Une cinquantaine d'année auparavant...

Tom regardait sa fenêtre. Il était assis sur son lit métallique, le dos droit, tentant d'oublier qu'il se trouvait dans l'orphelinat Cole et qu'il était entouré de moldus insignifiants. Au loin, il entendait les petits enfants chahuter ce qui l'énervait d'autant plus.

Tom était solitaire. Tom était fort. Tom s'ennuyait. Le jeune homme regardait l'extérieur de la pension. Londres était ravagé par la guerre. Il ne savait depuis quand le quartier était devenu aussi sale et impure, peut-être cela avait toujours été ainsi. Honnêtement, il s'en fichait. Le brun exécrait cet endroit, tellement qu'il s'était juré de le maudire plus tard, même si le jeune homme se demandait si ce n'était pas déjà fait aux vues de l'aspect du lieu.

Il soupira puis tourna sa tête vers le seul et unique objet acceptable de sa chambre. Un grand miroir. Tom s'inquiétait de sa beauté, non pas car il était soucieux de plaire, mais car il savait mieux que personne que l'on peut faire beaucoup de choses avec un beau sourire et une apparence attrayante.

Ses cheveux noirs et bouclés retombaient sur son front pâle, sa bouche esquissait l'un de ses nombreux sourires dont il avait le secret, son nez pointait vers le haut dans un signe de supériorité. Tom était comme un dieu parmi les mortels, un ange tombé du ciel, mais il suffisait de plonger ses yeux dans son regard vermillon pour comprendre qu'il n'était pas une petite créature aillée descendue des cieux, mais bel et bien un démon dont la place résidait sans nul doute en enfer. Et même la-bas, il aurait été le roi.

« Roi ». Comme il aimait ce terme ! Seigneur aussi il aimait. Car parfois les rois n'avaient aucune grandeur, parfois ils étaient vieux et immondes. Jamais Tom ne serait ce genre de roi. Jamais. Il se l'était juré.

Le regard de sang du jeune homme se posa sur ses livres. Bientôt, il retournerait à Poudlard. Bientôt. Mais pas assez tôt à son gout. Tom Jedusor n'était pas connu pour sa patience, loin de là.

Il frémissant déjà à l'idée de l'asservissement et la crainte qu'il procurera à son retour. En première année, il dominait déjà les premières et les deuxièmes, en seconde années, les quatrièmes et les troisièmes, et l'année dernière, toute l'école était à ses pieds.

Les nouveaux allaient apprendre à le craindre, les anciens allaient continuer.

Oui, Tom en frémissant d'avance.

« On passe à table le monstre !

Jedusor se tourna vers la porte d'où les voix d'enfants s'élevaient. Il était haï, mais il s'en fichait, après tout, il leur était supérieur.

-J'arrive, grogna Tom.

-Heureusement que tu pars bientôt, on aura plus à te supporter ! »

Oui, heureusement.

Plus qu'un mois.


« Le château est impressionnant.

-Il nous aura fallu beaucoup de temps pour le construire.

Deux silhouettes se tenaient devant la grille de l'archaïque bâtiment. L'une des deux était transparente. L'autre en revanche, était bien réelle. Rowena se tourna vers la jeune fille à sa droite. Sans surprise, Titania arborait un visage calme, mais seul un aveugle n'aurait pas vu cette lueur briller au fond de ses yeux d'eau. Elle passa une main dans ses cheveux d'ébène, attachés en un chignon négligé dans une pince en or sertie d'émeraudes, dont quelques lèches venaient s'échapper.

C'était calme, comme l'est n'importe quelle nuit. Quelques hiboux hululaient dans la noirceur, certains oiseaux continuaient à chanter, et une petite brise faisait gentiment bruisser les feuilles de l'île du parc sur laquelle elles étaient.

Titania jeta un regard sur le reflet du château dans l'eau du lac Noir, aussi lisse qu'un miroir, reflétant la nuit étoilée avec une telle netteté qu'elle aurait pu rester admirer ce cadre des heures encore.

-Salazar n'est pas avec vous ? Demanda une douce voix féminine derrière elles.

Titania jeta un petit regard minuscules vagues qui frôlaient les orteils de ses pieds nus, enfoncés dans la mousse verte de l'île.

-Non, il a voulu faire le tour du château avant de rentrer à Yllyame.

Rowena se tourna vers elle, un petit sourire sur les lèvres. Titania avait toujours été si proche du spectre qu'elle ne s'étonnait plus de l'entendre dévoiler des secrets sur lui dont elle ne ferait jamais soupçonné l'existence.

Helga Poufsouffle souffla, amusée, puis les rejoignit sur la rive, admirant à son tour l'école qui avait formé toutes sa vie, une boule nostalgique au fond du cœur.

-Ce sera chez toi, bientôt, fit-elle en souriant à Titania.

La seule vivante ne put s'empêcher de sourire à son tour.

-Il est si beau... Murmura-t-elle.

-N'est-ce pas ?

Titania tourna un peu la tête pour apercevoir le spectre de Salazar Serpentard, un petit visage éclairant son noble visage, bleuté dont les contours semblaient flous. Il s'approcha d'elle, le fantôme de sa longue cape voletant sous la force de la légère brise.

-La balade t'a plu visiblement, petit nostalgique, va, ricana gentiment Rowena.

-Tu n'as pas idée.

Helga fit tourner sa bague du bout de doigts, pensive. Ce château lui rappelait tant de souvenirs, bons comme mauvais, ceux de sa lointaine jeunesse, et de l'époque regrettée où elle était encore en vie. C'était même douloureux de seulement l'observer, alors s'imaginer y entrer ? Constater combien le temps l'avait changé ? Elle ne pouvait s'y résoudre.

Rowena lui jeta un regard entendu. Poudlard n'était plus leur génération, ils étaient le passé, et il fallait le laisser à l'avenir.

Titania inspira l'air doux de la nuit, celui qui deviendrai bientôt le sien, se contentant de profiter du calme reposant de la noirceur. Elle releva la tête pour admirer les étoiles par centaines elles brillaient dans le ciel d'encre, dessiné comme une peinture dont on aurait étalé les embruns blancs sans y faire attention, ou un manteau noir que l'on aurait décoré de milliers de pierres d'ivoire. Elle les connaissait toutes, à la perfection. Chaque étoile, chaque constellation, sa place et son histoire, son nom et le chemin qu'elle devrait suivre pour rentrer.

La brune tendit le doigts alors qu'une petite fée s'y posait. La jolie créature verte, brillante, battit des ailes face à elle, la regardant avec un petit sourire en lui tendant un gland.

-Merci, fit Titania doucement en attrapant le petit présent délicatement.

Rowena lui jeta un regard doux, échangeant un regard attendrit avec Helga, dans son dos.

Titania apporta le gland à ses lèves, sous les yeux perplexes de la petite fée au chapeau champignon, puis la brune ferma les yeux, attendit quelques secondes, et jeta le gland dans l'herbe, au milieu des arbres. La petite fée poussa une mignonne exclamation de surprise lorsqu'elle vit des branches sortir du sol, s'enroulant délicatement pour venir former un arbre tortueux, lentement. Ses ailes battirent de joie, et voyant des fleurs bleues apparaitre sur le lierre qui entourait les branches alambiquées. Heureuse, elle se mit à voleter autour de Titania, dessinant une petite tresse avec quelques mèches que laissait s'échapper sa pince.

Titania rit doucement en voyant une petite tripotée de fées investir l'arbre magique, découvrant cet environnement parfait que la jeune fille venait de leur construire. Elle les admira silencieusement, sachant pertinemment que la main fière que Salazar était posée sur son épaule. Les fées chantaient ce nouvel habitat, visitant les belles fleurs bleues, leurs petits jouant dans les feuilles.

Titania ne put retenir cet énième sourire attendrit. Elle ne se lasserait jamais de ce spectacle.

-Hé bien c'est calme par ici !

La brune souffla, amusée, puis se tourna vers la voix qui venait de briser sa sérénité.

-Chut Godric, apprécie le silence, vociféra Serpentard.

-Tu es barbant, Salazar ! Rétorqua le rouge dans une expression indignée.

-Je préfère être barbant plutôt que désagréable.

-J'ignorais qu'être ennuyeux et taciturne était agréable, rétorqua Godric.

-Et moi que tu connaissais ces mots.

Les deux hommes fantomatiques se faisaient faces, les yeux pleins d'irritation. Il était bien connu que Gryffondor et Serpentard avaient toujours chamaillé entre eux, et ce n'avait pas changé.

Titania eut un petit sourire amusé, presque triste alors qu'elle pensait au fait qu'elle ne les entendrait plus se disputer de la sorte durant l'année qui allait venir. C'était le sacrifice pour accomplir ses rêves, et ce n'était certainement pas le fantôme Serpentard qui allait la retenir.

Sentant la dispute inutile arriver, Poufsouffle demande à la seule personne vivante du groupe :

-Au fait, tu sais dans quelle maison tu vas aller ?

Titania lâcha un petit ricanement dépité. Non, elle n'en avait strictement aucune idée. Et pourtant, elle ne manquait ni d'intelligence, ni de clairvoyance.

Ce n'était pas qu'elle était incompatible, c'était plutôt qu'elle l'était trop

Ses yeux hyalins pouvaient voir au plus profond l'âme. Elle pouvait voir les peurs et pleurs, qu'elle pouvait voir la joie, la haine, la colère. Elle voyait les secrets les plus enfouit, les hontes les plus ignobles, les passés les plus sombres. Elle admirait les plus grandes joies, faisait profiter des meilleurs conseils. Et surtout, elle savait les comprendre. Rusée.

Mais elle était aussi vaillante. Une flamme qui avait bravé maintes intempéries, et qui était, aujourd'hui, plus forte que jamais. Courageuse.

Aussi, Titania tenait ses promesses. Elle n'était pas un ange, mais si on était des siens, alors elle protègerait quoi qu'il advienne. Loyale.

Et enfin, la jeune fille excellait dans tout. Elle n'était pas banale, elle pouvait créer, elle pouvait détruire. Elle était la mémoire. Intelligente.

Oui. Personne ne savait où elle allait aller.

-Plus qu'un moiset nous le sauront, philosopha-t-elle en haussant les épaules, je dirais tout de même Serpentard ou Serdaigle...

Gryffondor bougonna dans son coin alors que Salazar, tout fier, faisait comme si sa main fantomatique caressait sa tête.

Titania releva le regard vers l'immense château.

Et elle avait très hâte. Mais en même temps...

-Vous allez me manquer...

Serpentard, lui jeta un regard doux, puis descendit sa main fantomatique le long de ses cheveux, jusqu'à sur son épaule, aussi présent qu'une vague sensation.

-A nous aussi gamine, à nous aussi...


Némésis bailla, fatiguée. Elle avait passé la nuit plongée à lire, si bien que le réveil était assez ardu. Elle réajusta sa position sur son vieux fauteuil en velours noir, avant de passer sa main dans ses cheveux de neige, en soufflant. Sa tutrice, comme toujours, était absente. Enfin, rien de bien étonnant. Qui voudrait avoir quoi que ce soit à faire avec la fille de Gellert Grindelwald, le plus grand mage noir jamais connu ?

Némésis eut un petit rictus, puis grimaça lorsqu'elle vit que son thé avait refroidit.

« A quoi penses-tu petite humaine ?

Némésis se tourna vers la voix. Eillyda sauta sur ses genoux et se roula en boule, sa queue frottant son petit museau.

-A tout et à rien. Et à mon thé, il n'y en a plus dans le placard.

-Pauvre de toi.

Némésis tira la langue à la petite dragonne et passa sa main sur la peau écaillée. En dessous, elle sentit son amie ronronner à la manière d'un chat.

-Décidément, tu es bien plus féline que draconienne, commenta la blanche dans un sourire.

Eillyda claqua sa queue épinée sur la jambe pâle du bébé qu'elle avait vu grandir. Elle souffla de la fumée par ses naseaux, puis se leva, faisant craquer les vertèbres de son dos.

-Je sais à quoi tu penses, soupira la dragonne en ouvrant ses yeux.

-Ce sera pareil cette année encore.

Eillyda avait un caractère affreux, mais s'il y avait bien une chose pour laquelle elle était forte, c'était bien parler avec la détestée Némésis Grindelwald.

-Ne les écoute pas. Tu n'es pas ton père.

-Ca fait bien longtemps que je n'ai que faire de ce qu'ils aiment raconter.

Némésis se plaisait à porter le nom « Grindelwald » par moments. Un nom remplit de grandeur et de ténèbres, un nom plein d'une lugubre noblesse, un nom qui pouvait bien lui correspondre. Enfin... Elle aurait cent fois préféré que sa mère lui donne le sien avant de mourir...

La jeune fille jeta un regard au lever de soleil, qu'on ne discernait qu'à peine dans le brouillard continuel qu'il y avait au-delà de ses fenêtres.

-Pourquoi tu me regardes comme ça, grimaça la blanche en faisant tomber ses yeux vers la dragonne.

-Tu n'en a vraiment rien faire d'eux, commenta Eillyda attristée. Sais-tu seulement ce qu'est l'amitié ?

Némésis referma son livre dans un claquement sourd tout en soufflant du nez.

-Ils ne m'aiment pas, je ne vais pas leur courir après, ça ne sert à rien.

-Pauvre folle, souffla la dragonne naine.

Celle que l'on appelait « La Noire du Sort » se leva, tout en faisant tomber son amie qui grogna, puis se dirigea vers une étagère de la bibliothèque pour ranger une de ces nombreux grimoires de magie noir que possédait la demeure. Puis, Grindelwald se dirigea vers la fenêtre. Le soleil se levait, annonçant une nouvelle journée, chassant les ténèbres rassurantes de la nuit. Malgré les belles couleurs, Némésis détestait l'aube car celle-ci marquait la fin de la noirceur. Tout le contraire du crépuscule. Némésis aimait beaucoup cette heure-là. Bien plus que le petit matin.

-Tu es sûre de ne pas vouloir m'accompagner à Poudlard ?

-J'aimerais, mais tu sais bien que je ne peux pas.

La jeune fille se tourna ensuite pour admirer la pièce qu'elle avait spécialement redécorée selon les couleurs de sa maison. « Serpentard ». Némésis senti son cœur s'emballer en repensant à sa maison. Si l'on poussait Jedusor, elle était parfaite. Némésis avait vraiment hâte de retourner à Poudlard, sa vraie demeure. Même si Dumbledore serait là. Elle en trépignait d'impatience.

-Tu deviens grande, déclara le petit reptile. Je suis fière.

-Si tu le dis, Némésis haussa négligemment les épaules alors qu'Eillyda soufflait. J'ai vraiment hâte de retourner à Poudlard, murmura finalement la Blanche.

« Plus qu'un mois. »


Le son du Poudlard express résonna par-dessus l'effervescence de la foule. Tom soupira déjà épuisé par le bruit que produisait ces créatures insignifiantes. Mais, malgré cela, Le brun ne pouvait s'empêcher d'être satisfait. Les élèves qui le croisaient le fixaient dans un respect teinté de crainte et émerveillement. Les parents, eux, ne connaissaient rien du charmant garçon et se contentaient de l'admirer.

En revanche, combien même Tom était louangé, ce n'était pas le cas de tout le monde. Après avoir traversé le quais - sans difficultés puisque les gens se décalaient face à son charisme - le Serpentard aperçu au loin une chevelure blanche, légèrement platine.

Némésis Grindelwald.

La foule s'écartait de crainte, pourtant Némésis gardait jalousement sa magie au fond d'elle, mais ce n'était pas elle qu'on fuyait, c'était bien le nom qu'on lui avait collé. Tom fronça les sourcils. L'allure de la jeune fille, ne dégageait qu'assurance et noblesse. Et juste pour ça il la haïssait.

Mais surement cela ne serait pas aussi fort si Tom n'était pas autant attiré par elle.

Une nouvelle fois le train sonna. Némésis releva la tête dans un juron alors qu'elle fouillait les poches de son menton avec hargne. Quelle idée de coller un sort d'extension aussi grand ! Némésis toucha des livres, une des clefs, des pièces, sa baguette, mais elle ne parvenait pas à trouver son billet !

De nouveau, elle poussa un juron alors que le train sifflait, puis, énervée, elle laissa tomber ses bras sur son corps et se résolut à lancer un Accio.

La Blanche mit ses cheveux en arrière, attrapa le maudit billet, puis entra enfin dans l'antique locomotion.

Tom, lui, eu un rictus en la voyant disparaître, elle ne lui avait même pas adressé un seul regard. Et même s'il ne se l'avouerai jamais, le mage noir était frustré de ne pas avoir pu voir ses yeux magnifiques smaragdins. A son tour, le garçon se tourna puis rentra dans le train et s'installa dans son compartiment habituel, dans le coin le plus sombre du train, au dernier wagon.

Celui-ci était vide, à sa plus grande joie, il s'assit donc dans une position pleine de grâce et de noblesse, comme il avait été obligé de l'apprendre, et comme il s'appliquait encore à le faire.

Tom croisa les jambes et sortit un des seuls livres qu'il possédait. Ce n'était pas un livre de magie noire, contrairement à ce que l'on avait l'habitude de voir, mais bien un simple grimoire d'histoire, pour passer un peu des futures sept prochaines heures.

Abraxas Malfoy entra soudain dans le compartiment.

Tom n'appréciait pas grand monde, seul ce camarade avait réussi à rentrer dans son cercle proche. Abraxas avait comme toujours une carrure digne d'un Malfoy, un peu méprisant sur les bords, impassible s'il le voulait, ou fier de son nom et de sa fortune. Il se plaisait souvent à dire que les Malfoy avaient plus d'influence que n'importe quel ministre de la Magie, mais malgré son attitude, il restait le plus calme et le plus posé, celui sur qui Tom pouvait le plus compter.

« Bonjour Malfoy.

Tom détourna son regard sur son livre. Ambroise Avery, Armand Zabini, Cygnus Black, Erza Prince, Isidor Lestrange, Orion Black... Tous lui étaient dévoués, et Tom avait dû batailler pour que ce soit le cas.

-Bonjour Jedusor. »

La discussion s'arrêta là. Court, rapide et efficace. C'est pourquoi Tom appréciait le personnage.

Le Poudlard express démarra et Jedusor rouvrit les yeux, attendant patiemment la fin du voyage en compagnie du blond.


« En ce jour, nous avions commencé l'année, chacun de notre côté. Mes deux amis avaient repéré tous les gens qu'ils connaissaient. Mais aucun d'eux ne m'avaient vu. Cela n'était venu que sept heures plus tard, sur cette estrade, et même là, nous n'avions pas encore atteint les prémisses de ce qui nous attendait. »

Extrait du journal des Rois de Serpentard, Page 5, Titania


Titania souffla épuisée. Elle marchait lacement, le pas aussi lourd qu'elle avait l'impression que ses chaussures étaient de plomb. Non pas que son corps fût fatigué, mais plutôt son esprit, qui s'encombrait de maintes criantes et plus de stress qu'il ne le devrait.

Et pourtant, ce n'était pas cela qui l'inquiétait le plus, non.

C'était bien pire.

Bien plus terrifiant.

Une souffrance qu'avaient connu maintes personnes avant elle.

Le grand saut dans l'inconnu.

L'entrée dans la fausse des serpents.

Et oui...

Pour la première fois de sa vie, elle allait devenir écolière.

Comment garder son calme ? Être posée et parfaitement sûre d'elle alors qu'elle savait qu'elle allait bientôt pénétrer une école de sorciers aux sangs purs. Titania n'était pas comme eux. Elle ne vivait pas avec eux. Et en plus de l'appréhension de l'inconnu, celle des secrets venait s'ajouter. Là-bas, il y aurait des sangs purs, nombreux, sûrs d'eux, riches, qui la prendraient immédiatement pour cible. Elle n'avait pas spécialement peur d'eux, seuls, ils n'étaient pas grand-chose, mais à plusieurs, leurs amis, leurs familles... Surtout leurs familles. Leurs familles plus anciennes que le monde. Des familles pour qui elle ne serait qu'un cafard à écraser.

C'était ce qui lui faisait le plus peur.

Ironique lorsque l'on savait combien elle avait vécu plus terrible.

La jeune fille soupira de nouveau.

Elle ne se plaignait pas, ce serait culotté de le faire, même si elle savait d'ores-et-déjà que cette étape décisive de sa vie ne commencerait pas de la meilleure manière qui soit.

Et Titania ne disait pas cela à cause de l'entrée de la voie 9,3/4.

Elle avait eu du mal à trouver le voix 9,3/4. Quelle idée aussi de dissimuler un quai derrière un pan de mur ! Enfin,dansun pan de mur, plutôt. Elle était restée quelques secondes devant le pilier, incrédule, entre les deux panneaux, presque proche de faire demi-tour à la recherche d'un sorcier qui pourrait l'aider. Elle avait très bien vu qu'il renfermait quelque chose, ce mur, mais... Très sérieusement... Comment croire qu'on voulait préserver le secret magique en mettant la porte d'entrée devant le nez des moldus ? Comme les humains pouvaient être farfelus ! Elle s'était retrouvée dans la gare, une lettre à la main, l'air bête et hagard, à regarder les deux panneaux de la voix 9 et 10. Puis, elle avait aperçu deux sorciers de son âge foncer avec leurs chariots bondés vers le mur et le traverser !

Si elle se souvenait bien, elle était restée béate quelques instants, avant d'esquisser un rictus d'amusement. Elle avait regardé à droite et à gauche puis avait rapidement traversé. La brune avait alors vu une voie, bondée de sorciers, d'enfants et de maléfices en tous genres. Un véritable capharnaüm de magie et de sorcellerie.

Titania se serait bien arrêtée pour découvrir un peu son environnement, mais pour ne pas paraître suspecte, elle avait usé de ses nombreux entrainements. Elle s'était donc retrouvée à marcher dans l'ombre pour rejoindre le train rouge.

Titania souffla puis jeta un regard attendri à un bébé, tout poupon, qui se tenait à la main de sa mère. Titania eut un petit sourire, fit tourner sa baguette, et regarda la minuscule créature tendre le bras vers le beau papillon bleu qui voletait vers lui. Titania le fit se poser sur son petit nez, et le jeune être loucha avant de se mettre à rire, l'illusion s'envolant dans le ciel.

La brune eut un dernier regard puis se retourna vers le train, apercevant au loin un groupe d'adolescents, vêtus du même habit rouge, fiers comme des paons, le sourire éclatant. Ils marchaient le balai à la main, le dos droit et le torse bombé. Ils affichaient une attitude horripilante.

Des Gryffondors. Évidement.

La jeune fille eut un sourire mi amusé, mi émerveillé. C'était si beau de voir tant de magie, tant de joie... Cela contrastait tant avec ce dont elle avait l'habitude qu'elle se serait bien laissé admirer cette scène quelques minutes supplémentaires.

Titania fit un petit sourire à une gamine qui la regardait en soufflant un « trop belle », puis entra dans le train. Ses pas la menèrent jusqu'à un compartiment, vide, où elle installa son petit sac et sa valise. La jeune fille ne put s'empêcher de sourire de nouveau en regardant le quai. Elle avait tant attendu ce jour qu'elle n'aurait jamais cru pouvoir le vivre. Un sentiment d'accomplissement logeait dans son cœur, répandant sa douce chaleur, comblant le manque des siens.

La sorcière sortit sa baguette de sa poche, y passant son indexe, redessinant les symboles qui y étaient gravés. Malgré son passé, malgré les dangers, malgré ses secrets et les problèmes qu'elle aurait sans doute à régler, Titania Dragya savait qu'elle ferait de Poudlard son seul foyer.


« Nous revoilà.

Titania regardait, comme un mois auparavant, l'imposant château de Poudlard. La bâtisse s'élevait du sol, et son immense tour venait fendre les cieux, illuminés par une infinité d'étoiles, comme pour lui souhaiter la bonne arrivée.

-Que dites-vous ?

La jeune fille se tourna vers la voix à ses côtés. Armando Dippet, le directeur de l'école, lui souriait gaiement. C'était un petit sorcier tout ridé, frêle, et chauve, excepté les quelques rares cheveux blancs et fins qui subsistaient sur son crâne. Il n'avait rien de méchant, mais semblait déjà un peu trop crédule.

-Rien, ne vous en faites pas, Fit Titania dans un doux sourire.

-Bien, si vous le dites...

Titania lui jeta un dernier sourire, se mordant la lèvre de joie devant la magnifique vue du château. Elle y était. Elle y était. A deux pas de ce rêve devenu réalité.

-Poudlard m'a tout l'air d'être une école prestigieuse.

Titania retint son petit rictus. Il n'était même pas nécessaire qu'elle se tourne, elle devinait sans mal le soudain enthousiasme du directeur.

-Ho oui ! Vous devez être sacrément observatrice pour l'avoir remarqué ! S'écria-t-il. Poudlard est sans nul doute la plus prestigieuse école de sorcellerie de toute l'Europe, que dis-je, du monde entier !

Titania l'écouta débiter ses inepties, plus plongée dans ses pensées joyeuses que dans ses paroles, hochant de temps en temps la tête lorsque l'anecdote la faisait gentiment sourire. Elle connaissait tout ce qu'il lui disait, elle en connaissait même probablement plus que lui, mais qu'importait, elle était tellement contente qu'elle ne pouvait s'en sentir vexée.

Ils entrèrent au bout de quelques minutes dans le château. Titania retint sa respiration lorsqu'elle passa les grandes portes, comme si elles risquaient de se fermer à tout instant et de lui refuser l'accès à jamais.

Mais son pied se posa bien sur le carrelage du hale de Poudlard, et elle put bien admirer l'entrée moyenâgeuse.

Dippet la guida à travers un immense escalier, et ce n'est que lorsqu'ils arrivèrent à l'étage que Titania vit la centaine de premières années, qui, pour beaucoup, la regardaient intrigués, avec des yeux émerveillés.

Titania leur sourit discrètement. Elle faisait souvent cet effet aux gens lorsqu'on la voyait, cette impression d'être submergé, une sensation d'admiration. Elle était très belle.

Dippet s'avança vers un homme, habillé d'une robe de sorcière extravagante, colorée de rouge. Le quarantenaire à la longue barbe et aux boucles brune l'écouta, puis détourna ses yeux électriques vers Titania, l'analysant derrière un air bienveillant.

La brune lui renvoya le regard, ainsi que le faux sourire. Albus Dumbledore. Il l'étudiait déjà, c'était évident.

-Bonsoir Armando, est-ce notre nouvelle élève ?

-Bonsoir Albus, oui je te présente Titania Dragya qui entre en quatrième année.

Titania agrandit son sourire, alors qu'elle se méfiait davantage de l'homme qui la toisait avec intérêt.

-Bonsoir professeur, je suis ravie de faire votre connaissance.

-Enchanté Titania, je suis moi-même ravi de rencontrer une jeune étudiante. Le renouveau est agréable, répondit aimablement Dumbledore en détournant le regard.

Titania plongea sa main dans sa poche, touchant pensivement sa baguette avant de brusquement relever le regard vers la porte de la grande salle.

-Comment va se passer sa répartition ? Demanda Dumbledore à Dippet.

Celui-ci se caressa pensivement la barbe avant d'éclater de rire.

-Bonne question.

Titania souffla par le nez en secouant la tête de droite à gauche. Oui, bonne question. La brune était mi amusée, mi irritée, Dippet était bien comme elle se l'était imaginé, un peu trop léger.

-Je pense que nous allons faire entrer en premier lieu les premières années, puis, une fois la répartition terminée, nous l'appellerons. Dippet se tourna vers la noiraude. Cela vous va Miss Dragya ?

-Je n'y vois pas d'inconvénient.

Tant qu'elle savait enfin dans qu'elle maison elle atterrirait...

-Bien ! Alors nous pouvons commencer, entrons mon ami, Miss, vous attendez là. Lâcha Dippet tout guilleret en claquant des mains.

-Entendu. »

Cela clôtura la conversation.

Dumbledore adressa un dernier hochement de tête auquel Titania répondit par un hochement de tête poli, et s'engouffra dans une salle lumineuse suivit de Dippet et des premières années. La grande pièce, autrefois bruyante, était maintenant silencieuse. Le petit groupe entra et la porte se referma dans un bruit assourdissant.

Un léger rire cristallin emplit la pièce lorsque Titania se détendait. Dumbledore avait comme prévu été en premier lieu méfiant, mais elle avait bien joué, il l'avait déjà acceptée. La jeune Dragya passa distraitement sa main dans ses cheveux de geai. Elle les organisa rapidement dans un chignon complètement négligé et les coinça dans deux épingles dorées serties de joyaux smaragdins. Des mèches lisses retombaient naturellement sur son visage pâle, comme toujours, malgré ses efforts pour les retenir.

Titania écouta le message de bienvenue, s'attardant sur la chanson du Choixpeau à mesure qu'une immense joie venait réchauffer son cœur.

Voici un peu plus de mille ans,Lorsque j'étais jeune et fringant,Vivaient

quatre illustres sorciers
Dont les noms nous sont familiers :

Le hardi Gryffondor habitait dans la plaine,
Poufsouffle le gentil vivait parmi les chênes,
Serdaigle le loyal régnait sur les sommets,
Serpentard le rusé préférait les marais.

Ainsi, il préfère les vielles mangroves remplies de moustiques, chuchota la puissante jeune fille en souriant dans le vide, les yeux tendres.

Ils avaient un espoir, un souhait et un rêve,
Le projet audacieux d'éduquer des élèves,
Ainsi naquit Poudlard
Sous leurs quatre étendards.

Chacun montra très vite
Sa vertu favorite
Et en fit le blason
De sa propre maison.

Aux yeux de Gryffondor, il fallait à tout âge
Montrer par-dessus toute la vertu de courage,
La passion de Serdaigle envers l'intelligence
Animait son amour des bienfaits de la science,

Poufsouffle avait le goût du travail acharné,
Tous ceux de sa maison y étaient destinés,
Serpentard, assoiffé de pouvoir et d'action,
Recherchait en chacun le feu de l'ambition.

Ainsi, tout au long de leur vie,
Ils choisirent leurs favoris,
Mais qui pourrait les remplacer
Quand la mort viendrait les chercher ?

Gryffondor eut l'idée parfaite
De me déloger de sa tête,
Les quatre sorciers aussitôt
Me firent le don d'un cerveau

Pour que je puisse sans erreur
Voir tout au fond de votre cœur
Et décider avec raison
Ce que sera votre maison.

Titania passa une main sur son front, pensive. Elle allait devoir baisser ses barrières magiques, même si celles mentales subsisteraient. Titania savait que le Choixpeau ne divulguerait rien à son sujet, mais cela l'embêtait tout de même. Il y avait des secrets dans sa tête qu'elle ne pouvait se permettre de dévoiler...

La répartition commença, les premières années furent appelées uns à uns alors que Titania ne réfléchissait à peine pour mémoriser leurs noms et leur répartition, elle s'en souviendrait de toute manière, qu'elle écoute ou non.

Titania s'adossa au mur dans son dos, patientant.

Tom, de son côté, attendait que la cérémonie soit finie, avec irritation, avide de savoir ce que Dippet allait leur annoncer.

Étrangement, le directeur était bien loin que l'habituelle lassitude à l'idée de devoir reprendre son travail, mais pour une raison qui lui échappait encore, l'homme semblait étrangement guilleret.

-Sais-tu ce qu'il se passe ? Glissa Abraxas Malfoy à Armand Zabini.

Le brun secoua négativement la tête, lui aussi perplexe. C'était bien la première fois qu'il voyait Dippet aussi souriant.

Le directeur applaudis pour la première fois la dernière élève qui passa, une petite Serdaigle qui se précipita timidement à sa table, puis, le directeur ouvrit grand les bras, comme pour épouser ce qu'il s'apprêter à dire, ou mettre théâtralement son annonce en avant. Il attendit une seconde, fier de son effet, et entama son discours.

"Magnifique ! Il claqua des mains. Bienvenue aux nouveaux ! Bienvenue aux anciens ! Voici donc une nouvelle année qui commence, une nouvelle, belle et prolifique année, le regard du Directeur dériva vers Tom, plein d'espoir. Mais avant de profiter du festin, une surprise nous attend. Je sais qu'il n'est que peu, voire même pas courant, de vivre cette situation dans cette magnifique et incroyable école qu'est Poudlard mais, aujourd'hui nous accueillons Titania Dragya, qui comme certains, entre en quatrième année. Bienvenue Titania."

Une soudaine agitation prit les élèves. On murmurait à voix basse, échangeait, supposait dans l'excitation qu'engendrait un peu de nouveauté.

A la table de Serpentard, on s'agitait aussi, mais pas dans la joie. Au contraire, on murmurait à voix basse des injures, des insultes, et un ressentiment grandissant ainsi un mécontentement flagrant.

-Quel est donc ce nom, siffla Walburga Black, Dragya... Poudlard n'a donc plus aucune dignité que d'accueillir des êtres sans histoires ni familles ?

-De plus, en quatrième année, murmura Druella, tout de même. Où était-elle avant ?

Walburga hocha la tête et se tourna vers Némésis, étudiant sa réaction, sans chercher son approbation. La blanche avait posé sa tête sur sa paume, et se languissait du moment où elle pourrait enfin manger. Finalement, l'arrivée de cette nouvelle ne devrait pas changer beaucoup de choses à sa vie, puisqu'elle n'irait sans doute pas à Serpentard, et même si c'était le cas, la partie la plus aimable de la jeune fille lui souhaiterait bien du courage.

Némésis fit tourner son doigt autour de la circonscription de sa coupe, tentant de produire le son voulu.

Soudain, les lourds battants de l'immense porte s'ouvrirent dans un claquement si sonore qu'il ramena d'un coup le silence. Les élèves se tournèrent vers les deux personnes qui se tenaient derrière.

La Blanche resta immobile quelques secondes, avant de sentir une magie étrange. Elle fronça les sourcils, devant une aura si puissante, et si inhabituelle. Elle était d'une fascinante texture, comme de l'eau, aussi calme et gentille qu'elle pouvait être agitée et capricieuse.

Soudain interloquée, Némésis, étira le cou pour voir ce qu'il se passait, et ne put retenir un rictus amusé lorsqu'elle découvrit la scène.

Le vieux concierge, d'habitude si acariâtre, qui la tenait en horreur, gardait encore la porte d'une main, sans y accorder un regard, trop plongée dans la discussion qu'il avait entamée avec celle qui était nul autre que la fameuse Titania Dragya.

Et Némésis devait bien avouer être soufflée. Ses cheveux lisses, noirs aux reflets bleus, étaient attachés grâce à deux épingles alors qu'un certain nombre de petites mèches tombaient sur son visage fin et noble. Petites mèches qu'elle tenta de caler derrière son oreille d'une main, mais qui revinrent chatouiller son menton. Ses lèvres étaient d'un rouge fascinant. Son nez fin était gentiment relevé, sa peau était lisse et sans imperfections et sa bouche s'étirait dans un sourire aimable et agréable alors qu'elle discutait avec l'impartial Apollon Picott.

Elle était déjà tournée vers l'allée, prête à partir, mais avait le cou tendu sur le côté, comme si sa discussion était trop essentielle pour qu'elle ne puisse la mettre en suspens avant de l'avoir terminée.

Némésis plissa les yeux, et comprit enfin à quel genre de personnage cette aura magnifique était liée.

Le plus marquant et sans doute le plus incroyable. Symbolique et instinctif. Calmes mais vifs. Doux mais puissants. Sages et intelligents. Deux yeux à la texture hyaline, en amande, décorés de longs cils noirs et recourbés, d'un bleu si clair qu'ils paraissaient blancs. On aurait dit deux lunes que l'on aurait dessinée dans ses yeux, ou bien de magnifiques miroirs, qui montraient le monde meilleur que ce qu'il était. Comme de l'acier que l'on aurait fait fondre, ou une rivière que l'on aurait transformé en yeux. Ils étaient indescriptibles et irréels. Titania Dragya, redéfinissait la beauté.

-Il faudrait peut-être utiliser des runes pour réparer votre tuyauterie. Je vous conseille les livres de Bernac, très utiles, commenta Titania en s 'avançant d'un pas, sans lâcher l'homme du regard.

-J'y penserait Miss, merci beaucoup, déclara Apollon avec un grand sourire en hochant la tête.

Titania fit une petite mimique, mélange de sourire et de salutation, puis se détourna vers l'immense allée centrale qui s'étendait devant elle, aussi allongée et imposante que l'entrée d'un palais, d'un château, ou du plus beau des manoirs. Au-dessus d'elle, un faux ciel étoilé se dessinait, si beau qu'elle dû se retenir de lever la tête pour en admirer la splendeur. C'était un chic homme, ce Picott, et pour lui faciliter la tâche, elle jurait d'ores-et-déjà de ne jamais se faire prendre lorsqu'elle enfreindrait le règlement !

Titania jeta un regard circulaire sur la salle, à mesure qu'elle avançait, vite et droite, sans doute ni erreurs. Elle était au centre de l'attention, mais elle y était habituée. Elle avait déjà appris à le faire, tout comme elle avait appris à être irréprochable. Intérieurement, un petit rire ironique égayer ses pensées. Les élèves étaient si curieux que s'en était attendrissant, elle avait vu et vécu tellement pire, tellement plus hostile, qu'elle se sentait déjà à sa place, dans cette immense salle, entre ses immenses tables, ce plafond gigantesque et ces quatre couleurs significatives.

-Nous y voilà, fit poliment Dumbledore alors qu'elle gravissait calmement les marches de l'estrade, posée et tranquille.

-Gryffondor, Poufsouffle, Serdaigle et Serpentard, énuméra-t-elle énigmatiquement, je vais enfin savoir...

L'enseignant à longue barbe hocha la tête, puis posa le Choixpeau sur elle.

Alors l'attente commença.

Une minute.

Puis deux.

Trois minutes.

Le vide prend place.

Un long silence gagna alors la grande salle, puis, face au mutisme évident de l'artéfact, les élèves commencèrent à s'agiter.

Titania pinça les lèvres dans un mimique perplexe. Quelle était-donc cette attente ? Ce n'était pas normal. Elle le savait.

La brune leva le regard vers le ciel étoilé, passant ses yeux sur les constellations qui y étaient ajoutées, décrivant la courbe de la grande ourse, Orion, La constellation du scorpion, Cassiopée... Dont l'une des étoiles était mal placée...

Lassé devant les regards perplexes et la désagréable impression que le Choixpeau s'était endormi sur sa tête, Titania ouvrit la bouche.

"Bonsoir.

Une seconde passa, un ange au-dessus de sa tête, avant qu'une voix caverneuse ne résonne à ses oreilles.

-Bonsoir jeune fille.

-Trouvez-vous ? Ou suis-je réellement un cas désespéré, s'amusa Titania en penchant la tête sur le côté.

Le Choixpeau se balança sur sa tête, comme si par ce mouvement il tentait de dénouer les fils de son esprit, ou d'écarter les murs qui l'empêchaient de passer.

-Je dois bien avouer que rien n'est moins sûr, souffla-t-il à ses oreilles. Vous êtes une personne très complexe Dame Dragya. Extrêmement complexe. Cela risque d'être très long.

Même si elle ne le vit pas, il lui sembla sentir l'antique artéfact grimacer.

-Prenez tout votre temps, soupira t-elle avec amusement, cela fait bien deux mois que je cherche, et je n'ai moi-même pas la réponse.

-Je déteste cette situation.

-Celle d'échouer, d'avoir tort ?

-Celle-là même.

Deuxième sourire en coin.

-Je crains d'être dans le même cas.

-Oh, ce n'est pas si marquant, déclara le Choixpeau.

-Je vous interdis de me contredire !

Un rire rauque emplit la salle sous le regard médusé des élèves. On échangeait des regards ronds, et même Némésis releva ses yeux sidérés de son livre pour constater l'étrange phénomène.

Par Merlin, Le grand Choixpeau riait !

-Oui, je vois où vous voulez en venir, murmura-t-il.

Titania commença à se balancer sur son tabouret, une main sur le menton, réfléchissant à la suite des évènements.

-Serpentard ?

-Je l'ignore. Gryffondor, Serdaigle, Poufsouffle, Serpentard, les quatre vous collent comme un gant.

-Cela est étonnant. Je n'ai pas vraiment le sentiment de correspondre à Gryffondor et Poufsouffle, ricana Titania en fronça les sourcils dans une moue perplexe.

Le courage sous sa forme la plus pure, brulante et incandescente, un brasier que ni la peur ni le mal ne pouvait taire. Un feu infini qui résistait aux plus violentes pluies et aux incessants coups de vents. Un courage pur, brut, parfois dans l'incompétence et la précarité. Sans retenue, sans réflexion...

La fidélité, la plus douce et la plus candide, imbrisable pour celle qui avait été brisée. Vivre avec, vivre pour, vivre droit... Sans se détourner, en épargnant l'ennemi, en pardonnant sans retenue, en pliant devant les adversaires pour éviter d'avoir à s'y confronter. L'amitié, l'amour, la fraternité, aveugle parfois...

Ce n'était pas Titania, ni l'un, ni l'autre. Ni la force brute, ni la gentillesse sans faille. Elle avait vécu dans un monde où elle ne croyait plus en l'absoluité de ces valeurs. Épargner, sauver, combattre sans réfléchir... C'était impossible, dans sa vie. C'était des valeurs sous lesquelles elle ne pouvait plier. Triste vestige de son passé.

-Mais vous êtes courageuse, loyale, forte, et... gentille.

Un second rire dans la salle. Celui cristallin de Titania.

-Oh, ça dépend avec qui. Chuchota-t-elle. Pour la vertu, cela fait juste parti de mon entrainement, temporisa la jeune fille en haussant les épaules. Je n'ai pas la prétention de me dire courageuse.

-Hum, oui je vois. Et pour Poufsouffle ?

Titania resta silencieuse un court instant, un rictus sur les lèvres, celui qu'elle prenait en se rappelant d'un bon souvenir.

-Disons, que j'ai un passif avec les blaireaux.

-Vraiment ?

-Hooo oui...

-Hum.

Un vide plana dans leur conversation. Puis, comme après une longue réflexion, le Choixpeau reprit la parole :

-Je crois avoir trouvé.

-Vraiment ?!

Le Choixpeau garda le silence un long instant. L'absence de sa voix laissait libre cour aux murmures des élèves, qui, pareils à du sable qui tombe à terre, remplissaient de plus en plus l'espace, devenant omniprésents. Dans son dos, Titania savait parfaitement que les enseignants aussi s'inquiétaient, s'impatientaient, et devaient sans doute se demander s'il fallait influencer. Cela faisait désormais cinq minutes et vingt-sept secondes que sa répartition avait commencé, et Titania comprenait qu'on puisse s'interroger.

-Nous allons opérer par ce qui sera le plus bénéfique pour vous, celui qui vous apportera le plus. Je n'ai jamais été obligé de procédé ainsi, expliqua la Choixpeau, mais vous avez vos affinités partout, votre place qu'importe les lieux.

Titania eut un petit ricanement, laissant sa tête tomber en arrière. L'ironie avait toujours ce même goutte.

-Vous m'envoyez là où j'ai le plus à apprendre, conclut-elle calmement.

-Cela vous convient ?

La jeune fille rouvrit ses yeux, laissant ses pupilles bleus s'illuminer d'un éclat brisant, une braise incandescente, brillantes, déterminées.

-Et bien si nous parlons de travail et de progrès, pour moi, il n'y aura pas meilleure maison que celle-ci.

Le Choixpeau se pencha vers elle, tout sourire, puis se redressa et hurla le seul mot qui pouvait engendrer tout ce qui arriva :

-SERPENTARD !