Chers lecteurs,
Pour ceux qui s'inquiéteraient : Harry Potter n'est pas homme à se laisser faire. Mais bon, il a toujours un petit retard au démarrage...
Merci aux commentateurs et autres lecteurs. J'aime toujours vous lire. Continuez ainsi bande de gens sympas.
Portez-vous bien, soyez fiers d'être de valeureux Poufsfouffles, à bientôt,
Al
Premier lundi de l'année. Drago était prêt. Il n'aurait pas pu être plus prêt.
Sa salle de classe était rutilante. Ses ingrédients étaient rangés par ordre alphabétique dans son armoire. Ses stocks étaient à jour : Fournitures & Sortilèges l'avaient livré la veille au soir. Un dimanche ! Il devait vraiment être leur client préféré (à moins qu'il les ait trop effrayés la fois précédente, quand le magasin de fournitures magiques l'avait livré avec deux jours de retard. Deux jours de retard ! Impardonnable.)
Il commençait à huit heures avec un cours d'une heure à donner aux quatrièmes années de Gryffondor. Puis il enchaînait avec les Serpentard de la même année. Question de bien commencer… Il était certain de réussir à coller Livingstone, son Gryffondor souffre-douleur un peu trop tête-brûlée préféré, dès le premier cours. Il suffirait que Livingstone rencontre Cooper en sortant de cours pour créer une occasion de faire perdre des points à la maison des lions.
La sonnerie retentit et bientôt un brouhaha lui indiqua que les quatrièmes années se trouvaient devant sa salle.
Drago attendit un petit moment que la tension monte derrière la porte avant d'aller l'ouvrir d'un geste brusque. La classe, en désordre dans le couloir, se reprit et se fit silencieuse en un instant : les élèves se redressèrent, certains, adossés contre les pierres, réintégrèrent le rang sans moufter. Quant à Livingstone, qui était adossé contre la porte, il tomba en arrière et ne dut qu'à son amie Mary Smith, gardienne de réserve dans l'équipe des rouges et débiles, de ne pas s'écrouler dans les bras de son professeur : elle le rattrapa d'un geste habile par la cravate et lui évita ainsi, au plus grand désespoir de Drago, sa première humiliation de l'année.
Drago lui jeta son regard le plus froid :
« Apparemment, le Quidditch n'aide pas à développer les réflexes. Vous devriez prendre exemple sur votre camarade, Livingstone : elle, au moins, est capable de rattraper quelque chose. C'est pas faute de vous avoir vu jouer l'an dernier.
- Pardon Monsieur.
- Nous vous pénaliserons comme au Quidditch. Dix points en moins pour Gryffondor. »
Drago vit un éclair de colère et d'incompréhension dans les yeux de Livingstone. Malheureusement, ce dernier ne répliqua pas, coupé dans son élan par Smith : à tous les coups, ces deux-là s'étaient acoquinés pendant l'été.
Dommage. Si Smith permettait à Livingstone de garder son calme, ça contrariait ses plans.
Drago fit entrer l'équipe de bras cassés dans sa salle et les laissa sortir leurs affaires. Bientôt la salle fut emplie d'une odeur agréable de métal frais de chaudron neuf et d'encre de Chine.
Drago, ragaillardi par ces odeurs qu'il affectionnait particulièrement, s'installa à son bureau et commença son cours sans plus s'intéresser à ces crétins de lions. Pour bien commencer l'année, il leur épargna la théorie et attaqua directement par des travaux pratiques. Par binômes ils se mirent au travail. Drago passait dans les rangs pour vérifier l'avancée des potions et vérifier la régulation des feux sous les chaudrons. Il lâchait parfois un commentaire acerbe.
« Broyés, les œufs de cafard ! Là vous les avez tellement écrasés qu'on dirait le vif d'or quand Jones réussit à l'attraper. Enfin, la seule fois où elle a réussi à l'attraper. »
Les Gryffondor frissonnèrent à la mention de Greta Jones, capitaine de l'équipe de Quidditch qui faisait la fierté de leur maison. Drago jeta un œil à Livingstone, mais peine perdue : aucune réaction. Il restait concentré sur son découpage consciencieux. Drago en remit une couche.
« Une salamandre entière, jusqu'à la moindre écaille, Livingstone. N'oubliez pas de vous occuper de sa queue, Smith. Et les boules de groseillier sauvage, c'est toujours par paire, n'en déplaise à votre camarade. »
Smith rougit jusqu'à la racine des cheveux. Il en fallait malheureusement plus pour émouvoir Livingstone que des allusions graveleuses.
À moins qu'il soit trop niais, ce qui était une possibilité à ne pas négliger.
La porte s'ouvrit soudain en grand pour laisser le passage à un professeur de Défense contre les forces du mal très énervé.
« Male… Merde.
- C'est Malefoy, Potter. » répondit Drago en pinçant les lèvres.
Les Gryffondor, ragaillardis de voir le Grand et Saint Héros Potter l'Ami des Elfes et des Mal-Aimés de l'Angleterre Sorcière, se poussèrent du coude, chuchotant et s'agitant, perdant en concentration. Livingstone en oublia enfin sa queue de salamandre et sa potion se mit à bruire désagréablement, pour le plus grand plaisir de Drago qui voyait enfin advenir ses prévisions apocalyptiques.
« Ah… Euh… T'es en cours, reprit Potter.
- Tes capacités de déduction ont dû faire fureur chez les Aurors. C'est étonnant qu'ils t'aient laissé partir.
- Je suis… Vraiment… »
Ah ben voilà. Ça devait lui arracher la gueule de reconnaître qu'il s'était planté. Dragoa attribua toute son attention à Saint Potter. Les yeux dudit Potter errèrent sur ses bras nus et la Marque des Ténèbres qui s'étalait sur son avant-bras. Il fronça les sourcils et Drago se dit qu'il aurait bien aimé que son collègue continue à afficher un air contrarié : ça lui allait bien.
« T'ai-je seulement autorisé à entrer ?
- Euh…
- Même notre directrice toque à ma porte. Jouirais-tu (et il insista sur jouir) de privilèges dont elle ne dispose pas ?
- Je ne jouis pas…, s'empêtra Potter.
- C'est bien ce qu'il me semblait. »
Avec tout ça, Drago en avait presque oublié où il se trouvait.
Le chaudron de Livingstone et Smith se mit alors à siffler violemment. L'attention de Potter se reporta sur cet abruti de Livingstone qui regardait, ébahi, son chaudron se liquéfier. Grâce à ses réflexes d'Auror surentraîné, il sortit sa baguette à toute vitesse.
Cette fois, le sang de Drago ne fit qu'un tour : si Potter agissait, c'en était fini de sa salle de classe !
« Potter ! Non ! »
Cela détourna suffisamment l'attention de Potter qui dut sentir son angoisse pour que Drago puisse dégainer sa propre baguette.
Il hésita un très court instant à pétrifier Potter pour éviter tout débordement, reconnut tout aussi rapidement que Potter aurait trois fois le temps de le stupéfixer en retour pour lui apprendre les bonnes manières et décida de reporter toute sa colère sur le malheureux chaudron de Livingstone.
« Evanesco ! »
Le chaudron entier se volatilisa.
Dans la salle, le silence se fit parfait. La voix glaciale de Drago reprit, alors que son regard ne quittait pas Potter :
« Livingstone, quelle était la longueur de la queue de salamandre que vous avez omis d'intégrer à votre préparation ?
- Euh… Euh… Vingt…
- Smith.
- Vingt-trois centimètres, monsieur, répliqua la bonne élève sans moufter.
- Vous ferez donc perdre vingt-trois points à votre maison pour avoir créé une situation qui aurait pu créer un accident mortel. »
Drago adorait exagérer : il aurait largement eu le temps de faire disparaître la potion incriminée avant l'explosion et il ne faisait pas travailler ses quatrièmes années sur des potions aussi dangereuses. Mais bon, avec Potter dans les parages, rien n'était moins sûr. Pas que Potter le perturbe, non. C'était juste que cet affreux individu réussissait toujours à introduire un coefficient de dangerosité et de hasard malencontreux dans n'importe quelle situation par sa simple présence.
« Vous serez en retenue avec moi ce soir et vous vous débrouillerez pour avoir un chaudron neuf pour le prochain cours. »
La cloche retentit et les élèves rassemblèrent leurs affaires. Dans chaque binôme, l'un s'occupa du chaudron alors que l'autre allait ranger les ingrédients. Tout se fit en un ballet admirable : Drago observait Potter du coin de l'œil et ce dernier paraissait dûment impressionné par la rigoureuse organisation de la classe de potions.
« Tu…
- Laisse les adultes finir leur travail. Tu en as fait suffisamment pour aujourd'hui.
- Je n'ai rien fait !
- Justement. N'en fais pas plus, tu pourrais être vraiment dangereux. »
Bien entendu, tout se passa comme prévu : Drago ne put s'empêcher de trouver qu'il était meilleur devin que cette pouffette de Patil. En sortant, Livingstone bouscula Cooper qui ne put retenir une remarque désobligeante. Drago ignora la première insulte venue du côté serpentard et ôta de nouveau deux points à Gryffondor pour le « Niffle ta mère ! » de Livingstone.
Trente-cinq points pour la première heure de cours de l'année ! Record battu.
Quand tous furent sortis, il se tourna vers Potter, impatient.
« Qu'est-ce que tu me veux ? Il y en a qui travaillent.
- J'étais venu pour te demander si on pouvait utiliser la salle commune de Serpentard pour observer le calamar géant du lac de Poudlard. C'est pour mon cours de troisième année.
- Depuis quand tu empiètes sur les plates-bandes de Lovegood ?
- Elle ne l'étudie pas : les animaux marins ne l'ont jamais trop intéressée. De plus, il entre dans mon domaine de compétences.
- Tu as des compétences, toi, maintenant ? Et Sushi n'est pas une créature maléfique.
- Le calamar a un nom ? »
Potter semblait vraiment surpris, au grand étonnement de Drago. Ce benêt n'avait jamais dû ouvrir l'Histoire de Poudlard pour ignorer une information aussi capitale.
« Hors de question que tu déranges Sushi pour tes lubies. Et il n'est pas dit qu'un Gryffondor dans ton genre mette un jour un pied dans la salle commune des Serpentard.
- J'y suis déjà allé, tu sais. »
Crâneur.
« J'ai cours, Potter. Tu as eu ta réponse. Si tu pouvais bien fiche le camp… »
Hors de question que Drago s'abaisse à lui demander où, quand, pourquoi, comment il avait fait pour se retrouver en salle commune de Serpentard. Il était certain que c'était une histoire fascinante que Potty chéri avait dû vivre lors de ses extraordinaires années scolaires et il n'avait pas envie de s'y intéresser. Absolument pas.
Mais Potter n'avait pas l'air de vouloir bouger.
« Tu leur montres ta marque ? » demanda-t-il en pointant ses manches relevées.
Ah. Là, il n'y allait pas de main morte.
« En quoi ça te regarde ? »
Drago avait presque craché sa réplique. Potter haussa une épaule, peu impressionné par sa verve :
« Tes élèves savent donc que tu as été un Mangemort ? »
Drago fit une moue : il n'avait jamais eu une remarque sur son tatouage ou son passé. Sa technique d'effroi permanent de ses élèves lui avait toujours permis de ne jamais laisser la porte ouverte à des questions plus personnelles. Son tatouage lui donnait un côté bad boy dangereux criminel qui ajoutait à son charisme. De toute façon, les élèves étaient trop jeunes pour comprendre pleinement les implications contenues dans la Marque.
Quant à ses collègues… Drago adorait les provoquer, et si ça passait par montrer de temps en temps sa marque, pourquoi se priver ?
« Je ne vois pas pourquoi je le cacherai, Potter. La guerre est finie. Ça fait partie de mon passé. »
Potter se frotta machinalement la cicatrice qui ornait son front et les yeux de Drago suivirent le mouvement de sa main nerveuse. Il avait toujours vu Potter faire ça et ça le rassura : il retrouvait des points de repère.
« J'en viendrai presque à t'admirer, Malefoy. »
Eh ben.
« La plupart des Mangemorts essaient de faire oublier leur passé. Toi, tu l'assumes.
- Et ? »
Potter avoua du bout des lèvres, presque admiratif :
« Tu fais preuve de courage. »
Merlin ! Mais qui lui avait filé un niais de Gryffondor pareil ?
« Je ne perdrai pas plus mon temps à t'écouter. J'ai des élèves dans le couloir. »
Drago fut presque quasi certain de lire du regret dans les yeux de Potter, comme si cet énergumène aurait voulu continuer ce badinage sans insulte ni provocation gratuite. Mais il se trompait, c'était sûr.
Alors il la fit, cette provocation gratuite qui rétablissait la distance entre eux :
« Dehors. J'ai besoin de garder mes potions sans contact impur. Et là, ta présence, c'est déjà trop comme contact.
- De ce que j'en vois, c'est plutôt toi qui mets en danger tes potions, répliqua Potter sur le pas de la porte.
- Ta classe explosera avant la mienne.
- Pari tenu. »
Et Drago sut qu'il était perdu. Le clin d'œil que Potter le perturba suffisamment pour qu'il ne réussisse pas à donner le moindre point à Serpentard lors du cours suivant.
