« Apocalypse SNow. »
Résumé : Où il est prouvé que Gojyo est bien le digne frère de Doku. Où il est prouvé que sanzo-ikkou et gui est aussi un drôle de mélange. Se passe avant le Voyage. Quasi-séquelle de « Gambler ». Gojyo's POV.
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Personne ne soupçonne les avantages à être des fumeurs invétérés. Prenez deux personnes qui n'ont strictement rien à se dire (les risques de pugilat ayant la faculté d'augmenter exponentiellement en cas contraire). Assis tous les deux à la même table, le silence risquerait rapidement de devenir pesant. Mais non. Chacun fume sa clope. Attendant patiemment que les deux autres membres du quatuor reviennent.
Et ils reviennent d'ailleurs. Les bras chargés.
« C'est quoi ça ? » demande aussitôt le moine, pas particulièrement amène.
« Des décorations de noël. » répond Hakkai, comme une évidence. Mais c'est vrai que c'est évident. Rien que le sourire béat du saru est un indice suffisant.
« Noël ? » lâche Sanzo d'un air dubitatif. « Tu es au courant que je suis bouddhiste, quand même ? » continue-t-il, effleurant inconsciemment du bout des doigts le sutra sur ses épaules.
« Tu sais Sanzo, plus je te connais, moins je suis sûr que tu sois un vrai moine, alors… »
Je fais de mon mieux pour étouffer en catastrophe un éclat de rire dans ma main. Il faut avouer qu'Hakkai ne manque pas d'aplomb.
« Noël. Non mais je vous jure…T'as été élevé par des bonnes sœurs ou quoi ? » continuait de marmonner le bonze tout en se battant pour allumer une nouvelle cigarette.
« Effectivement. L'orphelinat où j'ai grandi était tenu par des nonnes. » acquiesça tranquillement le youkai. « Je n'étais pas très friand de ce genre de célébrations, à l'époque, mais je crois que ça pourrait amuser Goku, non ? »
Et que voulez-vous répondre à ça ?
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Goku vient de me raconter quelque chose de très intéressant (qu'il tient d'Hakkai, vous pensez bien) à propos de ce morceau de verdure que je tiens dans ma main. J'ai bien l'intention de vérifier ses dires, au moment où je rejoins la cuisine…
« Ce n'est pas encore prêt, Goku… » sont les mots qui m'accueillent. Hakkai ne s'est même pas retourné. Je me dirige vers la table.
« Ne m'insulte pas, tu veux bien ? »
Il ne se donne pas la peine de répondre. Un bref sourire éclaire ses traits, j'en capte le reflet dans une vitre assombrie par le soir qui tombe. Manifestement, il décide que finir de cuisiner est plus important que de me demander ce que je peux bien foutre tout à coup perché sur une chaise. Il se saisit d'un couteau, et avec une dextérité impressionnante, se met à émincer des légumes.
Elles débarquent parfois sans crier gare, ces étranges idées qui me rappellent qui est supposé être l'homme qui partage ma maison. Cho Gonou n'était pas un youkai avant. Même si Cho Hakkai l'est. Il n'avait pas de griffes. Pour son œuvre de mort, c'est une lame qu'il a utilisée. Sans doute avec la même habileté avec laquelle il découpe ces pauvres végétaux innocents. Peut-être qu'une telle pensée devrait me déranger. Et pourtant…
J'en ai carrément rien à foutre.
Il est pas bien lourd. Au moment où il essaye de récupérer la salière, à côté de moi, je le saisis par la taille pour l'asseoir sur la table, juste en face de moi. Mes mains s'attardent sur ses hanches. Mon visage à quelques centimètres du sien, je suis penché vers lui. Il cherche à m'éviter, légèrement renversé en arrière, ses mains posées sur le bois dur de la table. Dans l'expectative, son regard troublé croise le mien. Son éternel sourire vacille.
Je ne pourrai plus jamais aimer avec ces mains couvertes de sang, avait-il laissé échapper un soir de pluie où je m'étais approché trop près de lui.
« C'est la tradition, non ? C'est important les traditions, sensei… » je lui dis de mon ton le plus badin.
Ça y est. Il a compris. Il lève la tête vers le plafond. La minuscule pousse de gui est toujours là où je viens de l'accrocher. Il a un bref éclat de rire avant que je me fasse un devoir de clore ses lèvres. Pour quelques instants, son passé ne compte plus. Il ne signifie pas grand-chose (pour lui, en tout cas), ce baiser. Une simple parenthèse. Il doit considérer ça comme une blague à moi.
Un éclair blanc en mouvement dans un coin de mon champ de vision. C'est Hakuryu qui vient de passer l'encadrement de la porte. Il stoppe net. En l'air. Une seconde de plus sans battre de l'aile, et je suis sûr qu'il serait tout bêtement tombé.
Si je n'étais pas si occupé, là, je me poserais des questions sur l'éclair meurtrier que je vois briller dans son regard reptilien. Mais il s'enfuit déjà à tire-d'aile hors de la pièce.
Vraiment trop occupé pour me demander pourquoi ce foutu dragon blanc ne vole plus droit. Hakkai n'a pas vu. Et je vais pas m'arrêter pour lui dire que son dragon débloque.
« Fumée… »souffle-t-il pourtant un instant plus tard en détournant légèrement la tête.
« Hakkai ? Tu m'as jamais dit que l'odeur du tabac te dérangeait à ce point… »
« Non, je veux dire… Ça sent la fumée…Ça vient de l'autre pièce… »
De mon côté, je suis quasiment sûr que j'ai aussi entendu des coups de feu…
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Un Goku hilare réfugié au sommet d'une armoire, ce qui confirme qu'il n'est qu'un baka saru, mais ça je l'ai toujours su…Il sourit pourtant d'une oreille à l'autre.
Un Sanzo enragé. Arme fumante au poing, il tient toujours le gamin en joue, mais semble à court de munitions. Il est en train d'insulter tout le monde et Hakkai en particulier. Il aurait raconté un truc qu'il fallait pas au singe. Je soupçonne Goku d'avoir eu la même idée que moi pour fêter noël. Et le bonze n'a pas dû apprécier (ou du moins c'est ce qu'il dit).
Et un dragon…Qui semble avoir eu la soudaine envie de réduire en cendres la maison… Hakuryu s'est manifestement mis en tête de brûler méthodiquement la moindre branche de gui accrochée dans la maison. Je veux même pas savoir pour quelle raison. Les flammes sont déjà en train de lécher la tapisserie…
On peut légitimement se demander comment à eux trois, ils ont réussi à transformer mon living-room en théâtre d'apocalypse, non ?
Rendre Hakkai muet de surprise n'est certes pas un mince exploit. Et c'est la deuxième fois ce soir. Heureusement, il retrouve bientôt sa voix. Il regarde toujours la scène par-dessus mon épaule.
« Kami-sama. Sanzo, pourquoi est-ce que tu as encore fait des trous dans notre porte ? C'est un nouveau hobby ? »
Notre porte. Hakkai fait des progrès…
Mais c'est pas tout ça. On peut pas laisser notre maison partir en fumée, quand même…
Et ma foi, aucune apocalypse ne me fera peur tant qu'il sera… là.
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À moitié endormi sur les genoux d'Hakkai, Hakuryu a toujours le hoquet. Quelque chose me dit que finalement j'aurais dû m'abstenir de partager mon sake avec lui, tout à l'heure.
Owari