Winner is coming
Chapitre 9
Négociations
Assis dans son fauteuil en pierre, un plaid en laine rabattu sur les épaules, Stannis Baratheon sirotait une tisane. Melissandre avait insisté pour qu'il en boive.
« Bon sang, Melissandre, vous me prenez pour qui ? Mémère Tyrell ? »
« Vous devez reprendre des forces, mon roi ! »
« J'en reprends ! », avait-il protesté.
Il l'avait saisie par les cheveux, et l'avait attirée à lui : « J'enrage de vous désirer en vain comme un fou ! Jetez-vous donc nue sur la table, que vous puissiez tâter de ma puissance ! »
Une telle déclaration n'avait pas fait ciller Melissandre pour un sou, et elle avait posé ses mains sur ses pectoraux, le repoussant tout en les massant, en disant simplement : « Buvez. »
Et Stannis avait obtempéré.
Ce fut dans cette posture déshonorante au possible que Ser Davos le trouva.
« Sire ! Nous avons surpris ce géant dans la chambre de votre fille ! »
« Shireen ? »
« Vous n'en avez qu'une, à ce que je sache… »
Stannis avait alors jeté un œil au gros paquet que brandissait Davos. A première vue, il avait cru qu'il s'était agi d'un troll des montagnes, mais en fait, non, la créature était bien humaine. Il se leva, et alla l'examiner de plus près.
Sur ces entrefaites, sa femme, la reine Selyse, entra.
« C'est quoi, ça ? Un nouveau bâtard de Robert ? », fit-elle en regardant distraitement Brandor.
« Hum… Non. », répondit Davos.
« Robert sautait tout ce qui bouge, mais je n'ai pas souvenir qu'il se soit tapé des ogresses ! », lâcha Stannis avec flegme. Pour les chèvres, il était moins sûr… Ben quoi, tout le monde sait que ça existe, les satyres !
« Je suis Brandor, au service des Rois dans le Nord, et je suis venu récupérer le jeune prince Rickon ! », répondit fièrement Brandor.
Stannis le regarda, passablement estomaqué par ce pouilleux qui parlait avec hauteur.
« Et il le dit, en plus… », murmura-t-il.
Pour toute réponse, Bran le saisit à la gorge, et le souleva de terre : « Oui, j'ose, et tu vas me libérer mon fr… Rickon, si tu ne veux pas que je t'étrangle ! »
Davos saisit aussitôt un poignard, et le porta à sa gorge : « Lâche le roi ! »
Pour toute réponse, Bran serra plus fort.
« Si tu me plantes, je le balance par-delà le détroit ! », répondit-il à Davos.
Celui-ci eut un moment d'hésitation. Bran saisit doucement, de son autre main, le poignard de Ser Davos, et l'abaissa. Le vieux ne savait plus où se mettre.
« Libérez Rickon, et je vous laisse la vie ! », ordonna-t-il.
Melissandre intervint : « Ne cédez pas, mon roi ! Le sang royal a de grands pouvoirs ! »
« Je suis au seuil de la mort, Melissandre ! », grogna Stannis, qui n'arrivait plus à respirer.
« Il suffit ! », ordonna Selyse. « Ser Davos, allez donc chercher le jeune otage ! »
Davos s'exécuta.
Lorsqu'il reparut, avec Rickon, Stannis était devenu violet.
En voyant le géant, l'enfant courut aussitôt dans ses bras, bousculant tout le monde (apparemment personne ne respecte ces gens-là !).
« Hodor ! », s'écria-t-il.
Bran posa une main sur les boucles brunes de son frère, et de l'autre, lâcha Stannis, qui s'écroula par terre.
Melissandre et Selyse se précipitèrent vers lui.
« Oh, mon roi ! Dans quelle posture vous êtes-vous mis ? », lui reprocha sa femme.
« Oui, bon, ça va ! », marmonna Stannis, en reprenant son souffle.
« Je vous avais dit que vous étiez faible ! », renchérit Melissandre.
« Mais bon sang, taisez-vous ! »
Bran, quant à lui, avait saisi Rickon et s'apprêtait à partir.
« Holà ! Pas si vite ! »
Il se retourna. Stannis, lui jetant des regards furieux, se massait la gorge.
« Tu es un homme fort, le géant, reconnut-il. Mais où comptes-tu aller, maintenant ? »
Aïe ! En voilà une bonne question ! Bran n'y avait pas songé.
Rickon le regardait, épouvanté. A tous les coups, songea son frère, il doit s'attendre à ce que je lâche « Hodor ! ».
Bran tenta un clin d'œil à destination de son puîné, puis déclara : « Je suis au service de la Maison Stark, je m'en vais retrouver le roi Robert… »
« Hodor ? », murmura Rickon, interloqué. Les dieux soient loués, il s'abstint de poursuivre ses interrogations.
« L'usurpateur Robert », corrigea Stannis, avant d'ajouter stoïquement : « Il est mort. »
A ces paroles, Bran crut que son cœur allait défaillir.
« Je… Je ne vous crois pas ! » glapit-il.
A ses côtés, Rickon se mit à pleurer.
« Courage, Rickon, lui dit Brandor, tu vois bien que ces gens-là mentent pour nous déstabiliser ! »
« Il ose vous traiter de menteur ! », fulmina Selyse, outrée.
« Laissez, mamie. », répondit Stannis.
« Euh… En deux mots, s'il te plaît, chéri ! », chuchota sa femme, gênée.
« Ah oui ! Laissez, ma mie ! », rectifia Stannis sans s'émouvoir.
« Si, c'est vrai, Hodor, murmura Rickon, ils ont même récupéré la queue de Vent-Gris, et ils m'ont aussi montré la missive… »
Bran avait besoin de s'asseoir. Il s'accrocha au petit corps de Rickon. Robb, mort ? Mais comment ? Et où était leur mère ?
Stannis, voyant le type déstabilisé, en profita : « Tu n'as plus de maître, Brandor. Tu n'as aucune chance de t'en tirer. Je t'en accorde une : mets-toi à mon service, et j'épargnerai ton prince ! »
Bran regarda Stannis. C'était pour cet homme que son père avait donné sa vie.
« Entendu, dit-il, j'ai ta parole, roi Stannis. Mais Rickon demeure avec moi ! »
« Marché conclu ! »
Stannis tendit sa main, et Brandor la saisit.
