Chapitre 11

Bonne nuit

Hermione se sentait infiniment troublée après la nuit qu'elle venait de passer.

Il l'avait tenue dans ses bras comme quelqu'un qui comptait. Elle n'arrivait pas à se donner de meilleure définition. Elle s'était sentie comme quelqu'un d'important.

Et il lui avait montré qu'il savait avoir une attitude si soumise… Elle en avait encore des frissons. Et ce corps… Et ces mains…

Une bouffée de gêne la submergea lorsqu'elle réalisa qu'elle était entrain de penser à son professeur de potions.

Elle repensa aux raisons qui l'avaient amenée la veille à venir vers lui.

Cela semblait si loin…

Au prix d'un effort douloureux, elle se força alors à se remémorer le plan qu'elle avait conçu.

Après tout, elle pouvait s'amuser un moment avec lui, juste le temps de lui faire payer les brimades et les humiliations qu'il lui avait fait subir depuis qu'elle était à Poudlard.

S'amuser un moment… Et ensuite, elle verrait.

A cette pensée, elle eut la sensation d'être un chat, jouant cruellement avec la proie à demi vivante qu'il tient entre ses pattes.

Mais peu importe, après tout, c'était un jeu.

Puis elle réalisa avec horreur –mais était-ce bien le terme - que son deuxième cours de la mâtinée serait un cours de potion…

Après tout, il fallait bien s'y confronter un jour ou l'autre.

Au petit déjeuner, Ron et Harry lui demandèrent si elle allait bien et s'étaient inquiétés de ne pas l'avoir vue dans la salle commune avant de descendre.

« - C'est parce que j'étais… A la bibliothèque. », articula-t-elle péniblement.

« - Dis-moi, ton but, c'est de lire tous les livres qu'elle contient avant la fin de tes études ? », fit Ron sur le ton espiègle qui amorçait habituellement toujours une dispute entre eux.

« - Mmh… Oui… », répondit-elle distraitement.

Ron semblait décontenancé.

Mais malgré sa torpeur, elle avait lu dans le regard intense que Harry posait sur elle, que celui-ci n'était pas dupe de ses mensonges.

Il devait se demander plus que jamais à quoi avait servi la carte du Maraudeur, la nuit dernière.

Elle se força à avaler un bout de toast, et ils filèrent à leur premier cours de la mâtinée.

Elle redoutait et était à la fois impatiente de savoir comment allait se passer le cours de potions.

Elle garda les yeux rivés au sol lorsqu'il entrèrent dans les cachots.

Le cours se déroula presque comme d'habitude.

Sauf qu'elle n'osait plus intervenir pour répondre aux questions dont elle avait habituellement toujours la réponse.

Sauf que lorsqu'il passait derrière elle pour vérifier, comme il avait l'habitude de le faire, le contenu du chaudron qu'elle partageait avec Harry et Ron, le frôlement si proche de sa robe sombre, son souffle imperceptible, la rendaient presque folle, tremblante, prête à bondir de sa chaise.

Sauf que rien que sa voix lui donnait de terribles frissons.

Ses joues devenaient brûlantes et elle avait la sensation que tout le monde la regardait et se doutait de quelque chose.

Mais rien d'exceptionnel ne se passa.

Hermione se força à reprendre ses esprits, et parvint tant bien que mal à terminer sa potion.

Comment, mais comment avait-elle pu se mettre dans une situation pareille…

Tard dans la soirée, Severus quitta les cachots où il avait surveillé un moment l'évolution de sa nouvelle potion.

Il regagna ses appartements et lorsqu'il entra dans la pièce, il constata que les torches étaient allumées et que, assis à son bureau, quelqu'un semblait l'attendre. Ou plutôt quelqu'une.

Comment était-elle entrée ? Ses appartements étaient scellés magiquement… Mais elle était très intelligente après tout. Son élève. Apparemment ses cours particuliers portaient leurs fruits. Elle arrivait même à briser ses sortilèges. Au fond de lui, il se sentit un peu fier. Beaucoup, même.

Elle replia les jambes qu'elle avait négligemment posées sur la surface de bois, et se renfonça dans le fauteuil en lui jetant un regard insolent.

Lui se tenait toujours immobile.

« - Je ne t'attendais plus. »

« - Et si je n'avais pas été seul ? »

Elle sourit sans répondre à sa question.

« - Bien, je voulais seulement te souhaiter une bonne nuit », fit-elle calmement.

Elle se leva et contourna le bureau en direction de la porte, devant laquelle se trouvait déjà Severus. Elle le frôla. Il lui attrapa le bras.

« - Où vas-tu ? »

« - Au lit. Je suis fatiguée. » Et après un court silence, elle ajouta : « Tu devrais en faire autant, tu as une mine épouvantable. »

Il resserra la prise sur son bras.

Il était devenu livide.

Hermione était satisfaite d'elle. Elle tenait le coup. Mais c'était difficile.

Elle était presque arrivée à lui faire perdre son sang froid.

Et avant qu'elle ait compris ce qui lui arrivait, il la plaqua contre la lourde porte en chêne et l'étreignit brutalement, soudant sa bouche à la sienne.

Il devenait de plus en plus difficile de se contrôler. Il fallait qu'elle reprenne le dessus.

Elle se força à détendre ses muscles, à calmer ses nerfs, et lentement, doucement, presque tendrement, remonta sa cuisse le long de son entrejambe, à travers sa robe de sorcier.

Elle fit durer cette caresse le plus longtemps possible, et lorsqu'elle atteint enfin la partie sensible et délicate de son anatomie, il partit en un grand frisson et eut un mouvement convulsif, presque orgasmique.

Puis il s'immobilisa, tremblant.

Sans avoir d'expérience précise à ce sujet, elle sut qu'elle était entrain de le mener progressivement aux portes de la folie. De sa propre folie.

Il était à sa merci.

Une fois de plus, elle se sentit agréablement dominatrice dans cette étreinte, mais dans une nuance bien plus malsaine que la fois précédente, lorsqu'il avait retiré un à un tous ses vêtements et s'était littéralement offert à elle. Oui, tout ici n'était que manipulation.

A elle de jouer. Une fois de plus, elle se sentit plus Serpentard que jamais.

« - Qu'y a-t-il ? », lui demanda –t-elle d'une voix faussement naïve.

Il ne répondit pas. Il haletait presque. Ses lèvres effleuraient maintenant sa joue.

« - Je vais y aller. ».

La froideur de son propre ton la surprit.

Elle se dégagea, la mort dans l'âme mais bien décidée à ne pas le lui montrer, et lorsqu'il tenta à nouveau de retenir son bras, sa prise était faible et tremblante, et elle s'en dégagea facilement.

Elle se retrouva dans le couloir et partit en courant, se retournant cependant une fois, pour voir la porte encore ouverte, et la silhouette toujours figée de l'homme dans l'embrasure de celle-ci.

Tout son corps lui faisait mal, bouillant du désir que sa trop brève étreinte avait cependant réussi à lui insuffler. Mais elle avait réussi. Réussi.

Severus ne sut combien de temps il resta là à contempler le couloir, mais il finit par s'apercevoir de son état quasiment léthargique, et il se décida enfin à refermer la porte.

Il s'écroula dans son fauteuil préféré, près du feu, son érection encore douloureuse, son âme troublée, son esprit tourmenté.

Pourquoi avait-elle fait cela…

Elle voulait jouer. Très bien.

Il fallait juste qu'il reprenne ses esprits.

Fichue gamine. Que faisait-elle à Gryffondor ? Une véritable petite peste… Même Serpentard n'en aurait pas voulu…

Il comprit qu'elle allait faire partie, qu'elle faisait déjà partie, de ces gamines ingrates qui à l'adolescence se transforment progressivement en jolies femmes et qui ont besoin de tester ce pouvoir de séduction fraîchement acquis dès que l'occasion se présente.

Et il était cette occasion, apparemment.

Pour son plus grand bonheur et pour son plus grand malheur.

Merlin, cette situation lui tournait vraiment la tête…

Et au fond de lui, une petite voix cruelle et railleuse lui répétait inlassablement « Et en plus c'est une élève, une de tes élèves… ».

Il détestait se sentir ainsi en faute. Il avait lutté toute sa vie contre la culpabilité, et voilà qu'elle revenait à l'attaque, le harcelant de plus belle.

Il effleura la bosse douloureuse et se sentit presque devenir fou à l'idée qu'il ne pourrait pas la toucher cette nuit.

La frustration était telle qu'il sentait presque des larmes lui monter aux yeux.

Garce. Allons, il ne devait pas penser cela, elle était si jeune… Rien que le fait de penser à elle était une faute.

Mais il oublia bien vite cette idée.

Il la voulait. Il la voulait, et tout de suite.

Immédiatement dans son lit, ou bien n'importe où, même par terre, sur le sol rude et froid, comme la première fois.

Il la voulait. Sa chair, tout.

Il massa ses tempes douloureuses, puis se prit la tête entre les mains.

Il avait besoin de dormir.

Il n'y avait rien d'autre à faire. Il se leva, se dirigea vers une armoire dans le coin de la pièce et en sortit une fiole. Puis il entra dans sa chambre, s'assit sur le lit, but d'un trait le contenu de la fiole et s'écroula sur les draps, inconscient.