Chapitre 03 : Lily Evans

Lily était une jeune fille tout à fait normale, vivant dans une maison des plus normales avec une famille normale.

Pas vraiment en fait, puisque Lily avait la fâcheuse tendance à faire se produire des choses étranges autour d'elle, puisque sa maison faisait des bruits bizarres la nuit, et puisque sa sœur était quelque peu stupide et méchante.

Ce fut donc (plus ou moins) normalement que Lily se réveilla ce matin de juillet. Le soleil, levé depuis quelques heures seulement, faisait des reflets rouges dans la chevelure rousse foncée de la jeune fille. Elle évita de remarquer qu'elle avait envoyé valser son réveil sans même l'avoir touché, se disant qu'elle avait dû faire un mouvement du bras dans son sommeil. Dans ce cas là pourquoi l'avait-elle entendu sonner juste à côté d'elle ? 'Parce que !' se répondit-elle. Et puis de toute façon, c'était bien fait pour lui, à ce faux ami qui la réveillait tous les jours à huit heures alors qu'elle était en vacances. Bon, d'accord, c'était elle qui voulait se lever aussi tôt pour profiter pleinement de ses vacances. Mais il n'avait qu'à oublier de sonner !

Ce fut donc mi-en colère, mi-heureuse qu'elle sortit de son lit pour aller déjeuner. Elle embrassa sa mère qui lisait son journal, puis son père en train de faire des crêpes. Mr Evans, 'le roi de la crêpe', comme il aimait se surnommer, adorait faire le petit déjeuné, mais surtout le manger ensuite !

Lily s'assit en face de sa mère tandis que son père posait une assiette de crêpes devant elle.

'Alors, tu vas faire quoi aujourd'hui ?' demanda Mrs Evans par-dessus son journal.

Lily réfléchit un instant.

'Je ne sais pas encore, j'irai peut-être jouer chez Maria.'

Maria Kend était une copine à elle, mais elles allaient bientôt être séparées. Les Kend déménageaient dans l'Etat de New York, à cause du travail de la mère de Maria.

Après avoir copieusement déjeuné, Lily partit prendre sa douche. Quand elle retourna à la cuisine sa grande sœur Pétunia venait de se lever avec son éternelle mauvaise humeur. Bien que de cinq ans son aînée, Pétunia éprouvait une jalousie maladive à l'égard de sa sœur. Ses superbes yeux, ses cheveux magnifiques, ses excellents résultats scolaires, tout était un prétexte pour éveiller son envie. Bien sûr, jamais elle n'aurait avoué être jalouse.

Se forçant tout de même à être gentille devant ses parents, elle salua plus ou moins froidement sa sœur. C'est alors que ça arriva. L'événement qui allait perturber toute la petite vie tranquille (et normale) de Lily. La sonnette de l'entrée retentit.

'Lily, tu peux aller voir qui c'est ?'

Obéissant docilement à la demande de son père, elle alla ouvrir.

C'était un vieil homme avec de longs cheveux argentés et une longue barbe assortie. Des yeux bleus laissant entrevoir son éternel caractère enjoué derrière des lunettes en demi-lune. Etrangement vêtu d'un pantalon de jogging vert et d'une chemise de golf de la même couleur. Il émanait de lui une aura de puissance, et Lily sentit tout de suite qu'il s'agissait d'un homme en qui on pouvait avoir confiance.

'Bonjour' dit-il. 'Tu es Lily Evans.' Ce n'était pas une question mais plutôt une remarque. 'Je voudrais te parler, ainsi qu'à tes parents.'

Laissant l'homme attendre sur le pallier, Lily alla chercher ses parents, qui invitèrent chaleureusement le vieil homme à entrer. Ils s'installèrent dans le salon, l'homme sur un fauteuil, Lily et ses parents sur le canapé.

'Je suis Albus Dumbledore, directeur de l'école de sorcellerie de Poudlard.'

Mr et Mrs Evans le regardèrent, stupéfaits. Dumbledore n'avait pourtant pas l'air fou. Mais comment reconnaît-on un malade ? Ce n'est pas toujours écrit sur leurs fronts.

'Vous vous sentez bien, Mr Dumbledore ?' demanda Mrs Evans.

Il éclata d'un rire joyeux.

'Tout va bien pour moi, merci de votre sollicitude. Je suis venu vous annoncer que Miss Lily Evans, ici présente, et une sorcière et qu'elle a donc sa place à Poudlard pour apprendre tout l'art de la sorcellerie.'

Mr Evans eut un tic nerveux. Comment avait-il pu inviter ce fou à entrer chez lui ? Mais en même temps, il était difficile de penser à cet homme comme à un fou.

Lily intervint, voyant ses parents muets de stupeur.

'Mr Dumbledore…'

'Professeur Dumbledore, je préfère' corrigea Dumbledore avec un sourire chaleureux.

'Professeur Dumbledore, la sorcellerie n'existe pas.'

Toujours souriant, Dumbledore sortit une baguette en bois de sa poche et l'agita négligemment. La table basse se métamorphosa alors en un Phacochère des plus magnifique, reniflant la moquette du salon.

Pétunia, qui était debout à côté de la porte, poussa un hurlement de terreur et s'enfuit en courant dans sa chambre. Mr et Mrs Evans regardaient l'animal avec leur maintenant-habituelle expression abasourdie. Un autre mouvement identique, et la table redevint table.

'Bon' concéda Lily. 'Peut-être que la magie existe. Mais je ne suis pas une sorcière.'

Avec un petit sourire entendu, Dumbledore lui demanda :

'N'as-tu jamais remarqué de phénomènes étranges se déroulant autour de toi ?'

Bon d'accord, peut-être était-elle une sorcière. Ou peut-être était-elle tout bonnement en train de rêver. Elle se pinça discrètement pour vérifier, mais la douleur lui prouva qu'elle était bel et bien réveillée.

Mrs Evans laissa alors échapper un cri. Paniquée à l'idée que sa propre mère ait peur d'elle, elle se tourna. Mais ce n'était pas de la peur qu'on voyait sur son visage, mais une immense joie. Son père maîtrisait mieux son excitation, mais semblait tout aussi enjoué.

'C'est vraiment génial ! Ma petite Lily est une sorcière ! Je suis tellement fière de toi ! Je savais que tu étais spéciale, mais à ce point là !'

Dumbledore sourit gentiment.

'Vous n'aurez donc aucun problème à la laisser venir étudier à Poudlard ?'

'Non, non, bien sûr que non !' dit Mr Evans. 'Mais dites-moi, vous êtes le directeur ? Pourquoi venez-vous nous avertir vous-même ?'

Sans se départir de son sourire, Dumbledore répondit.

'Je veux juste mieux connaître mes futurs élèves et leurs familles. Spécialement ceux qui sont d'origine Moldu' devant l'air perplexe des Evans (parents et enfant réunis), il précisa 'Les gens qui n'ont pas de pouvoir magique.'

'Et vous faites ça tous les ans ?' demanda Mr Evans avec curiosité.

'Non, je viens d'être nommé directeur. Bon, ce n'est pas que vous m'ennuyez, mais j'ai d'autres enfants à voir.'

Il leur tendit une épaisse enveloppe.

'Tout ce dont vous avez besoin de savoir se trouve ici. Bon après midi.'

Et il partit, sans rien dire de plus.

En entendant la porte d'entrée claquer, Pétunia retourna au salon et regarda sa sœur avec horreur. Ses parents ne s'en rendirent pas compte, trop occupés à regarder le contenu de l'enveloppe.

Il y avait une lettre d'admission à Poudlard, rédigée par un certain B. Steevens, une liste de fournitures scolaires. Un instant paniqués à l'idée de ne pas savoir où trouver les articles, Mr et Mrs Evans se regardèrent. Ils finirent pas remarquer un bout de parchemin avec l'adresse du chemin de Traverse (un endroit où ils trouveraient les fournitures). Ils sortirent également un billet de train avec la date et l'heure du départ du Poudlard Express, ainsi que le numéro de quai.

'Numéro 9 ¾ ?' répéta Mr Evans. 'Ça existe ?'

Mrs Evans haussa les épaules en signe d'ignorance.

Ils étaient tellement excités qu'ils ne voyaient pas que Lily n'avait dit un mot depuis qu'elle avait appris la nouvelle.

'Une sorcière ? Mais quelle horreur' fit Pétunia avec une grimace.

Mrs Evans sursauta.

'Mais voyons ma chérie, nous avons une sorcière dans la famille ! Il faut en être fier !'

De toute évidence, d'après Pétunia, le fait que Lily soit une sorcière devait justement être une raison d'avoir honte. Lily elle-même n'était pas convaincue de l'attitude à adopter face à cette nouvelle. Devait-elle être heureuse ou effrayée ? La seconde solution était la plus attirante. Les sorcières n'étaient-elles pas mal vues dans les contes pour enfants ? Avec leurs nez crochus, leurs verrues, et leurs envies de détruire tous les gentils ? En tout cas, ses deux parents semblaient très excités par cette grande nouvelle.

'Regarde' dit Mr Evans à sa femme. 'Nous avons l'adresse du chemin de Traviole…'

'De Traverse, chéri' corrigea Mrs Evans avec un sourire.

'… nous irons demain chercher ses affaires de classe' continua-t-il comme s'il n'avait pas été corrigé (et surtout interrompu).

Il retourna à l'étude des documents que le professeur Dumbledore leur avait laissés.

'Une baguette magique, Lily, tu vas avoir une baguette magique, tu te rends compte ! J'en ai toujours rêvé !'.

La jeune fille se força à sourire à son père. Et c'est ainsi que ses parents passèrent toute la journée à débattre sur sa condition, et à quel point ça pouvait être fantastique. Pétunia se contentait de maugréer. Lily écoutait distraitement en répondant des 'hum-hum' et des 'oui-oui' quand on la questionnait, mais sans vraiment écouter ladite question. Pour mieux réfléchir, elle décida à la fin de la journée d'aller se coucher tôt pour être loin des bavardages excessifs que ses parents avaient entretenus toute la journée.

Cette nuit là, elle eut son premier cauchemar depuis longtemps. Depuis en fait qu'à l'âge de cinq ans elle avait peur du Croque-mitaine caché sous son lit et qui l'empêchait de se rendormir. D'ailleurs, il était étrange que maintenant qu'elle connaissait l'existence du monde de la magie elle ne s'inquiétait pas à nouveau de ce monstre, alors que des craquements sortaient de sous son lit.

Mais cette nuit là était dédiée à plus qu'un malheureux Croque-mitaine. Elle courrait à en perdre haleine au milieu de la forêt, des brindilles de pin écorchaient ses pieds nus pendant que des branches s'accrochaient à son pyjama. Au loin, elle pouvait entendre des villageois crier 'la sorcière ! Elle est par ici !'. Sans trop savoir pourquoi, elle tourna la tête. Des points lumineux, qui devaient être des torches, scintillaient au loin. C'est alors qu'elle trébucha et se ramassa de tout son long en mangeant de la terre. En peu de temps les villageois la rattrapèrent et elle se retrouva soudain attachée à un bûché sur la place du village. Sa mère s'approcha avec sa torche pour allumer le feu. 'Je suis désolée' dit-elle, 'mais tu es un monstre. Tu dois être purifiée par le feu'. Et Pétunia éclata d'un rire diabolique qui résonnait dans sa tête pendant que des panaches de fumée l'asphyxiaient peu à peu.

Lily se réveilla en sursaut et écarta ses draps qui s'étaient enroulés sur son visage. Elle ôta de ses yeux une mèche de cheveux collée par la sueur. Machinalement, elle regarda son réveil. Il était six heures et demie. Elle tenta tant bien que mal de calmer son cœur qui battait la chamade, menaçant presque de s'échapper de sa poitrine. Elle essaya de se lever mais ses jambes s'étaient autant crispées que le reste de son corps durant son cauchemar et de ce fait refusèrent de la porter. Elle retomba brutalement sur son lit, et attendit que ses tremblements cessent. Peu à peu les images de son rêve s'estompèrent jusqu'à lui laisser juste une vague idée générale de ce qu'il avait été.

Elle finit donc par réussir à se lever et alla prendre sa douche. A huit heures, elle rejoignit ses parents à la cuisine pour prendre son petit déjeuné.

Pétunia, déjà debout aussi, la regarda avec mépris. Tandis qu'elle s'asseyait, sa mère se leva et déposa une assiette de toast devant elle.

'Mange ma chéri. Aujourd'hui, nous allons au chemin de Traverse !'

Pétunia eut un rire dédaigneux.

'Ne comptez pas sur moi pour venir ! De toute façon, même si ça m'intéressait je ne pourrais pas car je dois voir Vernon Dursley.'

Mr Evans, toujours passionné par ce qui arrivait à ses filles, demanda :

'Qui est Vernon Dursley ?'

Pétunia ne put s'empêcher de rougir un peu.

'Un ami de classe' répondit-elle vaguement.

Bien que son rougissement eut amusé Lily, elle préféra s'abstenir de tout commentaire. Voyant que sa fille ne voulait rien ajouter, Mr Evans déclara qu'il était temps d'y aller.

Trouver le quartier ne fut pas bien difficile, par contre le Chaudron Baveur semblait décidé à ne pas montrer le bout de son nez, et encore moins de sa porte.

'C'est là !' s'écria Lily en voyant apparaître le panneau entre deux boutiques.

Heureusement qu'elle regardait directement dans la bonne direction, sinon elle ne l'aurait pas vu.

L'intérieur était tout aussi minable que l'extérieur. Un barman les regarda entrer, leur adressa un immense sourire, puis ne les lâcha plus du regard. Mr Evans se racla la gorge.

'Heu… le chemin de Tramy…'

'De Traverse ?' termina (et corrigea) Mrs Evans.

'Oui' reprit Mr Evans. 'Où est-ce s'il vous plait ?'

Le barman indiqua une porte… qui donnait dans un cul-de-sac. Mais où était donc le chemin de Traverse ? Perplexes, ils cherchèrent autour d'eux pendant vingt bonnes minutes jusqu'à ce que le barman apparaisse avec un jeune garçon. Vraiment très mignon, environ treize ans, de superbes yeux gris rieurs et chaleureux, les cheveux noirs souples et raides tombant gracieusement sur sa nuque. Une vilaine balafre enflait sa lèvre inférieure et une plus petite blessure apparaissait sur sa tempe. Avec sa peau claire et ses yeux craquants, Lily le trouvait absolument irrésistible. Le garçon remarqua que Mr Evans fixait ses blessures, et passa la main dans ses cheveux pour apparemment masquer sa tempe. Un geste absolument adorable. Mais Lily se reprit vite. A onze ans, on ne regardait pas les garçons de cette manière. Pas encore.

'Ho, suis-je bête !' s'exclama le barman. 'Vous êtes des Moldus ! Vous ne savez pas ouvrir le passage ! Heureusement que je savais que Sirius (il tapa le jeune garçon dans le dos) avait besoin d'aide pour l'ouvrir sinon vous seriez encore ici !'.

Donc, le jeune garçon (Sirius) ne savait pas non plus où était le chemin. Ni ouvrir le passage. Tout en parlant, le barman semblait oublier pourquoi il était ici. Sirius le lui rappela en se raclant la gorge.

'Oh bien sûr, Sirius, j'allais oublier encore avec tout ça !'

Il sortit sa baguette magique et frappa une brique. Avec émerveillement, Lily vit les briques s'écarter, dévoilant enfin le chemin de Traverse.

C'était stupéfiant. Des boutiques plus fascinantes les unes que les autres s'étendaient à perte de vue. Leur premier arrêt fut Gringotts, la banque des sorciers, pour changer leurs Livres Sterling en… oui enfin, en argent de sorciers. Lily ne se souvenait plus du nom exact. Il y avait plusieurs guichets avec des Gobelins. Ne sachant pas trop ce qu'ils devaient faire, ils s'approchèrent du premier guichet libre.

'Bonjour', fit Mrs Evans d'une voix pas très sure. 'Je voudrais faire changer mes Livres Sterling.'

Le Gobelin eut une drôle de grimace que Lily ne parvint pas à traduire. Avaient-ils fait quelque chose de mal ? L'avaient-ils offensé ?

'Bien sûr, et combien voulez-vous changer ?' demanda le Gobelin d'une voix grinçante.

Rassurée, Mrs Evans lui tendit son argent.

'Veuillez patienter, s'il vous plait.'

Et il disparut dans un couloir. Mrs Evans regarda son mari, qui haussa les épaules. Le Gobelin revint une dizaine de minutes plus tard et déposa un gros sac de pièces sur le bureau.

'Dix Gallions, vingt-sept Mornilles et quarante-huit Noises', annonça le Gobelin.

'Merci bien', dit Mr Evans en masquant tant bien que mal une grimace d'incompréhension. Le Gobelin venait de sortir une volée de mots incompréhensibles aux oreilles purement Moldus des Evans.

Lorsqu'ils sortirent enfin de chez Gringotts, Lily se sentit toute excitée à l'idée d'acheter ses affaires de sorcellerie. Jusqu'à ce qu'elle arrive au chemin de Traverse, elle n'était pas sûre d'être heureuse de sa… condition… de sorcière. Mais là, à voir toutes ses boutiques, tous ses sorciers amicaux qui les saluaient en les croisant, elle désirait plus que tout connaître ce monde fascinant.

Fleury et Botts était une sublime librairie. Des milliers et des milliers de livres s'étalaient sous ses yeux. Bon, peut-être pas des milliers, mais il y en avait vraiment beaucoup et la seule envie de Lily était de s'asseoir pour lire tous ses ouvrages à l'aspect passionnant.

'Tu sais ma chérie, il faudrait se dépêcher', dit alors Mrs Evans. 'Donc, je vais avec ton père chercher les fournitures et on te rejoint à la boutique de baguettes.'

'Mais pourquoi ?' demanda Lily, paniquée à l'idée de ce retrouver seule.

'Tu sais que je travaille cet après-midi', intervint Mr Evans.

Elle essaya de se ressaisir. Après tout, il y avait plein de sorciers bienveillants qui seraient prêts à l'aider en cas d'ennuis. Et si elle avait peur d'être seule ici, qu'est-ce que ça serait à Poudlard ? Elle hocha donc la tête en regardant ses parents en signe d'acquiescement. S'approchant du comptoir, elle remarqua qu'un jeune garçon attendait déjà.

'Salut', dit-elle timidement.

Il se retourna et lui adresse un sourire gentil. Plutôt mignon, et même très mignon (mais pas autant que Sirius), les cheveux châtains, raides et soyeux coupé en un joli dégradé assez court, les yeux de la même couleur que ses cheveux, mais avec un reflet doré, la regardant d'un air amical (sans l'air joyeux de Sirius) qui laissait apparaître une trop grande mâturité pour un enfant de onze ans. Mais qu'avait-elle à penser à Sirius alors qu'elle ne l'avait vu que quelques secondes ? Il était mignon, et alors ?

La voix du garçon, qui semblait avoir muée prématurément, la fit redescendre sur terre.

'Tu entres en quelle année ?'

'En première.'

'Moi aussi, mais j'ai bien cru que jamais je n'entrerais à Poudlard.'

'Pourquoi ?' demanda Lily, curieuse.

Le sourire du garçon se figea, comme s'il venait de ce donner une claque mentale.

'Bah, rien d'intéressant.'

Elle n'insista pas, ne voulant pas le contrarier, voir même le blesser car une ombre de tristesse venait de voiler son visage. Elle se contenta de lui sourire gentiment, sourire auquel il répondit de la même manière, puis se plongea dans la contemplation des livres, mal à l'aise. Il lui reparla en premier.

'Remus Lupin' se présenta-t-il

'Lily Evans', répondit-elle.

Et un autre ange passa. A côté d'elle, elle vit Remus qui contenait mal une envie de rire. Il n'y avait pourtant rien de drôle dans le fait d'avoir envie d'entretenir une conversation sans pour autant trouver de sujet. En fait, peut-être que si. Lily ne put s'empêcher de laisser un petit rire bête s'échapper de sa bouche. Ils se mirent alors à glousser comme deux idiots. En fin de compte, Remus n'était peut être pas si mâture que ça…

'Puis-je savoir la cause de cette hilarité ?' demanda avec un sourire le libraire, qui venait d'arriver.

'Crise de mutisme aiguë' répondit solennellement Remus, avec le ton d'un médecin annonçant à son patient une maladie grave et incurable.

'C'est vraiment une triste maladie' rajouta Lily avec un faux air navré.

'Je compatie à ce grand malheur' sourit le libraire. 'Et si ce virus le permet tout de même, puis-je avoir vos listes ?'

Ils ressortirent bientôt de la librairie, un gros sac de livres de sorcellerie chacun. Lily annonça qu'elle devait aller acheter sa baguette magique. Remus, qui avait déjà la sienne, lui montra la boutique, et ils se séparèrent. Elle croisa un garçon au nez proéminant d'environ onze ans qui sortait de la boutique. Ce garçon avait de sérieux problèmes d'hygiène corporelle, comme l'en témoignaient ses cheveux noirs graisseux. Il ne lui adressa aucun regard et traça son chemin. D'accord, en plus de sa relation passionnelle avec Mr Savon, il avait l'air très sympathique. Elle secoua la tête. Qui était-elle pour juger quelqu'un qu'elle ne connaissait même pas ?

'Bonjour' dit Mr Ollivanders.

Lily sursauta, elle ne l'avait pas remarqué.

'Vous devez être Miss Evans.'

Bien que surprise qu'il sache cela, elle hocha tout de même la tête.

'Bon, voyons voir ça.'

Il sortit un mètre ruban de sa poche, et entreprit de prendre les mesures de Lily. Absolument toutes ses mesures. Taille des oreilles, tour des bras, des chevilles, longueur du nez, etc…

Quand il eut fini, il disparut quelques secondes dans ses rayons, puis revint avec cinq longues boites fines. Il lui tendit une première baguette, pour la reprendre aussitôt et lui en donner une autre, que d'ailleurs il lui reprit tout aussi sec. Que cherchait-il ? Lily n'y comprenait plus rien. Trois autres baguettes passèrent, et Mr Ollivanders se contentait à chaque fois de la lui ré-arracher brutalement des mains. Il re-disparut bientôt dans ses rayons pour en revenir avec une boite. Quand Lily saisit la baguette, elle sentit dans son corps une douce chaleur bienfaisante. L'extrémité de sa baguette envoya des étincelles rouges et or.

'Bois de saule, 25.6 cm, souple et rapide. Excellente pour les enchantements.'

Lily, occupée à contempler sa baguette, entendit à peine la présentation. Elle la trouvait magnifique.

Ses parents, portants de gros sacs de fournitures diverses, choisirent cet instant pour entrer dans la boutique.

'Alors chérie', fit avec un sourire Mr Evans qui venait d'apercevoir sa fille. 'Tu as trouvé ?'

Répondant au sourire, elle lui montra sa baguette.

Une fois qu'ils eurent payé, ils quittèrent le chemin de Traverse. Au Chaudron Baveur, Lily remarqua que Sirius était assis à la grande table, où il dévorait avec bon appétit une grosse assiette de frittes. Elle lui adressa un signe de la main, et manqua s'évanouir quand il lui sourit. 'On se calme' se dit-elle en emboîtant le pas à ses parents.

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Le reste de l'été passa normalement. Lily sortait avec ses copines, mais elle garda son secret intact. Pétunia l'évitait comme si elle avait la Peste, au moins elle n'avait pas à subir ses sarcasmes, c'était toujours ça de gagné. Au fond d'elle-même, elle languissait le jour de son départ pour Poudlard. Jour qui finit par arriver.

Ce matin du 1er septembre, alors que Lily vérifiait sa valise pour la quatre mille deux cent soixante quinzième fois (d'après son père), Pétunia se plaignait de crampes abdominales et d'envie de vomir.

'Ecoute ma chérie' dit Mr Evans, 'on emmène Lily à la gare, et ensuite je t'accompagne chez le docteur.'

Lily préféra ne rien dire, mais elle se demandait si la soi-disant maladie de sa sœur n'était pas due à une crise de jalousie aiguë à l'égard de toute l'attention que ses parents portaient à Lily.

Après une dernière vérification de sa valise (qui porta le total du nombre de vérifications à quatre mille deux cent soixante seize), Lily embarqua dans la voiture familiale en direction de King's Cross.

'On doit partir', dit son père, une fois qu'ils furent arrivés.

Lily embrassa ses deux parents, et remarqua que son père versait une larme.

'Papa, voyons ! Je serai à l'école, tout ira bien !'

'Je sais ma chérie', répondit-il. 'Mais fait attention à toi.'

'Oui.'

'Et ne sort pas après le couvre feu.'

'Non.'

'Ecoute tes professeurs.'

'Oui.'

'Ne fais pas de bêtises.'

'Non' soupira Lily. 'Je vais rater le train et Pétunia vous attend à la maison !'

Après des dernières embrassades, Lily tira son énorme valise et pénétra dans le hall de King's Cross, quittant ses parents avec un petit pincement au coeur. Un autre problème arriva alors, après ses Je-Ne-Te-Laisse-Pas-Partir-Seule de parents. Où était donc la voie 9 ¾ ? A sa gauche, voie 9, à sa droite, voie 10. Aucune 9 ¾.

Après l'éclat de rire du contrôleur lorsqu'elle eut demandé où était la voie, elle songea que le moment était parfait pour avoir une crise de panique.

'Alors, on est perdue ?' demanda une voix amusée derrière elle.

Sirius lui souriait, incroyablement mignon avec ses élégantes mèches tombant sur son front (il s'était fait couper les cheveux), ses yeux rieurs, sa chemise bleu et ses jeans noirs. Un hibou petit duc était paisiblement endormi sur son épaule.

'Bien, oui' murmura-t-elle, penaude.

Il éclata de rire.

'C'est par là' dit-il en lui montrant une barrière entre les voies 9 et 10. Elle se demanda s'il ne se moquait pas d'elle. Voyant son expression méfiante, il sourit encore.

'Suis-moi, il faut traverser la barrière pendant que les Moldus ne regardent pas.'

La barrière se rapprochait dangereusement tandis qu'ils s'en approchaient à pas rapides. Que ferait-elle après s'être honteusement scratchée sur la barrière ? Mais il n'en fut rien, et Lily voyait maintenant un superbe train avec des locomotives rouges, un nuage de fumée s'échappait de sa cheminée et le nom 'Poudlard Express' était inscrit en lettres argentées sur le devant.

'Et voilà' dit Sirius. 'Bon, je te laisse.'

Au moment où il allait partir, il se présenta enfin officiellement.

'Je m'appelle Sirius Black.'

'Lily Evans.'

'Ravi de t'avoir rencontrée, et surtout aidée…', il fronça les sourcils d'un air moqueur. 'Tu en as souvent besoins on dirait.'

Bien sûr, il parlait du chemin de Traverse. Elle lui sourit, puis le regarda s'éloigner. Elle remarqua qu'il avait une brûlure sur la nuque. Autour d'elle, des sorciers embrassaient leurs enfants. Soupirant, elle se dirigea vers un wagon.

'En route pour Poudlard !'

To be continued…