Résumé du chapitre précédent :

L'état de Sirius est inquiétant, les médicomages et psychomage ne sont pas optimistes. C'est dur pour Remus, James et Regulus de garder espoir, surtout quand un psychomage intolérant essaye de rejeter la faute sur un Remus complètement déstabilisé. James prend sa défense et tente de le convaincre du contraire. Regulus quant à lui ne veut pas rester les bras croiser et attendre un miracle, il veut savoir ce qui est arrivé à son frère, comment le sauver. James lui donne une première piste et Regulus apprend que sa famille cache un secret, que James le savait et ne lui a rien dit. Il tente de mettre de côté sa colère pour aller au bout de sa quête. James et lui retournent à Cardiff et alors Regulus comprend tout, ou une grande partie. Cette femme étrange, cette photo et cet homme dessus sont la clé de ce fameux secret. Cet homme il le connaît. Henry Ballonga a déjà fait partie de sa vie il y a plusieurs années. Des souvenirs oubliés refont surface et bouleversé, Regulus fuit, s'isole, laissant James seul, terrifié à l'idée que comme pour Sirius, il arrive quelque chose au cadet des Black.


Chapitre 45 : L'honorable famille Black

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Remus ne s'était jamais senti aussi misérable et aussi honteux. Après l'altercation qui avait opposé le psychomage et James, le calme avait mis du temps à revenir chez les Potter. Tout le monde avait été bouleversé et choqué par les propos du professionnel de santé. Si James n'avait pas répété les propos tenus, il avait bien fait comprendre à ses parents et à Regulus qu'il était intolérant et incompétent.

Remus lui en était d'ailleurs gré. Il n'aurait pas supporté de voir le jugement ou la pitié dans le regard des autres. Il n'avait pas voulu parler de ce qu'il s'était passé pendant les quelques minutes de discussion, ou plutôt d'accusation, avec l'adulte. Remus ne s'était pas senti de le faire, la scène se rejouait encore trop souvent dans sa tête. Et puis, il ne pouvait oublier la menace proférée par le psychomage. Mal à l'aise, nauséeux, angoissé et ne se sentant plus à sa place, il avait émis le souhait de partir. James n'avait pas compris mais Regulus avait supposé que c'était à cause de ce qu'il venait de se passer. Remus n'avait pas confirmé.

Tout ce qu'il avait désiré à cet instant était s'éloigner et retrouver sa famille. Pouvoir s'effondrer, enfin. Les parents de son ami avaient tenté de le réconforter, lui avaient assuré qu'il pouvait rester autant qu'il le souhaitait et même revenir n'importe quand. Mais surtout, ils s'étaient excusés. Ils regrettaient de l'avoir laissé seul avec l'adulte. Plus encore, ils regrettaient de l'avoir fait venir. Le Poufsouffle aurait souhaité les rassurer, leur rappeler qu'ils n'étaient coupables de rien mais il en avait été incapable. Croiser le regard des Potter et de Regulus lui avait déjà demandé tous les efforts du monde. Il était finalement parti en s'excusant.

Une fois chez lui, il avait pu parler avec ses parents, leur expliquer la situation. Ceux-ci l'avaient soutenu mais également séché ses larmes. Les vannes s'étaient ouvertes et le châtain avait laissé libre cours à son chagrin. Ses parents connaissaient un peu Sirius, il l'avait déjà vu quelques fois et surtout, ils savaient ce qu'il représentait pour lui.

Ses parents l'aimaient plus que tout alors forcément, ils avaient tenté de le rassurer, de le réconforter. Néanmoins, les phrases toutes faites pour lui assurer que tout irait bien, que Sirius allait se réveiller, Remus ne les supportait plus. Ce n'était pas vrai, personne ne pouvait le savoir ni être si catégorique. Il savait bien que ses parents ne disaient cela que pour tenter de lui remonter le moral, mais le Poufsouffle avait besoin d'une vraie raison de s'accrocher.

Si au début être avec ses parents lui avait fait du bien, à présent, Remus ne ressentait donc plus cet apaisement. La négativité s'était emparée de lui et les affirmations du psychomage tournaient en boucle dans sa tête. Et s'il avait raison ?

Une partie de cet homme devait savoir qu'il n'était qu'un horrible homophobe, mais il restait un professionnel qui avait fait des études, qui avait un cabinet, un diplôme. Ce n'était pas parce qu'il ne plaisait pas à Remus qu'il était nul. Par exemple, Sirius lui avait parlé de Jedusor et malgré tout ce que le Gryffondor pouvait lui reprocher, Remus pouvait en attester : il était compétent.

Finalement, peut-être que le psychomage devrait prévenir les Aurors, ou même les Potter. Ainsi, il y aurait une enquête et si vraiment il avait fait du mal à Sirius, il serait puni car c'est ce qu'il mériterait, tout simplement. Remus avait encore du mal à y croire, néanmoins le psychomage avait soulevé un point important. Il était possible que Sirius ait éprouvé des regrets à la fin de leur week-end.

C'était une explication mais c'était peut- être aussi une mauvaise rencontre après qu'il l'ait perdu de vue, ou autre chose encore. Remus était trop bouleversé pour réfléchir correctement. Il avait l'impression d'être bon à rien.

Assis sur le canapé, recroquevillé dans un coin, il ne savait pas quoi faire. Il avait envie de prendre des nouvelles de son ami mais n'osait pas. Les Potter lui avaient affirmé qu'il était le bienvenu et le châtain savait qu'ils étaient sincères, mais il n'osait pas. Il ne s'en sentait pas le droit. Peut-être qu'être loin de Sirius pouvait l'aider à aller mieux ? S'il était le responsable, alors penser ainsi n'était pas complètement illogique. Sa mère ne comprenait pas son choix. Il était mort d'inquiétude, cela sautait aux yeux ! Remus lui affirmait pourtant qu'il allait bien mais il ne dupait personne.

A présent, Remus gardait le silence, souffrant seul chez lui sans oser s'exprimer. Il n'en avait même pas parlé à Isabel. Pour lui dire quoi de toute façon ? Elle était encore en train de faire le deuil de Peter… Et dire qu'ils devraient normalement retourner à Poudlard dimanche. Cela lui paraissait d'un coup plutôt précipité. Sirius pourrait-il revenir ? Serait-il remis ?

Remus gémit et laissa tomber sa tête sur ses genoux repliés. Allait-il sérieusement passer le reste de ses journées ainsi ? C'était déplorable. Heureusement que ses parents n'étaient pas là pour voir ça. Néanmoins, ils seraient là en fin d'après-midi après leur journée de travail et voudraient savoir comment il avait occupé sa journée. Le Poufsouffle n'avait pas envie de mentir mais il n'avait envie de rien.

Alors qu'il réfléchissait à la meilleure manière de faire, on frappa vivement à la porte. Remus bondit sur ses jambes, surpris. Il fronça les sourcils et se précipita au deuxième tambourinement. Il eut un instant de flottement, se rappelant de ce qu'il s'était passé à Poudlard. Il devait se montrer prudent, c'était fini l'époque où le danger restait loin.

Remus prit une grande inspiration et ouvrit lentement la porte. Le châtain tomba alors sur Molly, appuyée difficilement sur le chambranle et tenant tant bien que mal dans ses bras le petit Percy, grognon et chouinant par intermittence. Les jumeaux Fred et Georges, qui avaient quelques semaines seulement, gazouillaient dans leur poussette magique. Le tableau de famille était complété par l'ainé de la fratrie, Bill, ainsi que l'adorable Charlie. La pauvre mère de famille n'avait pas l'air d'aller bien. Elle avait les joues rouges et ses cheveux en bataille témoignaient de sa fatigue.

Même si Remus adorait les enfants, c'était ce genre de spectacle qui le faisait parfois douter de l'envie d'en avoir. C'était quand même un sacré boulot et on n'avait jamais de repos. Le Poufsouffle comprenait bien pourquoi Molly était si épuisée. D'ailleurs, la laisser attendre sur le palier de la porte alors qu'elle ne semblait n'avoir qu'une seule envie, s'asseoir, n'était pas très courtois.

-Bonjour, Molly ! fit-il, nerveux

Remus s'écarta pour la laisser passer et la mère de famille lui en fut fortement reconnaissante. Elle peina un peu à manœuvrer sa poussette magique et consentit à laisser Percy marcher tout seul. Les deux grands garçons saluèrent ensuite le Poufsouffle et allèrent directement s'installer sur le canapé.

-Bonjour, Remus, je suis désolée de débarquer à l'improviste…

Molly se passa une main dans les cheveux, embarrassée.

-Tes parents ne sont pas là ?

Remus secoua la tête.

-Ils sont au travail, ils ne rentreront pas avant 17h, voire 18h.

Le châtain vit que cette nouvelle n'arrangeait pas la mère de famille.

-J'aurais dû m'en douter, c'était un peu évident, souffla-t-elle.

-Je peux vous aider ?

Percy hurla d'un coup, pleurant pour réclamer l'attention des adultes. Celui-ci avait tenté de monter sur le canapé à côté de ses frères mais, éprouvant des difficultés, Charlie avait tenté de l'aider. Le petit Percy n'avait pas apprécié, voulant à tout prix réussir seul, et avait bien fait entendre son mécontentement.

-Charlie ! hurla Molly.

-J'ai rien fait ! se défendit l'enfant.

Molly soupira fortement et tenta de se calmer avant d'apaiser son fils.

-Il y a une grève à l'école de Bill et de Charlie, ils n'ont pas d'enseignant, expliqua-t-elle finalement à Remus. J'étais venue pour voir si tes parents ne pouvaient pas les garder… Enfin bon, ça tombe à l'eau. Je ne sais pas quoi faire, Percy a rendez-vous chez le médicomage pour faire un vaccin et je ne peux pas annuler, j'attends déjà depuis trois mois. Je dois aussi gérer les jumeaux et même si Bill et Charlie sont calmes, ça fait un peu trop pour moi…

-Je comprends, compatit Remus.

Il ne savait pas quoi dire d'autre. Il lui suffisait d'entendre Percy pleurer pendant 10 minutes pour avoir mal à la tête. De leur côté, les jumeaux étaient relativement calmes, même s'ils savaient se faire entendre à leur façon.

-Les garçons, vous allez passer la matinée avec mamie, décida Molly.

-Non, pas mamie ! soupira Charlie et Bill fit la grimace.

-On s'ennuie chez elle et en plus, elle est sénile !

-Bilius ! s'énerva Molly. Allez, on y va, on a assez embêté Remus comme ça !

-Mais Mus peut nous garder, fit remarquer Charlie.

-Oui ! approuva Bill. On est grand, on sait se tenir ! On est hyper autonome !

Remus voyait que Molly s'apprêtait à sévir encore une fois, utilisant ses cordes vocales pour les rappeler à l'ordre, alors il décida d'intervenir.

-Molly, si ça peut aider, ça ne me gêne pas qu'ils restent avec moi. Ça me fera de la compagnie, proposa-t-il.

Bien entendu, les deux frères ne manquèrent pas de faire savoir combien cette solution leur allait. Néanmoins, Molly hésita encore : elle ne voulait pas embêter Remus. Tout le monde savait que la cérémonie avait eu lieu il y a peu de temps, même ceux qui n'avaient pas d'enfant à Poudlard. Remus pouvait encore être fragile et il avait d'ailleurs l'air triste. Devant le débat intérieur qui se jouait en elle, le châtain décida d'intervenir.

-Tout ira bien. J'adore Bill et Charlie, on va bien s'amuser ensemble.

-Très bien, accepta-t-elle. Je m'en vais avant que tu ne changes d'avis alors !

Ils rirent tous les deux. Remus parce qu'il croyait surtout que c'était une blague, mais c'est ce que fit vraiment la mère de famille. Elle s'empressa de partir, sûrement déjà un peu en retard. Remus se retrouva ainsi avec les deux enfants et les observa. Bill et Charlie étaient grands. Bill rentrerait dans quelques années à Poudlard et les surveiller était moins contraignant que s'il s'était agi d'enfants en bas âge. Même si ce n'était pas ce qu'avait prévu Remus, ce n'était pas bien grave. C'était d'ailleurs même très bien comme ça, au moins n'allait t-il pas se morfondre tout seul.

Pour faire bonne figure, il proposa aux deux frères de jouer à des jeux de société. Il pouvait même les aider avec leurs devoirs s'ils en avaient mais étrangement, les Weasley n'étaient pas très emballés par cette option.

La première heure se passa très bien mais plus le temps passait, plus Remus avait du mal à ne pas penser à Sirius. Il était moins concentré, moins réactif, tentant néanmoins de donner le change. Mais il ne devait pas s'y prendre si bien que ça car Charlie lui reprocha son manque de concentration. Remus s'excusa, bougea son pion mais pensa à nouveau à ce que le psychomage lui avait dit. Remus était un jeune homme émotif. Il savait que pour gérer les situations difficiles, il devait laisser ses sentiments de côté et se montrer pragmatique. Ce n'était pas toujours facile mais il devait y arriver, surtout pour pouvoir surmonter la situation dans laquelle il était.

"Lorsque vous avez éliminé l'impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité."

Cette citation d'un célèbre écrivain, Remus devait s'en servir comme d'une maxime pour aller au bout, trouver la vérité. Il ne voyait vraiment pas ce qui avait pu provoquer une telle situation. Il avait beau chercher, il ne comprenait pas. Cela révélait deux choses : qu'il avait été incapable de voir que Sirius n'allait pas bien, mais aussi qu'il n'avait pas su prendre soin de lui. Il s'en voudrait probablement toute sa vie.

Il se sentait si stupide ! Et si Sirius restait prostré toute sa vie ? Rien que d'imaginer que les choses pouvaient ne pas s'arranger, cela lui fit monter les larmes aux yeux.

-Mus, pourquoi t'es triste ? lui demanda soudain Bill.

Remus cligna des yeux, étonné par la question du roux. Il sentit alors que ses joues étaient humides : il pleurait. Il s'essuya, s'en voulant de ne pas avoir pu se contenir.

-Je suis désolé, ce n'est rien d'important.

Il tenta de leur sourire pour les rassurer mais ni Charlie, ni son frère ne furent dupes, Remus le savait bien. Il ne pouvait pourtant pas leur dire la vérité. C'étaient des enfants, il devait préserver autant que possible leur innocence.

-C'est même pas vrai, argua Bill.

-Mais si. Dès que vous m'aurez fait un gros câlin, j'irais déjà beaucoup mieux.

-Oh, pas un câlin, râla l'ainé.

Remus sourit. Put-être que Bill avait atteint l'âge où il trouvait que ça faisait trop bébé.

-Moi, je veux bien ! s'exclama Charlie.

Remus en fut heureux : Charlie était si gentil et cela lui fit un peu de bien.

Ça n'effaçait pas sa peine mais pour quelques heures, ça allait au moins l'alléger un peu.

xXx

Regulus n'avait pas réfléchi avant d'abandonner James à Cardiff. Tout cela avait été simplement trop dur à gérer pour lui. Même s'il en voulait à James, il pouvait comprendre pourquoi il avait en quelque sorte choisi de lui mentir. Mais il ne savait pas ce qu'il pouvait faire de son ressentiment. Il y penserait probablement plus tard. Là, il y avait autre chose qui prenait toute la place chez lui, qui le ravageait et qui avait besoin de s'exprimer ou il allait s'écrouler.

Le Serpentard n'avait jamais été si en colère contre ses parents. Cela allait même au-delà. Il était triste, déçu, anéanti et bouleversé. Dégouté d'avoir cru en eux toutes ces années, de s'être trompé, d'avoir voulu y croire alors que les indices avaient été là. Orion et Walburga n'étaient pas faits pour être parents. Ils n'avaient pas eu le choix pour préserver la lignée, mais n'avaient fait aucun effort pour être bons, ni même pour les rendre heureux. Regulus avait cru avoir une bonne vie avant, mais c'était avant de rencontrer Padfoot, de vivre avec les Potter, d'avoir des amis, d'être libre et amoureux…

Il se sentait si stupide !

A présent, c'était fini de se cacher derrière la fierté du sang, des traditions familiales et des idées préconçues que sa famille lui avait mises dans la tête. Rien de ce que lui avait appris ses parents n'était vrai, ni ne valait le coup. Ils l'avaient manipulé toute sa vie, lui le petit naïf tellement heureux d'avoir de l'attention. Regulus était si en colère qu'il sentait qu'il pourrait leur faire du mal. Il n'avait jamais ressenti ça mais quand il repensait à son enfance, à toutes ces choses étranges qu'il avait été incapable de comprendre, ça lui donnait envie de vomir.

Il n'y avait pas que cet homme, ce moldu étrange. Il y avait cette rivalité que ses parents s'étaient assurés d'instaurer entre Sirius et lui. Ces comparaisons incessantes dans le but de le rabaisser. Les doloris, les punitions que Sirius se prenait continuellement. Comment avait-il pu croire que c'était normal ?! Regulus se sentit mal et eut l'impression d'hyperventiler, encore.

Le Serpentard ne s'était jamais senti le droit d'être lui-même, de dire ce qu'il pensait, de faire ce qu'il voulait ou même d'aimer qui il voulait. Tout ça à cause de sa famille, de son entourage, de cette maison. Le 12, Square Grimmaurd.

Il regarda la grande bâtisse devant lui et entra sans attendre. Kreattur arriva aussitôt, surpris que quelqu'un y fasse irruption ainsi. Regulus le dévisagea un instant avant de détourner le regard et de se diriger vers le salon. Il avait transplané depuis une ville moldue, entouré de moldus qui l'avaient peut-être vu. Il allait avoir des problèmes, il le savait, mais il était prêt à les affronter. Tout comme ses parents. Il ne les voyait plus comme des alliés ou des personnes dont il devait à tout prix chercher l'approbation désormais.

-Qui est Henry Ballonga ? demanda-t-il sans même les saluer.

Tranquillement assis en train de prendre le thé, ces derniers se crispèrent. Le Serpentard put les voir échanger un regard mais en parfaits Sang-Pur, ils ne montrèrent pas plus d'émotion. Regulus savait que ce serait dur d'obtenir quoi que ce soit mais ses parents le connaissaient mal s'il pensait qu'il n'allait pas insister.

-Il est arrivé quelque chose à Sirius, il est malade, lâcha-t-il. Je sais que ça a un rapport avec cet homme. Il a travaillé ici il y a plusieurs années et je suis certain qu'il a fait quelque chose à mon frère. Son état est grave et aucun médicomage ni psychomage ne peut l'aider pour l'instant. Les Potter vont prévenir les Aurors pour savoir ce qui a pu déclencher ça. Ils sauront qu'il s'est passé quelque chose dans cette maison. Que vous y êtes pour quelque chose !

-Cela reste à voir, fit Orion, dédaigneux.

-Il a été engagé comme professeur particulier pour ton frère mais ça s'est avéré complètement inutile. Ton frère n'a d'ailleurs fait aucun progrès, il suffit de regarder où il en est aujourd'hui, souffla Walburga, fatiguée par cette discussion.

Cela aurait dû faire quelque chose à Regulus de voir qu'il n'y avait plus de retour en arrière, que ses parents étaient bien coupables et ne s'en cachaient même pas. Impossible maintenant de continuer à faire semblant. Regulus allait plonger dans l'inconnu et il ignorait comment il se sentait. Il n'arrivait pas à ressentir autre chose que de la colère et du dégout. Sa vie avait-elle eu un sens jusque-là ? Sa vie s'était construite sur un mensonge. Les sourires d'ange n'avaient été que des masques portés devant lui pour endormir sa confiance.

Henry Ballonga. Même sans connaitre toute la vérité, ce nom lui donnait des sueurs froides. Que s'était-il passé au Square Grimmaurd ? Ses parents n'avaient pas l'air plus inquiets que ça, mais fallait-il se fier à leur indifférence ? Il venait de leur dire que Sirius n'allait pas bien et une fois de plus, ils s'en fichaient. Mais c'était la fois de trop pour Regulus.

-Nous avons renvoyé cet homme il y a déjà bien longtemps. Nous avons d'ailleurs bien trop attendu pour le faire, continua Orion.

-Il a disparu, plus personne n'a de nouvelle de lui depuis son passage ici ! ragea Regulus. Sirius va mal !

Il n'en revenait pas que ses parents soient si détachés alors que l'état de Sirius était si préoccupant. Il s'agissait de leur ainé tout de même. Pourquoi mentir ? Pourquoi s'entêter aujourd'hui encore à cacher la vérité ? Que s'était-il passé … ?

-Je vais mal, avoua-t-il alors.

Cela n'émut pas plus ses parents et il décida donc de changer de stratégie.

-C'était un moldu, je le sais, pas la peine de le nier. Il était étrange… Qu'a-t-il fait à Sirius ? Il-il…l'a touché ?

Regulus avait l'estomac lourd, la langue pâteuse et ses oreilles bourdonnaient. Il n'arrivait pas à gérer tout ça. L'évoquer faisait remonter des souvenirs douloureux, ceux de Rosier qui lui faisait subir des choses similaires… Ce serait une blessure qui resterait à jamais gravée en lui et qu'il ignorait comment soigner encore aujourd'hui. Pour connaitre lui-même cette douleur, il espérait de tout son cœur que Sirius y avait échappé. Mais il était difficile d'être optimiste, surtout quand quelques flashs de cette époque lui revenaient. Henry Ballonga s'était montré bien trop tactile avec lui et ses regards aussi en disaient long.

Y repenser lui donnait envie de vomir et ça, c'était quand il ne se sentait pas pris d'un intense sentiment de malaise. Même sa colère, forte et puissante, avait du mal à le garder debout. Ses jambes tremblaient de fatigue et de peur face aux regards si vides de ses parents. Ils n'exprimaient rien. Ni remord, ni inquiétude. Il avait l'impression de ne pas les connaitre.

Qui étaient donc ces gens dénués d'humanité ?

-Tu te montres bien insolent, claqua Orion. Sirius t'a déjà monté le cerveau ! Nous n'aurions jamais dû te laisser avec lui. Nous nous sommes trompés, ajouta-t-il ensuite en soupirant.

Regulus fronça les sourcils et Walburga esquissa un sourire.

-Tout ceci aurait déjà pu être réglé depuis longtemps, marmonna encore son père.

-De quoi parlez-vous ?

-Quoi ? Vas-tu réellement faire l'ignorant ? Il est impossible que Sirius ne soit pas déjà venu te voir pour se mettre en avant et montrer quel preux chevalier Gryffondor il est ! lui fit remarquer Orion, sarcastique.

Regulus était encore plus perdu. Il répéta sa question et ses parents durent reconnaitre qu'effectivement, il était dans l'ignorance. Que s'était-il passé avec Sirius ? Encore quelque chose qu'il ignorait ? Pourquoi ne lui disait-on jamais rien ?!

-Sirius est venu avant Noël pour nous demander de stopper le contrat qu'on avait mis sur ta tête dans le but de te faire revenir ici, expliqua sa mère.

Regulus hocha la tête, il se souvenait de ça. Enfin, Sirius ne lui avait jamais rien dit, mais Regulus l'avait deviné. Cela l'avait touché. A l'époque, il avait cru que son grand frère avait réussi à faire entendre raison à Walburga et à Orion. Apparemment, ce n'était pas la bonne version. Il avait pourtant toujours cru que ses parents tenaient plus à son bonheur qu'à le voir revenir au Square, que peut-être ils étaient prêts à changer, à accepter cette situation. Une fois de plus, il s'était montré bien trop naïf. Pourquoi remettre ça sur le tapis aujourd'hui ?

-A l'époque, reprit sa mère, nous avions accepté parce que Sirius nous avait promis de renoncer à son héritage. Le voir sans le sou pour tenter de construire cet avenir dont il rêvait tant était trop tentant alors nous avons accepté. Mais avec le recul, il semble que si nous avions persisté, tu aurais fini par craquer et tu serais revenu à la maison. Quel gâchis, finit-elle.

Regulus n'en revenait pas. Il vit trouble pendant quelque secondes et ses jambes étaient comme du coton. Il eut besoin de s'asseoir pour ne pas chuter lamentablement par terre. Il se laissa tomber sur un des fauteuils du salon, juste en face de son père dont il n'osa pas tout de suite croiser le regard.

-Eh bien, tu viens nous demander des comptes mais tu es incapable d'affronter la vérité. Nous t'avons toujours estimé, Regulus, mais la vérité, c'est que tu es faible, renifla Orion.

-Dites-moi ce qui est arrivé à cet homme ! gronda Regulus qui fit de son mieux pour ignorer la douleur dans son cœur.

Il devait rester concentré sur son objectif. Ne surtout pas laisser la conversation dévier. Orion et Walburga étaient forts et sans scrupules. S'il ne faisait pas attention, il se ferait mettre en miettes ou retourner le cerveau.

-Tu ne veux pas vraiment l'entendre, crois-moi, minauda Walburga.

-Ce n'est pas à vous de décider. Je vous laisse une dernière chance.

-Tu nous menaces, tiqua alors sa mère.

-Exactement, siffla-t-il d'une voix froide.

Mais loin de leur faire peur, cela sembla plus les amuser qu'autre chose. Ils montraient enfin leur vrai visage et cela ne plaisait pas au 6ème année. Comment en était-il arrivé là ? La réponse à cette question remontait à 9 ans en arrière, lorsque cet homme était entré chez eux. Lorsque ses parents avaient accepté qu'un monstre n'entre chez eux, devenant eux-mêmes des abominations.

-Si tu tiens tant à le savoir, je vais tout te raconter, mais pourras tu l'encaisser ? s'amusa la femme.

Orion leva les yeux au ciel et se leva pour sortir. Il n'avait aucune envie d'assister à ça. Pour lui, il s'agissait d'une perte de temps. Regulus se mordit les lèvres. Il pensa à son frère, à son regard vide, et acquiesça.

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9 ans en arrière

Sirius entra dans la chambre de son frère, furieux. Il était énervé contre sa mère. Comme d'habitude, celle-ci aimait lui crier dessus et le traiter comme un idiot. Mais aujourd'hui, elle était allée plus loin, et tout ça pour une petite histoire. Le jeune adolescent grommela et après deux allers-retours devant le lit de son frère, croisa le regard clair et curieux de Regulus.

-Mère est horrible ! C'est une sorcière !

Regulus pouffa et Sirius sourit. Sorcière n'était pas exactement une insulte.

-Qu'est-ce qu'il y a ? lui demanda son petit-frère.

-J'en sais rien, elle s'est énervée parce que j'ai dit que je n'avais pas envie d'épouser une fille plus tard ! Beurk, elle veut que je me marie avec une de nos cousines !

Regulus fit la moue.

-C'est pas bien de se marier ?

Sirius leva les yeux au ciel.

-Bah non, ça va être chiant ! Ça veut dire qu'on sera ensemble tout le temps et j'ai pas envie ! Les filles, c'est chiant, ça fait des chichis pour rien et je pourrai pas faire ce que je veux ! En plus, avec nos cousines ! Elles sont tarées, sauf Andromeda, mais j'ai pas envie d'être avec elle !

-Mère s'est énervée pour ça ? s'étonna le plus jeune.

Sirius haussa les épaules. Il avait aussi parlé de garçons mais il ne voyait pas bien le rapport. A son âge, tous les garçons préféraient passer du temps avec leurs amis plutôt qu'avec des filles. Sa mère était tarée, comme ses cousines, tout simplement.

xXx

Walburga était une femme intelligente et puissante. Fière et fortunée, elle avait toujours tout réussi. Elle n'était pas une Serpentard pour rien. Elle ne laisserait donc pas ses enfants être des échecs. D'abord son ainé qui disait ne pas vouloir épouser de filles et maintenant son cher Regulus qui s'amusait à mettre des talons pour attirer l'attention ! Mais Regulus n'y était pour rien, il avait dû être influencé par son ainé. Il adorait Sirius et faisait tout pour lui ressembler.

L'homosexualité, elle s'en fichait bien, mais elle ne voulait pas de ça chez elle. Les Black étaient parfaits et pour elle, la perfection passait par la capacité à prolonger leur lignée de sang-pur. Hors de question que ses fils la couvrent de honte. Le problème venant d'abord de Sirius, elle devait le remettre dans le droit chemin et elle savait comment faire.

La solution se résumait à un nom : Henry Ballonga.

Elle avait fait escale dans une petit village moldue non loin de Cardiff deux jours plus tôt pour y retrouver une vieille connaissance qui avait désiré lui parler d'un nouveau projet et était à la recherche de mécène. Walburga n'avait jamais eu l'intention d'accepter mais avait apprécié de voir l'autre tout faire pour s'attirer ses bonnes faveurs. Au cours de cette rencontre, du grabuge avait éclaté plus loin, attirant son attention. Un homme avait été arrêté. Curieuse, elle avait demandé des informations à sa connaissance qui avait été incapable de lui répondre. Avant de rentrer, elle s'était donc contentée de trouver elle-même ses réponses. Faire parler le policier du petit commissariat du village avait été d'une facilité déconcertante pour une sorcière comme elle.

Elle avait trouvé l'histoire scabreuse et avait espéré que l'homme finirait pendu ou donné à manger à des chiens affamés. Elle en avait parlé à son époux le soir même et ils en avaient beaucoup ri. Mais aujourd'hui, l'histoire ne lui donnait plus du tout envie de rire. Elle espérait qu'il n'était rien arrivé à cet homme parce qu'elle avait besoin de lui. Quel meilleur moyen de faire rentrer Sirius dans le droit chemin si ce n'était en lui montrant combien l'homosexualité pour un Black était sale, dangereuse et honteuse ? Il fallait l'en dégouter.

Walburga était donc retournée dans le commissariat du village et avait une fois de plus utilisé ses dons pour pouvoir parler avec l'homme qui s'était avéré pitoyable. Il l'avait prise pour son avocat et avait tenté de plaider sa cause, disant qu'il était malade, qu'il avait besoin d'aide, qu'il avait une famille etc.… Walburga lui avait souri pour endormir sa confiance et lui trouver des excuses, si bien que quand elle lui avait proposé son marché complètement irréel, il avait accepté.

Elle avait lancé un sort d'oubliette au policier présent pour effacer toute trace de sa venue et de celle de Henry Ballonga. A celui-ci, elle avait affirmé avoir réussi à faire abandonner les charges contre lui. En échange, il devait disparaître, se faire discret quelques temps. Et pour cela, sa maison à Londres était l'idéal.

Walburga ignorait comment Orion réagirait mais elle ne s'en faisait pas. Si c'était pour l'honneur de sa famille, il n'y trouverait rien à dire.

xXx

Depuis quelques jours un homme s'était installé chez eux et Regulus était curieux. Un cracmol à la maison, c'était bizarre. L'enfant aimait l'observer. Il le trouvait bizarre et se demandait ce qu'un adulte incapable d'utiliser la magie pouvait bien apprendre à son frère. En plus, Sirius était trop fort, il n'avait besoin de personne. Poudlard était donc si dur que ça ? Il espérait qu'il allait s'en sortir quand ce serait son tour d'y entrer.

La venue de cet homme était censée être une bonne chose mais Regulus avait plus l'impression que tout était bizarre depuis qu'il était arrivé. Sirius ne souriait plus et n'avait plus de temps à lui accorder. Quant à ses parents, parfois ils le regardaient bizarrement, comme s'ils essayaient de lire à travers son regard.

A bien y penser, tout avait changé depuis la venue de Henry Ballonga. Peut-être que personne ne l'appréciait vraiment dans cette maison. Mais alors pourquoi l'avoir invité ? En plus, il vivait carrément ici !

Ses parents lui avaient dit de rester loin de lui. Néanmoins, malgré leur recommandation, Regulus était trop curieux. Lui aussi voulait assister au cours. En plus, Henry était gentil, il avait toujours une attention pour lui après ses cours avec son frère. Regulus l'aimait bien et ne voyait pas quel était le problème avec lui.

xXx

Sirius tenta de ne pas trembler, de lire correctement les mots qui se trouvaient sur son cahier, mais il peinait à se concentrer. Il n'avait que trop conscience de la présence de l'adulte à ses côtés. Sa respiration, son odeur, son regard. Il avait envie de vomir. Il priait pour que rien ne se passe cette fois.

Il ne comprenait pas comment tout ça était arrivé. Lorsque ses parents lui avaient présenté cet homme, le désignant comme une espèce de tuteur pour l'aider à être au niveau avant d'entrer au collège, il avait été presque content. C'était bien la première fois que ses parents se souciaient de lui. Bien entendu, il savait qu'ils servaient d'abord leur intérêt. Hors de question que leur fils ainé rate ses études ni ne couvre la famille Black de honte. Mais c'était un pas vers lui, le premier depuis si longtemps !

Mais très vite, Sirius avait compris que quelque chose n'allait pas.

A présent, c'était juste devenu un cauchemar.

La main de Henry se posa sur sa cuisse alors qu'ils étaient tous les deux assis devant le bureau de l'adolescent. Il se pencha vers lui, sous le prétexte grotesque de le féliciter, et Sirius eut un haut le cœur.

xXx

-Va-t-il rester encore longtemps ? soupira Orion.

-Qui ça ? demanda Walburga alors qu'elle feuilletait le journal.

-Le sale moldu que tu as ramené.

-Jusqu'à ce que Sirius comprenne bien la leçon. En tant que Black, on est en droit d'attendre plus de lui qu'un sorcier lambda ou même un autre Sang-Pur. La famille Black, c'est bien plus que ça. Si on ne fait rien maintenant, nous le regretterons plus tard, Orion.

-Je suis surpris qu'il ne soit pas déjà venu pleurer dans tes jupes, sourit Orion. As-tu pensé que peut-être, il aimait ça ? plaisanta-t-il.

-Ne sois pas grossier, voyons ! C'est répugnant, continua-t-elle. Sirius aime faire le fort, me tenir tête. Mais il finira par craquer.

-C'est vrai, convint Orion. J'espère tout de même que cette situation ne va pas s'éterniser. Regulus m'a déjà demandé deux fois s'il pouvait assister aux cours avec son frère. Il peut être si naïf parfois !

-J'espère que tu le lui as formellement interdit ! s'inquiéta sa femme.

-Bien entendu.

-Celui-là alors, toujours à vouloir faire comme son frère ! Tu sais qu'il a mis mes chaussures à talons il y a quelques semaines ?

Orion ouvrit de grands yeux choqués.

-Par Merlin !

-Ne t'inquiète pas, ce n'était probablement rien, juste un moyen d'attirer notre attention. Mais Sirius a également pu lui mettre des idées dans la tête, il en serait capable

Orion soupira et Walburga fit de même.

xXx

L'homme se caressa devant lui et Sirius eut envie de pleurer. Pourquoi faisait-il ça ? C'était dégoutant et il se sentait mal. C'était pire que lorsqu'il le touchait et faisait semblant d'être gentil pour se servir de lui. Il détourna le regard et Henry Ballonga lui parla. Il lui susurra des mots empoisonnés, l'accusant d'aimer ça, que ses parents savaient déjà tout et que ce n'était pas la peine d'avoir honte.

Honte.

Sirius se sentait honteux pourtant. Il n'avait rien fait de mal mais il avait l'impression d'être coupable. On lui infligeait tout ça pour le punir, pour l'avilir. Il était honteux et se sentait coupable. Tout ce qui se passait était une sorte de punition.

Quand ses parents l'avaient puni, il avait toujours trouvé ça injuste mais là, c'était différent. Il n'arrivait pas à penser, il voulait que ça s'arrête. Mais il ne savait pas quoi faire et au final, il ne faisait rien. Il était fautif parce qu'il laissait les choses continuer. Pourquoi ne tentait-il pas de tenir tête à cet homme ? A ses parents comme il l'avait toujours fait ?

Il s'en sentait incapable, physiquement et psychologiquement.

Il se sentait sale, tout simplement.

xXx

Lors du repas de famille – Henry soupait dans la chambre que la famille Black lui avait attribué – Kreattur leur apporta un courrier. Regulus sourit à son elfe et le remercia. Kreattur fut ravi et gêné à la fois. Il se tortilla avant de s'en aller pour les laisser manger. Sa mère le rappela alors à l'ordre et il baissa la tête. Il chercha le regard de son frère pour être rassuré mais son ainé avait la tête penchée sur son assiette, la mine sombre. Il mangeait à peine ces derniers jours.

-Qu'est-ce donc ? fit Walburga.

-Une invitation d'un de mes cousins. Il nous invite pour son anniversaire, lui et son compagnon, répondit son mari.

-Tu parles de Kairon Black ?

Orion acquiesça.

-Il en est hors de question. Plus personne n'a de contact avec lui depuis qu'il a décidé de vivre avec son gigolo. Un sang-mêlé en plus ! Je ne comprends pas pourquoi il n'a tout simplement pas été renié. Quelle honte pour un Black

Regulus se tassa sur sa chaise, mal à l'aise. Il n'aimait pas quand ses parents disaient du mal de son oncle Kairon. Il ne l'avait pas beaucoup vu, mais il l'aimait bien. Il était un peu comme lui. Rêveur, doux, intelligent et passionné. Il ne connaissait pas son compagnon mais il avait compris que le problème venait de lui. S'il le quittait, tout le monde serait de nouveau gentil avec Kairon.

-Ne suivez jamais le même chemin que lui, mes enfants, ou vous nous trouverez sur votre chemin !

Walburga regarda Regulus droit dans les yeux et ce dernier sentit son estomac se tordre. Sirius sortit soudain de table et alla s'enfermer dans sa chambre. Et alors qu'il pensait que ses parents allaient encore l'engueuler, ils ne dirent rien. Regulus eut l'impression que quelque chose n'allait pas.

xXx

Allongé sur son lit, Sirius pleurait toutes les larmes de son corps. C'était la première fois qu'il se sentait aussi mal après une de ses entrevues avec Ballonga. Il avait mal à la tête et passa la journée au lit. Il alla vomir plusieurs fois dans la journée et même si le lendemain matin, il allait mieux, il fut incapable de se lever et ne parvint pratiquement pas à manger. Orion l'accusa de faire semblant pour sécher ses cours de soutien mais dut se rendre à l'évidence que Sirius était vraiment malade. Ses parents firent alors venir un médicomage qui lui fit avaler des potions et lui conseilla de rester au lit pendant 3 jours pour pouvoir récupérer pleinement.

Dans son malheur, Sirius put néanmoins en tirer quelque chose de bon. Pendant ces jours de convalescence, au moins n'était-il plus obligé de voir Ballonga. Mais bien vite, ses jours de repos arriveraient à leur terme. Cela lui faisait peur, il ne voulait pas. Il ne pouvait plus supporter ça… Alors, pendant la nuit, pendant que tout le monde dormait, il alla dans la réserve de magie de ses parents et avala un truc au hasard. Il savait que tout ce que ses parents gardaient était dangereux de toute façon.

Pour ne pas se faire attraper, il retourna ensuite vite se coucher. Quelques heures plus tard, il se sentit si mal qu'il hurla dans son lit, réveillant toute la maisonnée. On appela de nouveau le médicomage de toute urgence qui parvint à le soulager très vite. Sirius se sentit ensuite plus fatigué encore. Il avait cru pendant plusieurs minutes qu'il allait mourir tellement il avait eu mal.

Ce jour-là, une partie de lui regretta qu'il ne soit pas vraiment mort.

Ses symptômes attirèrent néanmoins l'attention du soignant qui lui posa des questions pour savoir comment il avait pu tomber si malade. S'il avait mangé un truc bizarre ou si tout se passait bien chez lui. Sa mère était présente juste à côté de lui alors Sirius hésita.

Finalement, le futur Gryffondor assura que tout allait bien.

Que pouvait faire le médicomage pour lui de toute façon ?

Ses parents l'avaient abandonné alors il était déjà condamné.

xXx

Regulus avait pu discuter avec Henry aujourd'hui malgré les interdictions d'Orion. Cela voulait dire qu'il avait désobéi et il était inquiet d'être attrapé, mais ne regrettait pas. Il pouvait comprendre pourquoi Sirius le faisait si souvent. Il avait appris aujourd'hui que l'homme vivait à Cardiff et qu'il était marié. Il lui avait parlé de sa vie de moldu et Regulus trouvait ça bizarre de pouvoir se passer de magie. Mais c'était un cracmol alors c'était normal pour lui. Il aurait voulu l'interroger davantage mais ses parents le lui avaient formellement interdit. C'était un sujet douloureux pour l'homme, ce que l'enfant pouvait comprendre.

Content d'avoir pu se rapprocher d'un adulte si gentil qui se souciait vraiment de lui, Regulus lui parla de son frère, son héros. Il lui demanda d'ailleurs comment se passaient les cours. Ballonga semblait en être ravi alors cela fit plaisir au brun. Il savait que son frère s'en sortirait.

A la fin de leur discussion, le blond lui avait confié qu'il était son préféré et qu'il avait hâte de pourvoir passer plus de temps avec lui.

Cela aurait dû faire plaisir à Regulus néanmoins, il avait eu une sensation bizarre. Il avait souri, mais ça avait été quelque chose de forcé.

xXx

Comme Sirius ne pouvait plus se rendre malade pour échapper à ses cours, il se retrouvait dans la situation de devoir affronter cet adulte plus fort que lui qui lui faisait des choses contre son gré. Ce n'était pas forcément poussé mais c'était déjà trop. Ce que Ballonga aimait, c'était s'exhiber devant lui.

Et alors que Sirius croisa sa mère en sortant de la chambre de l'homme, il se demanda si elle était vraiment au courant de tout ce qu'il se passait. Ballonga avait toujours certifié que oui, mais s'il avait menti ?

Le doute s'installa en lui.

Quel genre de parents pouvait laisser faire ça ? Même le médicomage s'était inquiété alors normalement, ses parents devaient l'être aussi.

Sirius retourna dans sa chambre, indécis.

xXx

Finalement, Sirius en parla à ses parents. Il décida d'en parler plutôt à son père car il s'énervait moins souvent pour rien. Il avait aussi l'impression que celui-ci se moquerait moins de lui.

Son père n'eut aucune réaction particulière. Il posa simplement sa main sur son épaule et lui assura qu'il allait s'en occuper et qu'il n'aurait plus à le voir.

Le futur Gryffondor n'arrivait pas à y croire. Il avait attendu des semaines avant de venir dénoncer ce qu'il se passait de peur de ne pas être cru ou pire, que ses parents laissent faire… Mais cela allait s'arrêter si facilement que ça.

Il en était si heureux qu'il pleura de joie cette nuit-là.

xXx

Deux jours s'étaient écoulés depuis que Sirius avait alerté son père. Il n'avait pas reparlé de Ballonga et ses parents non plus. Sirius ne l'avait pas vu à vrai dire. Il pensait qu'effectivement, tout était fini. Mais lui qui avait pensé qu'il serait soulagé, ce n'était pas le cas : il avait toujours du mal à se nourrir correctement et avait des crampes d'estomac lorsqu'il pensait au blond.

Il pensait que ce lundi serait un autre jour comme un autre mais après le diner, sa mère lui demanda de le suivre dans le grenier. Il s'exécuta même s'il n'en avait pas envie. Il n'aimait pas le grenier. Bella lui avait fait croire, à Regulus et à lui lorsqu'ils étaient plus jeunes, qu'il était hanté par un esprit qui voulait manger leurs cervelles.

Mais sa mère n'accepterait pas de refus, surtout pour une histoire si stupide.

Quand il entra dans le grenier, sa mère pointait sa baguette sur le blond affalé par terre. Il gémissait de douleur et était couvert de plaies. Sirius fit un pas en arrière, apeuré. Non ! Non ! NON ! Son père lui avait dit qu'il ne le verrait plus… Pourquoi était-il encore là ?

Sa mère lui attrapa le bras et le mit face à l'homme. Sans qu'il ne s'en rende compte, il termina avec la baguette de sa mère dans la main.

-J'ai déjà fait le plus gros du travail et il a déjà beaucoup souffert pour tout le mal qu'il t'a fait, Sirius. Mais c'est toi qu'il a souillé, qu'il a blessé, qu'il a avili et traité comme un objet. C'est donc à toi que reviens le droit de mettre fin à sa vie.

Sirius se tourna vers sa mère, complètement paniqué.

-A toi de voir si tu veux rester une victime ou si tu veux être le bourreau qui inflige sa sentence à cette crapule. C'est un dégénéré. Un homosexuel pédophile. Tu n'es pas comme lui, mon fils, n'est-ce pas ? Tu n'es pas un monstre Sirius ?

-Non !

Alors qu'il repensait à tout ce qu'il avait vécu, à cette souffrance inutile, l'adolescent sentait la colère l'envahir. Avant l'arrivée de cet homme, Sirius se sentait bien. Il ne faisait pas de cauchemars, il était capable de rire malgré ce que sa famille lui faisait déjà subir. Avant Ballonga, Sirius n'était qu'un enfant. Maintenant, il n'était plus rien. Il se sentait sale et en colère. Il n'avait eu aucune chance. Le moldu était un prédateur, un criminel. Lui n'était qu'un enfant. Sirius avait commis l'erreur de croire qu'il pourrait s'en sortir, qu'un jour peut-être, tout cesserait. Il s'était trompé.

Il n'avait eu aucune chance. Une bataille perdue d'avance. Ballonga supplia pour sa vie et rampa se réfugier derrière des meubles en mauvais état. Sa mère mit sa main sur son épaule et serra. Ses ongles lui rentrèrent presque dans la peau. Sirius avait l'impression d'être une simple marionnette entre ses mains. Pourquoi était-il encore là ? Sirius avait cru que ses parents l'avaient chassé, que le square Grimmaurd était enfin redevenu sûr pour lui. Pourquoi était-il encore là ?!

Des larmes roulèrent sur ses joues. C'était trop pour lui. Il se souvenait parfaitement de ce que lui avait fait l'homme et c'était si dur qu'il arrivait à peine à ne pas fuir. Il savait que sa mère le traiterait de faible.

-Tue-le !

Sirius sursauta et commença à trembler. Elle réitéra son ordre plusieurs fois et il sentit les larmes couler sur ses joues. Le tuer ? L'adolescent n'en croyait pas ses yeux, il ne pouvait pas faire ça.

-C'est un dégénéré, il ne manquera à personne ! C'était déjà le sort qu'il lui était réservé à Cardiff !

Sirius connaissait le sort de mort mais il ne se sentait pas capable de le faire. Certes, il voulait que Ballonga disparaisse, il voulait qu'il meure pour tout le mal qu'il lui avait fait. Il avait vécu l'enfer à cause de lui. Sirius avait été prêt à mourir pour ne plus avoir à souffrir alors qu'il n'avait rien fait de mal… Mais le tuer… il ne pouvait pas. Cela ferait de lui un assassin. Il n'était pas un monstre. Il était le héros de son petit frère et un héros ne pouvait pas faire ce genre de choses.

-Tu es un incapable, Sirius, ragea finalement Walburga. Veux-tu que je demande à Regulus de venir s'en charger lui-même ?!

Elle fit semblant de l'appeler et Sirius dévisagea la porte légèrement ouverte. Non, surtout pas ça

-Mère, je vous en prie…

Elle esquissa un sourire.

Sirius osait à peine regarder le blond. Il devait le faire, il n'avait pas le choix. Sa mère continuait de le presser et Sirius commençait à perdre pied. Il ferma les yeux et trembla lorsqu'il prit enfin sa décision.

-Avada K-Keda…vra

Aucune étincelle ne sortit de la baguette et Sirius s'écroula par terre, anéanti.

-Une déception jusqu'au bout, marmonna sa mère.

Elle lui arracha la baguette des mains et la pointa sur l'homme qui s'était relevé et fonçait sur eux pour tenter, dans un acte de désespoir, de la désarmer.

-Avada Kedavra !

Le sort le toucha de plein fouet et il s'écroula aux pieds de l'adolescent. Sirius tomba sur ses yeux grands ouvert. Il vit la vie les quitter et sentit quelque chose se briser en lui.

Henry Ballonga était mort et il avait l'impression que c'était sa faute. Il l'avait tué. Et lui aussi était un peu mort en quelque sorte.

.

Regulus tenta de rester digne alors que Walburga observait ses réactions. Il savait ce qu'elle guettait, cette faiblesse qu'Orion et elle avaient toujours détesté chez lui. Regulus avait toujours tout fait pour ne pas les décevoir, leur donner tort. Il n'était pas faible. Ce que ses parents prenaient pour de la faiblesse était tout ce qu'ils ne possédaient pas. Du cœur, de l'humanité et de la compassion. Il ne s'était pas trompé en pensant plus jeune qu'il était comme son oncle Kieran Black.

Mais lui ne ferait pas la même erreur. Il ne laisserait pas son nom l'enchainer et lui faire croire qu'il devait quelque chose à ce nom, cet emblème.

Regulus se leva tel un automate. Ses yeux gris-bleu habituellement clairs, innocents et vifs étaient devenus sombres, orageux, et de sa personne se dégageait une telle quantité de magie qu'elle lui donnait une aura intense, écrasante. Walburga lui fit face, ses lèvres pincées en un signe de défi.

-Merci, lâcha alors le 6ème année.

Sa mère fronça les sourcils. Elle ne comprenait pas pourquoi il la remerciait. Elle ne semblait pas croire non plus que Regulus ait réellement les épaules pour encaisser de telles révélations.

-Vous savez, j'ai toujours cru qu'une famille, c'était celle dans laquelle on grandit, auprès de nos vrais parents, reprit Regulus d'une voix égale. Que les enfants se devaient d'être redevables de leurs parents. J'ai grandi en faisant de mon mieux pour vous honorer, vous rendre fiers. Je vous remercie d'enfin me permettre d'ouvrir les yeux. Sans vous, j'aurais été dans l'erreur encore longtemps et je n'aurais jamais pu être heureux. Je n'ai pas besoin de parents pour avoir une famille, surtout de parents comme vous. Ma famille, c'est Sirius. Ce sont tous les amis que je me suis fait cette année et les Potter qui sont si bienveillants avec moi. Je ne veux plus rien avoir à faire avec vous. Je veux me libérer de vous. Vous êtes un poids mort et m'avez assez empoisonné l'existence. Bruler mon nom de la tapisserie, je vous en prie. Si vous m'avez vraiment aimé un jour, faites-le.

-Pour qui te prends-tu ?! s'écria sa mère, ivre de colère devant l'insolence dont faisait preuve le cadet.

Mais contrairement à ce à quoi elle s'attendait, l'expression du Serpentard ne changea pas. Dans son regard, Regulus lui renvoyait tout ce qu'il pensait d'elle : une femme pitoyable. Il la détestait, réellement. Ce qu'il avait fait à Sirius, jamais il ne pourrait leur pardonner. Ils avaient détruit leur famille et l'avaient élevé dans le mensonge.

-Faites-le maintenant si vous voulez un tant soit peu garder la face.

Elle le gifla et Regulus vacilla. C'était la première fois que Walburga levait la main sur lui. Il esquissa un sourire triste.

-C'est fini, dit-il simplement. Je vous déclare la guerre. Je vais vous détruire vous et ce nom que vous brandissez en étendard. Détestez-moi car je n'aurais aucune pitié pour vous.

Il se détourna alors que Walburga restait sous le choc. Il ne se retourna pas même quand elle croassa son nom. En partant, le Serpentard croisa le regard triste de Kreattur. Il quitta le 12 Square Grimmaud, le cœur étonnamment plus léger. Une larme lui échappa.

C'était sa décision. Pas celle de Padfoot, ni celle de Sirius ou de n'importe qui d'autre. Aujourd'hui, il se détachait de ses chaines et cela faisait du bien.

Il était prêt pour ce qui allait suivre. Walburga et Orion avaient éveillé une part sombre en lui et allaient le regretter. Sirius méritait que pour une fois, quelqu'un prenne soin de lui. Il n'abandonnerait pas.

xXx

James avait l'impression de vivre un véritable cauchemar. Regulus n'était toujours pas revenu et… il ne savait pas ce qu'il ferait s'il ne revenait pas. Ses parents n'avaient pas été content quand il leur avait tout avoué. Il s'était pris un sacré savon mais n'avait pas bronché. C'était mérité. Les Potter avaient ensuite tenté de retrouver le Serpentard mais avaient dû s'avouer vaincu après avoir tourné pendant plusieurs heures dans les rues de la ville moldue. Fallait-il de nouveau demander l'aide de l'explorateur ? James y avait pensé et il avait voulu le faire mais ses parents l'en avaient dissuadé. Le blond devait être occupé et ils possédaient d'autres moyens de retrouver le Serpentard.

Euphémia et Fleamont avaient ainsi décidé d'attendre jusqu'au soir avant de prévenir les Aurors. Regulus était mineur et sa disparition était inquiétante. Ils seraient obligés d'intervenir et ne pourraient pas leur renvoyer une fin de non-recevoir comme ils l'avaient fait pour Sirius. De plus, avec l'alerte que Fleamont avait déposée au sujet de l'état du Gryffondor, ceux-ci seraient obligés d'admettre que quelque chose n'allait pas. Les Potter ne savaient pas dans quelle mesure les Aurors pourraient intervenir. Ils n'avaient malheureusement d'autres choix que de se reposer sur eux. Peut-être qu'ils auraient d'autres affaires plus urgentes, plus importantes à faire passer avant. Peu importe, les Potter comptaient leur rappeler régulièrement qu'ils attendaient des résultats. Il ne s'agissait pas de numéro, de dossier, mais d'un jeune homme à qui il était arrivé quelque chose de grave. D'inacceptable.

Pour l'instant, James les laissait bien volontiers gérer. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était attendre dans l'angoisse. Il espérait de tout son cœur que Regulus ait juste besoin d'espace pour se calmer, réfléchir et accuser le coup. Une partie de lui craignait que le 6ème année ne veuille pas rentrer à cause de lui, parce qu'il lui en voulait. C'était ce qu'il avait ressenti lorsque Regulus était parti. Le regard du brun avait été empli d'une immense tristesse et de désillusions, mais également d'une rage que James ne lui avait jamais connu avant.

James voulait juste qu'il revienne, il se fichait bien du reste. Il était prêt à s'excuser jusqu'à la fin de sa vie s'il le fallait. Pour lui, tout était de sa faute. Si seulement il avait prévenu des adultes bien plus tôt du problème de son ami ! A présent, Sirius était malade et il ignorait s'il retrouverait son meilleur ami un jour…

Avachi sur le canapé du salon, sa mère vint le voir pour tenter de le réconforter et James accepta son câlin sans rechigner. Il avait plus que jamais besoin du soutien et de l'amour de sa mère. Combien d'heures encore allait-il devoir attendre ? Et si Regulus ne revenait pas avant le lendemain ? A cette pensée, le Gryffondor sentit une boule d'angoisse se créer dans sa gorge. Il avait l'impression que cette boule lui bloquait la respiration et lui donnait envie de pleurer. En quelques semaines à peine, il avait l'impression de tout perdre. Comment sa vie avait-elle pu prendre un tel tournant ?

James ferma les yeux lorsque sa mère lui caressa les cheveux, appréciant le geste qui arrivait à le détendre.

-Tu ne te demandes pas pourquoi je réagis comme ça, maman ? souffla-t-il soudain.

Il connaissait et fréquentait amicalement le Serpentard depuis à peine un an. James avait beau être amical, populaire ou même un gentil garçon comme aimait le rappeler ses parents, il ne lui arrivait que très rarement de s'attacher aussi vite à des gens. Sirius, Padfoot ou encore Alice et Franck avaient été des exceptions. James avait beaucoup de connaissances, mais la plupart n'étaient que des camarades, de bons copains ou des gens qui l'admiraient.

-Je n'en ai pas besoin, je te connais bien, James. Il suffit de te regarder pour comprendre.

James se redressa et observa sa mère. Ses sourcils se froncèrent et il se demanda si sa mère avait vraiment compris ses sentiments pour Regulus. Il détourna cependant le regard sans rien dire, ne se sentant pas le courage d'aborder le sujet maintenant. Heureusement, sa mère non plus n'ajouta rien.

xXx

En début de soirée, on sonna à la porte. Il y eut d'abord un moment de flottement chez les Potter et puis James sentit son cœur battre plus vite. Il se leva si vite qu'il faillit se prendre les pieds dans le tapis du salon. Il courut pour aller ouvrir et sentit ses parents se dépêcher de le rejoindre. Il ouvrit la porte sans attendre et sentit l'émotion le submerger quand il découvrit Regulus. Celui-ci lui renvoya un regard vide. Le brun pouvait voir à travers ses yeux rougis les larmes qu'il avait versées plus tôt. Ce n'était pas l'accueil dont il avait rêvé mais tant pis, au moins était-il revenu.

James sentit toute la tension cumulée lors de la journée le quitter. Ses mains tremblèrent et il sentit l'émotion le gagner. Mais il verrait ça plus tard. Ce qu'il désirait le plus en cet instant était de prendre Regulus dans ses bras, de s'assurer qu'il allait bien et de ne plus jamais le quitter.

-Nous étions tellement inquiets pour toi mon garçon, l'accueillit son père, ému.

Fleamont passa devant son fils pour prendre brièvement le Serpentard dans ses bras. Bien entendu, sa mère fit de même et James aussi en rêvait mais ses yeux ne quittaient pas le Serpentard et il le voyait à peine répondre aux étreintes de ses parents. Il tenta néanmoins de leur sourire pour les remercier. James resta silencieux et suivit ses parents quand ceux-ci entrainèrent le 6ème année dans le salon.

-Comment vas-tu ? s'inquiéta Euphémia.

-…bien, je crois, hésita-t-il.

-Pourquoi es-tu parti ? demanda James.

Il aurait tout aussi bien pu lui demander pourquoi il était revenu mais il craignait d'être blessé par sa réponse. Pour finir, le principal était qu'il soit là, justement.

James observa le Serpentard. Il voulait déceler dans une de ses expressions s'il était énervé contre lui. S'il allait vraiment bien. Regulus détourna le regard et son expression s'obscurcit. Les Potter l'invitèrent à s'asseoir sur le canapé, l'entourant pour lui montrer leur soutien.

-Si tu n'as pas envie de parler, ce n'est pas grave, tenta Fleamont.

James n'était pas de cet avis. Il s'était fait un sang d'encre et avait besoin de réponses. Il pensait également que laisser le plus jeune seul avec ses tourments n'était pas une bonne idée. Regulus était parti pendant plusieurs heures. Sans compter que lorsqu'il l'avait brutalement quitté, il était dévasté et n'aurait pas dû rester seul.

Et puis, il n'en avait pas parlé à ses parents, mais Regulus avait transplané alors qu'il n'était pas encore majeur et surtout dans une rue avec des moldus. James ignorait si quelqu'un l'avait vu. Les gens qui l'avaient regardé l'avaient surtout trouvé bizarre et pathétique à geindre en plein milieu de la rue. Enfin, sans doute qu'avec la femme Ballonga, ils devaient avoir l'habitude de ce genre de scènes…

Alors même s'il ne désirait pas brusquer le Serpentard, le 7ème année ne pouvait se résigner au silence.

-J'avais besoin de voir mes parents. Je suis désolé d'être parti comme ça, James, expliqua alors Regulus.

-T-Tes parents, balbutia James. Pourquoi ?

-Je voulais savoir, souffla Regulus. Et j'ai compris. Je sais pourquoi Sirius est dans cet état.

Les Potter échangèrent un regard et James se crispa. Même s'il connaissait une partie de l'histoire, il lui manquait encore beaucoup d'éléments. Et il imaginait bien en voyant Regulus que cela n'avait pas été simple pour lui. Il était revenu différent de chez les Black.

-C'est leur faute. Ils l'ont détruit et je ne sais pas s'il pourra aller mieux un jour.

Une tristesse infinie s'afficha sur ses traits alors qu'il serrait les poings sur ses genoux.

-Je ne peux pas le perdre…

Euphémia le serra contre elle et tenta de le rassurer. James lui n'avait pas les mots. Il ignorait si son ami irait mieux bientôt. Regulus, qui se sentait fatigué, demanda ensuite à pouvoir se retirer dans sa chambre. Ils continueraient cette conversation plus tard. James l'accompagna, le suivant à distance. A distance physique évidente, et à distance mentale, moins visible. James sentait en effet que les pensées du Serpentard l'emmenaient dans un endroit inaccessible pour lui. C'était frustrant.

Regulus était revenu à la maison, mais finalement rien n'avait changé. Sirius n'allait pas mieux, James lui avait caché quelque chose d'important, les Black étaient des saletés de Suprémacistes. James n'aimait pas savoir que Regulus n'allait pas bien.

Le Serpentard était merveilleux, il devait passer sa vie à sourire, à être heureux et à être aimé parce qu'il le méritait. Alors il voulait faire la seule chose qu'il lui était possible de faire.

-Regulus.

Celui-ci se tourna brièvement vers lui avant de continuer à marcher jusqu'à sa chambre, hochant imperceptiblement la tête. James le suivit avant de fermer la porte derrière lui. Regulus resta alors debout au milieu de la pièce pour le dévisager droit dans les yeux.

-Je veux que tu saches que si je n'ai rien dit, ce n'était pas contre toi, bredouilla le lion. Sirius ne voulait pas en parler, j'étais perdu. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Même aujourd'hui, je n'en sais encore rien…

James ne savait pas quoi ajouter d'autre. Il aurait probablement dû y réfléchir pendant ses longues heures d'attente.

-Je savais que je n'aurais pas dû faire ça, qu'il fallait en parler mais j'étais juste complètement paumé et terrifié. Je craignais qu'il arrive un truc à Sirius, qu'il ne me le pardonne pas, ajouta-t-il.

-Je ne pardonne pas mais je comprends.

James ne savait comment interpréter ces mots.

-Tu as simplement fait ce que tu pensais devoir faire, ce n'était pas simple, reconnut Regulus. Mais si je suis encore un peu en colère et que je ne peux pas déjà passer à autre chose, c'est parce qu'une petite partie en moi se dit que si tu avais parlé, peut-être que nous n'en serions pas là aujourd'hui.

-Pour dire quoi ? lui fit remarquer James, agacé. Que voulais-tu que je fasse ? Sirius faisait des crises, refusait de me parler des détails glauques soit parce qu'il ne pouvait pas ou parce qu'il craignait que j'aille le dire à quelqu'un ! Il refusait d'être véritablement aidé parce qu'il pensait mériter tout ça. Tu voulais que je fasse quoi !?

-Que tu me dises que mes parents sont des monstres ! Que ce sont des putains de criminels…

-On te l'a dit. C'est toi qui refusais de le voir.

xXx

Pendant un instant, la révélation le fit vaciller. Pourtant, il aurait dû s'y attendre. James avait raison après tout, il avait effectivement toujours refusé de voir la vérité en face. Regulus avait pourtant eu de nombreuses preuves des défaillances qu'avait commises ses parents. Il avait attendu celle de trop pour comprendre, pour réaliser que ce n'étaient pas des actes isolés mais leur nature profonde.

Il avait presque accusé James de complicité du fait de son silence, mais et lui alors ?

Regulus se détourna, tentant de retenir les larmes qui ne demandaient qu'à couler. Il avait été là tout ce temps et ce monstre avait fait du mal à son frère. Tout cela était parti de petites histoires d'enfant dont sa mère avait fait une tragédie. Il se souvenait de presque tout. Avait-il délibérément choisi de fermer les yeux ou encore de se convaincre que ce n'était pas si grave ? Regulus ressentait un profond dégout de lui même. Il fit un pas, mais ses jambes le lâchèrent. Il s'effondra par terre sans pouvoir retarder sa chute. Toute l'adrénaline et la rage cumulées pour affronter ses parents le quittait. A présent, ne restaient que la fatigue et la tristesse profonde. Encore et toujours. Regulus ne tenta même pas de se relever.

-Il a essayé de se tuer, murmura Regulus.

Il ne regarda pas James, n'écouta pas sa réaction. Il avait le regard vide et flou à cause de ses larmes.

-J'aurais dû faire plus. Si j'avais parlé avant, tout aurait été différent…

James s'approcha et même s'il doutait que ce soit une bonne idée, il le prit contre lui. Le dos du plus jeune reposa contre son torse alors que le lion l'entourait de ses bras.

-Ne fais pas ça, Regulus, tu n'es pas responsable de ce qui arrive à ton frère.

-Si.

-Non !

-Bien sûr que si. Et toi aussi ! l'accusa Regulus. Lâche-moi !

-Non, je sais très bien ce que tu essaies de faire. Tu as peur, tu es énervé, tu es triste, tu te sens coupable et j'en passe. Tu ne sais pas comment gérer, tu es perdu et tu fais les mauvais choix. Tu me repousses parce que tu penses que tu ne mérites pas d'être soutenu. Je trouve ça injuste que tu m'accuses, mais je préfère encore que tu rejettes la faute sur moi plutôt que tu te dénigres comme ça.

James souffla et, sentant que Regulus ne se débattait plus, relâcha légèrement sa prise sur lui.

-Mais il y a une chose qu'il ne faut pas que tu oublies : les seuls coupables sont tes parents, mais également cet homme, Henry Ballonga.

Regulus ne savait pas quoi dire. Une partie de lui savait que James avait raison, mais peu importe à quel point il en était conscient, il n'arrivait pas à le verbaliser. Il avait pensé en allant voir ses parents et après leur avoir livré le fond de sa pensée qu'il serait apaisé. Mais non ! Il avait toujours cette rage en lui et ne savait pas quoi en faire.

-Ils m'ont tout dit, souffla-t-il. Je n'aurais jamais pensé me tromper autant sur des gens. Sirius et moi, on n'est rien pour eux. Seule la réputation de la famille Black a une véritable importance. Et ils étaient prêts à tout pour qu'on reste sur le chemin qu'ils avaient tracés, qu'on atteigne les objectifs.

Regulus serra les poings.

-Ils ont fait venir un homme chez nous, un autre monstre pour qu'il fasse du mal à Sirius. Tu te rends compte ?!

James ferma les yeux. Il avait toujours redouté d'entendre ces mots.

-A la fin, Walburga a tenté d'obliger Sirius à le tuer mais il en a été incapable.

Il prit une inspiration.

-Alors elle l'a tué devant lui, juste comme ça, sans une hésitation. Si Sirius est dans cette état là, c'est parce qu'il se sent coupable, confus et qu'il a peur. Il souffrait tellement qu'il voulait en finir et moi, je n'ai rien vu !

Regulus se dégagea violemment et fit les cent pas dans sa chambre.

-Ce n'est pas ta faute, tu étais jeune. Tu ne pouvais pas imaginer que tes parents feraient quelque chose d'aussi abject et monstrueux, tenta à nouveau de l'apaiser James.

-Pourtant, Sirius me l'a toujours dit. Qu'ils étaient fous et qu'on ne serait jamais heureux avec eux. Quand il a quitté le Square l'été dernier, c'était vraiment pour une question de vie ou de mort !

Regulus croisa les bras sur son torse et se mordilla les lèvres pour ne pas éclater en sanglots. C'était douloureux pour James de le voir ainsi. Il le sentait prêt à imploser. Il savait que quelque chose s'était cassé chez lui et qu'à présent, il était empli de colère et d'amertume.

-Je ne vais pas les laisser s'en sortir comme ça, gronda finalement Regulus.

-Qu'est-ce que tu veux faire ? s'inquiéta James.

-Leur faire payer. J'ai construit ma vie pour leur faire plaisir, toutes ces années gâchées à faire semblant d'être quelqu'un d'autre, à m'angoisser parce que je craignais de ne pas combler leurs attentes ! Ce ne sont plus mes parents, ce sont des criminels et je ne suis pas comme eux. J'ai un code moral, hors de question qu'ils s'en sortent comme ça !

-Regulus, tu es sérieux ? Tu ne vas pas t'attaquer à eux ! Imagine ce qu'ils pourraient te faire ?!

-Je n'ai pas peur d'eux.

James était réellement heureux que le Serpentard se détache enfin de ses parents, qu'il ouvre les yeux à leur sujet. Mais un tel changement, il craignait que ce soit plus la colère qui parle et que Regulus le regrette. Il ne savait pas dans quoi il allait se lancer. James lui-même ignorait quoi lui conseiller. Il était d'accord pour ne pas laisser les Black s'en tirer une fois de plus, mais comment faire…

-Un homme est mort. Un moldu tué par un Impardonnable, commença l'Attrapeur. Je vais les dénoncer à la commission magique.

James n'en revenait pas. Ce n'était pas rien de décider de dénoncer ses parents. Lui et Sirius avaient toujours espéré que Regulus parviendrait un jour à se détacher des Black, qu'il vivrait pour lui, serait libre et non plus sous influence. Ce jour arrivait enfin mais à quel prix ? Il regardait Regulus mais parvenait à peine à reconnaître l'adolescent boudeur et engagé, empli de timidité et de doutes lorsqu'il lui disait qu'il tenait à lui. Pire que ça, James avait l'impression que Regulus refusait tout soutien de sa part. Il affirmait ne pas avoir peur et loin de le rassurer, cela l'inquiétait davantage. La peur maintenait en vie, rendait prudent face au danger. Sa réflexion pouvait étonner car tout le monde savait combien il avait les valeurs Gryffondor chevillées au corps ! Mais c'était bien parce qu'il avait appris de ses erreurs qu'aujourd'hui, son discours n'était plus le même.

Et puis, il s'agissait de Regulus. Il avait tellement craint pour lui ces dernières heures. Il aurait d'ailleurs apprécié que le Serpentard n'agisse pas sous le coup de l'émotion et prenne le temps de réfléchir. Mieux encore, qu'il le laisse venir avec lui et n'affronte pas ses parents seul.

-Je n'aime pas t'entendre parler comme ça, souffla-t-il.

Regulus fronça les sourcils alors qu'il croisait les bras sur son torse.

-Je n'ai pas besoin de ton approbation, c'est mon combat.

Regulus semblait déçu de l'attitude de James et le lion tenta de ne pas trop prendre à cœur l'animosité du plus jeune, de ne pas se vexer de la manière dont il lui parlait. Il était sûr que Regulus aurait agi ainsi avec tout le monde. Sauf avec Sirius, probablement. James était certain que toute cette colère n'était là que pour ne pas qu'il s'écroule face à son sentiment de culpabilité. C'était tout un monde qui s'effondrait pour le 6ème année.

-Je crois que tu te trompes d'ennemi, Regulus.

-Non, tout est très clair dans ma tête, au contraire, répliqua-t-il fermement.

-Alors pourquoi j'ai l'impression que tu te tiens prêt à m'attaquer à tout moment ?

Les iris bleu gris tremblèrent et Regulus détourna le regard.

-N'oublie pas que je suis ton allié et c'est parce que je tiens à toi que je te dis de faire attention. Tu es en colère et moi aussi, mais si tu laisses cette colère prendre le dessus, tu ne pourras pas gagner contre eux. Tu comprends ?

Regulus le regarda de nouveau et James fut heureux de constater qu'il semblait moins sourd à ses arguments. Il pouvait enfin l'atteindre. Regulus venait de baisser ses barrières.

-Je n'ai pas le droit à l'erreur, admit alors Regulus.

-Ne te mets pas autant de pression. Comme je l'ai dit plus tôt, tu n'es pas tout seul. Je rêve de les voir pourrir en prison depuis un moment.

Regulus approuva et James eut un sourire.

Aujourd'hui, ils pensaient enfin à l'unisson, unis dans une même direction.

James ferait de son mieux, quoi que le Serpentard décide. Même s'il était motivé, il pouvait encore changer d'avis ou décider de suivre une autre voie. Là, c'était la colère qui parlait et tout le monde savait qu'il ne fallait pas prendre de décision quand on était dans cet état. Après tout, ce ne serait pas facile et peut-être que Regulus aurait envie de faire marche arrière. Peut-être qu'il douterait. Mais ce qui était sûr, c'était qu'il avait définitivement rayé de sa vie Orion et Walburga. James craignait pour lui.

Mais malgré tout, il était fier.

Mais malgré tout, il était fier.

-Je t'aime tellement, Mini-Black !

-Je déteste ce surnom, tu le sais, râla le concerné.

-Je sais, approuva James.

Regulus esquissa un sourire et timidement, vint le prendre dans ses bras.

-Je suis désolé, fit le Serpentard.

James n'était pas son ennemi et dans sa rage destructrice, il l'avait mis dans le même bateau que ses parents. James avait simplement fait ce qu'il avait cru être le mieux pour aider son ami. Regulus, au fond, n'aurait probablement pas mieux agi que lui. C'était ça qui le bouleversait le plus. Se dire qu'il n'aurait probablement pas pu faire grand-chose de plus pour que cette histoire ne connaisse pas une fin tragique.

-N'en parlons pas, je sais bien que tu as agi comme ça parce que tu t'inquiétais pour ton frère. Personne n'est parfait ! On ferait mieux de se soutenir, ça nous aidera à rester fort pour Sirius. Je serai là pour toi et on va les faire tomber, crois-moi.

Regulus acquiesça. Aujourd'hui, une fois de plus, il prenait conscience de la chance qu'il avait d'avoir James avec lui.

-Merci, bredouilla-t-il, car il s'en voulait encore.

-De rien, tu sais bien que je serai toujours là pour toi.

-James, souffla-t-il. Si à l'avenir tu es au courant de quelque chose du même genre sur mon frère, je veux le savoir. Je sais bien que ce qui vous lie avec Sirius est très fort, bien plus que ce qu'on a et même si je l'accepte, j'ai besoin de savoir que tu ne me feras pas toujours passer après lui.

-Regulus, tu sa-

-Ecoute, le coupa t-il. Je ne veux pas être traité comme un enfant ni comme un faible. Sirius est incapable de prendre soin de lui-même et tu es son meilleur ami, tu devrais le savoir. C'est mon frère, je ne veux pas être mis à l'écart. J'ai besoin qu'une fois dans ma vie, quelqu'un me montre que j'en vaux la peine et me traite comme un adulte.

-Très bien, c'est quelque chose que je peux faire.

xXx

Kreattur était très inquiet. La maison était agitée et ses maitres étaient furieux. Il savait pourquoi : le jeune maitre Regulus Black était passé il y a deux jours puis il était parti pour ne plus jamais revenir. L'elfe le sentait, il ne reverrait plus le jeune maitre et il en était triste. Il voulait que les choses s'arrangent, mais il ne pouvait rien faire. Il ne décidait de rien dans cette maison et se contentait de faire ce qu'on lui disait de faire. Il n'était qu'un elfe.

Mais cette situation lui faisait du mal et il se sentait responsable. Il s'était mutilé la veille pour se punir mais la douleur dans sa poitrine n'avait pas disparu. Il était un mauvais elfe, complètement inutile. Qu'allait-il advenir de la famille Black, du Square Grimmaurd ? Kreattur ne voulait pas se retrouver sans travail, il se sentait si bien ici.

Walburga et Orion, ses maitres, se disputaient constamment et l'elfe essayait de ne pas écouter mais ils criaient si fort… Pour ne pas les déranger, Kreattur redoublait d'efforts pour faire briller cette maison. S'atteler à ces taches le calmait un peu. Il était dommage que ses maitres ne possèdent pas d'activité qui les calme également.

Un cri retentit soudain à l'étage et Kreattur faillit casser une des précieuses porcelaines de sa maitresse. Il soupira de soulagement et continua de s'afférer. Comme il avait fini ses tâches à l'étage du bas, il monta plus haut. Il pouvait entendre plus distinctement les voix d'Orion et de Walburga alors il frotta plus fort la rambarde de l'escalier comme pour exorciser tous ces bruits, ces malheurs.

-Que crois-tu qu'il va faire ? s'inquiétait Orion.

-Je ne sais pas, c'étaient des paroles en l'air ! Jamais il n'aura le cran d'aller voir les Aurors, répliqua-t-elle.

-Et s'il le fait vraiment ? Tout ça, c'est ta faute ! Toi et tes idées révolutionnaires. Pauvre folle !

-Je t'interdis ! Je me suis peut-être trompée au sujet de Sirius, mais ce que j'ai fait ne nous fait pas risquer le baiser du Détraqueur. Veux-tu qu'on parle du secret de la naissance de Regulus ? Si ce que tu as fait venait à se savoir, on nous exécuterait sur le champ !

-Pas la peine de me le rappeler, se rebiffa Orion.

-Alors calme-toi et laisse-moi gérer. Il ne lui reste plus tant de temps que ça. En attendant, je m'occupe de gérer la tempête que notre très cher fils veut faire déferler sur nous.

Kreattur voulait ignorer ce qu'il venait d'entendre. Il descendit à toute vitesse les marches et alla se cogner la tête contre le mur de la cuisine.

Oublie ! Oublie ! Il continua à se faire mal tout en gémissant de douleur.

Il n'était qu'un elfe fait pour obéir aux ordres. Peu importe qu'il appréciât plus que tout le jeune maitre. Il ne faisait plus partie de la famille et il ne lui devait plus rien.

xXx

La veille, Remus avait reçu un étrange courrier. Un courrier qui l'avait néanmoins convaincu de retourner de nouveau près de Sirius. Apprendre la vérité avait été un véritable soulagement. Remus n'arrivait pas à croire que ce psychomage homophobe avait réellement réussi à le faire douter.

Dans sa lettre, James avait indiqué que Sirius avait probablement souffert pendant plusieurs années d'amnésie traumatique. Il lui était arrivé quelque chose chez lui, alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Revoir cette femme en ville, mais surtout la photo de cet homme, avait tout fait remonter. Le reste, il n'avait pas su comment gérer. Cette histoire était inconnue au Poufsouffle mais pourtant, ça lui disait quelque chose. Le châtain se souvenait de Sirius lui confiant un terrible secret. Lui livrant les souvenirs flous de son enfance et de cette personne à qui il avait sans doute fait du mal. Remus n'y avait pas cru et il avait eu raison. La seule personne à qui on avait fait du mal, c'était au jeune lion.

Remus se demandait ce qu'il s'était véritablement passé. James ne lui en avait pas dit beaucoup finalement et Remus lui en était gré. L'histoire, il voulait l'entendre de la bouche de Sirius si un jour il voulait se confier à lui.

Une partie de lui avait honte de la manière dont il avait réagi après ce qui était arrivé à Sirius. Il avait le sentiment de s'être bien trop focalisé sur lui et sur son sentiment de culpabilité. Il avait voulu des réponses, encore et encore, sans prendre le temps de digérer ce qu'il se passait, de comprendre.

Il avait oublié l'essentiel, le rétablissement du Gryffondor.

Remus se le promettait, il ne dévierait plus jamais du plus important ! Il avait hâte de revoir Sirius. Il voulait lui transmettre tout son amour et lui donner le courage et la volonté de revenir parmi eux. La veille, après avoir lu la lettre de son ami, il n'avait pas su trop quoi faire. Finalement, il avait sonné chez les Potter presque en s'excusant avant d'avoir la confirmation que tout le monde était heureux de le revoir.

Aujourd'hui, Remus s'apprêtait à quitter à nouveau la demeure familiale mais sa mère l'arrêta juste avant qu'il ne franchisse la porte. Elle s'inquiétait pour lui, il le savait et la comprenait. Il s'apprêtait à partir le sourire aux lèvres même s'il y avait de grandes chances qu'il revienne sans… Il pourrait alors retrouver ses travers et de nouveau ne plus décrocher un mot. Il pleurerait dans son lit son désespoir. Ce n'était pas facile de voir que l'état de Sirius ne s'améliorait pas. Remus l'avait déjà abandonné une fois, il ne referait pas la même bêtise. Il ne laisserait plus jamais personne douter de lui et le séparer du brun.

Alors même si c'était dur pour ses parents, aujourd'hui, il allait de nouveau rendre visite à son petit-ami.

Les Potter l'accueillirent avec joie et Regulus et James passèrent quelques minutes avec lui. Depuis ce qui était arrivé à Sirius, le trio n'avaient pas vraiment pris le temps de se retrouver. Remus avait préféré être seul avec sa culpabilité de peur de voir ses propres pensées se refléter dans le regard des autres. Regulus quant à lui n'avait trouvé rien d'autre que la colère pour ne pas s'effondrer. James enfin avait failli finir fou avec tous ces mensonges, ces secrets…

Rien n'était réglé, pourtant chacun des trois allaient déjà mieux et avaient envie de garder espoir. Ils avaient surtout compris qu'il leur fallait rester forts et unis pour espérer passer ce cap difficile. Leur principal sujet de discussion était l'avenir de Sirius, toujours en état végétatif, et la rentrée qui approchait à grands pas. Le Gryffondor allait rentrer en clinique privée. Les Potter lui avaient trouvé une très bonne place dans un endroit réputé. Tout le monde espérait ainsi que cela pourrait évoluer dans le bon sens.

Au bout d'un moment, Remus abandonna ses amis pour aller voir Sirius. Celui-ci était toujours dans sa chambre. Il n'était pas assis à fixer le vide mais allongé, les yeux fermés, comme s'il dormait paisiblement. Cette vision troubla le Poufsouffle, lui faisant l'effet d'une illusion déchirante. Le châtain prit une grande inspiration et s'approcha de lui. Il toucha son visage, replaça ses mèches de cheveux pour que sa coiffure soit impeccable mais possède aussi ce petit côté rebelle qui faisait craquer tout le monde. Et surtout lui.

Hier, il n'avait pas su comment se comporter face à Sirius. Il n'avait pu que pleurer, attristé de la cruauté qui avait frappé le brun et qui le faisait encore souffrir aujourd'hui. Il ne voulait pas de nouveau s'effondrer. Il voulait profiter de la présence du brun et lui donner de la force pour combattre ses démons. Le Poufsouffle s'allongea à côté de lui et lui raconta sa journée, lui parla de la rentrée imminente et du désir qu'il avait qu'ils puissent retourner à Poudlard ensemble. Il lui confia ses doutes, ses envies et surtout, lui rappela qu'il l'aimait plus que tout. Sirius ne réagissait jamais, mais Remus ne se démoralisait pas.

Sirius était l'amour de sa vie, il le savait. Il n'abandonnerait pas. Bientôt, il lui reviendrait.

Aujourd'hui, c'était sans aucun doute la dernière fois qu'il le voyait avant très longtemps. Il ne savait pas encore s'il pourrait rendre visite à Sirius dans sa clinique les week-ends, ni même si les sorties seraient autorisées à Poudlard. Il voulait profiter un maximum tant qu'il le pouvait encore. La prochaine fois serait peut-être à la fin de cette année scolaire, cet été. C'était si loin.

Remus se sentait tout chamboulé et il tenta de raconter des blagues, espérant que Sirius les entendrait et que cela lui ferait du bien même s'il ne pouvait pas lui répondre. Il termina par s'endormir blotti contre lui, la main contre le collier qu'il lui avait donné il y a plusieurs jours. Remus aurait pu rester là des heures durant, mais Fleamont vint le chercher, inquiet de ne pas le voir revenir. Il se réveilla, fatigué et dans un piteux état. Avant de rentrer, il s'arrêta néanmoins pour partager son ressenti avec Regulus et James. Le Gryffondor lui apprit par la même occasion qu'il n'allait pas reprendre les cours. Quant à Regulus, à présent que son frère allait mal, il hésitait lui aussi à retourner à Poudlard.

Remus pouvait le comprendre. Que pouvait-il ajouter d'autre ? Lui-même n'avait pas vraiment le cœur à retourner au château. Surtout que s'il ne pouvait pas rendre visite à Sirius, son moral dégringolerait. Plus les jours passaient, plus Remus doutait de ce qu'il voulait vraiment. En parler avec ses parents lui permettrait peut-être d'y voir plus clair.

-Merci de m'avoir permis de passer le voir aujourd'hui.

Remus s'apprêtait à rentrer chez lui mais Regulus l'interpella. Le Serpentard l'accompagna alors jusqu'à l'entrée pour pouvoir lui parler tranquillement.

-J'aimerais que tu me donnes les coordonnés de l'Auror Maugrey.

-Je ne sais pas si je peux… C'est pour quelle raison ?

-C'est très important, ça a un rapport avec Sirius.

Remus hésita. Il savait que Maugrey n'apprécierait pas mais si c'était pour Sirius…

-Très bien.

Regulus lui sourit et il put déceler dans ce sourire l'importance de sa réponse.

xXx

Padfoot était heureux de la nouvelle forme qu'il avait prise. Même si retourner dans le voile avait été dur, cette pause lui avait été bénéfique. Il s'y était ressourcé et avait travaillé sur lui-même. Il lui en avait fallu du temps pour comprendre qu'il ne pouvait pas se satisfaire de cette demi-vie, celle qui le condamnait à rester vivant mais qui l'empêchait de vivre. Il avait essayé, réellement, mais il allait finir par devenir fou s'il restait dans le voile.

Il ne demandait pas grand-chose. Il avait appris de ses erreurs et ferait en sorte que ça se passe bien cette fois-ci.

L'esprit observa Sirius, retranché dans un coin de son esprit. Pour les psychomages, cette partie de la tête du jeune sorcier était infranchissable, mais pas pour lui. Il pouvait y évoluer à sa guise. Alors il alla s'asseoir à côté de Sirius qui ne bougea pas d'un iota. Il ne semblait même pas le voir. Padfoot était triste de le voir comme ça.

Ce Sirius là n'avait déjà que trop souffert, il ne pouvait en supporter plus. Son esprit était en arrêt mais son corps était en bonne santé. Alors qu'à l'inverse, lui son esprit était en pleine forme alors que son corps était mort. La solution à leur problème lui apparaissait clairement. Cette fois-ci, ça marcherait car il n'y aurait qu'une seule personne aux commandes. Il garderait le secret et ferait au mieux selon les volontés et désirs de Sirius.

-Je vais m'occuper de tout. Tu n'as plus à te forcer à affronter ce qu'il se passe dehors.

Sirius sembla l'entendre et tourna lentement la tête vers lui. Padfoot lui sourit.

-Je sais que tu as peur, rien ne t'oblige à te battre si tu n'en as pas envie. Tu en as assez fait. Ici, tu es en sécurité.

-C'est vrai ? souffla Sirius.

-Bien sûr ! lui assura Padfoot. Je m'occupe de tout, pense à toi pour une fois.

-Merci…

Padfoot sentit son cœur battre plus vite. Enfin, son rêve allait se réaliser, il allait vivre la vie qu'il avait toujours voulu. Il sourit avant de se lever. Il s'éloigna de Sirius et lui jeta un dernier coup d'œil avant de refermer la pièce dans laquelle l'esprit du Gryffondor s'était retranché. Il vérifia que les barrières de celle-ci étaient solides et tenaient bien. De l'autre côté, Sirius était toujours replié dans un coin, l'air plus apaisé.

Padfoot se détourna et quitta l'endroit pour la salle de contrôle de l'esprit. Il allait prendre possession des lieux.

xXx

Lentement, Sirius ouvrit les yeux. Il reprit contact avec la réalité. Il sentait la chaleur sur sa peau, le soleil qui l'éblouissait, l'odeur de la tarte que Euphémia avait tenté de lui donner plus tôt. S'il se concentrait encore plus, il pouvait entendre les bruits de la maison et de ses habitants. James, Regulus, les Potter et leurs discussions, celle de la vaisselle, les oiseaux dehors. Le bruit de la vie.

Sirius tenta de se lever et chancela, mais il y parvint.

Il avait réussi à saisir cette 2ème chance. Il n'avait pas laissé le voile avoir raison de lui. Sa nouvelle vie commençait maintenant.

Fin partie 2


J'avais tellement hâte de vous montrer ce que j'avais réserver pour la fin de cette 2eme partie. Qu'en avez-vous pensez ? Est-ce digne d'une fin de partie ! x)

Est-ce que je réussis encore à vous surprendre ?