Bonjour ! :)
Cette nuit, il a neigé beaucoup chez moi. Ce matin, toute ma cour est blanche. C'est bientôt Noël ! :D
Merci à Rinku13, AliFantasque et Guest pour vos super reviews !
(L'univers et les personnages appartiennent à JK Rowling. L'inspiration provient tout droit du film "The Hangover".)
Bonne lecture !
Chapitre 7 ― Le Géranium Dentu
― Putain de merde ! s'écria Sirius avec exaspération folle dès qu'ils sortirent dehors.
Remus, en contraste, demeurait silencieux, mais dans son esprit se répercutaient néanmoins des hurlements de désespoir. Il avait toujours envie d'étrangler Peter pour lui faire regretter encore plus sa bêtise de les avoir empoisonnés, mais ils avaient besoin de lui pour retourner à la Cabane hurlante.
Le soleil déclinait à l'horizon, au-dessus de la forêt Interdite, et le souffle du vent agitait la cime des arbres. Le Saule cogneur se balançait doucement dans ses feuilles et paraissait inoffensif. Mais dès qu'ils s'approchèrent de son gros tronc, l'arbre agita ses branches dans un craquement sinistre et essaya de les frapper.
― Mais qu'est-ce que tu attends, abruti ? demanda sèchement Sirius en reculant d'un bond. Occupe-toi du saule !
Peter, qui était plongé dans ses pensées, tressaillit, et après s'être assuré que les quelques élèves auprès du lac regardaient ailleurs, se métamorphosa en un gros rat. Sa petite silhouette grise terminée d'une longue queue rose se glissa aisément sous les branches sans prendre de coups et alla appuyer sur le nœud de la racine qui immobilisa aussitôt le Saule cogneur.
― Allons-y, personne ne regarde, dit Sirius avant de jeter à son tour des regards prudents dans le parc. Ah, si, merde ! C'est ta putain de Karline, là !
Remus fit volte-face et vit Fanny se diriger tout droit vers lui d'un pas colérique.
― Remus, comment oses-tu traîner avec tes amis alors que la fête de Slughorn est sur le point de commencer ? s'écria-t-elle avec colère, ses cheveux noirs voltigeant dans le vent. Amène ta peau, il faut qu'on s'occupe de tes cicatrices ! Et c'est quoi cette cravate ? J'espère que ce n'est pas ça que tu vas porter, la couleur est horrible !
― Je… je n'ai pas le temps…, balbutia Remus, pris de court, tandis que Sirius se pinçait l'arête du nez avec découragement. Je veux dire, je m'excuse, Fanny, mais… il me reste encore des choses à faire et…
― Des choses à faire plus importantes que de te préparer à aller à la fête avec moi ? s'indigna Fanny, les yeux scintillants. Arrête tes conneries et suis-moi, idiot ! On a beaucoup de travail pour te rendre beau.
Elle lui attrapa le poignet et le tira vers le château.
Le cœur de Remus battit à toute allure. Il ne pouvait absolument pas la suivre. Il devait inventer vite une excuse pour se défiler. Pendant qu'il se creusait rapidement les méninges, il plongea instinctivement la main dans sa poche pour y saisir sa baguette, puis il s'aperçut qu'il avait envie de lui jeter un sort, alors que c'était une idée parfaitement indécente. Il n'allait quand même pas la stupéfixer.
Soudain, il frôla la cape d'invisibilité dans sa poche et il eut une meilleure idée.
― Oh, par Merlin ! s'exclama-t-il en feignant la surprise. Tu as vu dans le lac ? Un énorme tentacule vient d'émerger !
― Ah oui ? s'étonna Fanny en se retournant avec curiosité.
Aussitôt, Remus sortit la cape d'invisibilité de sa poche, qu'il déploya sur sa tête, et disparut en dessous.
― Où ça le tentacule ? demanda Fanny qui fouillait le lac des yeux. Tu es sûr que tu as vu le calmar ? Remus… ? Remus, mais où est-ce que tu es passé ?
Remus se dépêcha de revenir auprès du Saule cogneur où Sirius souriait d'un air impressionné et hilare.
― Bravo, Lunard, murmura-t-il en félicitant le vide devant lui. Tu évolues.
― Elle va me tuer, ce n'est pas drôle, grinça Remus sous la cape. Dépêchons-nous.
― Où est-il, Black ? rageait Fanny en revenant dans leur direction d'une allure effrayante. Dis-moi où il a filé !
― Il a déguerpi au château ! mentit Sirius d'un air désinvolte. Si tu cours assez vite, tu pourras peut-être le rattraper !
Remus crispa le visage avec regret pendant qu'il regardait Fanny s'éloigner en poussant des jurons, puis il se glissa à la base du tronc où s'ouvrait un grand trou entre les racines. Un instant plus tard, Sirius le rejoignit en allumant sa baguette pour éclairer le tunnel au plafond bas. Remus retira la cape de sa tête et ils s'engagèrent le long du passage qui menait à la Cabane hurlante.
― Je suis vraiment pitoyable, déplora Remus.
― Tu as vu sa tête ? ricana Sirius. Tu l'as bien rembarrée, la Karline.
― Je suis définitivement en train de la perdre, gémit Remus en sentant ses entrailles se nouer. J'étais presque parvenu à être le petit ami idéal pour elle et voilà que cette journée est en train de tout bousiller notre relation. Qu'est-ce que je vais faire sans elle, Patmol ? Fanny est la femme de ma vie ! La seule qui m'aime !
Sirius resta silencieux durant un bon moment, avant de murmurer tout bas :
― Tout va s'arranger, Lunard, t'inquiète…
Une fois revenus dans le sombre salon aux fenêtres barricadées, ils revirent le désordre qu'ils avaient causé hier, les bouteilles vides qui s'éparpillaient partout et le morceau de rideau déchiré abandonné près du tapis mangé aux mites devant le foyer calciné. Peter, encore sous sa forme de rat, disparaissait sous les restes d'un meuble fracassé.
― Bon, dit Sirius en se frottant les mains, déterminé. Ramenons cette plante au plus vite pour qu'on puisse retourner au château et interroger enfin les Serpentard… et peut-être aussi dîner, parce que je commence à avoir faim, moi…
― Je suis d'accord, mais comment ? interrogea Remus sans confiance. Quand tu as essayé de la stupéfixer ce matin, ton sort a rebondi sur ses pétales. Chourave a dû lui jeter des protections pour empêcher que quiconque froisse ses pétales, justement. Slughorn disait l'autre jour, en cours, que les pétales d'un Géranium Dentu étaient des ingrédients de potion très recherchés, et plus ils sont gros, plus ils sont efficaces. Cette plante est définitivement très précieuse.
― Une plante précieuse protégée contre les sorts, récapitula Sirius en se grattant le sourcil. Donc, si je comprends bien, on va se faire chier à essayer d'attraper ça à mains nues et se prendre toutes les morsures. C'est ça que ça veut dire ?
Remus soupira en levant les épaules d'un air désemparé.
― Je me demande surtout comment on a fait pour amener cette plante ici sans se faire tuer, dit-il. On n'a même pas de traces de morsures.
― C'est vrai, s'étonna Sirius. À part tes traces de dents sur ma main, je n'ai aucune autre blessure, aucune trace de crocs de Géranium Dentu.
― Qu'est-ce qu'on fait, alors ? demanda Remus. Comment on s'y prend ?
Sirius se frotta la tête en réfléchissant, puis jeta des regards noirs dans la sombre pièce.
― Queudver ? appela-t-il durement. Arrête de te cacher et reprends ta forme normale, crétin.
Un infime couinement répondit près du foyer. Sirius visa aussitôt les lambeaux du rideau de sa baguette et y envoya un éclair bleu. Des formes gonflèrent sous le tissu, comme un drôle de ballon de baudruche, et Peter apparut une seconde plus tard en retirant le rideau de sa tête.
― Vous allez vous venger en m'envoyant tout seul chercher la plante, hein ? se méfia-t-il en fronçant les sourcils, sur la défensive.
― Je n'y avais pas encore réfléchi, mais c'est une bonne idée, admit Sirius qui sourit en coin.
― Eh bien, je n'irai pas ! gémit Peter en se croisant les bras.
― Oh que si ! affirma Sirius. C'est ta faute, tout ça ! Si tu n'avais pas fait de bêtises en nous infligeant ce poison que tu ne connaissais même pas en plus, nous ne serions pas là en train de subir la pire journée de notre vie ! Alors, tu vas ramasser ton gros derrière et monter là-haut !
― Patmol, il va se faire tuer, intervint Remus avec un soupir las. Ce serait plus prudent si c'était nous qui…
Sirius l'interrompit d'un grand rire sans joie.
― Pas question ! s'obstina-t-il avec colère. Vois tout ce qu'il a provoqué ! Il mérite d'aller se faire mordre par cette plante !
― Patmol, sois raisonnable ! dit Remus en sortant sa baguette. J'y vais le premier. Je vais tester d'autres sorts pour voir si ce n'est pas juste le sortilège de stupéfixion qui ne marche pas…
Sirius poussa une exclamation agacée, fusilla Peter des yeux et talonna Remus dans l'escalier délabré.
Le silence régnait à l'étage. La plante devait dormir. Avec précaution, Remus poussa lentement la porte et regarda dans l'entrebâillement. Une silhouette feuillue se profilait au pied du grand lit à baldaquin. La plante était énorme, plus grosse qu'un Géranium Dentu ordinaire. Le professeur Chourave avait dû utiliser de l'engrais de qualité pour arriver à un tel résultat.
― Tu vas essayer quel sort ? chuchota Sirius qui tenait aussi sa baguette prête.
― Je ne sais pas, répondit Remus. Un sort qui ne lui fera pas de mal. Peut-être un sort de lévitation ?
― Bonne idée, approuva Sirius. Comme ça, on pourra la transporter à distance de nous sans qu'elle nous mordre.
Encouragé, Remus ouvrit la porte un peu plus grand, pointa sa baguette sur la plante endormie et prononça la formule à voix basse :
― Wingardium Leviosa !
Dans un éclair éblouissant, le sort illumina un court moment la chambre, ainsi que le bleu vif des pétales du Géranium Dentu sur lesquels il ricocha en produisant une pluie d'étincelles. La plante ne décolla pas du plancher, bien plantée dans son pot. En revanche, elle se réveilla en sursaut, la tige raidie de fureur, et ouvrit grand son pistil en dévoilant ses crocs monstrueux.
― Merde, ça n'a pas marché, constata Remus.
― Referme la porte avant qu'elle nous saute dessus ! paniqua Sirius.
Pendant que la plante, dans une série de claquements sourds, sautillait avec son pot dans leur direction, Remus s'empressa de refermer la porte de justesse. Il y eut un grand bruit lorsque la plante s'écrasa contre le panneau pourri.
― Si même ce sortilège ne fonctionne pas, on est fichus, haleta Remus pendant que feulait la plante de l'autre côté.
― Putain de Merlin de merde ! jura Sirius en donnant un coup de poing dans le mur. Qu'est-ce qu'on va dire à Chourave si on ne peut pas lui ramener son démon de fleur ?
Peter monta alors l'escalier en silence, le rideau à moitié déchiré en amas sous son bras. La tête basse, il leur lança un regard oblique, puis défroissa le rideau devant la porte. La vieille étoffe poussiéreuse était trouée, mais gardait néanmoins de grands endroits encore indemnes.
― Ouvrez la porte, je vais l'aveugler avec ça, dit-il d'une voix mourante.
― Aveugler de quelle façon ? demanda Sirius avec mépris. Elle n'a pas d'yeux ! Elle est déjà aveugle !
― Le rideau va la distraire, expliqua Peter.
― Ça va juste la rendre encore plus enragée, s'obstina Sirius.
Peter le regarda sans plus rien dire, comme s'il n'avait aucune réelle intention d'insister. Après tout, il était vrai que son idée était risquée. Cependant, Remus réfléchit.
― Il a raison, ça pourrait effectivement la distraire, dit Remus après un moment. De toute façon, on n'a pas de meilleure idée. Je doute que Chourave se montre indulgente si on lui explique qu'on ne se souvient pas comment on a fait pour transporter cette plante sans se faire attaquer.
― On aurait qu'à lui raconter quel genre de connerie a fait Queudver en nous empoisonnant ! répliqua Sirius avec énervement.
― Tu veux vraiment le dénoncer ? s'agaça Remus. Ce qu'a fait Queudver est révoltant, c'est vrai, mais il se trouve qu'il fait partie de notre bande. On s'entend qu'on aura beaucoup moins de chance d'être disculpés si on apprend que la bêtise provient de l'un de nous, si ce n'est pas quelqu'un d'autre qui nous a jeté un maléfice.
Peter soupira avec ennui et alla tourner la poignée.
― Toi, n'ouvre pas ça ! s'affola Sirius en se jetant en avant.
Mais la plante s'était déjà faufilée dans l'entrebâillement et s'extirpa sur le palier en ouvrant et refermant la bouche d'un air vorace. Sirius et Remus s'éloignèrent précipitamment avec effroi. Remus empoigna inutilement sa baguette, mais Peter avait déjà jeté le rideau sur les pétales du Géranium Dentu qui se rétracta aussitôt au-dessus de son pot.
― Voilà, dit calmement Peter, satisfait. Elle réagit encore mieux que je le pensais.
Sous le rideau, la plante tremblotait de toutes ses feuilles comme si elle croyait avoir été victime d'un prédateur herbivore. Peter la contourna tranquillement, se plaça derrière elle et souleva le pot de terre de toutes ses forces. Remus et Sirius se hâtèrent de l'aider. Sirius paraissait déconcerté, mais ne posa pas de questions tout de suite. Ensemble, ils descendirent la plante dans l'escalier, traversèrent le désordre du salon, puis s'engouffrèrent dans le tunnel en direction du château.
― Comment savais-tu qu'elle réagirait comme ça ? demanda enfin Sirius d'un air méfiant, haletant, tandis qu'ils transportaient le lourd Géranium Dentu de peine et de misère.
― Je n'en savais rien, répondit Peter en marmonnant. J'ai juste eu cette idée tout à l'heure après m'être retrouvé moi-même sous le rideau.
― Tu es sûr que tu n'as pas gardé un peu de mémoire de la veille ?
― Pas du tout ! Je suis aussi amnésique que vous ! Moi aussi j'ai bu de cette potion…
Ils arrivèrent sous les racines du Saule cogneur à bout de force. Après avoir discuté d'un plan pour se sortir de là sans être vus des élèves dans le parc, Peter prit la cape que lui tendit Remus, la fourra dans sa poche, puis se métamorphosa avec un bruit aigu. Remus eut tout juste le temps d'apercevoir une queue qui ressemblait à un lombric avant que le rat ne se faufile à l'extérieur du Saule cogneur. Dans la pénombre au bout du tunnel, ils attendirent ensuite patiemment le signal de Peter, tout en surveillant la plante sous le rideau pour s'assurer qu'elle reste tranquille.
― Je pus à force de suer, merde, grommela Sirius en s'essuyant le front de sa manche. Ça va être la course folle tout à l'heure quand il faudra se rendre à temps à la fête, propres et habillés.
― J'espère qu'on pourra y aller avec Cornedrue, dit Remus qui humait également des odeurs désagréables venant de ses propres aisselles. J'espère aussi que les Serpentard sont encore à la Grande Salle.
― C'est bon ! s'écria Peter à l'entrée du tunnel. Personne ne regarde ! Dépêchez-vous !
Aussitôt, Remus et Sirius se saisirent de nouveau du pot de fleurs et soulevèrent la plante vers Peter dont les mains surgissaient de la cape d'invisibilité dans le trou du tronc. Remus regarda avec inquiétude le pot s'enfoncer dans l'ouverture et pria pour que la plante ne recommence pas à vouloir les mordre. Un instant plus tard, Peter revint dans le tunnel pour leur redonner la cape et Remus la déploya sur sa tête et celle de Sirius. Derrière Peter qui était redevenu un rat, ils rampèrent vers la surface en mêlant leur sueur et sortirent enfin dans l'air frais du parc.
― Oh, putain ! se plaignit Sirius en sortant de sous la cape dès qu'il put le faire derrière un fourré proche. Je suis trop crevé, j'en ai marre !
Remus acquiesça en s'étirant. Ses muscles étaient épuisés et les ampoules dans ses mains s'étaient aggravées. Si ce n'était pas de la gravité de la situation qui les pressait à continuer, il se serait volontiers rendu sous le grand hêtre près du lac pour profiter d'une longue sieste tranquille.
― Lunard, tu es où ? demanda Sirius en tournant sur lui-même. Aide-nous à transporter ça aux serres.
Remus, qui était resté sous la cape, réprima sa fatigue et s'approcha. La plante continuait de se recroqueviller sous le rideau sans oser bouger, ce qui était tant mieux. Sirius se tenait d'un côté du gros pot et Peter de l'autre.
― Heu…, fit Remus en regardant en direction du château. Si ça ne vous dérange pas, les gars, je vais rester sous la cape. Je n'ai pas envie de recroiser Fanny.
― Comme tu veux, dit Sirius. Mais on va passer par-derrière. Il y a toujours moins de monde derrière le château.
Ensemble, ils soulevèrent à nouveau le lourd pot de terre et se déplacèrent en direction des serres, en s'éloignant du lac. Quelques élèves croisèrent néanmoins leur chemin et les regardèrent passer d'un air curieux.
― J'imagine qu'on a l'air idiot, murmura Remus qui suivait derrière en tenant le pot entre les deux autres.
― Tu veux dire Queudver et moi, on a l'air idiot, corrigea Sirius. Toi, personne ne te voit sous la cape… C'est complètement dingue tout ce qui nous arrive aujourd'hui. D'ailleurs, comment Chourave a su que c'était nous qui avions sa plante ?
― Bah, c'est évident, non ? haleta Peter, la respiration sifflante. Servilus doit être au courant de bien des trucs sur ce qui s'est passé hier. Ce n'est pas lui qui était avec ça dans la chambre en haut ?
― J'ai trop hâte de mettre la main sur Servilus, grinça Sirius d'un ton menaçant. On n'était pas dans notre état normal hier, mais lui, oui. Il aurait dû nous repousser au lieu de profiter de nous…
Remus eut une exclamation perturbée.
― Il n'a pas profité de nous ! protesta-t-il. Tu l'as dit toi-même tantôt, on l'a sûrement forcé.
― Je repense à ce qu'il y avait d'écrit sur le mur, voilà tout.
― C'est vrai, je me rappelle, dit Peter en étouffant un petit rire moqueur : « Servilus s'est abandonné avec plaisir dans la bouche de Lunard. »
― Ah, non, ce n'était pas écrit ça aussi ! s'horrifia Remus en réprimant un violent haut-le-cœur.
― Tu ne l'avais pas lu ? s'étonna Peter.
― J'en avais déjà trop lu !
Remus secoua la tête sous la cape pour chasser toute image mentale susceptible de le traumatiser. C'était impossible qu'il soit allé jusque-là. Si Sirius était convaincu de la véracité des messages, Remus, quant à lui, continuait de croire qu'ils s'agissaient de pures balivernes. Même soûl, il en était certain, il n'aurait jamais touché Rogue de cette manière ― quoique McGonagall non plus. Soudain, une montée de chaleur désagréable s'insinua dans sa nuque. Pourvu, vraiment, qu'ils n'aient pas fait tout ce qui avait été inscrit sur ce mur du cachot.
Quelques minutes plus tard, ils pénétrèrent dans la serre numéro 3 en ouvrant la porte bruyamment, à bout de souffle. Sous le plafond vitré qui filtrait les faibles rayons rougeoyants du soleil, ils laissèrent tomber le pot par terre, puis le traînèrent en direction des autres plantes carnivores au fond de la serre. Remus trébucha contre une branche noueuse et tomba au pied d'un Snargalouf qui l'enroula immédiatement d'un long tentacule épineux.
― Impedimenta ! s'écria aussitôt Sirius en brandissant sa baguette.
Le Snargalouf se figea avant de rétracter ses tentacules en ne ressemblant plus qu'à une vieille souche inoffensive. Remus remercia Sirius et put se relever en ramassant la cape qui avait glissé de ses épaules.
― J'enlève cent points à Gryffondor ! lança soudain une voix forte qui les fit sursauter dans un même mouvement. Et si vous malmenez une seule autre de mes plantes, ce sera une retenue tous les soirs jusqu'à la fin de l'année !
Remus fourra rapidement la cape dans sa poche et se retourna avec les autres. Le professeur Chourave longeait une rangée de pousses de mandragores en s'avançant vers eux, le visage colérique dans l'ombre de son chapeau rapiécé.
― Mais bien sûr, reprit-elle en les scrutant tour à tour, les yeux plissés. Je parle du Snargalouf. Concernant mon Géranium Dentu, la punition dépendra de l'histoire que vous m'inventerez pour expliquer son enlèvement.
D'un geste vif, elle retira le vieux rideau du Géranium Dentu qui s'agita aussitôt avec fureur. Remus, Sirius et Peter exécutèrent un bond en arrière au même moment. La plante aux pétales bleu outremer manifesta tout son désir de se jeter sur eux et de leur déchirer la peau de ses crocs, mais lorsque le professeur Chourave passa la main le long de sa tige en lui effleurant les feuilles, elle se détendit instantanément en refermant le pistil.
― Alors ? demanda le professeur Chourave en continuant de caresser sa plante de ses doigts courts et sales de terre. Je vous écoute.
― Heu…, fit Remus en échangeant un regard dérouté avec Sirius. En fait, on… on ne sait pas très bien ce qui nous a pris…
― On a perdu la mémoire ce matin et on n'a pas la moindre idée de ce qui a bien pu se passer ici hier soir, révéla spontanément Sirius, sans doute parce que la vérité lui semblait moins fatigante à dire que d'essayer de s'en tirer avec des mensonges. Alors, pour l'explication, on est désolés, mais on n'en a pas.
Peter regarda Sirius en se rongeant un ongle, comme s'il craignait d'être dénoncé, mais Sirius ne parla pas de la potion responsable de leurs bêtises.
Le professeur Chourave hocha la tête d'un air déçu, son chapeau tanguant sur son épaisse tignasse.
― D'habitude, vous êtes plus créatifs que ça, mes petits, dit-elle, tandis que le Géranium Dentu semblait ronronner sous sa main.
― C'est la vérité, affirma Sirius en se massant le front d'un air las. On ne sait pas du tout ce qui s'est passé ni pourquoi on a volé cette plante. Je ne vois pas non plus en quoi elle nous aurait été utile. Elle a failli nous mordre à plusieurs reprises. J'imagine que c'est Rogue qui vous a dit que c'était nous ?
― Rogue ? s'étonna le professeur Chourave. Il est dans le coup lui aussi ?
― C'est sûr. Il avait un comportement très louche ce matin.
Remus laissa échapper un infime gémissement, mal à l'aise. Certes, s'ils s'étaient amusés avec Rogue dans le cachot avant de se rendre dans les serres, ils devaient forcément l'avoir emmené avec eux. Mais de là à dire qu'il était dans le coup… ?
― Bon, d'accord, on n'en sait rien, avoua Sirius en croisant le regard d'avertissement de Remus. On n'accuse personne. Je fais juste dire que Rogue était louche. Mais si ce n'est pas Rogue qui vous a dit que c'était nous, alors, c'est qui ?
― Vous essayez vraiment de me faire croire que vous avez perdu la mémoire ? dit le professeur Chourave en fronçant le nez avec incrédulité. Vous ne manquez vraiment pas de culot.
― Mais c'est vrai ! répéta Sirius d'un ton découragé.
― Vous êtes entrés ici au milieu de la nuit, comme des bandits, vous avez abîmé les branches de mon bosquet d'arbrisseaux autofertilisants comme si vous y avez accroché quelque chose de lourd, vous avez marché dans mes Bubobulbs et vous avez agressé de façon extrêmement obscène mon Géranium Dentu avant de repartir avec lui.
Il y eut un silence, durant lequel on n'entendit que les bruits de succion que produisait le Géranium Dentu en suçotant affectueusement un morceau de manche du professeur Chourave. Remus déglutit.
― Heu…, hésita-t-il. Agressé comment… ?
― Ne me forcez pas à décrire vos actes abominables.
― Mais il n'a pas l'air si ébranlé que ça, remarqua Sirius.
Le professeur Chourave le fit taire d'un œil menaçant. Un second silence s'ensuivit, empreint de malaises exacerbés, puis Sirius s'impatienta :
― Mais je ne comprends toujours pas ! Comment avez-vous pu savoir que c'était nous ? Ensorcelez-vous vos serres la nuit avec un quelconque sortilège de révélation ou quoi ?
― Vous avez laissé des traces, expliqua enfin le professeur Chourave en fronçant à nouveau le nez, comme s'ils la dégoûtaient au plus haut point. Et je ne parle pas des traces laissées dans mes Bubobulbs.
Devant leur air perplexe, elle pointa alors du doigt, aux pieds d'une longue table surchargée de plants de dictame, par terre, de petites éclaboussures d'une substance laiteuse qui avait séché et caillé. Remus pensa que ce devait être du pus de Bubobulbs, même si la substance en question était loin d'être vert jaunâtre comme elle aurait dû plutôt l'être.
― Voilà ce qui appartient à Mr Pettigrow, déclara le professeur Chourave avant de se tourner de tout son corps potelé vers Peter. J'étais plus qu'outrée et répugnée quand ma baguette m'a révélé votre identité mêlée à la salive de mon pauvre Géranium Dentu…
― Quoi ? fit Peter d'une voix étouffée. Comment ? Qu'est-ce qui m'appartient au juste ?
― Oh, putain…, murmura Sirius qui se plaqua une main dans le visage, comprenant plus vite que lui. Putain, putain…
― Surveillez votre langage, Black, gronda le professeur Chourave en arrondissant les yeux.
― Mais attendez, reprit Sirius en réprimant un brusque un fou rire. Vous êtes en train de me dire que… que ces traces-là, c'est… c'est la semence de… ?
Remus soupira de malaise en réalisant à son tour que ces éclaboussures séchées n'avaient définitivement rien à voir avec le pus de Bubobulbs. Peter le comprit enfin également.
― Ah, non ! s'exclama-t-il avec horreur. Ne me dites pas que… c'est la plante qui m'a… ?
Sirius éclata d'un rire franc et ouvertement moqueur en pleine face de Peter. Le professeur Chourave continuait à écarquiller les yeux d'indignation, mais plus personne ne lui accordait son attention. Le Géranium Dentu cessa de sucer net la mache de sa maîtresse et regarda ce qui se passait d'un air surpris.
― Alors, c'était ça ! s'esclaffait Sirius en continuant de faire résonner ses rires parmi les plantes de la serre. On est venus ici pour je-ne-sais-trop-quoi, on a accroché Rogue dans le buisson et tu t'es alors épris de la plante !
― On n'est pas sûrs que ce soit ça ! protesta Peter, tandis que Remus fermait les yeux de gêne devant le professeur Chourave.
― C'est évident ! affirma Sirius d'un air triomphant, comme s'il jubilait que Peter ait enfin sa part de malaise dans cette histoire. Ce devait être la première fois que ça t'arrivait et alors tu as décidé d'amener la plante avec toi pour en faire ta petite amie. Tu t'es toujours plus intéressé aux plantes que nous, de toute façon. Tu as ensuite passé toute la nuit à recommencer ! Pas étonnant que tu sois enflé !
― Patmol…, marmonna Remus en serrant les mâchoires. Je te rappelle qu'on est toujours en présence d'un professeur…
Sirius renifla avec indifférence.
― Elle est déjà au courant, jeta-t-il.
― Effectivement, dit le professeur Chourave qui étira alors un drôle de sourire sur ses lèvres. Comme je suis au courant que vous avez aussi agressé ma plante, Mr Black.
― Quoi ? s'étrangla Sirius qui cessa net de ricaner.
― Ce qui vous appartient à vous se trouve dans ces crachats juste ici, auprès du Snargalouf, et Potter est allé semer dans les Ravegourdes plus loin.
― Ha ! s'esclaffa Peter sur ton de vengeance. Voilà ! Tu n'es pas mieux que moi !
― Noooooooon ! hurla Sirius en s'empoignant les cheveux à pleines mains, éminemment horrifié.
Il pivota sur ses talons et courut à l'autre bout de la serre où il s'agrippa aux branches d'une épaisse plante grimpante.
― Black ! s'écria le professeur Chourave en se précipitant vers lui. Mais que faites-vous, nom de dieu ?
― Il essaie de se pendre, déduisit Remus en regardant Sirius passer une longue tige flexible autour de son cou.
― Descendez de là, ne soyez pas ridicule !
Après plusieurs tentatives acharnées de le ramener à la raison, le professeur Chourave parvint à décrocher Sirius du lierre.
― Mais qu'est-ce qui vous prend ? demanda-t-elle, ébranlée, en le débarrassant des épines qui s'étaient accrochées à ses vêtements.
― Je ne peux pas avoir fait ça avec une plante, gémit Sirius, échevelé, traumatisé. C'est n'importe quoi ! Vous êtes sûre que votre baguette ne vous a pas fait une blague ?
― Ce sont bel et bien des crachats de Géranium Dentu qui contiennent votre code génétique, je suis désolée, dit le professeur Chourave dont le visage avait abandonné toute expression de reproche pour manifester plutôt de l'inquiétude. La plante a été déplacée à quelques endroits avant d'avoir été traînée à l'extérieur.
― Est-ce que mon… heu…, hésita Remus avec appréhension, mon code génétique se trouvait aussi dans les crachats… ?
― Non, répondit le professeur Chourave avec un bref sourire. On dirait que vous avez été le plus sage, comme d'habitude. Mais qu'est-ce qui a bien pu se passer pour que vous ayez commis de tels actes avant de perdre la mémoire le lendemain ?
Remus soupira de soulagement. Non seulement il pouvait récupérer un peu de dignité dans cette histoire de plante agressée, mais le professeur Chourave les croyait maintenant.
― C'est la quête qu'on mène depuis ce matin, expliqua Remus pendant que Sirius peinait à retrouver ses esprits. Il semblerait que quelqu'un ait versé une quelconque potion dans nos verres hier soir et maintenant on essaie de découvrir tout ce qu'on a fait de stupide à cause de ce poison. Le professeur McGonagall est au courant. Mais ne lui parlez pas du Géranium Dentu, s'il vous plaît. C'est déjà assez gênant comme ça sans qu'elle sache cette histoire en plus.
― Hum…, fit le professeur Chourave en les observant d'un air compréhensif. Je vois, je vois… C'est très ennuyeux… Soyez tranquilles, je passerai votre petite mésaventure sous silence si vous le voulez…
― Merci, dit Remus avec un profond élan de reconnaissance. Merci beaucoup, professeur.
― C'est moi qui vous remercie de m'avoir rapporté ma plante. Je suis heureuse de constater qu'elle ne garde aucune séquelle de son enlèvement. De toute façon, je ne crois pas qu'elle ait vraiment souffert. Elle a toujours été plus affectueuse que les autres et j'avais bien remarqué qu'elle aimait beaucoup téter ce qui lui tombait sous le pistil.
Le Géranium Dentu, auprès du Snargalouf, suçotait à présent l'une des branches de ce dernier, semblable à un veau, et Peter le fixait avec une expression proche de l'agonie.
― Mais que je ne vous vois pas revenir ici et profiter d'elle à nouveau, reprit le professeur Chourave en les pointant d'un doigt menaçant et encrassé de terre, parce que je ne serai pas aussi indulgente la prochaine fois.
― Oh, vous n'avez vraiment pas à vous inquiéter, dit Sirius qui était revenu à lui et qui ricanait d'un air un peu fou. Je ne veux même plus regarder cette plante en face.
― Partez, maintenant. Je dois m'occuper de mes Bubobulbs à moitié écrasés.
Un peu plus tard, Remus, Sirius et Peter regagnèrent le château en marchant d'un pas automatique, les yeux dans le vague. Aucun d'eux n'avait envie de parler. Ils ne savaient plus quoi dire de toute façon. En consultant la carte du Maraudeur, ils avaient constaté que les Serpentard étaient retournés dans leur salle commune, sûrement dans le but de se préparer pour la fête de Slughorn. Et eux n'avaient toujours pas retrouvé Cornedrue. Le dîner s'était terminé avant qu'ils n'aient pu se servir quoi que ce soit, ils étaient affamés, épuisés et découragés. De plus, Remus ne cessait de jeter des regards nerveux autour de lui, craintif de voir resurgir Fanny. Elle devait encore le chercher et il ne savait toujours pas ce qu'il lui dirait pour se justifier de l'avoir quittée brusquement dans le parc. Lily Evans devait également être déçue, elle qui croyait que l'attitude de James Potter avait changé alors qu'il venait de passer une nuit des plus épouvantables en compagnie de ses amis, à commettre les plus horribles bêtises. C'était un fait : Remus ne voyait plus du tout comment remédier à tout ce désordre.
― Je… je m'excuse…, couina enfin Peter, tandis qu'ils descendaient machinalement aux sous-sols. Je n'aurais jamais dû faire ça… J'ai été stupide… Je voulais juste m'amuser un peu comme dans le temps… Je ne m'attendais pas du tout à ce que tout vire au cauchemar…
― Il est trop tard pour les regrets, dit froidement Sirius.
Remus, quant à lui, consentit à adresser un faible sourire à Peter pour lui communiquer sa compassion. Après tout, ce dernier n'avait eu que de bonnes intentions. Il avait simplement été maladroit, comme cela pouvait lui arriver souvent. L'important était qu'il reconnaisse son erreur, qu'il le regrette et qu'il se promette de ne plus jamais agir dans leur dos, ce dont Remus était confiant. Peter, au fond, était un bon ami.
― Servilus…, articula tout à coup Sirius entre ses dents.
Remus eut tout juste le temps de voir une silhouette noire, au bout du couloir, s'enfuir en tournant un coin de mur. Sirius s'élança aussitôt, la baguette brandie, et dès qu'il s'engouffra dans l'autre couloir à la suite de Rogue, jeta un sort d'entrave. Il y eut un bruit de bousculade, comme si Rogue venait de trébucher contre une armure.
― Je te tiens, espèce de sale crasseux ! s'écria Sirius en poursuivant sur sa lancée.
Remus et Peter se précipitèrent en avant pour les rejoindre. Sirius avait plaqué Rogue contre le mur de brique, la main à sa gorge, le bout de sa baguette enfoncée sous son menton. Le teint cireux de Rogue avait rougi de colère et sa respiration s'alourdissait et s'étranglait sous la poigne de son agresseur.
― Maintenant, tu vas me dire où est Cornedrue, menaça Sirius, le nez tout près du sien. Parle !
― Je… je ne sais pas où il est…, répondit Rogue d'une voix suffoquée, les yeux luisants de haine profonde.
― Tu mens ! éructa Sirius en étouffant la voix pour s'empêcher de crier.
Le couloir dans lequel ils se trouvaient était désert, mais quelqu'un pouvait toujours s'y amener. Remus lança des regards inquiets de chaque côté, souhaitant que tout se passe bien.
― Si tu ne parles pas, Servilus, je te jure que tu vas le regretter, menaça Sirius qu'observait Peter avec une admiration manifeste.
― Ah oui ? ricana Rogue, sarcastique. Vous allez me faire quoi maintenant ?
Son regard noir étincelait et Remus éprouva comme une décharge électrique en repensant aux déclarations écrites sur le mur du cachot. Sirius dut penser à la même chose, car il s'éloigna tout à coup en retirant la main. Devant leur malaise subit, Rogue se redressa contre le mur d'un air satisfait.
― Commencez par me rendre ce que vous m'avez volé, dit-il d'un ton doucereux, et peut-être que je parlerai…
Merci d'avoir lu ! :)
La suite bientôt...
