Cette fanfiction comptera 41 chapitres : 39 chapitres pour l'histoire principale et 2 chapitres d'épilogue.


Le mois de janvier touchait à sa fin et Dahlia était à présent sûre d'une chose : elle n'aimait plus jouer au Quidditch. Enfin, pour être exacte, elle aimait jouer au Quidditch mais elle n'avait plus envie d'être joueuse professionnelle. Elle n'arrivait pas à s'imaginer faire ça pendant des années encore, elle avait envie d'arrêter. Il y avait plusieurs raisons à cela. Premièrement, elle en avait assez du stress et de la pression. Ça avait un côté attirant et stimulant, c'est vrai, mais c'était un peu trop. En tant qu'attrapeuse, elle avait le poids du match sur ses épaules à chaque fois et elle s'en rendait malade. Elle était nerveuse et stressée avant chaque match, ça ne lui plaisait pas, c'était usant. Deuxièmement, avec du recul, elle trouvait tout de même ce métier assez vain. Son objectif dans la vie ? Attraper une petite boule dorée. Super… Quand elle y réfléchissait vraiment, elle se disait que ça n'avait aucun intérêt. Elle n'apportait rien à la société, elle ne faisait que disputer encore et encore les mêmes matchs, elle « jouait » à un jeu. Au fond, il y avait quelque chose de puéril dans tout ceci. Elle se mettait dans des états d'anxiété fébriles pour des matchs qui en réalité n'avaient pas la moindre importance. Troisièmement, l'idée qu'elle pouvait perdre sa place à cause d'une blessure, d'une grossesse ou de l'arrivée d'une nouvelle personne meilleure qu'elle la rendrait franchement anxieuse.

Elle aimait jouer au Quidditch mais finalement, c'était mieux de le faire en loisir, dans un club amateur. En faire son métier et le but de sa vie professionnelle, c'était différent. Dahlia avait envie de faire autre chose, un travail plus stimulant intellectuellement, plus intéressant, plus important. Plus important pour elle, en tout cas. Au fond d'elle, elle savait parfaitement ce qu'elle voulait faire : travailler avec Clara. Lire des œuvres originales, promouvoir de jeunes auteurs et autrices, les rencontrer, influer sur le monde de la littérature, elle trouvait ça nettement plus intéressant et exaltant. Elle n'aurait plus à stresser pour les résultats d'un match complètement futile.

Elle avait cependant conscience que ce n'était pas une décision à prendre à la légère et que sa vie en serait un peu bouleversée. Malgré tout, elle savait qu'elle allait arrêter le Quidditch, ce n'était finalement pas un monde pour elle. Elle avait essayé, elle avait plutôt bien réussi, elle pouvait s'arrêter là. Elle comptait terminer sa saison et mettre fin à son contrat. Avant, il fallait qu'elle en parle à Harry et elle le lui annonça un soir, après avoir couché Perseus. Elle lui expliqua ses trois raisons et Harry ne fut pas vraiment surpris de sa décision. Il l'avait un peu deviné, il sentait bien qu'elle y prenait moins de plaisir qu'au début, il n'était pas aveugle. Il était le premier et essentiel témoin de ses angoisses d'avant match et il savait à quel point ça pouvait la miner. L'un dans l'autre, il était donc d'accord avec elle pour qu'elle mette fin à sa courte carrière dans le Quidditch.

Puisque c'était décidé, Dahlia invita Andrew et Clara à dîner. Andrew était méconnaissable depuis quelques temps, il était presque trop heureux pour que ce soit normal. Mais si, ça l'était. Il avait épousé la femme qu'il aimait, il avait un fils, sa boutique de bijoux avait du succès, tout allait bien dans sa vie. C'était beau à regarder, Dahlia adorait voir son ami comme ça. Ils bavardèrent joyeusement, entrecoupés de temps en temps par les garçons qui venaient les voir, partaient là où il ne fallait pas, essayaient de croquer n'importe quoi. Ils mangèrent l'entrée, nourrirent Walter et Perseus en même temps. Dahlia lui donna le sein une dernière fois avant qu'il se couche.

- Tu l'allaites encore ? demanda Clara. Moi j'ai arrêté, j'en avais marre… J'ai honte.

- Tu fais ce que tu veux, répondit Dahlia en haussant les épaules. Moi maintenant, c'est juste pour le matin, le goûter et le soir. Je pense que j'arrêterai à quand il aura un an, je commence à en avoir marre aussi.

Quand Perseus termina de boire, Dahlia le confia à Harry qui s'occupa d'aller le coucher. Andrew l'accompagna pour coucher Walter aussi et les deux femmes restèrent seules. Dahlia se tourna vers Clara et la regarda avec sérieux.

- Clara, tu te souviens quand tu m'as dit que ça te plairait de travailler avec quelqu'un et d'avoir une assistante ? Est-ce toujours le cas ?

- Oui, admit Clara. Je voudrais embaucher quelqu'un mais je n'ai pas encore trouvé.

- J'aimerais bien être cette personne-là.

Clara sourit, l'air ravie.

- J'aimerais bien aussi, à vrai dire… Au fond, j'espère depuis le début que tu vas revenir avec moi. Avec un salaire cette fois-ci, évidemment…

- Oui mais… Je vais être franche, je ne quitterai pas mon poste d'attrapeuse pour devenir une simple secrétaire.

C'était faux, elle allait le quitter de toute façon mais il fallait savoir se vendre. Clara regarda attentivement Dahlia.

- Bien sûr, c'est normal. Je ne veux pas une secrétaire, je veux une collaboratrice.

- Alors parfait !

- Je vais être franche aussi Dahlia, tu vas gagner beaucoup moins qu'avec le Quidditch, tu en as conscience je suppose…

- Oui mais ça m'est égal.

Dahlia aimait avoir de l'argent mais elle avait appris, depuis le temps, que ce n'était pas le plus important. Elle préférait nettement travailler avec Clara, elle savait que ça lui apporterait plus de satisfaction. Quand Harry et Andrew revinrent, Dahlia leur annonça qu'elle allait démissionner et travailler avec Clara. Il faudrait attendre un peu cependant car Dahlia avait signé un contrat de trois ans avec le club des Corbeaux du Bronx et elle devait aller au bout de sa saison. Au début du mois de juillet, elle serait libre comme l'air. Ça faisait long encore mais ses entrainements lui laissaient tout de même beaucoup de temps libre et Dahlia avait l'intention de rendre régulièrement visite à Clara pour se familiariser avec son futur travail et en connaitre déjà toutes les ficelles avant de commencer officiellement. Andrew eut l'air ravi de savoir que Dahlia allait travailler avec sa femme. C'était toujours plus agréable quand les gens qu'on aimait s'entendaient bien et devenaient proches.

Le moment le plus pénible fut assurément d'aller voir le président du club des Corbeaux pour lui annoncer qu'après cette saison, elle arrêterait. Cela se passa cependant mieux qu'elle l'avait craint. Elle prévenait tôt, ils auraient le temps de chercher et former quelqu'un d'autre. Elle jouait toujours bien, elle leur offrirait une dernière belle saison avant de partir, ce serait déjà ça. Et puis au moins, si elle avait la mauvaise idée de faire un deuxième enfant, elle ne les planterait pas en plein milieu d'une saison. Dahlia se serait passée de ce commentaire mais elle garda sa colère pour elle et quitta le bureau dès qu'elle le put. Maintenant qu'elle l'avait dit à Harry, qu'elle avait une promesse d'emploi avec Clara et qu'elle avait informé le club, Dahlia se sentit libérée d'un poids énorme. Elle retourna aux entrainements avec plus de motivation et de plaisir, désireuse de profiter de sa fin de carrière, soulagée de savoir que ce serait bientôt terminé.

Dahlia écrivit une lettre à ses parents pour leur donner des nouvelles et leur parler de sa démission. Elle craignit, en mettant sa décision par écrit, que son père soit déçu. Il avait l'air fier de savoir qu'elle jouait pour les Corbeaux, sans doute trouverait-il dommage qu'elle arrête. Dahlia trouva cela agaçant d'avoir à se préoccuper à nouveau de l'avis de ses parents et essaya de se persuader qu'elle se moquerait de ce qu'ils répondraient. Heureusement pour elle, ils n'émirent aucun jugement particulier. Après tout, elle démissionnait pour aller travailler avec Clara Seymour Stewart, il y avait pire comme choix de carrière. Dahlia comprit que son père était finalement très content qu'elle se rapproche encore plus de cette famille. Elle ne le faisait certainement pas pour la renommée et le prestige, elle aimait sincèrement Andrew et appréciait sincèrement Clara, elle pouvait laisser à son père le soin de réfléchir à ces choses-là.

OoOoO

Harry, lui, dut faire à nouveau face à une enquête délicate et resta à Londres pendant deux semaines. C'était beaucoup moins long que la dernière fois mais cela le déprima profondément. D'autant plus qu'il pouvait maintenant sentir l'agacement de Dahlia à l'idée qu'il ne rentre pas. Jusqu'à présent, elle n'avait jamais rien dit mais il était clair qu'elle commençait à en avoir marre. Elle faisait de plus en plus de remarques sur les inconvénients à être Auror, sur les risques, sur le fait qu'elle n'aimait pas rester seule avec Perseus pendant des semaines, sur le fait qu'elle n'aimait pas non plus ce genre de couple cliché où le mari s'absentait longtemps pendant que la femme restait gentiment à la maison à garder les enfants. Elle n'était pas Fleur. Harry entendait ses piques, lancées parfois au détour d'une conversation, parfois sur un ton faussement anodin.

Il se sentit donc coupable de s'absenter encore deux semaines et quand il rentra, il se sentait abattu et déprimé. Dahlia le vit nettement et s'abstint de tout commentaire, cette fois-ci. Ils se retrouvèrent au lit, après avoir couché Perseus, pour discuter de la situation. Harry avait replié ses jambes contre lui et paraissait un peu perdu.

- Je n'ai plus envie de faire ça, disait-il. Partir tous les jours loin de vous est déjà pénible mais quand je dois rester à Londres pendant plusieurs semaines, ça devient vraiment lourd.

- Pour moi aussi, admit Dahlia.

Il lui lança un regard un peu désespéré.

- Tu crois que je devrais démissionner comme toi ?

- Je ne sais pas, peut-être…

- Mais pour faire quoi ? Depuis que je suis petit, je veux être Auror, c'est le seul métier qui m'a jamais intéressé. Je n'ai jamais réfléchi à autre chose, jamais eu envie d'autre chose. Et je n'ai pas d'autres compétences que ça. Sincèrement, je ne m'imagine pas du tout dans une boutique comme Ron ou dans un bureau, je m'ennuierais à mourir. J'ai quand même besoin d'action, de me sentir utile…

Il était clair, en l'entendant parler, que Harry n'avait aucune envie de démissionner du bureau des Aurors. Et en tout honnêteté, Dahlia ne l'imaginait pas vraiment faire autre chose non plus. Il aimait son travail et elle se sentait coupable de vouloir l'en priver.

- Est-ce que tu ne pourrais pas être Auror ici, au MACUSA ?

Harry hésita un instant.

- J'en ai parlé avec Abby et Tyler, avoua-t-il. Et ils ont été francs, il y a assez peu de chances que le MACUSA m'embauche comme Auror.

- Mais pourquoi ? s'étonna Dahlia.

- Mais parce que je ne suis pas Américain, répondit Harry avec abattement. Apparemment, ils répugnent à confier de tels pouvoirs à des immigrés qui n'ont pas la nationalité, ils ont suffisamment d'Américains qui postulent, pourquoi donner un poste à un Anglais ? Je ne suis même pas résident permanent !

Dahlia médita ce qu'il venait de dire, essayant de compter les années et d'être certaine de ce qu'elle allait dire.

- Moi je pourrai bientôt obtenir la nationalité américaine si je le souhaite. Il faut avoir été résident permanent au moins cinq ans et ça fera cinq ans au mois de juin. Tu es marié avec moi donc…

- Je ne suis pas sûr que ça marche si on est déjà marié avant. Je deviendrai simplement résident permanent, non ? Et je crois qu'il faut avoir été marié au moins trois ans ou alors que tu sois Américaine depuis au moins trois ans ou… je m'y perds ! Je n'en sais rien, c'est affreusement compliqué tout ça !

- Mais c'est absurde, notre fils a la nationalité américaine !

- Je sais, je n'y comprends rien. Mais même si j'obtenais la nationalité, rien n'assure que je serais pris au MACUSA. Les gens qui émigrent ne retrouvent pas forcément leur métier d'origine…

C'était un fait, si Harry démissionnait, rien n'indiquait qu'il pourrait à nouveau être Auror. La vie n'était pas aussi simple. Il se retrouverait au chômage et il devrait chercher autre chose. Dahlia voyait bien que cette perspective effrayait Harry. Elle-même n'était pas très sûre de vouloir ça. Son salaire allait considérablement chuter quand elle travaillerait avec Clara et si Harry était au chômage, les choses risquaient de se compliquer. L'idée d'être pauvre ou en précarité financière effrayait Dahlia aussi.

Il y eut un silence, chacun réfléchissant à une solution, même temporaire. Il y en avait bien une à laquelle Dahlia pensait depuis un moment, depuis qu'elle avait invité ses parents pour les confronter à ses reproches. Elle n'en avait jamais parlé avec Harry mais l'idée était restée là, tapie dans son esprit, et revenait parfois la démanger. Dahlia hésita longtemps avant d'ouvrir la bouche, pas vraiment sûre elle-même de ce qu'elle allait dire.

- Et si… Et si nous allions vivre à Londres quelques temps, pour voir ce que ça donne ? Proposa-t-elle.

Harry se tourna brusquement vers elle, stupéfait. Il se crispa immédiatement, cette idée le rendait nerveux. Dahlia s'expliqua davantage avant qu'il réponde.

- Je ne veux pas dire que nous devrions y vivre définitivement mais nous pourrions essayer, quelques mois, le temps de réfléchir à autre chose. Peut-être que ça se passerait bien après tout…

- Que ça se passerait bien ? répéta Harry, incrédule.

- Oui, regarde, on y a passé tout l'été et personne n'a découvert qui j'étais. Maintenant ils savent que tu es marié, ils ne chercheront peut-être pas à en savoir plus. Au pire, ils peuvent toujours prendre quelques photos comme la dernière fois, ce n'était pas trop méchant, personne ne me reconnait. Ils savent que je m'appelle Dahlia Black et que je joue au Quidditch, ils n'iront peut-être pas chercher plus loin !

Harry était surpris par ce qu'elle disait, surpris qu'elle soit aussi optimiste. Mais en même temps, il commençait à se dire qu'elle n'avait pas tort. Ça rejoignait ce qu'il avait pensé au sujet de Mark. Peut-être avaient-ils peur pour rien, peut-être s'empêchaient-ils de vivre pour des angoisses qui n'existaient pas. Après tout, oui, les gens savaient qu'il avait épousé une Américaine qui jouait au Quidditch, très bien, ils s'en contenteraient surement. Harry sentit son cœur s'accélérer dans sa poitrine d'un seul coup, pris du même optimisme qu'elle.

- Et si les gens découvrent qui tu es ? demanda-t-il quand même.

Dahlia hésita un moment.

- Eh bien… Ce qui me faisait le plus peur, c'étaient bien sûr mes parents. Maintenant qu'ils savent et qu'ils me soutiennent, j'avoue que ça m'effraie un peu moins.

- Et ton travail ? Comment feras-tu pour…

- Comme toi Harry, je prendrai des Portoloins !

- Mais tes amis, tu ne pourrais plus…

- Comme toi Harry ! répéta Dahlia. Tu fais ça depuis des années et je sais que ça te fait souffrir sur bien des points. Je pourrais… je pourrais le faire à mon tour. Et puis ce n'est pas comme si je partais dans un pays étranger. L'Angleterre, c'est mon pays, il y a mes parents, il y a Fleur, je ne serai pas complètement seule non plus.

Elle avait raison. Harry aussi devait traverser l'Atlantique pour travailler et voir ses proches, pourquoi pas elle ? Une partie de Harry en ressentit une détermination égoïste et vaguement rancunière. Oui après tout, pourquoi pas elle ? Pourquoi ne se taperait-elle les Portoloins, le décalage horaire, le manque de ses amis, tout comme Harry se le tapait depuis des années ? Surtout si ce n'était que pour quelques mois, elle pouvait bien survivre à cela. Harry s'en voulut de penser de cette manière mais il ne put pas s'en empêcher.

Ils discutèrent jusque tard dans la nuit, élaborant des projets, réglant un par un les obstacles qu'ils imaginaient sur leur route. Qui garderait Perseus ? Où vivraient-ils ? S'ils allaient vivre à Londres, Lucius et Narcissa seraient surement plus présents dans leur vie. C'était finalement le seul vrai désavantage que Harry voyait. Ils se couchèrent fatigués mais excités par cette nouvelle perspective. Harry ne pouvait s'empêcher de penser que si l'expérience se passait bien, ils pourraient même décider de rester définitivement en Angleterre.

Ils y pensèrent et en parlèrent pendant des jours. Les deux plus gros soucis qu'ils avaient étaient de trouver une maison à louer et de trouver un mode de garde pour Perseus. Puisqu'on parlait de vivre plusieurs mois là-bas, Dahlia préférait être à Londres. La campagne était agréable pour les vacances mais elle n'avait pas envie d'aller se perdre toute seule dans un village pendant des mois. En ville, ce serait mieux, ils auraient plus facilement accès à tout et en plus, c'était toujours plus discret de vivre dans une grande ville. Pour Perseus, ils auraient pu engager une nourrice mais ni l'un ni l'autre n'avait très envie de faire entrer chez eux une personne étrangère qui risquait de reconnaitre Dahlia et d'ébruiter l'affaire. Idéalement, ils préféraient que ça reste en famille. Et ça tombait bien, il y avait beaucoup de famille en Angleterre.

Ils s'y rendirent un jour tous les deux, laissant Perseus chez la nourrice à New York. Molly les accueillit pour le thé, heureuse de les voir. Andromeda était là aussi, ainsi que Fleur et Ron. C'était une sorte de réunion de crise et Harry était heureux de constater qu'ils avaient tous répondu présents. Dahlia et Harry expliquèrent leur projet de venir vivre quelques temps en Angleterre pour voir comment ça se passerait. Il fut évident que tout le monde eut l'air ravi de l'apprendre. Evidemment, ils essaieraient de se faire discrets pour éviter les scandales ou la curiosité mal placée des journalistes. Dahlia irait travailler en Portoloin et ne serait finalement pas absente très longtemps, c'était l'intérêt du Quidditch. Perseus se retrouverait donc seul de deux heures de l'après-midi à six ou sept heures, moment auquel Harry rentrerait du travail.

- Je peux parfaitement venir garder Perseus deux jours dans la semaine, déclara Andromeda.

- Vraiment ? s'étonna Harry. Je voulais surtout vous faire savoir que je pourrai prendre Teddy plus souvent avec moi, le weekend ou…

- Il en sera enchanté. Mais je peux aussi garder Perseus. Si vous louez une maison avec une cheminée, ce sera facile de venir avec Teddy. Franchement, ça me ferait sortir un peu et Teddy serait heureux de s'occuper de Perseus, c'est un enfant très seul malheureusement. Nous y serions tous gagnants.

- D'accord, merci, dit Dahlia, soulagée de cette première proposition.

- Je veux bien garder Perseus le reste du temps, compléta Molly.

Harry s'y attendait mais il était heureux qu'elle l'ait dit. Il se sentirait beaucoup plus rassuré de confier son fils à Molly et Andromeda qu'à des inconnus. Fleur et Ron assurèrent qu'en cas d'imprévu, s'il y avait quoi que ce soit, ils seraient également là. Avec le travail de Harry, on ne pouvait jamais être totalement certain qu'il rentrerait à l'heure ou même qu'il rentrerait. Harry et Dahlia remercièrent. Ils savaient bien que ce n'étaient que des solutions temporaires et qu'il faudrait reconsidérer les choses dans quelques mois mais pour l'instant, ça semblait plutôt bien.

Evidemment, il fut impossible d'ignorer le fait que Narcissa et Lucius seraient parfaitement disponibles pour garder Perseus et qu'ils seraient certainement très heureux de le faire. Harry ne voulait pas, cela voudrait dire laisser Perseus seul avec eux.

- Ils ne vont pas le transformer en Mangemort simplement parce qu'ils le gardent un après-midi de temps en temps, finit par dire sèchement Dahlia.

- Non, je sais, je… Nous en reparlerons quand la question se posera.

Ils évitèrent d'en reparler et ignorèrent le sujet. Même si Dahlia était d'accord pour dire que ses parents avaient commis des crimes et qu'elle leur en voulait, cela la blessait un peu que Harry refuse de leur laisser Perseus. En tout honnêteté, elle-même n'avait pas spécialement envie que son fils grandisse au manoir avec des gens au passé aussi sombre mais c'était agaçant que Harry l'interdise.

Harry s'occupa de louer la maison, comme la dernière fois. Il se sentait toujours un peu coupable d'embrouiller les Moldus et de les forcer à signer des contrats fallacieux mais il se rassurait en se disant que le plus important était de toute façon qu'ils paient leur loyer. Ce n'était pas sa faute s'il n'avait pas de bulletin salaire à présenter, si Auror et Quidditch ne faisaient pas partie du vocabulaire moldu. Cela aurait été bien plus simple que les sorciers louent eux-mêmes des maisons mais ça ne se faisait pas. Ils n'étaient surement pas assez nombreux pour ça, en plus. L'avantage était que personne ne savait où Harry habiterait.

Les amis de Dahlia furent tristes d'apprendre qu'elle allait partir mais ils comprenaient tous sa décision. Après tout, elle était Anglaise et elle avait retrouvé ses parents. Il était plutôt normal qu'elle veuille rentrer. Clara eut l'air inquiète que ce déménagement bouleverse le plan de carrière de Dahlia mais celle-ci lui assura que ce ne serait pas le cas. Et, comme, elle le répéta à de nombreuses reprises, ce ne serait que temporaire. Harry et Dahlia gardaient leur appartement de New York, ils y reviendraient certainement dans quelques mois. Enfin, à la fin du mois de février, Dahlia, Harry et Perseus prirent le bateau pour gagner Londres.

Ils avaient choisi une maison de brique rouge, proche de Regent's Park, à Baker Street. Elle se trouvait juste en face du musée du célèbre détective Sherlock Holmes, ce que Harry avait trouvé drôle. Evidemment, Dahlia ne savait pas qui c'était. La maison était grande, meublée, plutôt luxueuse. A vrai dire, c'était un quartier et une demeure de riches et Harry avait un peu hésité à la louer. Mais la vérité c'était que Dahlia gagnait extrêmement bien sa vie en tant que joueuse de Quidditch professionnelle et que donc, dans les faits, ils étaient riches. Dahlia adorait la maison, rien que pour ça elle était contente d'être venue à Londres. La décoration témoignait d'un goût certain, les meubles anciens étaient élégants, les lustres impressionnants. La fenêtre de sa chambre donnait sur les arbres de Regent's Park et elle était ravie de savoir qu'elle pourrait régulièrement aller s'y promener. La rue était bruyante et animée, il y avait beaucoup de touristes dans le coin mais ça ne faisait rien, un simple sortilège les coupait du bruit extérieur. Et le soir, en revanche, ça redevenait plutôt calme.

La maison contenait quatre chambres et deux salles de bain, un vaste salon, une salle à manger tout aussi spacieuse et une cuisine fort jolie. Dahlia était intriguée par les prises du frigo, les plaques à induction et surtout, le grand écran noir qui trônait dans le salon. Elle aurait préféré posséder une maison sorcière, comme à Hidden City mais c'était le prix à payer pour être à Londres et elle le payait de bonne grâce. Harry avait l'air ravi de pouvoir regarder des films. Il trouvait que les sorciers manquaient cruellement de loisirs calmes de ce genre à faire le soir ou par temps pluvieux. Et puisqu'ils étaient à nouveau en Angleterre, ils avaient bien besoin d'activités à faire par temps pluvieux.

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Leur nouvelle vie commença, plutôt heureuse et bien organisée. Dahlia trouvait cela étrange d'être à Londres et l'idée que ses amis soient aussi loin lui pesait un peu. Elle s'était cependant promis de ne pas se plaindre car elle savait déjà ce que Harry lui rétorquerait et il aurait entièrement raison. Ce qui allégeait le sentiment d'étrangeté de Dahlia était qu'elle se rendait presque tous les jours à New York pour travailler et qu'elle n'était donc pas complètement déconnectée de sa ville. Après l'entrainement, quand il finissait tôt, elle pouvait aller prendre un verre avec Emily ou rendre visite à Clara dans les bureaux de sa maison d'édition. Parfois, elle se permettait de trainer un peu, parce qu'elle savait que Harry était rentré et s'occupait de Perseus et que cela ne gênait donc personne.

En général, Dahlia rentrait vers huit ou neuf heures du soir, pile à l'heure pour donner le sein à Perseus et le coucher. Il y avait des moments où elle trouvait cela un peu triste de rentrer et de voir à peine son bébé et des moments où elle trouvait cela très agréable. De toute façon, elle ne se sentait pas coupable parce qu'elle passait toutes ses matinées avec lui et qu'elle estimait qu'elle remplissait largement sa part. Elle aimait voir Molly arriver par la cheminée vers une heure de l'après-midi, bavarder un peu avec elle et lui laisser Perseus. Elle savait qu'il était entre de bonnes mains. Elle aimait aussi quand c'était Andromeda et Teddy qui venaient. Après tout, Andromeda était sa tante et Dahlia était contente que son fils ait quand même un lien avec sa famille à elle.

Le matin, quand elle était seule avec Perseus, ou les samedis où Harry travaillait, il n'était pas rare que Lucius et Narcissa viennent lui rendre visite. Ils semblaient vraiment heureux qu'elle vive à Londres et qu'elle soit près d'eux. Ils jouaient avec Perseus, lui souriaient, s'émerveillaient d'avoir un petit-fils. Il arrivait que Dahlia omette de dire à Harry que ses parents étaient venus, volontairement, pour éviter une scène. Ils ne venaient pas tous les jours non plus, peut-être une fois par semaine, et ils ne restaient pas très longtemps. Elle ne trouvait pas que c'était trop et Perseus était encore petit, il ne se rendait pas compte des choses. Elle s'entendait mieux avec ses parents et ils faisaient tous des efforts. Les reproches avaient été faits et entendus, ils n'en parlaient plus. Il y avait une distance entre eux et Dahlia savait qu'elle ne serait sans doute jamais franchie. Mais au moins, ils se parlaient gentiment, ils se souriaient, ils passaient de bons moments.

Harry, lui, était terriblement heureux d'être revenu à Londres. En toute honnêteté, il n'y voyait pas d'inconvénient, ou du moins, aucun qui soit assez important pour le déprimer. Il ne pouvait plus suivre de cours de tennis mais ce n'était pas très grave. Certains samedis, quand Dahlia n'avait pas de match, il prenait un Portoloin pour aller à New York et jouer avec Harold. C'était la seule raison qu'il avait encore de retourner aux Etats-Unis et il soupçonnait que cette raison disparaitrait petit à petit s'ils décidaient de rester à Londres. Et il espérait qu'ils prendraient cette décision parce qu'à vrai dire, il allait beaucoup mieux depuis qu'ils étaient là. Comme durant les vacances d'été, il pouvait dormir jusqu'à sept heures, se réveiller avec Perseus, partir en disant au revoir à Dahlia. Il pouvait parfois rentrer le midi pour les retrouver et déjeuner avec eux avant que Dahlia n'aille travailler. Il les savait là, tout près de lui. C'était facile d'inviter Ron et Hermione à dîner, c'était facile d'aller chez eux. C'était facile d'aller prendre le thé chez Arthur et Molly le dimanche, de se promener dans le jardin avec Perseus qui tendait la main vers les cochons et les gnomes en poussant des cris curieux.

Et quand une enquête importante se présenta à nouveau, Harry ne fut plus forcé d'aller dormir chez Mark. Il pouvait rentrer chez lui, retrouver sa femme et son fils. Même s'il rentrait tard et que Perseus dormait déjà, il pouvait passer un moment avec Dahlia. Et le matin, il voyait Perseus avant de partir. Il était évidemment moins présent qu'en temps normal mais c'était beaucoup moins lourd à supporter. Il pouvait même faire un saut à la maison quand l'enquête s'essoufflait un peu ou qu'il n'y avait rien d'autre à faire que d'attendre des résultats d'analyse. Il allait passer une heure avec Perseus, bavardait avec Andromeda et Teddy s'ils étaient là ou avec Molly. Tout était plus facile, plus souple, Harry se sentait libre. Sa vie n'avait rien à voir, il était bien plus heureux qu'avant.

Le 22 mars, ils fêtèrent le premier anniversaire de Perseus. Ils le firent chez eux, à Baker Street, et eurent le plaisir d'accueillir leurs amis et la famille. Finalement, c'était la première fois qu'ils pouvaient le faire. Emily vint spécialement de New York, ils avaient de la chance, elle était entre deux déplacements. Hermione fut ravie de la revoir, ça faisait longtemps. Depuis le mariage de Harry et Dahlia, en fait, et ça remontait à presque trois ans. Fleur et Bill furent invités aussi, Arthur et Molly, Teddy et Andromeda, Hagrid, George et Angelina. C'était joyeux et festif, le salon et la salle à manger étaient assez vastes pour accueillir tout le monde. Hagrid dut toutefois faire attention en passant les portes.

Perseus était toujours un peu effrayé par Hagrid mais il souriait à Emily et venait facilement vers elle, il la connaissait bien. Maintenant, il connaissait aussi très bien Molly, Teddy, Andromeda et Fleur. Ron était jaloux, il s'écriait que c'était quand même lui le parrain de Perseus. Hagrid s'extasiait du babillement de Perseus qui ne cessait de prononcer des choses incompréhensibles mais qui avait l'air enchanté de le faire. Louis Weasley semblait toujours aussi fasciné et atterré par l'incompétence de Perseus.

- Mais il va parler quand ? demandait-il en fronçant ses petits sourcils.

Il fut quand même fier de constater que Perseus était maintenant capable d'encastrer ses formes en bois et de comprendre certaines choses quand il lui parlait. De toute évidence, Louis en avait assez d'être le petit dernier, le seul garçon, et d'être traité par ses sœurs comme un bébé. Il trouvait donc très satisfaisant d'avoir Perseus sous la main pour jouer au grand frère. Il construisit une tour avec les cubes que Perseus avait reçus à son anniversaire, aidant le bébé à les poser soigneusement. Rose les aida également, plus adroite que Perseus. A la fin, Perseus donna un grand coup dedans pour l'effondrer, sous le regard crispé de Louis et Rose qui n'apprécièrent pas du tout.

Le lendemain, Dahlia prit un taxi pour aller chez ses parents et fêter avec eux l'anniversaire de Perseus. Ce fut beaucoup moins bruyant, festif et joyeux mais c'était comme ça. Au moins, c'était calme. Comme d'habitude, ils offrirent beaucoup trop de choses mais Dahlia se contenta de remercier et de manger l'excellent gâteau que l'elfe de maison avait préparé. Perseus voulut goûter, recracha tout et ils abandonnèrent l'idée.

OoOoO

Souvent, Harry et Dahlia allaient se promener à Regent's Park et tenaient Perseus pour qu'il marche un peu dans l'herbe. Il y arrivait avec leur aide mais pas encore tout seul, même si ce n'était qu'une question de jours. Harry était toujours aussi fou de son fils et il adorait s'en occuper dès qu'il le pouvait. Il aimait lui courir après dans l'herbe et l'écouter crier, le prendre dans les bras et le lever le plus haut possible pour le faire éclater de rire. Il aimait lui raconter des histoires, jouer avec lui dans son bain, lui donner à manger, autant de tâches qui lui revenaient tous les soirs puisqu'il était seul avec Perseus jusque tard. C'était une différence qu'il appréciait par rapport à New York. Il n'aurait pas aimé être seul toute la journée avec Perseus, lui aussi aurait trouvé ça lourd à la longue. Mais il aimait avoir beaucoup plus de temps seul avec son fils, des moments rien qu'à eux, où ils tissaient doucement une complicité qui leur serait propre. Harry n'avait jamais connu cela avec son père et il était heureux de pouvoir l'offrir à Perseus.

Peut-être était-ce parce qu'elle savait qu'elle quittait le Quidditch à la fin de la saison, ou alors parce qu'elle était moins anxieuse mais Dahlia n'avait jamais aussi bien joué, paradoxalement. Son entraineur en était à la fois heureux et agacé, il n'arrêtait pas de lui demander pourquoi elle ne voulait pas rester. Elle remportait tous ses matchs et elle attrapait le vif d'or à chaque fois. Aujourd'hui, elle avait affronté le club de Chicago et elle avait gagné encore. Quand elle rentra à Londres, elle était d'excellente humeur et n'avait aucune envie de dormir. Il était beaucoup plus tard que d'habitude parce que les matchs se jouaient souvent l'après-midi et Perseus dormait depuis longtemps. Elle eut peur que Harry dorme aussi, il était presque minuit, mais non, il l'attendait en regardant un film dans le salon. Dahlia s'approcha de lui et il fit une pause.

- J'ai gagné, annonça-t-elle en souriant largement.

- Bravo, dit Harry en souriant de la même façon. Si tu continues comme ça, ils ne voudront jamais te laisser partir.

Dahlia éclata de rire et grimpa sur Harry pour lui faire face. Elle l'embrassa lentement, en prenant son temps, d'une façon à la fois paresseuse et langoureuse. Ça excitait Harry. Elle se détacha un peu de lui et embrassa son oreille.

- J'ai gagné, est-ce que j'aurai droit à une récompense pour ça ? Murmura-t-elle.

- Je pense que c'est envisageable, souffla Harry en la serrant contre lui.

Dahlia sourit avec satisfaction et se remit debout. Elle détacha ses longs cheveux blonds et s'éloigna de lui.

- Je vais prendre une douche d'abord.

Elle sortit du salon et Harry éteignit la télé. Il la suivit dans la salle de bain, celle avec la jolie douche aux murs de faïence, qui contrastait vraiment avec celle qu'ils avaient à New York. Dahlia se déshabilla, plutôt satisfaite qu'il l'ait suivie et entra avec lui dans la douche. Entre leur travail et Perseus, ils n'avaient plus assez de moments comme celui-ci. Ou pour être exacts, ils ne prenaient plus le temps d'en avoir. Mais ce soir, ils avaient le temps. Perseus faisait ses nuits depuis longtemps maintenant et il y avait peu de risque qu'il se réveille. Dahlia et Harry s'embrassèrent sous l'eau chaude, excités. Elle était souvent comme ça après une victoire, la tension et l'adrénaline lui donnaient envie de faire l'amour et Harry trouvait excitant de la voir dans cet état. Il lui lava les cheveux et les lui rinça, prenant du plaisir dans ces préliminaires étranges qui les obligeaient à attendre tout en regardant le corps nu de l'autre. Il l'observa se savonner puis se colla à elle et l'embrassa vivement tandis que l'eau chaude coulait sur eux et les débarrassait de la mousse. Il fit passer ses mains sur la peau de Dahlia, sur ses seins, sur ses fesses, et il se serra davantage contre elle pour frotter son sexe contre le sien. Il put sentir les mains de Dahlia sur son dos, sur ses fesses à lui, qui le tenaient pour lui rendre ses caresses. Ils avaient de plus en plus chaud dans la douche mais c'était bon. Presque à contre-cœur, Harry se décolla d'elle et fit glisser sa main entre ses jambes. Il caressa le sexe de Dahlia, la sentit mouiller contre ses doigts. Elle l'embrassa fiévreusement, gémissant contre ses lèvres quand les doigts de Harry caressaient son clitoris, bougeant ses hanches malgré elle pour en demander plus.

Elle finit par s'appuyer contre le mur de la douche, avec le poids du corps de Harry contre le sien, ses doigts toujours sur elle. Dahlia fit glisser une jambe contre celle de Harry et la passa autour de lui. Elle voulait le sentir en elle, qu'il la touche encore, un peu plus loin. Harry abandonna le clitoris de Dahlia, glissa ses doigts entre les lèvres de son sexe et la pénétra doucement. C'était toujours délicieux de sentir enfin quelque chose entrer en elle et Dahlia soupira. Depuis le temps, il savait où la caresser pour la faire jouir, où appuyer, où toucher. C'était excitant de sentir les mains de Dahlia se crisper sur son dos, de sentir sa jambe le serrer davantage, de la sentir bouger pour venir au-devant de ses gestes. Dahlia agrippa le poignet de Harry et le serra comme un étau.

- Là, ordonna-t-elle en gémissant. Là, encore, continue.

Il l'embrassa presque brutalement, se colla davantage contre elle et continua ses caresses en elle. A chaque frottement, à chaque effleurement, Dahlia pouvait sentir l'orgasme monter doucement, par vagues régulières mais presque trop lentes. Ses gémissements devenaient plaintifs, tant c'était bon et insupportable en même temps, tant elle avait envie de jouir et d'être libérée de ce plaisir intolérable. L'orgasme arriva enfin, lui arrachant des gémissements qui résonnèrent dans la douche, tandis que ses ongles s'enfonçaient dans la peau de Harry, sur son poignet et dans son dos. Il retira ses doigts d'elle et Dahlia reposa sa jambe sur le sol. Ses jambes n'étaient plus aussi solides qu'au début et elles vacillaient un peu, coupées par le match de Quidditch et le plaisir.

- C'était bon ? demanda Harry en souriant, sans vraiment douter de la réponse.

- Oui, assura Dahlia en se serrant à nouveau contre lui.

Il bandait clairement, il devait mourir d'envie qu'elle le touche aussi. Dahlia prit son sexe durci dans sa main et posa l'autre sur ses fesses. Elle le masturba un peu, fit glisser un doigt entre les fesses de Harry et leva les yeux vers lui.

- A ton tour maintenant, dit-elle d'un ton aguicheur.

Harry posa sur elle un regard assombri et impatient puis il la prit dans ses bras et la sortit de la douche.

- Allons dans la chambre, souffla-t-il précipitamment.

Il avait envie d'elle, tout de suite, mais pas dans l'inconfort de la douche. Il voulait qu'elle le touche elle aussi, avec ses doigts, avec sa bouche, avec tout ce qu'elle voudrait. Il voulait la sentir en lui, là où personne d'autre ne l'avait touché à part elle et qu'elle le fasse jouir aussi. Ils marchèrent maladroitement jusqu'à la chambre, s'embrassant en même temps, riant un peu des serviettes qui tombaient dans le couloir et qu'ils ne ramasseraient pas de sitôt.

OoOoO

Ils étaient à Londres depuis presque deux mois et les choses se passaient parfaitement bien. Il y avait de très légères ombres au tableau bien sûr, comme le fait que Harry ne pouvait toujours pas inviter Mark chez lui quand sa femme était là alors qu'il vivait maintenant à Londres. Mark en avait fait une remarque, en riant, assurant Harry qu'il était peut-être en manque de copine mais qu'il ne lui volerait pas sa femme pour autant et qu'il pouvait la lui présenter sans crainte. Harry avait ri aussi, tendu, ne sachant comment se dépatouiller de ça. Il avait fini par dire :

- Tu sais, je préfère passer du temps avec toi sans elle. On peut parler de ce qu'on veut et on est tranquille, c'est mieux non ?

Et il s'était senti un peu connard de dire ça. Ce n'était pas faux, boire une bière avec Mark et Dahlia ne serait pas du tout la même chose de que le faire seul avec Mark. Il avait besoin d'être seul avec ses amis parfois, comme tout le monde et c'était totalement normal. Pour autant, il aurait très bien pu présenter Dahlia à Mark une fois. Mais elle ne voulait pas, ça la stressait trop. Et s'il la reconnaissait ? Elle n'avait pas envie de vivre ce genre de chose en direct, surtout pas avec un macho homophobe comme Mark.

- Il n'est pas homophobe, avait dit Harry sans grande conviction.

Mais il gardait bien en tête les commentaires de Mark sur les hommes qui « aimaient se la prendre » et il doutait que son collègue serait plus ouvert d'esprit avec une femme transgenre. Il pouvait donc parfaitement comprendre les réticences de Dahlia, même si elles ne l'arrangeaient pas. Heureusement pour lui, Mark eut l'air ravi d'apprendre que Harry préférait le voir sans sa femme et il lui adressa un sourire complice et entendu, l'air de dire que oui, on était mieux sans les femmes après tout, entre mecs. Harry se sentit encore plus connard.

Pour Dahlia, le plus dur était d'avoir perdu la spontanéité de ses rencontres avec ses amis. Tant qu'ils vivaient tous à New York, ils pouvaient prévoir des soirées au dernier moment, se retrouver quand ils le voulaient dans un café, se rendre visite s'il y avait le moindre souci. Maintenant, ce n'était plus possible. Se voir demandait une organisation particulière et des efforts à fournir. Heureusement, Emily n'était pas arrêtée par les Portoloins. Heureusement aussi, Andrew était assez riche pour estimer qu'un trajet en bateau n'était pas très coûteux pour lui. Andrew et Clara vinrent passer quelques jours chez eux au début du mois de mai avec Walter. Puisqu'il y avait quatre chambres dans la maison, Harry et Dahlia pouvaient parfaitement les accueillir.

Andrew et Clara n'étaient jamais venus à Londres et ils étaient ravis de découvrir la ville. Ils se promenèrent beaucoup, dans les parcs, le long de la Tamise, sur le Tower Bridge, dans les quartiers connus et réputés. En tant qu'Américains, ils étaient surpris de voir à quel point les sorciers anglais vivaient avec les Moldus. A part le Chemin de Traverse qui ne contenait que des boutiques et des hôtels, les sorciers n'avaient pas d'endroit à eux. Andrew trouvait cela un peu effrayant. Harry ne savait pas quoi en penser. Il était habitué à Londres et aux Moldus, habitué à faire attention et à se cacher. Il n'aimait pas forcément l'idée de se couper totalement du monde moldu. Et en même temps, il ne pouvait nier à quel point c'était pratique de vivre à Hidden City, de pouvoir se promener, faire des courses, sortir, sans jamais avoir peur de tenir sa baguette et d'exercer la magie, sans avoir à cacher ce qu'il était. C'était deux modes de vie différents.

Walter allait bientôt avoir un an lui aussi et il suivait Perseus partout dans la maison, à quatre pattes, essayant d'attraper tous ses jeux et toutes ses affaires. Cela donnait souvent lieu à des crises de larmes mais c'était aussi un peu drôle à regarder. Un soir, Teddy arriva par la cheminée, tout seul comme un grand et ravi que sa grand-mère le laisse maintenant utiliser la poudre de Cheminette sans l'accompagner. Il rejoignit Andrew avec un grand sourire.

- Salut Teddy, dit doucement Andrew. Tu es beaucoup plus grand que la dernière fois, comment ça se fait ?

- J'ai eu dix ans en mars, répondit-il fièrement. Grand-mère dit que c'est une poussée de croissance.

- D'accord, acquiesça Andrew en riant.

Teddy avait eu dix ans, oui, et Harry avait été choqué de réaliser que son affrontement avec Voldemort remontait à dix ans lui aussi. Cela paraissait loin, effroyablement loin, étrange et irréel. Harry n'était pas certain que ce soit vraiment lui qui ait vécu tout cela, ça semblait appartenir à la vie de quelqu'un d'autre. Et pourtant, c'était bien lui, comme en témoignaient les blessures au fond de son cœur et au creux de ses cauchemars, parfois. Il n'avait pas très envie de repenser à ces choses et ils espéraient qu'elles finiraient par s'endormir en lui un jour. Il comptait sur Perseus pour cela, parce que la guerre n'existait pas dans le sourire de son fils et que c'était réconfortant.

Teddy était grand et il savait maintenant faire beaucoup de choses avec son pouvoir de métamorphomage. Clara riait en regardant Teddy et Andrew prendre des apparences saugrenues et absurdes. Teddy n'avait toujours rencontré personne qui soit comme lui en dehors d'Andrew.

- Il y en aura peut-être à Poudlard, dit Harry avec optimisme.

Mais il en doutait parce qu'après tout, il n'en avait jamais rencontré lui-même. C'était plutôt rare, apparemment, et ce pouvoir se transmettait uniquement de façon héréditaire. Bien que, même cela était étrange. Andromeda n'était pas métamorphomage, c'est Ted Tonks qui l'était mais ses parents étaient Moldus et Harry n'était donc pas sûr de comprendre comment était apparu le pouvoir de Ted.

- J'ai arrêté depuis longtemps de me poser des questions sur le sujet, répondit Andrew en haussant les épaules. Nous sommes ce que nous sommes, un point c'est tout.

Teddy jouait avec Perseus et Walter, avec patience et générosité car il était beaucoup plus âgé qu'eux. Il prenait doucement Walter dans ses bras et défendait Perseus quand le bébé essayait de lui voler ses jouets.

- Tu es plutôt doué avec les bébés, commenta Clara.

- Je suis habitué, répondit Teddy en haussant les épaules. Je suis toujours le plus grand quand je vais quelque part. J'ai connu tous les bébés des Weasley.

Clara savait maintenant à peu près qui étaient les Weasley pour Harry et Dahlia. Elle savait qui était Teddy aussi et elle était plutôt touchée qu'Andrew aide le petit garçon avec ce pouvoir étrange qu'il ne maitrisait pas. Teddy, qui était allé jouer avec les bébés, revint à nouveau vers eux, un grand sourire aux lèvres.

- Walter aussi l'est ! s'écria-t-il joyeusement.

- Oui, confirma Andrew en souriant aussi. On ne s'en est pas aperçu tout de suite, ça a mis un peu de temps à se manifester. Pour l'instant, il n'y a que ses cheveux et ses yeux qui changent.

Teddy semblait enchanté de l'apprendre. Plus tard dans l'après-midi, Teddy et Andrew s'assirent à l'écart pour discuter et on les laissa tranquilles. Teddy avait l'air très animé et motivé.

- Mais tout le corps, répétait-il. Est-ce que je peux changer tout mon corps ?

- C'est ce qu'il y a de plus difficile, ça, répondait doucement Andrew.

Harry était toujours heureux de voir Teddy parler avec Andrew, il voyait bien qu'il en avait besoin. Ils ne se rencontraient pas très souvent mais le peu qu'ils le faisaient, il était clair que Teddy prenait un plaisir sans nom à discuter de son pouvoir avec Andrew.

Dahlia fut très heureuse d'accueillir Clara et Andrew chez elle et leur départ la laissa de bonne humeur. Elle savait qu'elle pouvait voir ses amis, qu'elle ne les avait pas perdus, que tout allait bien. La vie continua paisiblement, entre ses entrainements, les affaires de Harry, les matchs et les jours de congés en famille. Perseus marchait maintenant et c'était toujours à la fois mignon et terrifiant de le regarder faire. Dahlia était paniquée à l'idée qu'il tombe et il tombait souvent. Harry le relevait doucement, lui faisait un câlin quand il pleurait, et le reposait sur ses petites jambes. Parfois, Dahlia regardait Harry et Perseus avec incrédulité, se demandant comment elle avait pu donner naissance à un enfant, un enfant qui était aussi celui de Harry. C'était fou, quand on y pensait. Si on lui avait dit cela quand elle était adolescente, elle n'y aurait jamais cru. Et elle se sentait un peu puissante et supérieure d'avoir réussi à faire ça, elle en ressentait une vanité qu'elle gardait précieusement dans son cœur.

OoOoO

Avec le mois de mai, les beaux jours revenaient lentement, souvent entrecoupés d'averses ou de bruine qui tombaient sur Londres. Dahlia et les Corbeaux avaient quand même fini par perdre un match contre le club de Boston. A l'heure actuelle, c'étaient eux les plus forts du championnat et personne ne s'était réellement attendu à ce que les Corbeaux gagnent. Dahlia était un peu déçue, ça aurait été incroyable de terminer sa carrière sur une victoire contre Boston. Elle ne perdait cependant pas espoir car il y avait un deuxième match important qui les attendait : celui contre les Flammes de Brooklyn, le meilleur club de New York. Jusqu'à présent, les Corbeaux perdaient toujours mais cette année, les spécialistes du Quidditch estimaient qu'ils avaient leurs chances. C'était l'objectif de Dahlia. Le match contre les Flammes aurait lieu en juin et elle se préparait activement pour ça.

C'était jeudi après-midi, un jour où les nuages gris cachaient le soleil. Harry était rentré tôt de l'entrainement et Dahlia ne travaillait pas. Dahlia feuilletait tranquillement le journal pendant que Harry, à côté d'elle, jouait avec Perseus. Il lui tendait les bras et reculait doucement, obligeant son fils à marcher vers lui.

- Allez, viens voir papa, disait Harry en souriant.

Perseus se débrouillait de mieux en mieux même si ses pas restaient encore hésitants et parfois mal assurés.

- Oui, bravo mon grand, c'est bien ! Viens jusqu'à papa !

Perseus comprenait maintenant de plus en plus de choses et il sourit à Harry, conscient d'être félicité.

- Pa-pa, dit Perseus d'une voix hachée.

- Tu as entendu ? s'écria Harry. Il le dit vraiment bien maintenant !

- Je ne suis pas sûre qu'il parle vraiment de toi, répliqua Dahlia d'un ton moqueur.

- Laisse-moi rêver un peu.

Mais elle avait raison, le biberon s'appelait aussi papa, ainsi que son lapin, les pigeons du parc et même les bus rouges qui passaient. Harry trouvait ça frustrant et un peu agaçant. Dahlia se moquait de sa réaction puérile à la limite de la jalousie. Il disait « mama » aussi mais là encore, Dahlia se demandait s'il parlait vraiment d'elle. En tout cas, ils étaient toujours ravis d'entendre Perseus dire de nouveaux mots, même si les mots en question se résumaient à une syllabe.

Dahlia se leva du canapé en reposant son journal avec détermination.

- Allez, c'est l'heure du bain !

Perseus s'enfuit quand elle s'approcha de lui et marcha de lui-même vers la salle de bain. Dahlia le rejoignit et lui donna la main pour l'aider à atteindre son but. Elle aimait quand la petite main de son fils agrippait la sienne.

Ils avaient couché Perseus assez tôt, parce qu'il était fatigué et avait pleurniché pendant tout le dîner en refusant de manger. Maintenant qu'il dormait, Harry et Dahlia terminèrent leur repas et s'installèrent sur le canapé pour boire une tisane brûlante, assis l'un contre l'autre. C'était un de leur moment préféré, peut-être, quand ils se retrouvaient tous les deux pour discuter paisiblement, en regardant la nuit tomber par la fenêtre. Ils pouvaient parler de l'avenir, de Perseus, de leurs envies, de leurs craintes. Ils savaient qu'ils pouvaient se dire tout ce qu'ils voulaient. Ils avaient envisagé l'idée de rester à Londres pendant un long moment, peut-être même d'y rester. Dahlia n'était plus aussi réticente qu'au début. Finalement, elle était heureuse ici, c'était réconfortant d'avoir une relation normale avec ses parents, elle aimait savoir Harry près d'elle, elle passait de bons moments avec Fleur. Il lui manquait ses amis mais elle était prête à réfléchir sérieusement à la proposition. Elle savait que Harry ne désirait que ça et elle se disait qu'il avait tellement sacrifié pour elle qu'elle pourrait peut-être lui rendre la pareille. Elle n'en était pas vraiment sûre.

Ce soir-là, ils ne parlèrent pas de leur vie en Angleterre, ils parlèrent de choses plus futiles. Que pourraient-ils faire pour l'anniversaire de Dahlia qui était dans trois semaines ? Que voulait-elle comme cadeau ? Si elle le souhaitait, ils pourraient aller à New York une journée pour faire la fête avec ses amis. Oui, elle le souhaitait, ce serait l'occasion de les revoir et de passer un moment avec eux. Ils furent interrompus par un coup contre la porte d'entrée et échangèrent un regard interrogateur. Harry se leva pour aller ouvrir et se retrouva face à un homme d'environ cinquante-cinq ans qu'il ne connaissait pas. Harry haussa les sourcils, étonné.

- Oui ? Demanda-t-il.

- Mr Potter, dit l'homme. Je suis désolé de vous déranger si tard. Je m'appelle Dan Rivers, je suis journaliste à la Gazette du Sorcier.

Les traits de Harry se fermèrent immédiatement.

- Qu'est-ce que vous me voulez ? demanda-t-il sèchement.

- Rien, assura Dan avec un malaise évident. Je suis simplement venu pour vous informer de quelque chose.

Harry observa le journaliste avec attention. Il ne semblait pas à l'aise, comme s'il n'était pas spécialement heureux d'être là. Il avait même l'air un peu triste et dépité, un peu hésitant aussi. Il n'avait pas du tout l'attitude de quelqu'un qui allait l'interroger ou fouiller dans sa vie. Il pleuvait et Rivers était trempé malgré son chapeau et son manteau. Harry s'écarta de la porte et le fit entrer dans le hall.

- Merci, dit Rivers en retirant son chapeau.

- Alors ?

Le journaliste regarda autour de lui puis son regard se posa à nouveau sur Harry.

- Est-ce que votre femme est là ?

- Aucune importance, laissez ma femme en dehors de ça.

- Je crois vraiment que vous devriez lui demander de venir, insista Dan doucement.

Harry et le journaliste se fixèrent quelques secondes pendant lesquelles le calme de Harry disparut au profit de l'angoisse. Il se détourna pour appeler Dahlia, d'une voix tendue et hésitante. Dahlia le rejoignit dans le hall, curieuse. Dan Rivers se présenta à nouveau et Dahlia se crispa, jetant un regard anxieux à Harry. Dan sortit un exemplaire de la Gazette de son manteau. Il le tendit à Dahlia.

- C'est le numéro qui va sortir demain, dit-il. Je ne suis pas censé être là, je m'occupe de la rubrique politique, je me fiche des articles sur les célébrités ou des révélations de ce genre. Mes collègues ne nous ont appris que ce soir ce qu'ils avaient découvert, ils ne voulaient pas que ça s'ébruite avant. Ils… n'ont pas voulu vous prévenir avant, ils craignaient que vous ne les empêchiez de publier. Au fond, je pense surtout qu'ils ont peur de la réaction de votre mari. En tout cas, j'estimais que… j'estimais que vous deviez savoir. Je n'aime pas cette façon de procéder.

Harry et Dahlia écoutaient à peine ce que Dan Rivers disait, concentrés sur la une du journal. « Harry Potter, marié à Drago Malefoy ? » titrait la Gazette. Avec une photo de leur mariage, une photo de qualité cette fois-ci, où on voyait parfaitement bien Dahlia. Un peu trop bien. Harry sentit une boule tomber au creux de son estomac et il releva la tête vers Dan Rivers. Le journaliste les regardait avec compassion, surtout Dahlia. Harry se rendit compte que rien ne l'obligeait à être là et qu'il avait agi gratuitement, de son propre chef, pour les prévenir.

- Dan Rivers, c'est ça ? demanda Harry d'une voix tendue. Merci, je n'oublierai pas votre geste.

Dan hocha la tête et se tourna à nouveau vers Dahlia.

- Vous verrez, Mrs Potter, l'article est plutôt neutre. En dehors du titre, ils… parlent de vous correctement. Ils ne vous insultent pas, ils énoncent plutôt les faits, votre parcours, ce genre de choses. Je pense qu'ils attendent de voir la réaction des gens pour s'engager davantage.

- D'accord, merci, répondit Dahlia en essayant de rester impassible.

Il essayait de la rassurer, elle le voyait bien. Dan baissa la tête et remit son chapeau.

- Bon, eh bien, je ne vous dérange pas plus longtemps…

Harry le raccompagna à la porte et Dan se retourna une dernière fois pour regarder Dahlia qui était toujours dans le hall, immobile et pâle comme une statue d'albâtre.

- Je vous souhaite bien du courage, dit-il sincèrement.

Puis il transplana dans la nuit et les laissa seuls. Harry et Dahlia se regardèrent, debout dans le hall, incapables de bouger. Il pouvait nettement voir la panique et la peur gagner Dahlia à chaque seconde qui passait. Sa main se crispa sur le journal.

- Nous pourrions prendre le premier bateau pour New York et rentrer, déclara-t-elle enfin.

Harry sursauta.

- Tu veux t'enfuir ? Demanda-t-il.

Ce n'était pas trop le genre de Harry et cette idée lui déplaisait. Dahlia se remit à bouger et baissa la tête, hésitante. Elle n'avait pas envie d'assister à la réaction des gens, qui pourrait en avoir envie ? Mais elle n'avait pas non plus envie de donner l'impression qu'elle fuyait. Harry s'approcha d'elle, incertain.

- Dahlia, je sais que c'est effrayant mais… Finalement, ça fait des années que nous craignons ce moment, peut-être que ce n'est pas une si mauvaise chose que ça. Les gens vont enfin savoir, ils vont jaser c'est sûr, ça va faire du bruit, il y aura surement quelques insultes mais au moins… il n'y aura plus de secret. Tu sais comment ça se passe, les scandales ne durent jamais bien longtemps. Il va surement y avoir quelques jours un peu difficiles mais après, nous serons libres ! Plus besoin de mentir ou de se cacher.

Dahlia lui rendit son regard, hésitant encore. Il n'avait pas tort. Cet article était peut-être leur chance de se libérer de ce secret pesant qui les empêchait de vivre exactement comme ils le voulaient. Peut-être le scandale ne serait-il pas si terrible, peut-être serait-il court.

- Tu seras de toute façon à New York une bonne partie de la journée, loin de tout ça. Et que veux-tu qu'ils nous fassent, sérieusement ?

- Je ne sais pas, souffla Dahlia.

- Si nous partons, nous donnerons l'impression que nous avons peur d'eux.

- Mais j'ai peur d'eux, Harry, rétorqua sèchement Dahlia.

- Oui mais… ils n'ont pas le droit de nous chasser de chez nous. Nous devons être plus forts que ça. Je ne veux pas partir, je n'ai pas honte d'être marié avec toi et je vais le leur faire savoir. Je les emmerde et tu les emmerdes aussi !

Dahlia essaya de calmer la panique qu'elle ressentait et de rester lucide. Elle avait peur, indéniablement. Mais au fond d'elle, elle avait envie de rester là, ou du moins envie que Harry reste là. Et qu'il se batte pour elle. Qu'il assume et qu'il l'aime. Et elle avait envie d'assumer aussi, ce qu'elle était et ce qu'elle aimait. Sa fierté et son orgueil se battaient contre sa peur. Elle eut une pensée pour ses parents, qui avaient toujours laissé la peur gagner, ou presque. A sa fuite quand elle avait simulé son suicide. Elle en avait assez de fuir, c'était fatigant.

- Très bien, dit Dahlia d'une voix blanche. Restons là alors.

Ils retournèrent dans le salon et lurent l'article. Dan Rivers avait raison, les journalistes avaient choisi un ton neutre et factuel pour raconter l'histoire. Il y avait même un encadré expliquant ce qu'était la transidentité. C'était lâche, c'était simplement pour ne pas se retrouver du mauvais côté de l'histoire au cas où l'opinion générale prenait la défense de Harry et Dahlia. Ils expliquaient le faux suicide, l'immigration aux Etats-Unis, le nouveau prénom, les Aurors, la rencontre avec Harry, la librairie, etc. etc. On ne les accusait de rien, on relatait juste les grandes lignes de leur histoire. Harry devinait que les journalistes avaient dû fouiller pendant des mois, curieux de ne rien trouver sur Dahlia Black. Ils avaient dû comprendre que les documents avaient été falsifiés et, à force d'efforts et de persévérance, ils avaient découvert la vérité. A partir de là, il avait dû être facile de trouver des témoins, de trouver des Aurors américains prêts à parler de l'indic trans qui avait bossé pour eux. Ce n'était pas comme s'ils portaient Dahlia dans leur cœur. Facile aussi de payer un guérisseur ou une guérisseuse de Sarah Good et de jeter un coup d'œil au dossier de Dahlia. L'argent brisait toutes les barrières.

L'article était précis, il ne mentait pas. C'était peut-être ça le pire, ils n'écrivaient que la vérité. Jusqu'à la date précise du sortilège de Dahlia et de leur mariage ou de la naissance de leur fils. Car oui, Perseus aussi était mentionné et pas qu'un peu. Harry était excédé.

- Mais à quoi ça sert de mettre la date exacte de ton sortilège, bon sang ?! On s'en fout !

- Bien sûr que non, répondit calmement Dahlia.

- Comment ça ?

- Personne ne se fout de savoir que tu as couché avec une femme qui avait un pénis pendant deux ans. C'est ça que les gens veulent savoir, Harry, c'est tout ce qui les intéresse.

Harry eut un soupir exaspéré mais elle était sérieuse et il se tut. Il se sentit mal à l'aise tout à coup et il évita son regard quand elle se tourna vers lui.

- Harry, dit froidement Dahlia. Ils vont surement m'attaquer, me sortir toutes les choses habituelles, que je ne suis pas une femme, que c'est contre-nature, bla bla bla. Je connais la chanson, je vais l'encaisser, comme je l'ai toujours fait. Mais ne te méprends pas, tu vas en prendre plein la gueule aussi. Moins, parce que tu es Harry Potter et que tu es un homme mais tu vas quand même t'en prendre plein la gueule. Ils vont se foutre de toi, Harry, tous tes collègues machos. Ils vont te regarder en se demandant si tu m'as laissé te baiser, ils vont rire parce que tu aimes les queues, ils vont te traiter de pédé, ils te diront que ta femme est un mec. Sans parler du fait que je suis la fille de Lucius Malefoy. J'espère que tu es prêt toi aussi à encaisser ça.

Harry la fixa un instant, dans un silence pesant et lugubre. Au fond de lui, il n'était pas sûr de vouloir vivre ça. Mais il ne pouvait pas y échapper, même s'ils rentraient à New York. Harry serait obligé de venir travailler et d'affronter tout cela. En réalité, il n'avait pas le choix. Et il n'avait jamais été du genre à se laisser faire, il n'avait jamais été comme ça.

- Je les attends, répondit Harry d'un ton dur. Qu'ils viennent donc me dire ce qu'ils veulent.

- Très bien, souffla Dahlia en repliant le journal.

Ils ne dormirent pas de la nuit. Malgré ce qu'ils essayaient de se faire croire, ils avaient peur et en toute honnêteté, on ne pouvait pas le leur reprocher. Le lendemain matin, ils se levèrent tôt et Harry mangea à peine. Dahlia fut incapable d'avaler quoi que ce soit et elle fut presque soulagée quand Perseus pleura. Elle le prit dans ses bras et le serra contre elle, avoir l'espoir naïf qu'il la protégerait de ce qui allait se passer. Elle était bien contente de rester à la maison et de ne pas être obligée de croiser des gens. Sans doute que Molly ou Fleur viendraient lui rendre visite pour lui remonter le moral et la soutenir. Elle plaignait sincèrement Harry, elle n'aurait pas aimé être à sa place.

Harry arriva au Ministère à l'heure habituelle, stressé mais déterminé à tenir tête à tous ceux qui feraient une remarque. La traversée du Ministère jusqu'aux bureaux des Aurors fut un supplice. Tout le monde se retournait sur son passage, tout le monde le regardait. Il y avait des murmures dès qu'il s'éloignait, il crut même entendre quelques rires. Il y avait sans doute aussi des gens qui s'en fichaient mais ceux-là, Harry ne les voyait pas. Il atteignit le bureau des Aurors sans savoir s'il devait être soulagé ou encore plus anxieux. Quand il entra, un silence déplaisant tomba dans la grande pièce pendant quelques secondes. Harry avala sa salive avec difficulté et marcha vers son bureau en essayant d'ignorer les regards et les chuchotements. Il retrouva Mark, Jane, Daisy et Francis. Il espérait au moins du soutien de leur part, ça lui éviterait de péter un câble.

- Salut, dit Francis d'un ton étrange en le voyant arriver.

- Bonjour Harry, dit Jane sans le regarder dans les yeux.

Mark le fixa sans rien dire mais il n'y avait pas beaucoup de sympathie dans son regard. Harry se tendit encore plus.

- Vous avez quelque chose à dire ? demanda-t-il sèchement.

- Non, répondit Jane. C'est simplement que ça fait bizarre, c'est tout.

- Qu'est-ce qui fait bizarre ?

- Malefoy était quand même un Mangemort et on le croyait tous mort. Ça fait bizarre de se dire que c'est avec lui que tu es marié.

- Avec elle, rétorqua Harry. Je suis marié avec elle. Si tu as lu l'article, tu sais que c'est une femme, non ?

- Oui, elle, excuse-moi, répondit Jane un peu sèchement. Au fond je m'en fous, c'est juste que c'est bizarre de l'apprendre de cette manière.

Il n'avait aucune envie de se mettre à la place de ses collègues. S'il prenait du recul, il pouvait comprendre que Jane et Mark, qui connaissaient Harry depuis longtemps, soient un peu choqués d'apprendre la vérité comme ça, d'apprendre que Harry leur avait caché quelque chose d'aussi important. Mais la vérité, c'était aussi que Harry ne leur devait rien, surtout à Jane. Ce n'était pas parce qu'il avait couché avec elle quelques années plus tôt qu'il devait la tenir au courant de toute sa vie privée. Il eut envie de le lui dire mais il se retint à temps. Et de toute façon, Mark le devança.

- Ce qui est bizarre, surtout, c'est de savoir que la Dahlia dont tu nous parles depuis toutes ces années, c'est en fait un mec, lâcha-t-il froidement.

Le silence tomba sur la grande salle et tout le monde se tourna vers eux pour écouter. Ils le pensaient tous, ou presque. Certains Aurors semblaient mal à l'aise mais dans l'ensemble, ils voulaient entendre la réponse de Harry.

- Dahlia n'est pas un mec.

- Arrête ! C'est Drago Malefoy pour l'amour du ciel ! Tu es marié avec Drago Malefoy ! C'est un mec !

- Tu n'y connais rien, Mark ! s'écria Harry. C'est justement ça être trans, renseigne-toi ! Dahlia est une femme, ce n'est pas à toi d'en décider et je n'ai même pas à en discuter !

- Comment tu peux dire ça ? Ce n'est pas une femme, Harry, c'est…

- C'est ma femme ! hurla Harry. Et c'est la mère de mon fils ! Je t'interdis de parler d'elle de cette façon !

Mark tressaillit et lança à Harry un regard mauvais qui lui fut rendu. Autour d'eux, certains Aurors croisèrent les bras avec déplaisir.

- C'est bon Mark, dit l'un d'entre eux. Pas la peine d'insulter la femme de Harry.

- Je croyais que nous étions amis, dit Harry.

- Que nous étions amis ? demanda Mark avec amertume. Tu ne m'as même pas invité à ton mariage, laisse-moi rire ! Enfin bon, maintenant, je sais pourquoi. Pourquoi aussi je dois toujours venir quand elle n'est pas là… Des mensonges, que des mensonges.

- Je ne te dois rien.

- Non… Mais qui l'aurait cru ? demanda Mark avec cruauté. Qui aurait cru que tu aimais les bites, finalement ? C'est ça qui te branche, pas vrai ? T'aurais dû nous le dire que t'étais pédé, ça aurait été plus honnête. Tu m'étonnes que tu prennes leur défense, toi aussi tu aimes te la prendre !

Mark éclata méchamment de rire et Harry se figea. Ce qui faisait mal, ce n'étaient pas les insultes débiles, c'était qu'elles venaient de Mark. Plusieurs Aurors s'approchèrent d'eux.

- Non mais pour qui tu te prends de parler comme ça ? demanda quelqu'un à Mark avec mépris. Tu vas trop loin là !

- Je vais trop loin, moi ? Mais c'est lui qui se pointe alors qu'il a épousé le fils d'un Mangemort, merde !

Harry eut envie de le frapper et il pensa sincèrement à le faire quand la voix de Nestor Achab le retint. Le chef arriva derrière lui et se planta devant le bureau de Mark. Il avait l'air furieux et tout le monde se tut, surpris. C'était rare de voir le chef dans cet état. Il toisa Mark de toute sa hauteur et ce dernier se crispa un peu sur sa chaise.

- Je rappelle que Maggie, à l'accueil, est toujours malade. Tu vas aller la remplacer.

- Quoi ? s'étonna Mark. Je ne vais pas aller à l'accueil…

- Si, tu vas y aller et tu vas y rester aussi longtemps que je le déciderai.

Mark eut l'air abasourdi.

- Pourquoi ? Simplement parce que j'ai dit à Harry ce que…

- Parce que je trouve ça répugnant de s'en prendre à un collègue comme tu viens de le faire. Et parce que je n'aime pas ta façon de prononcer le mot pédé.

Il y avait de la colère au fond des yeux de Nestor Achab, comme si Mark l'avait personnellement insulté. Il n'osa donc plus répliquer et se leva, honteux et humilié, pour se rendre à l'accueil. C'était aussi une façon de prévenir les autres que ce n'était pas la peine de faire des scènes. Ils avaient le droit de penser ce qu'ils voulaient, ils n'avaient pas le droit de s'en prendre à Harry pour autant. Nestor lui jeta un coup d'œil.

- Viens avec moi, je dois te parler.

Harry le suivit, se demandant ce que son chef avait à lui dire. Pendant les quelques secondes où ils marchèrent jusqu'à son bureau, les pires scenarii venaient à l'esprit de Harry. Il allait se faire virer, on allait lui dire qu'il causait trop de scandale et qu'on ne voulait plus de lui ou alors qu'il était Auror et qu'il ne pouvait être marié avec une ancienne Mangemort. Quand il entra dans le bureau, il regarda son chef avec anxiété.

- Qu'y a-t-il chef ?

- Oh, rien, répondit Nestor en haussant les épaules. Je me suis dit que tu serais mieux ici qu'avec tous ces crétins. Une tasse de café ?

Harry lui lança un regard abasourdi puis finit par s'asseoir sur l'un des fauteuils qui trônaient dans le bureau. Il accepta volontiers une tasse de café et la but avec soulagement. Il éprouvait pour Nestor une reconnaissance infinie.

- Mark est décevant, dit le chef sans aucune pitié. Je suis désolé pour toi. Ce qui les choque le plus, c'est surement que ce soit Malefoy. Si ça avait été une autre femme, ils se seraient un peu moqués peut-être mais pas de la même manière.

Harry n'était pas certain de vouloir les analyses de son chef mais il en ressentit tout de même une certaine satisfaction. Il y avait au moins quelqu'un qui comprenait les choses et ne se laissait pas emporter par ses émotions.

- Et vous ? Vous pensez que j'ai tort d'être marié avec une ancienne Mangemort ?

Nestor éclata d'un rire désabusé qui surprit Harry.

- Une ancienne Mangemort ? Ta femme n'est pas une ancienne Mangemort, c'était une ado endoctrinée et terrifiée. Je n'en ai rien à faire que tu sois marié avec elle. Je te plains simplement d'avoir Lucius Malefoy comme beau-père.

Harry lui rendit son sourire. Son chef était parfois surprenant, beaucoup plus tolérant et compréhensif qu'on aurait pu le croire. Ils terminèrent leur tasse de café, en prenant leur temps. Harry n'avait aucune envie d'y retourner. Il dut quand même se lever et remercier son chef.

- Rentre chez toi Harry, ordonna Nestor. Ça évitera une autre scène du même genre, en espérant que les choses se soient un peu tassées d'ici demain. Va donc retrouver ta femme, ça risque d'être une longue journée.

- Mais, j'ai entrainement et…

- Oui, justement, tu as entrainement. Tu peux louper un jour, personne n'en mourra.

Il hocha la tête, particulièrement heureux de pouvoir partir. Harry sortit du bureau de son chef et retourna dans la vaste salle où les Aurors discutaient. Dès qu'il entra, certains s'arrêtèrent de parler mais un petit groupe vint vers lui, Jane en tête. Ils avaient l'air ébranlés et furieux. Jane leva la main pour empêcher Harry de parler.

- Ok Harry, soyons clairs, j'étais un peu choquée et peut-être vexée d'apprendre que tu nous avais caché la vérité sur ta femme. Mais pour le reste, je n'approuve pas du tout ce que Mark a dit, c'était dégueulasse. Ta femme est ta femme, point barre, nous n'avons rien à dire là-dessus.

- Ouais, acquiescèrent les autres. Moi je m'en fous que tu sois marié avec elle.

On lui donna quelques tapes dans le dos, sur les épaules et sur les bras pour lui montrer son soutien. Harry en ressentit un soulagement considérable. Il expliqua qu'il allait rentrer et Jane hocha la tête. Il évita le regard du groupe du fond qui l'observait d'un air moqueur et méprisant et il sortit de la salle. En passant devant l'accueil, il ignora Mark, ne lui adressa ni un mot ni un coup d'œil, et rentra chez lui.

Il retrouva Dahlia, qui allait bien et fut surprise de le voir rentrer. Elle put deviner à sa tête que ça ne s'était pas très bien passé.

- C'était exactement comme tu as dit, déclara froidement Harry. Mais c'était Mark, c'est lui qui m'en a mis plein la gueule.

Et cette idée lui faisait mal, bien plus que le reste. Il était blessé, déçu, triste et en colère. Il n'aurait jamais cru que son ami réagirait de cette façon. Qu'il se moque un peu, qu'il le charrie, mais là… Harry ne comprenait pas ce qui rendait Mark aussi violent et hargneux. Mais ça n'avait plus d'importance maintenant, qu'il aille se faire foutre. Ils n'étaient assurément plus amis et ne le seraient plus jamais.

OoOoO

Les choses sérieuses commencèrent véritablement le lendemain. Harry, lui, retourna au travail et constata immédiatement qu'on le regardait beaucoup moins. Le choc était passé et ses collègues s'y intéressaient déjà moins, à l'exception d'un petit groupe d'Aurors qui continuait à mal le regarder. Harry était quand même soulagé. A l'accueil, Mark l'avait ignoré aussi mais ça blessait Harry de passer à côté de lui sans même lui parler.

En revanche, la réaction des gens et des médias se réveilla. Sorcière Hebdo fit un article également, beaucoup moins neutre que la Gazette, où elle se moquait clairement de Harry et surtout de Dahlia. Entre mégenrage, insinuations graveleuses et commentaires indécents, tout y était. Dahlia jeta le journal avec rage et dépit, furieuse de lire des horreurs pareilles. La Gazette se mit à publier « innocemment » les réponses des lecteurs à son article. Bizarrement, ils étaient unanimes : qu'est-ce que Harry faisait avec une cinglée transgenre qui était à peine une femme ? La radio sorcière diffusa une émission où un politique affrontait une guérisseuse pour parler de transidentité. Le politicien affirmait que les personnes transgenres étaient des malades mentaux tandis que la guérisseuse s'offusquait et déclarait qu'ils étaient des gens comme les autres. Le tout teinté d'un sexisme évident envers la guérisseuse.

Les articles s'enchainaient, avec des photos de Dahlia qui ne comprenait pas comment ils arrivaient à avoir ces clichés alors qu'elle faisait très attention quand elle prenait ses Portoloins. Il y avait des photos d'elle avant sa transition dans tous les articles, avec un charmant avant/après dont les gens raffolaient tant. Les titres de Sorcière Hebdo étaient de plus en plus racoleurs et dégradants. « Le Mangemort porte des robes ! », avec des caricatures nauséabondes. « Sondage : le sexe est-il meilleur avec ou sans pénis ? » Sans commentaire. « Soldes, maquillage pour se transformer en femme ». « Est-il réellement possible d'avoir un bébé quand on est un homme ? » « Harry Potter est-il gay ou hétérosexuel ? » Dahlia n'avait aucune envie de lire ces torchons mais elle les recevait dans sa boite aux lettres, comme par hasard. Et sa curiosité était trop forte. L'irrespect du ton d'écriture lui donnait la nausée et elle brûlait un à un les journaux dans la cheminée.

Molly et Fleur étaient venues la voir, comme elle s'y attendait. C'était un soulagement de les avoir à ses côtés. Elles étaient indignées de la méchanceté des gens et de la légèreté des articles. Les journalistes se rendaient-ils compte du mal qu'ils faisaient ? Dahlia en arrivait à préférer qu'on la traite de Mangemort et de criminelle, c'était encore le moins pénible à lire. Harry entrait dans des crises de rage quand il lisait les articles et il se mettait à crier contre les connards qui écrivaient de telles ignominies. Dahlia ne l'avait jamais vu comme ça, Perseus se mettait à pleurer, Harry se calmait et une ambiance lugubre tombait sur la maison.

Le pire fut sans doute les lettres qui se mirent à arriver. Dahlia ouvrit les premières puis laissa tomber, heurtée par ce qu'elle y avait lu. Elle les déposa dans une boite sans les ouvrir et les fixait parfois, de loin, avec horreur.

- Laisse, je vais m'en débarrasser, dit Harry le deuxième jour. Ne t'occupe pas de ça.

Harry attendit que Dahlia s'endorme et descendit dans le salon. Il s'assit sur le canapé avec la boite de lettres et ouvrit la première. Il voulait les lire, il voulait savoir ce que les gens disaient à sa femme. Il aurait trouvé cela lâche de ne pas le faire, ça aurait été comme se voiler la face. Harry lut donc toutes les lettres, une par une, avec des montées de haine et de fureur. Une bonne partie des lettres évoquaient le faux suicide de Dahlia et leurs auteurs lui faisaient savoir qu'elle aurait mieux fait de se suicider pour de bon au lieu d'imposer son existence à ce monde. Pourquoi ne le ferait-elle maintenant ? Il n'était jamais trop tard. Au moins, Harry serait débarrassé d'elle. Et puis il y avait tout le reste, des insultes et des commentaires dégradants.

C'est une blague que des guérisseurs acceptent de répondre à vos lubies complètement folles. C'est honteux et scandaleux, du grand n'importe quoi ! J'ai honte de mon pays !*

Quelle horreur ? Tu n'as pas honte ?* Comment Harry peut-il être avec toi ?

Va te faire soigner espèce de folle*, ta place est à Ste Mangouste !

Tu n'as pas honte d'être ce que tu es ? Je plains tellement tes parents et les gens sans amour propre qui vivent à tes côtés.*

Génial le progrès ! Nos impôts servent à financer cette folie. C'est honteux d'être un déviant et de bouffer le fric des personnes qui en ont vraiment besoin. Tes parents auraient dû te buter bien avant ta décadence.*

C'est vraiment du gâchis. Tu étais mieux en mec. Mais peu importe si tu changes d'apparence ou si tu fais un sortilège, tu resteras un homme.*

Tu as peut-être l'apparence d'une femme mais tu es toujours un homme, ça ne changera pas.*

Deux petites semaines sans tes potions et tu redeviens un homme, ne l'oublie pas !*

C'est confirmé, les Malefoy sont bien la poubelle de l'humanité.

Et puis les lettres sur Perseus, qui étaient peut-être les plus douloureuses à lire.

Tu es un homme, tu ne seras jamais sa mère !

C'est de la magie noire, un homme ne peut pas être enceinte, c'est immonde et contre-nature !

Comment as-tu pu avoir un bébé ? Il va être complètement détraqué comme toi.

Comment vas-tu lui dire que sa mère est en fait un homme ? Ce pauvre gosse ne méritait pas ça.

T'aurais mieux fait d'avorter plutôt que de laisser cet enfant naitre d'une personne comme toi.

Harry avait envie de pleurer. C'était encore pire que ce qu'il avait imaginé, les gens étaient d'une cruauté sans nom. Il sursauta en entendant du bruit et se tourna pour voir Dahlia entrer dans le salon. Elle marcha jusqu'au canapé et le regarda avec tristesse.

- Qu'est-ce que tu fais ? Il est une heure du matin…

- Je lis les lettres que tu as reçues.

- Pourquoi ?

- Parce que je dois savoir. Et je suis vraiment désolé, Dahlia, vraiment désolé.

Dahlia ne répondit pas. Son regard balaya les lettres pleines de haine et de rejet qui lui demandaient de se suicider et elle pinça les lèvres pour se contenir.

- Viens te recoucher Harry, ordonna-t-elle.

Il la suivit malgré lui, abattu, plein de haine lui aussi et plein de regrets. Il aurait aimé que les choses se passent autrement, aimé que la colère des gens ne s'abatte pas sur elle mais il ne pouvait rien y faire. Il se mettait à regretter d'avoir voulu rester en Angleterre et de ne pas être parti quand elle le lui avait demandé.

Le lendemain, le scandale durait déjà depuis cinq jours. Dahlia eut le déplaisir de voir des gens qui l'attendaient devant le hagard des Portoloins et qui l'insultèrent quand elle y entra. Elle essaya de ne pas les écouter mais leurs voix résonnèrent dans sa tête pendant toute la journée. Sa prestation à l'entrainement fut catastrophique et elle s'échappa du club dès qu'elle le put. Son entraineur ne la retint pas, il était inutile de forcer dans ces moments-là, ça irait mieux demain. A la sortie du terrain, Dahlia aperçut ses amis qui l'attendaient. Elle fut surprise de les voir, elle ne leur avait pas écrit. Elle avait trop honte, elle était trop choquée et malheureuse pour vouloir leur raconter et elle ne voulait pas leur faire mal non plus. Elle ne s'attendait donc pas à les trouver là. Ils étaient tous là pourtant, et ils la fixaient avec un mélange de douleur, d'atterrement et de sidération.

- Bon sang Dahlia, dit Andrew. Même les journaux people de New York en parlent… Pourquoi n'as-tu rien dit ? Même mon mariage avec Clara n'a pas fait un tel scandale.

Ils allèrent prendre un verre et écoutèrent Dahlia raconter ce qui se passait. Jamal, Marilyn et Andrew paraissaient horrifiés. Des coming-outs, ils en avaient fait, des insultes, ils en avaient reçu. Mais personne n'avait jamais connu une lapidation nationale comme Dahlia devait le subir. C'était un pays entier qui lui crachait dessus.

- Comment tu vas ? demanda Emily, inquiète.

- Ça va, assura Dahlia. Ça pourrait être pire.

- Ah bon ? demanda Chris d'un air dubitatif. Et ce serait quoi, quelque chose de pire pour toi ?

- Je vais essayer de prendre des vacances, dit Emily. Je viendrai te voir.

- D'accord…

- Pourquoi est-ce que tu ne rentres pas à New York ? dit Marilyn avec angoisse.

Dahlia hésita un instant. A vrai dire, elle n'avait même plus envie de rentrer, c'était trop tard maintenant. Son destin venait de se jouer là et elle devait jouer avec lui.

- Parce qu'il faut que j'assume ce que je suis, répondit-elle enfin. Je suis transgenre et je suis Dahlia Malefoy, et je ne pourrai jamais changer cela. Qu'ils me détestent donc, je ne partirai pas.

Elle avait un ton si dur en le disant que personne n'osa la contredire. Ils ne pouvaient pas comprendre, même s'ils la soutenaient et l'aimaient. Ils n'étaient pas Anglais, ils n'avaient jamais connu Voldemort, ils ne pouvaient pas comprendre. Car en réalité, c'était bien ça qu'on lui reprochait. Elle savait que les gens n'auraient jamais été aussi virulents si elle avait été une femme transgenre ordinaire. D'ailleurs, il n'y aurait sans doute même pas eu d'article. Elle payait pour le nom qu'elle portait et pour les crimes qu'elle avait commis. Elle payait pour tous les traumatismes de la guerre qui couvaient encore chez les sorciers anglais, pour toutes les rancœurs et les injustices.


*Ces phrases sont des copiés-collés de commentaires trouvés sous les publications d'une influenceuse française transgenre que je suis régulièrement. Je m'en suis servi volontairement pour que vous ayez conscience que je n'exagère pas et que dans la vraie vie, les personnes trans reçoivent vraiment ce genre d'insultes et de haine.