Chapitre 10

Chaque jour, chaque heure

Commença alors une période longue et intense, qui devait faire autant de ravages sur leurs nerfs que sur leur conscience.

Toutefois, leur conscience était loin d'être l'élément qui les empêchait de plus d'assouvir leurs envies.

La prudence était leur compagne habituelle, omniprésente. Cette satanée prudence que Severus, attentif, instinctif qu'il était, ne cessait de ranimer à chaque fois, à chaque rencontre.

Mais ils ignoraient encore tout cela, encore perdus dans le paisible sommeil de leur première vraie nuit d'amants.

Ce qui les attendait n'était rien. Ils dormaient, encore insouciants de ce qui les guettait.

Quand Hermione se réveilla, elle était seule. Elle se redressa sur le lit, cherchant instinctivement la présence de Severus, et se sentit telle une enfant, perdue de ne pas le trouver.

Il ne faisait pas encore tout-à-fait jour.

Elle se leva, se rhabilla à la hâte, et sortit de la pièce. Elle le trouva assis à son bureau, dans la pièce principale de ses appartements, qui tenait apparemment lieu à la fois de salon et de bureau.

Il leva son regard vers elle, et une fois de plus, elle eut le réflexe de rougir et de baisser le sien.

« - Je t'ai laissée dormir. »

Elle ne répondit pas, et se contenta de le regarder avec des yeux accusateurs de petite fille.

Il semblait légèrement décontenancé par son silence. Une brève lueur d'inquiétude passa dans son regard.

« - Q'est-ce que tu as ? »

Hermione ne répondait toujours pas.

Elle prenait plaisir à jouer avec ses nerfs et ses pensées.

Il sembla soudain comprendre, et se leva brusquement, marcha droit vers elle, et vint la serrer dans ses bras.

« - Ca y est, je sais… »

Elle sourit, le visage perdu dans les plis de sa robe.

« - C'est juste que tu es parti comme un voleur, j'étais toute seule, je t'ai cherché, et je te retrouve là, sérieux, tout habillé… »

Il ne répondit pas, et elle ne vit pas le demi sourire qui gagnait son visage, alors qu'il l'entendit parler ainsi, avec cette voix de petite fille. Il sentait littéralement son cœur se gonfler et exploser de tendresse.

Il pensa qu'elle était si frêle, même comparée à lui, qui était plutôt mince.

Frêle et fragile.

Une fois de plus, il pensa à la bestialité de leur première étreinte, et une fois de plus, il espéra aller pourrir en enfer pour son comportement, même s'il ne se souvenait plus avoir eu le moindre contrôle sur le déroulement des évènements de cette nuit-là.

Il se demanda comment il ne l'avait pas brisée en mille morceaux, pendant cette étreinte si violente.

« - Tu m'as laissée… »

Il sourit plus franchement, et la regarda enfin dans les yeux, amusé et attendri par cette plainte adorable.

« - Quelle trahison… »

« - Et en plus, tu es habillé. Je te préfère sans rien sur le dos, moi… »

Il la souleva et l'accrocha à lui, puis il la ramena à la chambre, le regard plein de promesses.

Ils roulèrent sur le lit, et pour lui faire plaisir, il retira à nouveau tous ses vêtements, jusqu'au dernier.

Elle le contemplait les yeux brillants, avide, et sans savoir pourquoi, il adorait cela.

Il tendit alors son bras gauche vers elle, et elle fixa avec attention la Marque Sombre qui le recouvrait.

Sa main effleura son visage, mais il se retira assez vite, car ce regard insistant sur sa Marque le faisait se sentir mal à l'aise.

« - Ne regarde pas ça… »

Elle leva vers lui un visage étonné.

« - Pourquoi ? »

« - C'est évident, n'est-ce pas… Tu ne devrais même pas avoir à supporter cette vision. C'est une chose sale, comprends-tu… »

« - Rien de ce qui est à toi n'est sale. Rien. Pas même cette Marque. Je te prends tel que tu es. Avec ta Marque. »

« - Tu ne sais pas ce que tu dis. Tu ne sais pas ce que cela représente… »

« - Je le sais plus que quiconque. Parce que cela veut dire qu'à une époque de ta vie, tu aurais considéré que je ne méritais pas d'exister, d'avoir ma place dans le monde sorcier. », répondit-elle d'une voix calme.

« - Ne dis pas ça ! », cria-t-il soudain.

« - Mais c'est la vérité. Seulement, tu as changé. Alors à quoi bon remuer toute cette boue ? Et tu veux que je te dise ? J'aime cette Marque. Je l'aime. Parce qu'elle fait partie de toi, qu'elle fait partie de ce que tu es aujourd'hui. Et j'aime ce que tu es aujourd'hui… »

« - Ne dis pas ça… », répéta t-il, la voix brisée. « Tu ne sais pas, tu ne sais rien… Personne… Aucun de vous n'a vraiment connu le Mal, c'est plus qu'une simple Marque. Tu ne sais pas les horreurs, les cauchemars, ces choses-là… »

Elle tendit une main tremblante vers lui.

« - Vas-t-en… Sors d'ici. », fit-il en un souffle.

Mais elle n'avait pas l'intention de s'exécuter.

Au contraire.

Elle se rapprocha de lui, jusqu'à sentir son souffle contre sa joue. Il était toujours nu. Et il semblait effondré. Le visage dans ses mains. Immobile.

Elle l'enlaça, et il se laissa faire. Elle le renversa sur les oreillers, et il roula docilement sous elle.

Une fois de plus, elle le sentait nu contre elle vêtue, désemparé, délicieusement vulnérable, mais elle ne fut pas pressée de rétablir l'équilibre, cette fois.

A sa grande surprise, il se montra… Totalement docile. Offert.

Elle l'enlaça fermement, le plus qu'elle put, et embrassa sa bouche de façon possessive.

Cette situation inversée était incroyablement troublante.

Elle parcourut son corps nu sous le sien, effleurant son bas-ventre avec douceur et autorité, et il gémit à cette caresse. Elle accentua même son geste.

Elle remonta ses bras au-dessus de sa tête, et entreprit d'explorer son torse, se délectant de chaque creux, de chaque protubérance qui ornait la peau constellée de dessins.

Il gémissait de plus en plus lascivement, de plus en plus sensuellement.

Il l'appelait. A sa façon.

Elle savoura encore un moment sa position dominatrice, effleura une dernière fois son visage, puis son sexe dressé contre elle.

Se relevant doucement, elle contempla un instant le corps de son amant offert, ses yeux mi-clos, puis retira ses propres vêtements.

Elle se coucha sur lui, et appuya son regard dans ses yeux noirs embrumés par le désir.

Il attendait.

Elle n'osait pas. Alors, lentement, il tendit une main jusqu'à son bassin et la guida vers lui, sur lui.

Il se fondit en elle. Elle était brûlante.

Elle donna le rythme et il la laissa faire, ébloui par son propre abandon, par son plaisir et par la chaleur intense qu'elle lui transmettait. Il n'avait jamais été dans une telle situation, jamais autant à la merci de sa partenaire.

Echange de caresses, mains aériennes qui effleurent des courbes mouvantes, puis… La délivrance, une fois de plus, toujours plus forte, surprenante, démente. Il se cramponna à ses hanches et accueillit la lumière.

Ils restèrent un moment enlacés, haletants, sans émettre d'autres sons que leurs respirations vacillantes.

Puis elle se détacha délicatement de lui.

Le jour était presque entièrement levé.

Ils se séparèrent ainsi, dans l'aube qui apparaissait, chacun rattrapé par la réalité, par leurs obligations, par ce que le monde exigeait d'eux.

Un monde devenu aberrant par le simple fait qu'il ne laissait pas de place à leur histoire.

Par le simple fait qu'un professeur et son élève soient coupables de devenir davantage.

Un dernier baiser, chaud comme le sang. Une dernière étreinte

Ils se séparèrent devant sa porte, et il la regarda s'éloigner, jusqu'à ce qu'elle disparaisse au fond du couloir, la voyant redevenir graduellement Hermione Granger, l'insupportable miss Je-sais-tout de Gryffondor.

Il attendit une durée suffisante pour reprendre ses esprits, refroidir ses sens du mieux qu'il put, puis il sortit à son tour dans le couloir, et se dirigea vers la Grand Salle et les cachots, vers les obligations qui l'attendaient, vers un monde devenu vide de sens.