amour pour chacun les auras conduits au désastre, surtout que leur amour est moins important que le votre, leur cœur s'épuisant plus vite, il ne seront bientôt plus que des cadavres desséchés.
- Charmant, murmura Sally avant de rasseoir.
- Comment ça « leur cœur s'épuise » ? questionna Tic-Tac, aussi innocemment que possible.
La copie de Brice désigna alors la tâche verte qui s'étendait sur sa poitrine en enfonçant légèrement le doigt à l'intérieur de son corps qui semblait modelable.
- Ceci est notre centre d'énergie, nous captons la votre en vous embrassant tout simplement. Il faut bien sûr que les personnes soient liées par un sentiment très fort et c'est pour cela que nous vous avons choisi, vous étiez des proies idéales.
Sally allait se mettre à crier mais Tic-Tac l'en empêcha et demanda tout simplement qu'ils leur apportent à boire et à manger. Sally le regarda incrédule mais laissa l'autre partir. Le jeune homme se pencha alors à son oreille pour lui murmurer quelques petites choses. Il avait aussi remarqué qu'ils étaient en fait dans une des caves de sa maison et connaissait un passage pour sortir de là mais ils devraient attendre le retour de l'imposteur pour partir le plus discrètement possible.
Sally se détendit les jambes et demanda à Tic-Tac ce qu'il pensait de cette histoire :
- Ça ressemble à une énorme farce, pour ma part, je n'y comprends plus rien, dit-elle en léchant délicatement les poignets meurtris du garçon pour tenter de les cicatriser quelque peu.
- D'un certain point de vue, c'est grotesque, mais c'est aussi parce que nous ne sommes pas habitués à nous battre contre des monstres emplis de sentiments presque aussi humain que nous, ou tout du moins, qui les sentent, répondit-il en se laissant faire.
- Pourquoi ont-ils parlé d'amour alors qu'il n'en subsiste aucun entre nous, soupira la jeune fille en jouant avec son bandage.
Tic-Tac releva la tête de Sally. Il arborait un air sérieux qui la faisait trembler d'envie. Il ôta ses lunettes et déposa un doux baiser sur ses lèvres qui se fit de plus en plus ardent. Sally laissa une douce perle salée le long de sa joue que Tic-Tac effaça d'une langoureuse langue. La jeune fille gémit légèrement en sentant ses délicates mains se poser sur son corps qui l'avait tant regretté depuis leur unique nuit. Elle commença à déboutonner le jeans que portait son ami quand elle le sentit frémir d'une drôle de manière. Elle releva la tête avec un large sourire sardonique.
- Ben alors, tu rougis encore à ton âge ? demanda t-elle avec un ton faussement mielleux et, voyant Tic-Tac rougir de plus belle, elle s'esclaffa, me dit pas que tu n'as jamais recommencé, tout de même ! Oh non, c'est trop drôle.
Sally s'en roulait littéralement par terre. Tic-Tac n'avait donc jamais rien fait avec Tira. C'était à la fois un soulagement et une chose des plus comique. L'abstinence « parfaite » pendant toutes ses années. Elle en avait mal au ventre et continua de pouffer de rire, allongée sur les dalles froides. Tic -Tac fit semblant d'être vexé et se mit à cheval sur la jeune fille, la plaquant au sol et l'embrassant avec passion, électrisant chaque partie de sa chair. Elle l'amena à se serrer contre son corps, le caressant avec doigté, l'excitant rapidement au plus haut point. Il la regarda intensément et sentit son corps se fondre en elle, enfin.
All
my life I wanted to be different from the prey
All my life I had
absolutely nothing to say
But my mind grew up as time passed by
And so I realised that friendship's nothing but a lie
These
Mortal feelings keep telling lies
And you're just too stupid too
realise
The pain deep within my heart
Deep within my soul
I love you
(Bout de These Mortal Feelings plus un petit « je t'aime » de moi car, remis dans le contexte, ça le fait)
Mais ce bonheur fut de courte durée. En effet, des bruits les tirèrent de leur unité parfaite. Sally revêtit ce qui restait de sa nuisette et tenta de discerner ce qui se disait, bientôt rejointe par Tic-Tac. La voix de Sally retentissait, évidemment, plus haut que les autres.
- Nous devons nous en débarrasser, c'est prendre des risques inutiles en les laissant en vie.
- Elle a héritée de ton mauvais caractère, chuchota Tic-Tac qui reçu un coup dans les côtes.
Au bout d'un certain temps, ils furent convaincus qu'il était temps de partir car les créatures voulaient faire d'eux de la chair à pâté. Tic-Tac s'agenouilla dans le noir qui leur semblait plus acceptable à présent et réussit à trouver une dalle qui s'ôtait parfaitement, laissant un abysse de ténèbres apparaître. Tic-Tac préféra descendre en premier et Sally le suivi avec une grande appréhension. Leur descente se déroulait bien même s'ils n'avaient plus aucune lumière ayant replacer le carreau pour ne pas laisser d'indices.
Soudain, des bruits de voix devenues inhumaines se firent entendre au-dessus d'eux et ils accélérèrent leur progression. Tic-Tac sentait la fin proche et il aurait pu prendre cette expression au sens figuré car c'est alors que Sally glissa sur une masse visqueuse et tomba sans même un bruit.
