Faline
Par Milie
L'intruse, une jeune fille, environ la vingtaine nous regarda avec stupéfaction en faisant irruption dans ma chambre, pour ensuite s'empresser de refermer la porte en la claquant bruyamment. Mes yeux demeurèrent fixer quelques instants vers la porte close, n'osant pas regarder ce troublant jeune homme qui me faisait face.
Quand mes yeux se posèrent enfin sur lui, il tourna vivement la tête et se leva. Il ramassa son sac près du lit alors que j'étais soudainement incapable de détacher mon regard de lui. Un regard implorant, un regard qui voulait dire combien j'étais désolée et combien je voulais malgré tout qu'il reste ici avec moi et qu'il ne s'en aille jamais. Il leva alors timidement la tête, un sourire au coin des lèvres, mélange de gène, ou peut-être même de peur, face à ce qui venait de se passer. Il me regarda avec intensité l'espace de quelques secondes, puis visiblement gêné par la façon que j'avais de le fixer étrangement, dit d'une voix douce et sincère :
« Bonne chance et euh... prends soin de toi surtout ! »
Il me regarda une dernière fois et partit par là où il était venu. C'est une fois la porte fermée que je prononçai faiblement :
« Nan... ne me laisse pas ! »
Trop tard, il était parti et ne reviendrait sûrement plus. Pauvre idiote, pensais-je, qu'est ce qui t'as pris de l'embrasser comme ça ? Il ne t'avait rien demandé le pauvre... mais ceci dit, il avait plutôt l'air d'avoir apprécié. Et je n'ose pas imaginer ce qui se serait passé par la suite si cette fille n'était pas arrivée... est-ce que je serais vraiment allée jusqu'à coucher avec lui dans cette chambre d'hôpital ? Oh nan, dîtes-moi que nan...
Je tombai lourdement en arrière, incapable de bouger, mes yeux scrutant le plafond en décrépitude au-dessus de ma tête. Cette fille... encore une inconnue pour moi, qui était-ce ? Je ne l'avais jamais vu traîner par ici... il faudrait que je la retrouve un de ses jours. On ne sait jamais, c'est peut être une vraie petite conne qui va s'empresser d'aller raconter ce qu'elle a vu ici... mais à quoi ça lui servirait ? À rien bien sûr, mais depuis le temps que je connais les gens, je sais que certaines personnes font ça seulement pour le plaisir par méchanceté, sans vraiment de motif mis à part celui de blesser moralement.
Enfin, peu importe, songeais-je, au point où j'en suis maintenant... et puis, Faline, arrête de prendre tous ces gens pour des cons ou des idiots, il y en a des biens aussi sur cette petite planète, et cette fille en fait peut être bien partit. Bref, c'est bien le dernier de mes soucis celle là.
Lui. Seul son visage envahissait ma tête, ce visage d'une extrême douceur. Qui était-il ? Un infirmier... j'en doutais à présent. Généralement, les infirmiers ne traînent pas avec eux, un sac que l'on approprierait plutôt à un voyageur. C'était sans doute un type de passage, comme beaucoup ici, avec quelques connaissances médicales. Je ne le reverrai plus. Mon cœur s'accéléra subitement à cette pensée, un frisson faisant palpiter ma peau. Mais c'est mieux... oui, c'est sûrement mieux comme ça. Pourtant mon corps ne demandait que lui ; sentir une nouvelle fois sa peau, caresser ses lèvres encore une fois.
Il y avait pourtant une véritable chimie entre nous, quelque chose que je ne saurais définir, une attirance réciproque. Et j'étais effrayée par ça. Qu'est ce que je ressentais ? Qu'est ce que c'était ? Ça ne pouvait pas être de l'amour, ça c'est impossible, pas en si peu de temps...Il avait l'air sympathique et il était vraiment très mignon, mais tous ça n'était pas suffisant pour employer ce grand mot qu'est le verbe 'aimer'. Je suis dépassée par moi-même par mes sentiments. Pourtant je le sens, mon corps veut le sentir une nouvelle fois contre lui alors que ma tête a peur, peur de cet emmêlement soudain. Peut-être même peur de le revoir.
Je soupirai, les larmes me montant aux yeux. J'en avais plus qu'assez ; j'avais déjà été salement amoché par un petit connard prétentieux, et il a fallu que l'homme mystère arrive et mette le trouble en moi, fasse frissonner et trembler mon pauvre petit corps meurtri. Merde ! Je n'avais pourtant rien demandé moi ! Et je suppose que lui non plus... au moins on est deux.
Et puis j'en peux plus d'être ici. D'être seule ici. Bien sûre Cassy est venue et je l'en remercie mais... c'est Matt que j'aimerais voir. Matt... dire que j'ai succombé à un bel inconnu alors que j'étais secrètement vouée à Matt. C'est comme si je lui avait été infidèle alors que je n'avais jamais entretenu de relation amoureuse avec lui. Alors que j'étais certaine de l'aimer. Il y a 10 minutes j'en étais sûre, mais plus maintenant. Oh quelle belle preuve d'amour que de tomber dans les bras d'un inconnu, de l'embrasser et d'être prête à coucher avec lui. Je ne vaux pas mieux qu'une belle conne... une salope même. Je ne vaux rien oui, rien du tout.
Des larmes coulèrent doucement sur mes joues. Je sanglotai comme une fillette, me blottissant dans les draps du lit. Je ne faisais qu'aggraver mon cas : voilà que maintenant, je me ridiculisais. Après tout je m'en fou, je suis seule, qui peut bien me juger ? Moi-même, mais je ne préfère pas compter sur ce dernier. J'hurlai d'une voix sanglotante :
« Pauvre conne... PAUVRE CONNE ! »
Je m'extirpai des draps, allai me placer devant la glace et aspergeai mon visage blafard d'un peu d'eau. Alors que je croisai mon reflet dans le miroir, je frappai avec mon poing le miroir qui éclata en morceau. Les morceaux de verre allèrent s'étaler dans le lavabo, sur le sol. Ma main saignait, quelques gouttes de sang coulèrent dans l'évier. Et oui, Faline, le verre ça coupe, pensais-je.
Je pris des mouchoirs, et me les appliquai à l'endroit de la coupure afin d'éviter le saignement. Je m'affalai sur le sol, ramassai les éclats de verres d'une main tremblante. Les quelques éclats dans une main, je me stoppai, pleurant doucement en murmurant avec faiblesse :
« Pauvre conne... »
Je restai là quelques instants, à murmurer ces quelques mots. Puis, je continuai à ramasser les éclats, prenant soin de ne pas couper la seule main qui me restait. Je jetai tous ça dans la petite poubelle, ramassai ceux dans le lavabo et les jetèrent eux aussi. J'ouvris le robinet pour effacer toutes traces de sang. J'avançai alors vers mon lit, et m'assis maladroitement dessus. J'examinai ma coupure à la main, heureusement pour moi, elle était peu profonde. Cependant, elle saignait pas mal. J'ajoutai alors quelques mouchoirs à mon pansement improvisé. Je regardai avec tristesse ma main en pensant « Apparemment ça ne me suffisais pas d'avoir des blessures partout sur le corps et le visage, il fallait que je m'en fasse une de plus à la main. Génial. »
Alors que ma blessure semblait s'arrêter de saigner, je fermai les yeux pour oublier cette journée, oublier mes remords. Il faut toujours être fière de ce qu'on a fait, pas vrai ? Tout dépend de ce qu'on a fait, pensais-je.
Alors que mes yeux fermés, j'essayai de trouver un peu de repos, la porte s'ouvrit doucement. Une jolie petite tête brune apparut dans l'embrasure de la porte.
- Oh elle dort...
- Nan, je dors pas Cassy, répliquai-je, entre.
Je me positionnai en tailleur sur le lit alors qu'elle entra, en amenant dans la chambre une étagère à roulette, où se trouvait une télé et un magnétoscope.
Je le regardai avec étonnement et amusement en m'exclamant :
- C'est quoi ça ?
- Une télé et un magnétoscope, dit elle un sourire aux lèvres.
- Et pourquoi tu apportes ça, ici ?
- Tu dois un peu t'ennuyer ici alors je me suis dit que de regarder des bons films ça ferait passer le temps.
- Je sors bientôt nan ? dis-je en fronçant les sourcils, alors je n'aurai pas le temps de regarder tes bons petits films je crois...
- Heu... nan, dit-elle gênée, je suis désolée. Dans l'état où tu es, tu ne pourras pas encore sortir, tu réouvrirais tes plaies, ça ne servirait à rien. Sois patiente, dans une semaine...
- Une semaine ? la coupai-je. Une semaine ? Mais tu avais dit dans quelques jours Cassy !
- Oui je sais, mais je ne savais pas... j'ai vu le médecin et il m'a dit une semaine.
Je serrai les dents. Une semaine... une semaine à me faire chier dans cette chambre miteuse, à me ronger l'esprit. Ça ne m'étonnerait pas si j'y crevais avant.
- Aller, je viendrai te voir. T'en fais pas, ça va passer vite. Tiens, regarde ce que je t'ai trouvé ! Un bon vieux western... tu sais, les bottes de cow boy, les lassos, les saloons et les revolvers ! Je regardais ça quand j'étais petite ! Je pense que ça te fera bien marrer...
Elle me tendit la cassette et je la remerciai par un sourire timide. Je déposai la bande vidéo sur la table de chevet. Elle se tourna alors vers la glace, ou du moins ce qu'il en restait :
« Oh la ! Qu'est ce qui s'est passé ici ?
- Rien, dis-je froidement.
- Comment ça rien ? Ne me dit pas qu'il y a rien, le miroir est en mille morceaux !
- Mais rien je te dis, dis-je énervée, c'était comme ça quand je suis arrivée.
- J'en ai pas souvenir pourtant...
- Je te dis que si ! dis-je en m'énervant sérieusement.
- Bon, ajouta-t-elle simplement voyant bien que ça ne servait à rien de discuter.
Elle vint s'asseoir sur le lit et fixa ma main meurtrie. Elle la regarda longuement. Je suppose qu'elle fit rapidement le lien entre la glace et ma main, car elle ne dit rien, mais me regarda avec tristesse. Je baissai les yeux puis elle ajouta :
- Sinon ça va ?
- Ça va, lui répondis-je simplement, au fait...
- Oui ?
- Tu ne saurais pas qui c'est le type là, celui qui s'est occupé de moi ? Je crois que c'est lui qui m'a amené ici...
- Euh... non je ne vois pas désolée ! Pourquoi veux-tu savoir ça ? dit-elle intéressée.
- Nan pour rien, comme ça... dis-je baissant la tête.
J'imaginais alors que ça n'était qu'un délire, que j'avais peut être bien imaginé ce type de toutes pièces. La saveur de ses lèvres revint alors à mon esprit et je me rendis à l'évidence ; je n'avais pas déliré, il était bien réel.
- Ouais, dit-elle d'une voix amusée, mais n'insistant pas.
Puis, après un bref silence elle se leva et dit d'une voix joyeuse :
- Bon je vais te laisser, je reviendrai te voir et que je ne te vois pas bouger de ton lit d'accord ? Repose-toi... aller, Bye !
Elle me fit un sourire que je lui rendit avant qu'elle ne franchisse la porte. Puis, ne voulant pas encore faire fonctionner mon esprit qui allait me trouver de nouveaux remords pour mon palmarès, je saisis la cassette et la mis dans le magnétoscope. Je m'assis sur mon lit, attendant que l'image s'affiche sur l'écran. Elle vint enfin. Mais elle n'avait rien à voir avec un décor de saloon ou autre plaine américaine. L'écran affichait un couloir sombre, qui m'était vaguement familier.
Enfin, je reconnus l'endroit comme étant l'un des points d'entré au quartier général. Mais qu'est-ce que c'est que ce ruban, me demandai-je. Puis deux ombres s'avancèrent en arrière plan. À la silhouette, je fini par deviner deux hommes qui s'approchaient. Je reconnus rapidement Matt et Kyle mais...
- Qu'est-ce qu'ils font ? Oh non je rêve, ils ont décidé de bouder leur t-shirt. Un streap-tease peut être ? Pas vraiment le genre... Merde ! On peut toujours rêver.
Les deux semblaient en grande discussion et comble de bonheur, décidèrent de s'arrêter en plein dans le champs de la caméra. Ohhh Kyle n'était pas mal foutu, mais Matt crevait l'écran. Je me mordis la lèvre inférieure en m'approchant un peu plus près de la télévision. Mon dieu, rien qu'en regardant ça, j'avais des chaleurs... vraiment, je ne vais pas bien, pas bien du tout. Mais qui a enregistré ça et pourquoi ? Et pourquoi ça a atterri entre mes mains... oh je n'avais vraiment pas envie de réfléchir à ça maintenant. Je me contentais d'admirer le spectacle.
La cassette terminée, je me la repassais plusieurs fois avec toujours le même enthousiasme. Un coup du destin... pour me montrer que c'était bien Matt que j'aimais. Pourtant, je n'étais vraiment pas superstitieuse. Alors que je regardais Matt avec attention, je crus voir le visage de l'inconnu. Oh nan, voilà que ça recommence, il ne va jamais me lâcher celui là ! En y regardant de plus près, je trouvais même une ressemblance. Ou du moins, j'essayais de m'en persuader. Ce n'était sûrement que mon petit cerveau embrouillé qui voyait ça. Il voyait les deux hommes qui hantaient mon esprit, dans l'espoir de n'en faire plus qu'un. C'est vraiment idiot.
Je me levai pour éteindre le magnétoscope et m'allongeai par terre : « Oui je sais ce que je veux... revoir Matt et revoir mon inconnu. Je ne peux pas choisir, pas maintenant. Je veux les deux, mais je sais que c'est impossible. Cela m'est même improbable d'en avoir ne serait ce qu'un alors... Et puis j'étouffe ici ! Je veux sortir, bouger, partir en mission. Mais nan Faline, pas avant une semaine ! Quoiqu'on en dise, c'est long une semaine, 168 heures c'est encore plus long. Je ne me risque pas à calculer les secondes ou je crois que je sauterais par la fenêtre. » Je fermai les yeux pour rêver que mon bel inconnu revienne et qu'il m'embrasse, qu'il m'entraîne dehors... comme deux adolescents. Son nom, je ne le connais même pas... à vrai dire, je ne le connais pas tout court.
Rain
Par Rayne
Cela faisait maintenant deux heures que nous sommes revenues de ce qui reste du bar de Jim. Je ne sais pas qui étaient ces hommes, ni encore ce qu'ils nous voulaient mais ce dont j'étais sûre, c'est que j'allais trouver qui avait fait ça.
Quant à la question de Blue.. Je savais quoi répondre, mais pas comment le dire..
J'étais dans la salle d'entraînement, à me défouler sur le punching bag tandis qu'elle m'observait silencieusement, appuyée contre le mur.
Je ne savais pas quoi dire..
Ou plutôt, j'avais trop de choses à dire, mais je ne savais pas par quoi commencer..
« Rain.. » commença Blue.
« Ouais? » fis-je sans arrêter pour autant de battre le pauvre sac de sable.
« Je peux te parler? »
« Sûr. » répondis-je en donnant un violent coup de poing final au sac de sable, qui se fendit en deux sous le choc. « Merde... » jurais-je en me reculant brusquement pour éviter que le sable ne me gicle dessus.
Malgré l'effort intense que je venais de fournir, je n'avais même pas chaud, seulement soif. Je pris ma bouteille d'eau et en but une longue rasade avant de la reposer et de me tourner vers Blue, qui était à quelques mètres de moi.
« De quoi est-ce que tu veux me parler? » demandais-je, bien que sachant parfaitement de quoi elle voulait parler.
« De toi.. de.. nous.. »
Je soupirais subrepticement, ne sachant quoi lui répondre... Je me dirigeais vers elle et l'enlaçais, l'embrassant doucement, mais elle m'arrêta.
« Non.. Il faut que je saches.. je n'arrête pas d'y penser.. Pourquoi lui as-tu laissé la vie sauve? »
« Je te l'ai déjà dit.. tu me l'as demandé.. Tu.. tu n'est pas comme les autres.. Je sens ton regard différemment de celui de autres.. Tu ne me juges pas comme les autre le font.. Ce que je ressens pour toi.. Je crois que c'est plus que de l'amitié.. Je crois que ça peut être de l'amour.. Car pour moi, tout ce concept 'd'amour'.. est totalement inconnu.. Mais je te jure que ce que nous partageons n'est pas que de simple affinités.. » terminais-je en lui souriant gentiment.
Blue
Par X5-369
Je n'aurais jamais cru que... Enfin, comment peut-on ignorer ce qu'est l'amour ? Mais en y réfléchissant bien, je crois que je suis mal placée pour parler...Ai-je déjà ressentie de l'amour envers qui que ce soit ? Je pensais que j'aimais Tasha, mais dans le fond, la raison pour laquelle je voulais toujours avoir sa présence à mes côtés est que ça me permettait de ne jamais douter, de ne pas me poser de question, d'être tranquille et de pouvoir dire : C'est pas grave si tout va mal, Tasha va s'en occuper...Elle est plus forte, plus belle, plus vieille, plus mature, plus détaché, plus sur d'elle, plus... tout ce que j'ai toujours voulu devenir, et elle semblait m'aimer. C'était logique d'en être amoureuse.
Maintenant que je suis seule et que je dois faire face, je crois que je me rends compte que rien de ce qui me semblait vrai à l'époque ne semble l'être aujourd'hui... Et il y a Rain qui est la, devant moi, à me dire qu'elle ignore ce qu'est l'amour...Pour la première fois, je sens que ce que je ressens n'est pas logique et que...pour la première fois, je suis réellement amoureuse. Rain est différente des autres, je ne peux pas lui demander de me répondre comme tout le monde. Si elle me voit comme étant quelqu'un avec qui elle a « plus que des affinité », alors c'est le mieux que je puisse avoir. Je peux espérer qu'un jour, peut-être, elle comprendra ce que c'est que le concept d'aimer quelqu'un et à ce moment là, je serai tout près...
- Je comprends. Si... Non, laisse tomber... Tu... C'est déjà quelque chose que tu me considères comme quelqu'un de... disons « spéciale ». Je veux juste que tu saches, question de jouer franc jeu, que je n'ai jamais ressentie pour quelqu'un d'autre ce que je ressens pour toi, Rain. Pas même pour Tasha. Dans le fond, c'est toi qui a raison, je n'ai aucune idée de ce que c'est l'amour, tout simplement parce que je ne l'ai jamais ressentie, alors je suis mal placée pour te dire ce que c'est ou te faire la morale en disant que « tu devrais le savoir » ou quelque chose du genre. Pour moi aussi, tu es quelqu'un de « spécial ». Je ne veux pas chercher à en savoir plus pour le moment.
- La seule autre personne que j'ai jamais... aimée... est morte, et ce, à cause de moi... Son amour pour moi lui a fait faire une chose qui lui a coûté la vie... Je tiens à toi, Blue, et je ne veux pas que ça se reproduise.
Je restai sans voix. Je voulais poser plein de question sur ce qui s'était passé, mais on aurait dit que ma voix était partie faire un tour ailleurs... Je bégaya un début de phrase sans suite logique...
- Que...? Comment...arriver...? Qui...horrible...? ...Affreux...
- Je préférerais ne pas en parler, ok ? Mon passé est loin derrière moi et je voudrais qu'il reste ou il est.
- Je... je comprends.
Et c'est vrai, je comprends. Qui voudrait penser à ça ? Pas moi... Et puis, ça n'a pas d'importance.
- C'est moi qui prends les risques, Rain. Mais il ne m'arrivera rien. Tout le monde t'écoute, soit parce qu'ils ont peur de toi, soit parce qu'ils te respectent, ce qui reviens au même aujourd'hui. Mais moi, c'est parce que je t'ai...parce que tu es quelqu'un de spécial pour moi que je ne vais pas t'écouter et que je vais rester avec toi. Tu n'auras qu'à m'apprendre à botter des derrières...
- ...
Un sourire éclaircit son visage, preuve qu'au moins son sens de l'humour était resté intact. Elle réfléchit, je le sais, mais peut importe ce qu'elle me dira, ma décision est prise. Je n'ai jamais eu peur de quoi que ce soit, ça ne changera pas aujourd'hui.
- Je... vais veiller sur toi, Blue.
Sérieuse. On dirait que soudainement, elle a perdu son masque d'indifférence pour prendre un air grave et lourd de sens. Je sais que c'est vrai, elle veillera sur moi. Et je veillerai sur elle, à ma manière.
- Mais maintenant, on va s'amuser !
Oh-merde. Le sérieux, ça lui réussit pas. Voilà que maintenant, elle veut qu'on s'amuse...Dans quoi va-t-elle réussir à me traîner ?
- Où on va ?
- Tu verras...
- UN RAVE !
Après les bars, me voilà dans un... rave ?
- Pas question que j'entre là-dedans !
- Oh que si !
Me voici tirée par le bras par une Rain déchaînée qui trémousse déjà son (très mignon, est-il besoin de le préciser ?) petit derrière au son de la musique je-sais-pas-trop-quel-machin-truc-techno-pré-ou-post-Impulsion qui sort de la « boîte » branchée où de le...l'immeuble branlant qui sert d'abri au gens pour ce rave. Elle me traîne avec elle, passant devant la foule de gens qui attendent pour entrer dans cet enfer et foncer droit vers le type à l'entrée.
- Salut Ray...Tu nous laisses entrer, ma copine et moi ?
- Sûr ! Depuis quand je te refuse quelque chose, Rain ?
- Merci, t'es un ange...
Et on entre.
Cloé
Par La Chimère
Tendant le badge plastifié, je subis sans broncher l'examen attentif du soldat pour vérifier que je correspondais effectivement aux observations notées, photo comprise. Me retenant de lui sourire à toutes dents, je repris mon laissez-passer et entrai dans un autre secteur.
Celui-ci ne ressemblait en rien au précédent. Aucun déchet, aucune carcasse de voiture à moitié désossée et aucun mendiant souffreteux tendant une pogne crasseuse pour récolter autre chose qu'un crachat. Ici, c'était propre et clair. Clair par la couleur beige qui recouvrait l'ensemble des bâtiments préfabriqués abritant l'infirmerie et le logement des troupes surveillant ce territoire. J'eus presque honte de mes godasses boueuses en foulant le trottoir. Avisant une baraque à la porte ouverte, j'entrai en me faisant la plus discrète possible.
Derrière son guichet, un homme au crâne dégarni lisait son journal par-dessus ses lunettes juchées en équilibre sur un nez épaté. Humectant consciencieusement son index, il tourna la page qu'il lisait et après un raclement de gorge particulièrement désagréable, reprit sa lecture sans se soucier de ma présence et de celle d'une autre femme qui se penchait sur le tableau installé à côté de moi.
Étaient épinglées de multiples affichettes offrant gloire et fortune... Non non je déconne... offrant un emploi à titre tout à fait exceptionnel et à durée très limitée. J'étais entrée dans un quartier réservé aux gens aisés et ces derniers avaient souvent besoin d'une aide, ne serait-ce que pour leur dire si la météo avait changé.
Scrutant attentivement les annonces, j'écartais d'office toutes celles m'apparaissant comme de subtils subterfuges pour dissimuler un esclavage en règle pire que celui pratiqué dans les champs. J'entendis l'autre femme soupirer et sans poser les yeux sur moi, elle sortit, n'ayant visiblement rien trouvé. Vaguement découragée, je m'apprêtais à en faire autant lorsque mon regard fut attiré par une annonce écrite à la main contrairement aux autres et scotchée juste à côté du guichet. Écriture fine, racée, féminine même. Je m'approchai donc. Le guichetier souleva une paupière lourde et me fixa tandis que j'arrachai l'annonce.
« Est-ce toujours d'actualité ? »
« Si elle est là, c'est qu'elle l'est ! » brailla t-il.
"Recherche jeune femme, bonne présentation exigée, pour effectuer tous travaux d'entretien. Nourrie et blanchie. Salaire à définir. Référence..."
Malgré le regard insistant du bonhomme, j'hésitai longuement. Troquer, marchander voire voler, ne me permettait pas de faire fructifier mes économies pour un éventuel départ alors qu'avoir un emploi stable même rémunéré au plus bas pouvait y parvenir. Respirant un grand coup, j'affrontai le cerbère ventripotent.
« Où dois-je me présenter ? »
Attrapant l'affichette, l'homme remit ses lunettes en place et relevant la référence, entreprit de la rechercher dans son vaste registre. Me retenant de lui arracher des mains pour aller plus vite, je jetai un coup d'œil à l'extérieur. Le manège d'un homme m'intrigua. Il faisait les 100 pas devant l'entrée d'un bâtiment tout en jetant de furtifs regards dans ma direction. A cette distance, je ne parvenais pas à distinguer ses traits. Rappelée à l'ordre par mon bonhomme, je retournai la tête vers lui.
«Voilà. Tu vas te rendre ici et demander Madame Eléanore Dumenil. Si tu sais y faire, le boulot est à toi.»
« Merci. »
Il ne me répondit pas, se replongeant ostensiblement dans son journal. Sans insister, je sortis avec l'adresse précieusement enfouie dans ma poche et sans en avoir l'air, m'approchai de l'homme qui avait cessé ses va-et-vient pour m'attendre. Parvenue à sa hauteur, il me souffla.
« Il est là. Il t'attend. Fais vite. »
Me plantant aussitôt, il disparut au coin du bâtiment tandis que je poussais la porte pour pénétrer dans un... club anglais ? oo
Fauteuils en cuir, guéridons en acajou rouge, cuivres et odeurs de cigares. Où étais-je tombée ? Une main preste m'attrapa par l'épaule et me poussa dans une sorte de cabinet lambrissé de bois doré. A peine revenue de ma surprise, j'entendis la voix grave de Lokie me demander :
« Qu'as-tu à me proposer exactement ? »
« Je peux avoir un verre d'eau ? »
L'homme blond au regard d'acier me surplombait d'une bonne tête et sa carrure aurait dû me faire hésiter mais je ne tenais pas à montrer ma nervosité vis-à-vis du plus gros trafiquant de Seattle. Cet homme pouvait m'apporter plus qu'il ne le pensait mais encore fallait-il avoir de quoi payer et Môssieur était gourmand, très gourmand.
« Assis-toi. »
Lokie s'avança vers un minibar abondamment garni et versa du liquide ambré dans un verre avant d'attraper une carafe d'eau pour remplir mon propre verre. Se retournant vers moi, il m'offrit la boisson avant de plonger son nez dans l'alcool doré.
«Alors ? Maintenant que Mademoiselle est servie, puis-je savoir ce que tu as ?»
« Du phosphate disodique en deux paquets de 500 grammes. »
Je l'entendis avaler sa gorgée avant qu'il ne daigne contourner le fauteuil sur lequel j'avais pris place et vienne s'affaler sur le canapé en cuir bronze en face de moi. Ses yeux gris bleu ne me quittèrent pas avant qu'un sourire ne vienne effleurer ses lèvres. Lokie pourrait être très séduisant s'il ne s'obstinait pas à crisper ses traits ainsi comme pour paraître plus âgé qu'il ne l'était réellement.
« Et puis-je savoir où tu as trouvé cette poudre ? »
« Il y a eu un incident sur le port lors d'un déchargement. Une caisse a éclaté sur le quai et son contenu s'est un peu éparpillé. J'ai trouvé les deux paquets par le plus pur des hasards. »
Mon sourire angélique le fit s'esclaffer. Se renversant pour s'appuyer sur le dossier, il semblait savourer l'instant. Je n'ignorais pas qu'il était le créateur du « Bonheur », joli nom pour une drogue dure aux effets euphorisants dévastateurs. La poudre que je lui proposai entrait dans sa composition complexe. C'était un coup en or autant pour lui que pour moi.
Lokie
Par Percolator
Je la regardais sans rien dire, le temps de réfléchir à combien je pouvais me permettre de monter pour elle ! J'avais de l'estime pour cette fille, et peu de mes contacts pouvait s'enorgueillir que moi, Lokie Mac Hoot, est de l'estime pour eux.
Je lui demandais d'abord ce qu'elle voulait, ou je lui proposais de la nourriture tout de suite ? Lui proposer la marchandise, serait un manque total de classe de part, vérifions déjà qu'elle veuille bien de la nourriture.
Relax ma fille, détends toi tu as de quoi négocier ce soir, c'est pas comme d'habitude.
" Dis-moi ce que tu veux en échange des 2 sachets ? lui demandai-je."
Cloé sourit, réfléchit puis d'une voix posée répondit :
" Dans mon message, je t'ai dit de la nourriture ! N'oublie que pas que nous sommes 2, mon frère et moi, mais je veux aussi autre chose. "
" Ton cher frère, il ne t'a pas encore cloîtrer ? Il a dû faire une syncope quand il t'a vu sortir habillée comme ça ! Il me rappelle ma tante Hortense par moment. "
Cloé sursauta et machinalement tira sur sa jupe pour recouvrir ses genoux mais sans réel résultat. Agacée, elle me toisa et répliqua d'une voix sèche :
" Je me fiche de ta tante Hortense ! Raven veille juste sur moi pour m'éviter des ennuis. Je n'ai que lui. "
Elle serra les dents en constatant que je semblais réellement amusé par son explosion soudaine et cela lui fit monter le rouge aux joues !
En plus, il se fiche de moi !
" Dis-moi tout ce que tu veux en plus de la bouffe, ça facilitera mon calcul, continuai-je. "
" Je veux le nom du responsable transmettant les demandes de visas à l'échelon au-dessus au sein de l'Ordre. Je sais que tu peux obtenir cette information ! "
Mon visage dut s'assombrir immédiatement et je vis la crispation de ses mâchoires !
Pas question ! Mais apparemment elle m'avait l'air d'y tenir à cette info, je pourrais peut être faire la recherche. Oui j'allais le faire, ça vaudra des sous, beaucoup !
" Je ferais des recherches, mais revenons à la nourriture, oui j'en ai et pas n'importe laquelle. "
Les yeux de Cloé brillèrent à cette phrase. Je fis signe à un porteur d'amener ma caisse et l'ouvris devant elle. J'attendis sa réaction.
Je dus me mordre l'intérieur de la joue pour éviter de crier. Ce type était hallucinant pour être parvenu à obtenir de la nourriture soigneusement conditionnée et loin de ressembler à celles que l'on pouvait acheter dans les établissements estampillés : Supermarché.
Pour me convaincre que je ne rêvais pas, j'effleurai du doigt l'étiquette annonçant "poêlée de légumes méditerranéens".
C'était trop beau. Je m'attendais presque à ce que Lokie referme le couvercle brusquement en disant : Raté c'était une blague, voici les rations que tu auras à la place !
Mais non, il attendait patiemment que je me décide.
" Je te propose contre les 2 sachets et parce que je viens de passer une matinée génial, 6 unités et pas une de plus ! fis-je "
Je me retins à nouveau de sauter de joie. C'était plus que je ne l'avais escompté.
Redressant la tête pour planter son regard dans le mien, elle accepta le marché. J'inclinai la tête ironiquement pour l'en remercier.
" C'est un plaisir de faire des affaires avec toi. Par contre tu diras à ton frère qu'il arrête de me chercher, il ne me trouvera jamais, je traite avec toi et avec toi seulement ! Et menacer mes contacts n'y changera rien ! "
Elle sourit.
Décidément Raven n'en faisait toujours qu'à sa tête, mais il serait forcé d'admettre que sur ce coup-là, jamais il n'aurait pu faire mieux.
Tout en empilant les six boites dans son sac à dos en veillant à ce qu'elles ne s'entrechoquent pas et que le tissu ne soit pas trop tendu, elle marmonna :
"Il est têtu mais je lui dirai. Je.. Je te remercie Lokie."
Je croisai les bras pour la détailler de la tête aux pieds et avec un sourire narquois :
"Continue à venir en jupe, ça pourrait t'aider !"
ÉDITÉ par Chayenne: j'ai fait ce que j'ai pu, mais à l'avenir, évitons de mélanger les pensées, please.
À suivre...
