Poupée de sang
Par Tsubaki Hime
Salut à tous !! Voici « enfin » le nouveau chapitre. Il aurait pu être un peu plus long mais c'était ça ou bien en faire un de quinze pages ! Rassurez-vous, le prochain est presque fini et l'épilogue est en cours. Je vous souhaite une bonne lecture.
Blood Kiss, Tsubaki Himé.
Chapitre X
Arabesques maudites
Tu tremblais… Ton corps était parcouru de frissons et de sueurs froides. Mais tout se déroulait bien. La lune, la seule lumière qui avait la pureté nécessaire, était rouge sang. La couleur de ta destinée. Cette nuit, dans cet espace clos… je fis de toi mon autre moi…
- Les autres poupées sont mortes grâce à moi… Je suis le bourreau…
Hisoka, dans son demi-coma, eut une comme un tremblement à cette révélation. Tatsumi et Watari, figés, contemplaient le jeune homme qui pointait toujours le canon du revolver contre sa tempe.
Kawashi écarquilla les yeux, pétrifié d'horreur.
- Non… Ce ne peut pas être toi… Tu ne peux pas être le meurtrier! Jamais!
Kagura eut un petit sourire cruel. Ses yeux à l'étincelle noire de vengeance de rage brillaient toujours par l'astre de la lune se reflétant dans les débris de verre. On aurait dit qu'il faisait un jeu dangereux, comme les gamins lorsqu'ils voulaient des émotions fortes.
- Vous êtes un homme faible, professeur, lança-t-il d'une voix douce mais menaçante comme le revolver qu'il tenait en main. Ces gens, ces autres poupées insouciantes… Ils étaient tous prêts à vous mener dans leur jeu. Je vous ai protégé. J'ai de nouveau tué. Pour vous. Pour nous…
Kagura lança un bref coup d'œil à Hisoka.
- Lui, je pensais lui faire confiance mais finalement, il m'a trahi. Comme tous les autres. Je n'ai plus personne d'autre que vous, professeur. Et même si je dois souiller mes mains déjà enduites de sang, je le ferai! Encore et encore!
- Kagura…, murmura Kawashi.
Il fit deux pas vers son élève et amant. Puis deux autres encore. De nouveau la panique saisit Kagura qui pointa son arme sur son professeur. Ses mains se remirent à trembler. Il n'était pas difficile de comprendre qu'il lui était impensable de tirer sur la personne qu'il aimait le plus.
- Ne… Ne m'approchez pas! S'énerva-t-il. Je… ne veux pas que vous veniez vers moi!
Mais Kawashi avançait de plus en plus. Tatsumi, aux aguets, s'aperçut que l'atmosphère devint de plus en plus lourde d'ondes prêtes à frapper.
- Mr Kawashi, faites attention!
Le professeur eut un bref sourire.
- Je le connais… Il n'osera pas… Je ne le connais que trop bien…
Le visage de Kagura perdit toutes ses couleurs. Chaque pas l'un après l'autre, le professeur s'avança, prudemment mais sûrement. Les mètres parcourus ne faisaient que renforcer Kagura dans son angoisse et sa panique. L'adolescent, ayant perdu toute contenance, fixait Kawashi d'un regard perdu. Les deux Shinigami à la porte d'entrée regardaient la scène, sans oublier d'être prêts à intervenir en cas de problème.
- Kagura…,souffla Kawashi, imperturbable. Arrête cette folie… Ce n'est pas toi qui est en face de moi. Ca ne peut pas être toi…
- Taisez-vous! Taisez-vous! Cria Kagura, complètement paniqué.
Sa main trembla fort. Trop fort.
PAN!
La balle rata d'un centimètre la tête du professeur de japonais qui malgré un léger geste de recul, reprit vite courage et se remit à avancer.
On aurait dit une étrange danse. Une scène de théâtre improvisée. Chaque pas de Kawashi vers sont élève était un véritable supplice pour ce dernier. Et, lorsque la dernière barrière fut franchie, le corps du jeune garçon était tout près, bien trop près de celui de Kawashi. Le canon encore tiède du revolver était pressé contre le cœur du professeur, et le doigt posé sur la gâchette de Kagura prêt à presser. C'était un pari risqué. Le jeu morbide de l'arme dangereuse.
- Kagura, calme-toi…
Les pupilles de Kagura se dilatèrent et tous ses membres se mirent à trembler violemment, comme s'il venait de plonger dans un bain rempli d'eau glacée. Son visage, aussi pâle que celui d'Hisoka, était figé dans une peur irrémédiable.
- Non… Laissez-moi… Lai…
- Kagura, reprends tes esprits…
Stupéfaits, les deux Shinigami contemplèrent la scène. Kawashi prenait le risque de calmer un meurtrier complètement hypnotisé par la peur et la rage. Cet homme aux yeux sages, au visage bienveillant avait une force incroyable en lui, Tatsumi comme Watari ne purent que le constater.
Lentement, mais avec fermeté, Kawashi plaça ses bras contre le dos de Kagura et, avec une douceur jamais égalée, le serra tout contre lui, malgré la pression dangereuse du canon contre son cœur qui battait une chamade soutenue. Kagura tenta de se débattre, ses pupilles devenant si petites qu'on pouvait croire qu'il était sur le point de faire une overdose.
- Aah… Non… Ne me touchez pas!! Laissez-moi!
L'étreinte amoureuse et tendre de son professeur et amant se fit plus forte et protectrice. L'odeur de l'Eau de Cologne monta en lui et de nouveau ses pensées se brouillèrent.
- Non, Kagura, chuchota Kawashi à son oreille. Je t'ai promis que je t'écouterai. Je suis tout près de toi, je peux écouter les voix qui te font mal. Alors, calme-toi, Kagura, je suis là… Je suis là…
- Aaah…
Une chaleur se mit à irradier dans le corps de Kagura. Puis, avec une puissance extrême, un halo bleuté l'entoura, le parcourut tout entier. Des éclairs, aussi vivaces et dangereux que des serpents venimeux, s'enroulèrent tout autour de ses membres dans un écho incessant. Les pierres, sous l'imminente explosion, se fissurèrent là où tout son corps était engourdi.
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHH!!!!!!!!!!
ZBAAAAAAAAAAAAAAAAAAMM!!!
Une onde fulgurante traversa la pièce dans un grondement gigantesque, comme si des dizaines de bombes explosaient simultanément. La lumière, à cet instant fut si aveuglante que Tatsumi et Watari ne virent plus rien, malgré leurs pouvoirs.
- Hisoka!!
Leur cri se perdit dans le brouillard et la poussière ce résultat de cette tentative vaine de repousser un être aimé.
ZBAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAMMM!!!
Cette onde… Plus fulgurante que tout…. Un tremblement assourdissant se fit sentir tout autour du Shinigami aux yeux d'améthystes. Des pierres grosses comme un poing de géant s'écrasèrent sur le sol fragilisé, provoquant une vibration beaucoup trop violente pour le bâtiment. Des nuages de poussières se dégagèrent de cette onde meurtrière.
Dans ce brouillard suffocant, Tsuzuki eut la terrible impression que s'il ne montait pas au premier étage, il ne verrait plus jamais Hisoka. Et là… sa vie immortelle se finirait en même temps que celle de son partenaire qu'il aimait tant.
- HISOKAAAA!!!
Suzaku, le Dieu du Feu, battit violemment l'air de ses ailes enflammées pour faire dissiper les poussières de plâtre. Son cri intérieur raisonna dans l'être de Tsuzuki. De la télépathie divine.
« Suzaku… Détourne leur attention… Fais en sorte qu'ils ne puissent pas me rejoindre… »
La mélodie protectrice de l'oiseau divin le rassura. Les yeux ocres et brillants comme des rubis de l'esprit eurent une étrange lueur. Il se préparait à attaquer grâce au sort de Tsuzuki.
De nouveau l'air devint chaud tandis que le halo doré enveloppa Tsuzuki dont les mains s'étaient de nouveau jointes en prière.
- BAKU!!
L'ordre de l'attaque prononcé, Suzaku ouvrit son bec d'or et dans un cri déchirant et mélodieux, un rayon aveuglant jaillit pour frapper en plein cœur le Roi Dragon du docteur aux yeux d'argent.
BRAOUUUUMM!!!
Le bruit de l'attaque provoqua un immense éclat de rire à Muraki dont les pupilles écarquillées ne faisaient que ressortir la folie qui émanait de lui.
- HAHAHAHAHAHA!!! Que tout scintille! Que tout illumine ce monde ténébreux! FUYEZ TSUZUKI!! FUYEZ MAIS LA MORT TOMBERA SUR L'ÊTRE CHER QUE VOUS AIMEZ PAR-DESSUS TOUT!!!! ALLEZ LE REJOINDRE MAIS JE SERAI LA!! ENCORE ET TOUJOURS!!! HAHAHAHAHA!!!
La lune embrassait les flammes de l'Enfer s'écoulant du rez-de-chaussée. Et ce rire maléfique, sonore et terrifiant, fit frémir tous ceux l'entendant.
« Ne meurs pas, Hisoka! Ne me laisse pas ! »
Cette phrase incessante ne quitta pas une seconde l'esprit de Tsuzuki qui monta les marches tremblantes de l'escalier.
- Watari! Watari! Est-ce que ça va? Tu n'as rien?!
- Non, ne t'en fais pas, Tatsumi… Ah mes lunettes…
Tatsumi, les membres encore tremblants par le choc de l'onde, se rendit compte de ce qu'il venait de faire. Pris d'un terrible pressentiment, il avait saisi à bras-le-corps le scientifique qui, complètement ahuri avait échappé à cent kilos de pierres brutes. Mais le résultat de la secousse avait fait tomber brutalement ses lunettes sur le sol et le plus drôle -d'un certain point de vue en tout cas- était que Tatsumi avait protégé le corps de Watari contre le sien, les amenant à se retrouver dans une position peu ordinaire.
Les yeux ambrés du scientifique s'écarquillèrent de surprise et peu à peu, des rougeurs apparurent sur ses pommettes. Il se dégagea des bras de Tatsumi, cherchant à tâtons ses précieuses lunettes. Il les remit, encore un peu secoué mais lorsqu'il parvint à voir plus clair, il se raidit.
- Hisoka! Kagura!
Tatsumi se figea à son tour, ébahi par ce qu'il voyait. Une bulle protectrice avait enveloppé les trois garçons, les protégeant de l'onde que Kagura avait lancé sous l'emprise de la panique. Puis, peu à peu, dans un écho sourd, les parois psychiques se désagrégèrent.
Watari se précipita vers Hisoka dont le corps, libéré de l'onde, avait glissé et s'était affalé sur le sol. Il était à moitié inconscient et de toute évidence, l'apparition de Watari le surprenait à peine, après tout ce qu'il avait vu.
- Watari…, souffla l'empathe.
- Ne parle pas, laisse-moi te soigner. Oh c'est pas vrai… Tu as trois côtes cassées et une vertèbre déplacée…
Watari se mordit la lèvre. Hisoka était rudement mal au point après toutes les attaques qu'il avait du endurer.
- Tsuzuki…, murmura Hisoka d'une voix bloquée par la douleur. Où est-il? Il… n'a rien?
- Ne dis rien, s'il te plaît…
Watari plaça sa main tout près du visage de son ami et collège Shinigami. Une chaleur dorée enveloppa sa paume et parcourut toutes les blessures du moins visibles d'Hisoka qui commença à se sentir un peu mieux. Lorsque la lumière douce cessa, Hisoka se remit péniblement sur son séant, grimaçant douloureusement. Les côtes n'avaient pas fini de se remettre en place et relever la tête n'était qu'un exemple parmi d'autres de sa souffrance.
- Ne te relève pas maintenant, Hisoka, prévint Watari, une main sur son bras.
Hisoka essaya de se dégager mais sans succès.
- Tsuzuki… Il ne faut pas qu'il lui arrive du mal… Je ne veux pas qu'il ait mal… Argh!
Une giclée de sang jaillit de sa bouche tandis qu'il fut plié en deux. Watari le prit fermement par les épaules, l'obligeant à se rasseoir contre le mur qui était tellement fragilisé que c'était un miracle qu'il tienne encore.
- Ca suffit, maintenant, Hisoka! Tu es une vraie tête de mule quand tu t'y mets! Gronda Watari, inquiet de la quantité de sang que l'empathe perdait devant lui. Tu aimerais vraiment que Tsuzuki te voie dans cet état? Tiens-toi tranquille!
- Watari, fit une voix près de lui.
Le scientifique se tourna vers le secrétaire de l'Enma-Cho penché vers Kagura toujours enlacé par Kawashi. Le professeur de japonais, encore essoufflé, avait apparemment tenu le choc.
- Kagura…, murmura-t-il. Ca va?
- Hum…
Il eut un petit gémissement puis dans un soupir douloureux, le jeune élève redressa la tête. Les Shinigami autour de lui ainsi que Kawashi s'aperçurent que ses yeux avaient de nouveau subtilement changé. Ses prunelles noires aux éclats bleu-gris avaient perdu cette étincelle de folie et de vengeance qui avait hanté son regard vide et froid de tueur. Il semblait avoir repris ses esprits et de toute évidence était complètement abasourdi par le désastre qu'il avait accompli.
- Professeur? Souffla-t-il. Qu'est-ce… Qu'est-ce j'ai fait…?
La peur le saisit de nouveau et tous ses membres se mirent à trembler. Il était paniqué mais d'une toute autre façon. Il baissa les yeux vers ses mains et les considéra, horrifié, comme si elle étaient pleines de sang.
- J'ai… J'ai… J'ai de nouveau tué!! Non… Je… Je ne voulais pas… Plus ça… Plus ça… Je suis un meurtrier…
Des larmes amères perlèrent à ses yeux déformés par la souffrance. Kawashi resserra son étreinte.
- Non… Non…, gémit-il, le souffle bloqué par les sanglots.
Tatsumi se pencha vers lui et, sous les yeux ébahis de Watari et Hisoka, posa ses doigts sur les joues de Kagura pour en retirer les larmes. Que ce garçon pouvait le toucher… Une telle ressemblance, aussi bien physique que morale, n'était pas normale. Il était la copie parfaite de Tsuzuki et c'était bien ça qui faisait frémir le secrétaire de l'Enma-Cho réputé pour une froideur calculée.
Kagura, bouleversé par ce geste, mit quelques secondes à se ressaisir. Il ne quittait pas des yeux l'homme agenouillé près de lui dont le sourire était le même que son professeur aimé.
- Vous êtes un Shinigami et pourtant… vos pensées ne sont pas douloureuses… Pourquoi? Je ne comprends plus rien… Pourquoi suis-je le responsable de ce massacre?
Il se tut un instant, le temps de remettre de l'ordre dans ses idées.
- Quand… Quand j'ai tué mes parents et Amano, je savais ce que je faisais. Mes pensées étaient très claires en moi malgré ma peur. Mais… pour les autres… je ne ressentais qu'une haine intolérable. La rage au cœur, je me disais « C'est lui ou moi! ». Une voix dans ma tête me disait que je devais tuer cette personne car elle avait fait du mal à l'être qui m'était cher. Je ne comprenais rien d'autre. Juste ça. Juste cette colère bouillonnante en moi. Mais je ne voulais pas… Je vous jure que je ne voulais pas les tuer, malgré tout le mal que ces personnes avaient fait à Mr Kawashi. Non… Je ne veux plus… être un meurtrier… Pardon… Pardon…
Des perles recommencèrent à couler sur ses joues, un flot désespéré de désespoir que personne ne pouvait arrêter.
- Kagura…
Une voix rompit le silence rempli de sanglots. Le dénommé sursauta et dans un geste se retourna vers l'empathe qui se remettait péniblement debout. Watari l'aida à marcher, le tenant par la taille.
- Je sais bien que tu ne voulais pas tuer ces quatre personnes…, dit-il dans un étranglement, ses côtes le faisant souffrir. Tu as été manipulé et il est aisé de savoir par qui. Muraki s'est servi de toi dans un but mais lequel, je l'ignore.
- Hisoka, je suis tellement désolé!
Au moment où le télépathe voulait prendre Hisoka dans ses bras, ce dernier fut plié en deux par la douleur. Le scientifique, ainsi que Kagura l'aidèrent à se redresser.
Les yeux verts de l'empathe rencontrèrent ceux noirs aux éclats bleu-gris du télépathe. Il n'y avait rien à dire. Il ne devait y avoir d'excuses. A quoi cela servirait-il? Les deux garçons se toisèrent encore un instant et un fugitif sourire passa sur les deux visages.
- HISOKAAAAA!!!
L'empathe sursauta. Cette voix…
- Tsuzuki!!
Des bruits de pas dans l'escalier. Le cœur d'Hisoka bondit dans sa poitrine lorsqu'il l'aperçut, lui, Tsuzuki, appuyé contre le mur, le visage ruisselant de sueurs.
- Tsuzuki!
Le dénommé eut un immense soupir de soulagement. Il était en vie. Dans un sale état peut-être mais encore en vie. Dieu qu'il avait eu peur. Son cœur bien qu'immortel allait finir par lâcher à force.
« Je fais vraiment mes quatre-vingt-seize ans! », songea-t-il, médusé.
Il se précipita vers son partenaire qui malgré la douleur omniprésente de ses côtes cassées, eut un très léger sourire.
- Hisoka, ça va?
- Abruti…, répondit l'empathe avec douceur. Où t'étais passé? Je me suis inquiété pour toi…
Les joues de Tsuzuki s'empourprèrent légèrement.
- Hisoka…
- Tu es tellement distrait…, ajouta Hisoka avec une étincelle mutine dans les yeux. Tu serais capable de te faire mal sans même comprendre ce qui t'arrives.
L'envie de serrer ce jeune garçon aux yeux d'émeraude dans ses bras était surpuissante mais l'idée de lui broyer les côtes n'effleura pas un instant l'esprit du Shinigami qui se contenta de lui ébouriffer affectueusement les cheveux. Ne pas le perdre, le regarder chaque jour avec cette même faim et adoration… Cela était la seule chose que Tsuzuki désirait pour l'éternité.
« Hisoka… »
L'empathe laissa la main de son partenaire glisser dans sa chevelure.
« Pour l'instant… Je me contenterais de ça… Juste ça… En attendant… que mes lèvres délivrent cette vérité qui me tient à cœur… »
Un raclement de gorge ramena les deux Shinigami dans la réalité morbide se déroulant sous leurs yeux. Tatsumi eut un signe de tête tout en remettant ses lunettes correctement sur l'arête du nez. Un geste qui marquait une réflexion évidente.
Tsuzuki lui fit un sourire qui se voulait jovial.
- Tatsumi! Mais qu'est-ce que tu fais là?
« Il ne s'est même pas rendu compte qu'on était ici depuis un petit bout de temps », remarqua Watari, résistant à l'envie d'envoyer son ami si désinvolte à l'autre bout de Meifu d'un coup de poing bien placé. « Mon Dieu… Il changera jamais celui-là… »
Le secrétaire, bien que la même envie passa imperceptiblement sur son visage, eut une grimace.
- C'est le patron qui m'a envoyé ici avec Watari. Il se trouve que l'aîné Gushoshin, après avoir fait des vérifications sur les données du centre, nous a contacté. Il avait, semble-t-il un terrible pressentiment vous concernant. Et à en voir les dégâts du bâtiment, il ne s'est pas trompé.
Kagura baissa de nouveau la tête, honteux. Il ne semblait pas cependant se rendre compte de la force psychique qui s'était développée en lui. Si Kagura était un Shinigami, sans nul doute qu'il serait le deuxième bras droit du roi Enma après Tsuzuki.
- Watari, fit Hisoka en lançant un coup d'œil au scientifique. Sais-tu combien de temps il faudrait à au bâtiment pour s'écrouler?
Le Shinigami sortit de sa poche blanche un carnet dans lequel il nota deux ou trois informations.
- A en voir les fissures dans les murs porteurs et la pression se résultant des ondes survenues… Le bâtiment s'écroulera dans deux heures grand maximum, s'il n'y a pas une autre explosion ou une attaque violente.
Tsuzuki hocha la tête.
- On va vite partir d'ici sinon je ne donne pas cher de nos corps.
- Qui a dit vous alliez partir, Tsuzuki?
Tout le groupe se figea au son de cette voix glaciale et langoureuse.
- Muraki…, siffla Hisoka, l'étincelle de haine flamboyant de nouveau dans son regard.
Kagura, en le voyant, fut parcouru de tremblements. Il pivota la tête, espérant que les yeux argentés du docteur ne viennent pas croiser les yeux.
Le médecin les regardait, très calme, les mains dans les poches de sa blouse. On aurait dit qu'il se divertissait, comme un réalisateur contemplant les acteurs de son film. Tour à tour, ses yeux balayèrent les quatre Shinigami ainsi que le sous-directeur et l'élève télépathe.
- Remarquable fuite, mon cher Tsuzuki, dit Muraki dans un sourire poli. L'attaque de votre maudit Suzaku a affaibli mon Oryu mais je vous avais dit il y a tout juste quelques instants…
Il baissa la tête en ne les quittant pas des yeux. La leur de ses yeux se fit plus dure que la glace.
- Je serai toujours là… Où que vous puissiez partir, je serai là et l'être cher à vos yeux… mourra… de mes propres mains…
Inconsciemment, Tsuzuki se mit devant Hisoka, prêt à le protéger de son corps. Ses poings se serrèrent si fort que les articulations blanchirent. Hisoka, stupéfait par ce comportement, ne dit pas un mot.
- D'après ce que j'ai compris de ton sous-entendu, tu as manipulé Kagura, dans un but horrible. Encore une fois, tu as sacrifié des innocents pour assouvir tes desseins maléfiques, gronda le Shinigami aux yeux d'améthystes. Tu te joues des Dieux de la Mort comme le maître d'un échiquier… Mais la pire chose qu tu aies faite…
Une aura sombre et puissante enveloppa Tsuzuki dont les traits du visage s'étaient figés dans une colère plus froide que la Mort elle-même. Il tendit brutalement la main vers Muraki, son regard capable de faire trembler n'importe qui.
- TU T'EN ES PRIS DE NOUVEAU A HISOKA!!
ZBAAAAM!!
Une boule de lumière ténébreuse jaillit de sa paume tendue et dans un éclat aveuglant, explosa contre le mur, à deux centimètres du crâne du docteur. Un filet de sang perla à sa tempe. Calmement, tranquillement, l'humain aux yeux d'argent passa son index sur le liquide rouge qui s'écoulait de sa blessure pour le poser ensuite sur ses lèvres qu'il humecta avec délice. Il ne semblait pas le moins du monde choqué ou furieux. Non, au contraire, un rire secouait ses épaules.
- Qu'est-ce que cela peut bien vous faire, Tsuzuki, répondit-il avec élégance. Vous ne pouvez pas comprendre les relations que j'entretiens avec mes poupées… Si belles, si pures et adorables… Qui dans ce bas-monde ténébreux ne rêverait pas de les souiller, de les faire tomber dans leur piédestal d'éloges et de lumière?
- Tes poupées? Répéta Hisoka, les yeux écarquillés. Je… ne suis pas le seul…?
Muraki le considéra ave amusement et mépris.
- Pendant trois ans, je n'ai cessé de t'observer… Ton souffle qui devenait plus faible que le murmure du vent, tes yeux dont l'éclat de la vie devenait terne… Tu étais une poupée superbe, rongée par la douleur… Mais… il y a deux ans exactement… J'ai de nouveau trouvé une chose unique, magnifique…
Tatsumi fronça les sourcils.
- Que veux-tu dire par là?
Le sourire démoniaque du docteur s'élargit.
- Je vais vous le montrer… Vous comprendrez de quoi je veux parler…
Il tendit une main vers le groupe devant lui, sans pour autant désigner quelqu'un en particulier.
FLASH!!
- Aah!!
Hisoka fut plié en deux par la douleur.
« Oh non… Pas ça… »
Le goût cuivré du sang se posa sur sa langue gonflée. Une chaleur brûlante s'engouffra dans ses entrailles et ses yeux furent vrillés d'une lumière explosive et infernale. Ses os se mirent à craquer dans d'atroces bruits sonores et monstrueux. L'empathe, ayant presque « oublié » cette douleur qui caractérisait si bien son maléfice, sentit des larmes rouges brouiller ses yeux. Il pleurait des gouttes de sang noirâtre. Dans sa vision obscurcie, il aperçut sur ses mains tremblantes, parcourues de spasmes incontrôlables, des signes apparaître sur sa peau. Rouges, brûlantes.
« On pouvait frotter, frotter, ou prier… Telle la rouille… ces marques resteraient, symbole de la malédiction… »
- Hisoka! Kagura!
« Ka… Kagura? »
Recroquevillé sur le sol, Hisoka tourna la tête vers le télépathe. Et ce qu'il vit lui retourna l'estomac.
Kagura était livide, en proie à une crise de tremblements si fortes que ses mains, pressées contre ses joues, laissaient des traces de griffure sanglantes. Des gémissements sourds, atténués par des pleurs, sortaient de sa bouche et des perles rouges perlaient à ses yeux dont les pupilles étaient dilatées d'horreur et d'épouvante. Il posa violemment sa main contre son torse.
- Ca brûle!! Paniqua-t-il. Au secours!!
Hisoka brûlait lui aussi. Les deux garçons, complètement englués dans la douleur, avaient l'impression qu'un feu immense et noir les traversait. N'en pouvant plus, Hisoka déchira sa chemise, laissant voir les arabesques démoniaques et rouges envahir tout son buste, son dos, ses bras, tels des serpents venimeux.
- Tsuzuki… Tsuzuki…, gémit-il.
- Hisoka! Tiens bon! S'écria Tsuzuki, horrifié.
Kawashi écarquilla les yeux, ne pouvant quitter du regard son élève et amant.
- Kagura…
Watari et Tatsumi eurent le souffle coupé. Dans un geste de désespoir, Kagura avait arraché sa chemise tout comme Hisoka. L'horreur se répétait. Noires. Des marques noires se dessinaient sur sa peau d'albâtre, arabesques d'une malédiction immortelle. La longue et large cicatrice du torse de Kagura était le début des signes, comme si la blessure était infectée. Du sang noirâtre perlait de la plaie de nouveau ouverte, coulait comme les larmes rougeâtres du télépathe en proie à la douleur plus qu'horrible.
Noires. Ténèbres de son cœur meurtri… Et les gouttes rouges glissant sur ses joues étaient le signe éternel d'une malédiction encore inconnue…
A suivre…
