Poupée de sang

Par Tsubaki Hime

Chapitre I

Les cinq poupées

- Tsuzuki! Tsuzuki! Grr… Où est cet estomac à pattes?!

La voix bourrue de Konoé fit vibrer le café dans la tasse posée sur son bureau irréprochable. C'était un homme ayant d'apparence un peu plus de cinquante ans. Son visage était plissé par une éternelle fatigue et une ride amère tordait le coin de sa bouche. Cependant, aujourd'hui, sa voix était grondante de colère et d'impatience. Il posa violemment son poing sur son bureau mais ce geste de rage fit renverser son café qui dégoulina sur son costume beige tout neuf qu'il venait d'acheter chez un importeur de Nagasaki.

La ride au coin de sa bouche s'intensifia sous l'effet du juron sonore qu'il venait d'employer.

- Je vais le tuer, ce fonctionnaire fumiste! Tonna-t-il, les mains crispées comme s'il rêvait de les passer autour du cou de son employé. Il devrait être ici depuis plus de deux heures! Je ne sais pas ce qui me retient de le virer…

Dehors, les cerisiers resplendissaient sous le doux soleil d'un perpétuel printemps. L'immense tribunal semblait être doré sous la lumière. Le Tribunal des Morts. Le Juo-Cho.

Pourtant, dans cette bâtisse impressionnante, il existait un petit département, au coin d'un couloir dont les lumières ne fonctionnaient plus, portant sur la porte métallique une simple pancarte nommée « Services des Assignations ». C'était l'Enma-Cho. Un département du Juo-Cho très important malgré les apparences.

L'Enma-Cho s'occupait des problèmes concernant les vivants dont le temps de vie était anormalement écoulé. Ce n'était pourtant que l'affaire de base car des enquêtes plus complexes devaient aussi être examinées avec attention par des employés spécifiques.

Ces employés furent nommés les Dieux de la Mort: les Shinigami. Leur boulot n'était pas très bien payé mais quand on était un mort désirant être utile au Meifu, le Royaume des Morts, on n'avait pas trop le choix.

Ce jour-là, donc, à l'Enma-Cho, Konoé se tenait à son bureau, en proie à ses terribles envies de meurtres concernant un certain employé. Tout en essayant vainement de se débarrasser de la tache de café s'agrandissant sur son veston, il marmonna:

- Ce Tsuzuki… Je parie qu'il est encore allé sur Terre s'acheter des gâteaux…

Il releva la tête.

- Tatsumi! Héla-t-il. Tatsumi!

La porte du bureau s'ouvrit presque aussitôt pour faire apparaître un homme d'âge mûr, habillé d'un costume stricte. Ses yeux bleus étincelèrent derrière ses lunettes. Il porta dans ses mains un dossier assez épais où dépassaient quelques feuilles mal rangées.

- Qu'il y a-t-il, Mr Konoé? Demanda-t-il d'une voix calme et polie.

- Tatsumi, sais-tu où se trouve ce fainéant de Tsuzuki? Répliqua Konoé ayant la douceur d'une tempête. Cela fait des heures que j'essaie de le joindre mais il reste introuvable.

Tatsumi s'offrit le privilège d'hausser un peu les épaules, comme pour les étirer après une longue journée d'efforts.

- Vous le connaissez aussi bien que moi, patron, répondit-il sobrement. Il est irrécupérable, on ne pourra pas le changer. Voyons, il doit être neuf heures sur Terre et c'est à cette heure-ci que les boulangeries font des offres sur leurs gâteaux et autres sucreries. Tsuzuki, en bon gourmand qu'il est, n'a pas pu s'empêcher d'y aller.

- Qu'il ait une indigestion, il aurait ainsi une bonne leçon, grogna Konoé en poussant sa tasse vide près du bord de son bureau. Il peut toujours rêver d'avoir une prime, il ne l'aura pas avant que le roi Enma décide de porter un maillot de bain.

Tout en disant cela, il eut une petite pensée d'excuse au roi car il savait bien que c'était injurieux de parler ainsi. Il eut un petit soupir, se demandant pratiquement pourquoi il travaillait avec un tel employé.

- Et Hisoka? Demanda-t-il après un très court silence, juste suffisant pour jeter son mouchoir couvert de café à la poubelle.

Tatsumi eut de nouveau un haussement d'épaules.

- Je ne sais pas… en fait…

VLAM!

Il fut interrompu par l'entrée fracassante d'une étrange homme aux longs cheveux, portant sur son épaule droite une chouette surexcitée.

- Bien le bonjour, messieurs!

- Bonjour, Watari, répondirent les deux intéressés, un peu médusés.

Les yeux ambrés de l'homme en blouse blanche pétillèrent de joie. Il avait l'air d'un enfant ayant reçu tous les cadeaux qu'il voulait pour Noël. Sur son épaule, la chouette battait l'air des ailes, hululant de joie.

- Je suis un génie! Lança Watari d'emblée. Mr Konoé, ça mérite bien une prime, j'en suis sûr!

- Au lieu de te prendre pour un pseudo-Einstein, dis-nous clairement ce qui te pousse à vouloir faire du bruit de si bon matin, grinça le patron, sentant ses nerfs fragiles comme du verre se briser lentement mais sûrement.

- Voici ma nouvelle création!

Fièrement, il brandit à bout de bras un minuscule robot, pas plus grand qu'une tomate cerise, sautiller dans sa paume ouverte. Ayant la forme d'une balle de golf, peinte en jaune poussin, une espèce d'antenne encore plus que le corps lui-même, l'animal glapissait d'une voix électronique sortant d'un tout petit, petit bec de métal doré. Des petites pattes en fer aussi fines que des allumettes vacillaient lentement, trop légères pour le corps.

- Voici le Bird-Tea! Clama Watari. Le petit robot qui vous servira le thé en moins de cinq minutes! Une invention de génie, je vous dis!

Tatsumi, indifférent de cette « sublime » invention, remit correctement ses lunettes sur l'arête du nez.

- Et tu dis que cette invention vaut une prime, répéta-t-il, pour être bien sûr d'avoir entendu.

Le scientifique hocha vigoureusement la tête. Il posa sa créature sur le bureau qui tout en zigzaguant, se dirigea vers la tasse de café vide de Konoé. Watari eut un petit sourire au robot.

- Allez, mon mignon, va resservir notre patron.

Le Bird-Tea s'exécuta maladroitement. Ses petites ailes essayèrent de prendre le bord de la tasse qui était malheureusement deux fois plus grande que lui.

CRAC!

Prise par l'élan, la tasse s'effondra de tout son poids sur l'oiseau robotique qui fut écrabouillé dans un bruit plutôt pittoresque. Des étincelles jaillirent de sous la tasse puis une fumée de brûlé monta dans l'air.

Konoé, calmement, raya quelque chose sur une feuille.

- Pas de prime, Watari, déclara-t-il d'une voix neutre.

Le visage si rayonnant de Watari blêmit.

- Ouin! Pleurnicha-t-il. Vous avez détruit mon Bird-Tea!

- Non, tu l'as construit trop petit, rétorqua Tatsumi. Bon, sais-tu où est Hisoka?

- Vous me cherchez? Répondit une voix d'adolescent à la question.

La porte s'ouvrit et se referma sur le jeune garçon. Il ne devait avoir que seize ans. Sa peau était pâle et des cernes se voyaient sous ses yeux vert émeraude taillés en finesse et en éclat. Ses cheveux châtain clair, contrairement à l'habitude, étaient un peu en bataille. Son visage, malgré ces changements était taillé dans une finesse particulière, comme un joaillier qui rend son bijou le plus beau possible .Il s'avança calmement vers le bureau, les mains dans les poches de sa veste en jean.

- Il y a un problème, patron? Fit-il d'une voix un peu traînante.

- Oui, on cherche Tsuzuki.

- Ouin, Hisoka, regarde mon invention, on l'a détruite! Fit Watari, montrant les débris calcinés du robot.

- Tu ne serais pas en train de monter Hisoka contre ton propre patron, j'espère? Grinça Konoé d'une voix acide.

- Mais non, non, non, s'empressa de répondre Watari, le visage plus rouge encore que le T-Shirt qu'Hisoka portait sous sa veste. Ah, quel beau temps aujourd'hui, n'est-ce pas Hisoka?

« Je me sens comme un mannequin de bois », répondit intérieurement Hisoka, furieux.

Konoé frappa de nouveau son bureau de son poing.

- Si Tsuzuki n'arrive pas dans la minute qui suit je…

- Coucou tout le monde! Clama une voix que tout le monde connaissait et souhaitait ne pas entendre à ce moment là.

Un jeune homme se tenait sur le pas de la porte, souriant gentiment, ne sentant pas les regards meurtriers que les gens tout autour lui lançaient. Ses cheveux étaient d'un très beau brun foncé, un peu ébouriffés. Son visage était d'une finesse incroyable, le rendant plus jeune qu'il ne l'était. Ses yeux brillaient d'une couleur étrange, insaisissable, mauves comme les améthystes. Il tenait dans les bras des sacs où une odeur chaude de pâtisserie se faisait sentir.

- J'ai entendu ce que vous disiez, lança-t-il d'une voix enjouée. Je suis donc aussi irremplaçable que ça?!

Les nerfs de Konoé lâchèrent à cet instant.

- PAUVRE ABRUTI BOUFFEUR DE GÂTEAUX!! Beugla-t-il à l'employé qui faillit être renversé par le choc. Tu rends-tu compte de l'ennui que tu as causé?!

- Euh… non, répondit piteusement le Shinigami. Pourquoi?

Le visage de Konoé était si rouge qu'il aurait pu ébouillanter une théière. Il tentait de calmer sa respiration mais celui était aussi difficile pour lui que d'avoir à escalader une montagne.

- Pour la peine, je prends tout ce qui tu as acheté lors de ton voyage non autorisé sur Terre!

- Oh non! Ma tarte aux pommes!

- Ca a l'air bon, fit Watari d'un air gourmand, ayant chapardé un sac. Oh, une meringue!

- Tsuzuki, estomac à pattes, lança Hisoka, presque blasé. T'as quoi à la place du cerveau? Un deuxième estomac?

- Hisoka, pourquoi tu prends pas ma défense? Fit Tsuzuki, ayant pris l'air d'un pauvre gamin abandonné.

- Tu t'es planté dans ce coup comme un grand, tu te débrouilles, répondit le jeune garçon, agacé.

Il se tourna vers Konoé.

- Au fait, qu'il y a-t-il de si urgent?

Le visage du patron retrouva ses couleurs. Il s'assit de nouveau derrière son bureau, arborant un air grave.

- Il s'agit d'une série de meurtres…

Les Shinigami se turent. Il n'était plus temps de se divertir. Tsuzuki se redressa, s'occupant tout de même du coin de l'œil toutes les pâtisseries qui trônaient sur le bureau de Konoé.

- Il faut dire que cette affaire n'est pas des plus simples, fit Tatsumi, ouvrant l'épais dossier entre ses mains. Tout a commencé il y a environ trois semaines, à Kagoshima. On aurait retrouvé les corps de trois personnes.

- Et pourquoi est-ce de notre ressort? Demanda Tsuzuki, ne comprenant pas tellement.

Konoé eut une légère grimace.

- Tout simplement que leur mort n'est pas… pour ainsi dire très normale dans le critère des meurtres.

Tatsumi brandit plusieurs photos à Tsuzuki et Hisoka. L'une d'elles était le cadavre d'un homme, d'environ un peu plus de vingt ans. Il était allongé de tout son long, les yeux voilés par la mort. Du sang coulait de sa bouche où on ne voyait d'un trou noir. Et à ses côtés, reposant négligemment assise…

- Une poupée de porcelaine?! S'écria Tsuzuki, surpris.

La poupée était habillée d'un bleu pervenche digne, une poupée de collection. Son visage frais pourtant avait été lézardé et sa bouche peinte en cœur avait été brisée comme si on lui avait donné un coup de poing.

La deuxième photo était une femme de trente ans. Elle aussi reposait de tout son long sur le sol. Ses yeux n'avaient pas le voile de la mort pour la bonne raison qu'on les lui avait arrachés. Et à ses pieds reposait une autre poupée de porcelaine, habillée d'un rouge vermeil semblable au sang qui avait coulé près d'elle. Tout comme l'autre, son visage avait été abîmé et ses yeux en billes de verre avaient été extraits et éclatés contre le sol.

La troisième était un autre homme, le plus âgé apparemment. Quarante-cinq ans peut-être. Allongé comme les autres, il ne voyait pas, les yeux vagues et sa bouche était close. Mais du sang coulait des deux côtés de son crâne, là où normalement il aurait eu ses oreilles. Une autre poupée de porcelaine était là, habillée d'un vert émeraude, ses oreilles fragiles cisaillées avec rage.

Les deux Shinigami rendirent les photos à Tatsumi.

- Ouais, c'est bien un meurtre au-delà du critère, accorda Hisoka.

- Il se trouve que les victimes ont été séparés de plusieurs atouts. La langue, les yeux et les oreilles.

- Comme si le meurtrier avait voulu supprimé ce qui avait coûté la vie à ces trois personnes. L'un avait parlé, l'autre avait vu et le dernier avait écouté, fit Tsuzuki.

Hisoka écarquilla les yeux.

- La comptine des cinq poupées, murmura-t-il, abasourdi.

Konoé sursauta.

- La comptine des cinq poupées? Répéta-t-il. Tu veux parler de cette fameuse comptine venue tout droit d'Angleterre?

Hisoka se mit à la réciter, de plus en plus surpris:

Il était cinq poupées

Cinq charmantes demoiselles.

Toutes de robes élégantes vêtues et de dentelle.

La première était de pervenche et d'azur.

Parlant de la voix la plus pure.

La deuxième était de rouge et de vermeille

Observant mille merveilles.

La troisième était de printemps et de vert

Écoutant des chansons de la plus belle manière.

La quatrième était de blanc et de neige

Goûtant aux joies du cortège

Et la dernière, la pauvrette

De noire et de voilette

Pleurait en silence

Dans l'oubli de l'existence.

Cinq poupées,

Cinq demoiselles, dit-on

Mais que firent-elle donc

Quand le bourreau les fit condamnées?

Il y eut un silence.

- La comptine des poupées fait plutôt une allusion ironique à l'affaire que nous devons élucider, fit Tsuzuki, amer. La poupée bleue parlait d'une voix pure et le « bourreau » la lui a coupé; la poupée rouge avait vu des merveilles et le « bourreau » lui a pris ses yeux et quant à la troisième, elle écoutait et le « bourreau » lui a pris ses oreilles.

- Celui dont la langue a été coupée se nommait Eiji Wabashi, 25 ans. Celle dont on a ôté la vue Mayumi Enzô, 34 ans et le dernier, Tetsuo Migamôto, 43 ans, ajouta Tatsumi. Tous avaient un point commun: ils travaillaient dans le centre de recueillement pour mineurs de Kagoshima.

Hisoka haussa un sourcil interrogateur.

- J'ignorais l'existence de ce centre, remarqua-t-il, songeur.

- Il a été crée il y a à peine quatre ans, dans le but de recueillir des orphelins jusqu'à leur majorité. La plupart des mineurs n'ont pas d'autres parents pour les héberger et ils ont été recueillis. En fait, pour être plus précis, Mr Migamôto était le directeur de ce centre. Mr Wabashi et Mlle Enzô étaient des surveillants.

Tatsumi remit ses lunettes correctement sur son nez, geste machinal.

- Cette affaire risque de bouleverser tout le Juo-Cho si on ne s'y prend pas très vite. Il vous faudra donc vous introduire dans le centre à Kagoshima pour trouver des indices et de préférence le coupable.

Watari, que l'on n'entendait plus, eut un petit soupir.

- Oui, vous devrez retrouver les prochaines victimes: la poupée de neige et celle en noir.

- Depuis quand tu t'intéresses aux comptines occidentales? Demanda faussement innocemment Tsuzuki.

- Depuis tu en pinces pour la tarte aux pommes, répondit Watari d'une voix égale.

« Touché, un point partout », commentèrent intérieurement Konoé, Tatsumi et Hisoka.

- Bon, on va y aller, fit Tsuzuki à voix haute, ne souhaitant pas de nouveau être touché à un point sensible.

- Eh, Tsuzuki! Le héla Konoé alors qu'il allait sortir suivi d'Hisoka.

- Quoi?

Konoé eut un sourire.

- N'oublie pas de me ramener les spécialités de Kagoshima.

- Euh ok… Vous me passez de l'argent?!

Le sourire de Konoé s'élargit mais Hisoka eut le sentiment de voir un requin savourer le dernier moment avant de dévorer sa proie.

- Quel argent? Cela sera retenu sur ta paye de ce mois-ci…

« Argh, le coup fatal! », pensa Tsuzuki, sentant un creux aussi profond que le néant se former dans sa poitrine… et son porte-monnaie.

- Et rapporte-moi des beignets à la crevette! Ajouta Watari, ravi qu'on lui ramène quelque chose sans que lui ne paie.

- Et pour moi, des gâteaux de riz gluant, rappela Tatsumi, semblant esquisser un sourire.

« Livreur, je suis qu'un livreur », songea Hisoka, médusé.

Kagoshima…

Hisoka et Tsuzuki contemplèrent ce qu'ils avaient devant les yeux, un peu étonnés.

Le centre de recueillement ressemblait plus à une université plutôt à ce qu'il devait être normalement. C'était une grande bâtisse au toit rouge et dont les multiples fenêtres brillaient au soleil. La cour était immense, où des arbres se tenaient çà et là, bercés par la brise. On entendait de la grille d'entrée des voix d'adolescents, récitant une leçon ou riant aux éclats.

- C'est un immense internat, ma parole, souffla Tsuzuki. Moi qui pensais que c'était un peu plus familial…

Il y eut un claquement de bec près de lui.

- Oui, voici le centre de recueillement pour mineurs de Kagoshima, fit une voix près de lui.

- AAAAAAAAAAAHH!!

Tsuzuki faillit tomber par terre en voyant l'étrange créature voletant à ses côtés. C'était un petit corps humain où reposait une tête d'oiseau, habillée de bleu. Elle tenait un bloc-notes dans ses petites mains où ressortaient des griffes à la place des ongles.

- Gushoshin! Explosa Tsuzuki. Me fais pas des frayeurs pareilles!

- Désolé mais le patron m'a envoyé ici de toute urgence afin de vous aider dans votre mission et garder un contact. J'ai laissé tout ce que je faisais à mon petit frère et je suis là.

Hisoka regarda encore quelques instants le préau où quelques élèves se trouvaient, portant un uniforme scolaire.

- As-tu des renseignements sur le centre, Gushoshin? Demanda-t-il.

Le petit bibliothécaire feuilleta dans son bloc-notes.

- Oui, le centre a été ouvert il y a tout juste quatre ans, dirigé depuis tout ce temps par Tetsuo Migamôto, que nous avons retrouvé mort quelques semaines auparavant. Mais à peine a-t-il été ouvert que certaines rumeurs ont circulé.

- Quel genre?

- Eh bien, la technologie du centre, par exemple. Au début, cela ne devait qu'être un bâtiment comme les autres mais les plans de l'architecture ont été modifiés au fil des années. L'intérieur devint plus moderne, on put même mettre des ordinateurs ultra perfectionnés. Migamôto prit des enseignants pour les élèves, une règle fut établie. Mais tout cet argent, personne ne sait où Migamôto l'a déniché. On soupçonnait une escroquerie mais après maintes enquêtes, Migamôto s'est retrouvé innocenté.

- Un génie des affaires pour le bien de son école, remarqua ironiquement Hisoka dans un sourire. Mais cette affaire d'argent n'est pas très claire, faudra surveiller ça.

Tsuzuki s'appuya à la grille.

- Et nous, comment on va s'introduire dans ce centre?

Gushoshin prit une feuille de son bloc-notes.

- Hisoka, tu as été admis dans le centre en tant que nouveau.

- Je change de nom?

- Non, pour cette fois, tu es libre. Personne ne vous connaît à Kagoshima, vous pourrez donc employer votre vrai nom sans problème. On a déjà ta chambre, tu seras avec un autre pensionnaire.

Hisoka fit une grimace. Il aurait préféré être seul dans sa chambre. Son pouvoir d'empathie lui ferait sentir les sentiments de son co-locataire et se serait très désagréable. Il retint un bâillement, depuis la vision de cette nuit, son sommeil s'était fait plus léger, ce qui était assez contraignant. Il se sentait un peu sur les nerfs et machinalement portait ses yeux sur ses mains à chaque fois qu'il le pouvait, espérant ne pas revoir des plaques rouges s'inscrire sur sa peau.

« Ce mouton noir, je le torturerai… »

Les paroles de cet homme glacial lui revinrent en mémoire. Et il se rappela comment lui avait réagi, la rage au cœur.

« Pourquoi est-ce que je me suis tant inquiété pour Tsuzuki? Ce n'est que mon partenaire… »

- Et pour moi, fit Tsuzuki, ramenant Hisoka à la réalité. Je suis inscrit en tant que quoi? Je suis trop vieux pour être un pensionnaire.

- Non, vous vous avez inscrit en tant que…

Un camion passa devant eux, brouillant dans un bruit assourdissant la voix de Gushoshin.

A suivre…