Chapitre 5 : Retour à la réalité

Suite 88, Le Mark Hôtel, NY

« Qu'essaies-tu de me dire ?

- Je sais que tu es attachée à ce bébé, mais je veux juste t'épargner de nouvelles déceptions. Je regrette de devoir te dire ça, mais ce n'est pas ton…

- Tu as tort de dire ça, Jarod.

- Parker, ouvre les yeux, enfin ! Ton père t'a déjà menti sur sa paternité et il a recommencé. Combien de fois t'a-t-il menti, trahi ou encore manipulé ? Ce n'est pas mon intention de te faire de la peine. Tu le sais bien.

Se détournant de lui, elle réfléchissait à haute voix. Bien que Mlle Parker avait du mal à admettre la vérité, elle devait cependant reconnaître que Jarod avait raison. Et malgré le fait que Mr Parker aimait sa fille et qu'elle avait toujours été néanmoins son point faible, il avait constamment eu à l'usure. Et pourtant, son père n'avait jamais été réellement honnête avec elle. Ne la tenant jamais informée ni de ses décisions ni de ses plans aussi foireux soit-il. Toutes les magouilles dont il avait fait preuve à son égard, toutes les manœuvres qu'il avait utilisées pour la manipuler, les mensonges qu'il avait accumulés au fil des années sous prétexte de la protéger s'il la savait en danger. Jusque-là, elle vivait dans un monde d'illusion, et la vérité était difficile à accepter mais très vite, elle se rendit compte qu'il y avait déjà bien longtemps qu'elle ne lui faisait plus confiance !

- Alors, qui est son père ? Et s'il n'est pas mon petit frère, qui est-il ?

- Aucun de nous deux n'a la réponse, mais tu la trouveras sûrement…

- Au Centre ! Bien sûr. Et je parie que Raines n'est pas étranger à tout ça !

- Et si tu retournes là-bas, que deviendrons-nous, tous les deux ?

- Je ne sais pas Jarod… Je suppose que chacun de nous va devoir reprendre le cours de sa vie. Toi, tu vas parcourir le pays à la recherche d'âmes à sauver et moi… Je continuerai à te traquer ! »

Le Centre, Blue Cove, Delaware

« Sydney ! J'ai intercepté ce fax dans le bureau de M. Raines. Qu'est-ce que ça veut dire ? Quelque chose est en train de se préparer et Mlle Parker n'est toujours pas là, mais où est-elle ?

- Vous avez raison Broots. Cela ne présage rien de bon. J'ai bien peur que Raines prépare un mauvais coup.

- J'ai un très mauvais pressentiment, Sydney.

- Faîtes voir ce document. »

Suite 88, Le Mark Hôtel, NY

« Parker, tu envisages vraiment de repartir au Centre, ce soir ?

- Jarod, il ne s'agit pas de nous, mais de mon frère.

- Dis-moi, j'ai besoin de savoir. Tu regrettes ce qui vient de se passer ?

- Non Jarod, parce que si je le regrettais, ce serait comme nier les sentiments que j'ai pour toi et je ne veux plus faire semblant, mais tout ce qui s'est passé ou tout ce qui s'est dit devra rester ici, dans cette chambre d'hôtel. Jarod, je pensais chacun des mots que j'ai prononcés et j'étais sincère quand je disais vouloir passer la nuit avec toi, j'espère que tu le sais. Peut-être même qu'on serait allés beaucoup plus loin si Broots ne nous avait pas interrompus. Ce n'était peut-être pas le bon moment.

- Parker, tu peux changer les choses, si tu le veux vraiment.

- Pardonne-moi, Jarod, je ne peux pas rester. Saches juste qu'il m'est impossible d'oublier ce que tu as fait pour moi, ce soir. Parce que vois-tu, pendant un instant, j'avais cette impression de n'être plus celle qui te traquait. Et je n'étais ni mon père ni ma mère, j'étais moi, seulement moi, et je me sentais bien… Tu es merveilleux Jarod, mais toi qui prônes la vérité, regardes-la en face. Jamais tu ne pourras me donner ce que je veux. Et tu ne peux pas me sauver… Personne ne le peut !

- Et maintenant que vas-tu faire ?

- Je vais retourner au Centre, découvrir la vérité sur ce petit garçon, peu importe qu'il soit mon frère ou non. Mais rassure toi, Jarod, je ne leur dirai pas où tu te trouves, sois tranquille.

- Qu'en est-ce qu'on se reverra ?

- Je ne sais pas… Un jour peut-être.

- Alors la traque continue ?

- À une différence près, tu sais maintenant ce que je ressens pour toi.

Oui, il le savait et il s'en réjouissait. Bien que ce soit dur pour lui de la laisser sans aller, Jarod était décidé à se comporter comme un gentleman avec elle, souhaitant la ramener jusqu'à sa voiture.

- Laisse-moi au moins te raccompagner. Je sais que tu sais te défendre, mais les rues sont loin d'être désertes. Nous sommes à New York, ici, la ville qui ne dort jamais.

- Ne rends pas les choses plus difficiles. Laisse-moi juste partir, Jarod, je t'en prie. » le supplia-t-elle.

Ses affaires à la main, Mlle Parker s'avança vers lui, l'enlaça dans ses bras le serrant aussi fort qu'elle le pouvait puis l'embrassa sur la joue avant de lui murmurer à l'oreille des mots qu'il n'oublierait jamais :

« Jarod, tu es la plus belle des illusions… Merci ! »

Jarod lui attrapa la main, attristé et silencieux, il n'avait plus rien à lui dire, et d'ailleurs que pouvait-il bien lui dire ? Elle lui avait déjà tout dit. Il la lâcha, effleurant ses doigts. Au bord des larmes, mais le cœur léger, elle ne put s'empêcher de réprimer un sourire, il ne l'avait jamais vue aussi belle que ce soir-là. Sortant de la suite, elle se retourna et s'en alla, laissant Jarod seul face à lui-même. Larme à l'œil, il s'approcha de la fenêtre, la regardant s'éloigner jusqu'à ce que son ombre disparaisse dans l'obscurité…

Le Centre, Blue Cove, Delaware, bien des heures plus tard.

Sydney et Broots étaient dans le bureau de Mlle Parker essayant de la joindre désespérément. Alors que Broots s'impatientait de l'absence de la jeune femme, tournant en rond, nerveux et l'air agacé, il paniquait.

« Je ne comprends pas Sydney, où a-t-elle bien pu passer ? Je déteste quand elle fait….

- Vous détestez quoi Broots ? ironisa-t-elle. Mlle Parker entra dans la pièce, surprise, lorsque l'informaticien soulagé de la revoir se jeta dans ses bras. Sydney, haussant les épaules, esquissa un sourire.

- Ho Mlle Parker, vous êtes là, enfin. Mais où étiez-vous passée, bon sang ? Ont étaient inquiets pour vous. Ici, il se passe des choses étranges, vous savez !

- Ressaisissez-vous Broot ! Ici, c'est le Centre, il se passe toujours des choses étranges et à voir vos têtes, on croirait que quelqu'un a disparu !

- Vous n'êtes pas si éloignée de la réalité, marmonna Broots.

- Mlle Parker, nous avons des révélations à vous faire…. C'est au sujet de votre petit frère, nous avons trouvé un dossier le concernant, annonça Sydney en y déposant le fameux dossier sur le bureau de la jeune femme.

- Allez-y, dites-moi !

- Il semblerait que le petit ait été soumis à des examens médicaux.

- Lui est-il arrivé quelque chose ? Il allait très bien pourtant ces derniers temps. s'inquiéta-t-elle.

- D'après ces analyses, il a l'air d'être en parfaite santé. On a également trouvé des documents plus précisément des grilles d'évaluation sur son avancée.

- Vous parlez de test, Sydney ?

- Ce ne sont pas des tests à proprement parler, il est beaucoup trop jeune pour ça. Les premiers tests psychologiques ne sont pas réalisables avant les trois années de vie de l'enfant. Voyez-vous ces évaluations, sont basées sur l'observation du développement, et des compétences du bébé, dans les différentes situations qui permettront de voir si ses capacités correspondent à celles qu'on attend d'un…

- Qu'est-ce que c'est que ce charabia ? Dites-moi seulement s'il va bien.

- Je pense qu'il va bien, Mlle Parker. Je ne crois pas qu'il lui ait été fait le moindre mal, pour autant que je sache.

- Vous pensez ou vous savez, Sydney ? Je vais aller m'en assurer moi-même… !

- Attendez Mlle ! Quand est-ce la dernière fois que vous avez vu votre petit frère ? Questionna Broots.

- Qu'essayez-vous de me dire, Broots ?

- Il y a une chose que vous devez savoir. Votre petit frère… Il a disparu !

- Qu'est-ce que vous me chantez là ? Il était là encore, il y a quelques...

Elle s'arrêta en réfléchissant à la dernière fois où elle l'avait vue.

- Votre frère… Il n'est plus au Centre, il a été transféré quelque part... On ignore où il se trouve, je suis désolé Mlle Parker ! »

Debout, elle se laissa tomber sur le canapé de son bureau. Désemparée et effrayée à l'idée qu'il puisse arriver du mal à ce petit être sans défense. Ce bébé qu'elle prenait pour son frère, ce bébé qu'elle avait aidé à mettre au monde, ce bébé qu'elle avait appris à aimer… Il avait disparu. Mais alors où était-il ? Que lui était-il arrivé ? La tête tournée vers Sydney, les yeux larmoyant, rempli d'inquiétude, la voix chargée d'angoisse, elle demanda :

« Mais alors, s'il n'est plus au Centre où est-il ? Où est mon petit frère...? »

Et non loin de Blues Cove, en dehors de l'état du Delaware, dans une maison isolée, dans une pièce remplie de jouets, dans une chambre d'enfant semi tamisé, on pouvait voir un petit bébé, un petit garçon aux capacités incroyables….

Un futur caméléon !