Sous-chapitre 3 : "... et ils vécurent heureux à jamais."

Un bruit incessant, des pas précipités dans un couloir blanc et propre, une agitation incroyable développée en seulement quelques secondes et un petit corps qui bouge, qui frémit, qui semble hurler de l'intérieur toute la douleur contenue ces jours-ci. Une infirmière. Sally. Et sans bien comprendre pourquoi ni comment, les voilà tous les trois dehors, face à une porte à la peinture blanche un peu écaillée par le temps. Trowa ne semblait pas avoir réalisé qu'il ne tenait plus la petite main blanche aux veines bleues parcourue de perfusions. Il ne semblait pas plus se rendre compte qu'il n'était même plus dans la chambre. La porte se rouvrit un court instant dévoilant le visage nerveux de Sally. Ses lèvres s'agitèrent fébrilement avant de disparaître à nouveau derrière le lourd battant de la porte en bois. Deux mains chaleureuses vinrent étreindre les épaules du Français tressautantes sous l'écho des paroles prononcées quelques instant plus tôt. Alors, sans un bruit, sans qu'un mot n'ait eu besoin d'être dit, Trowa se nicha dans le corps de son ami, pleurant silencieusement des larmes douces et amères, tendres et cruelles, douloureuses et soulageantes contenues trop longtemps.

- Viens Trowa, ne restons pas là. Ils... ils viendront nous chercher...

Fatigué et courbaturé, le corps de Trowa fut traîné par Wufei jusque dans la chambre Quatre. Heero suivait plus lentement encore, appuyant chaque pas d'une pensée, d'une réflexion. Il fallait qu'il parle, qu'il dise... Il fallait que quelque chose sorte, que sa conscience s'allège enfin un peu du sentiment de lâcheté qu'il éprouvait depuis qu'il avait une dernière fois croisé les prunelles améthystes de son pire rêve, de son plus doux cauchemar : Duo. C'était le moment idéal qu'il attendait depuis... Pas un seul instant, il n'avait risqué de se faire surprendre par une quelconque infirmière. Il voulait être seuls avec eux... pour sauvegarder son image et aussi parce que ça ne regardait qu'eux et personne d'autre.

Ils étaient enfin seuls, tous les trois serrés sur le lit minuscule dans la chambre de Quatre, entre les douces peluches et les trop nombreux coussins de soie orientale. Loin de tout le vacarme des machines silencieuses, loin de l'ambiance aseptisée malsaine, loin d'oreilles attentivement indiscrètes, Heero allait pouvoir se livrer. Soumettre ses doutes... sous forme de convictions... pour ne pas perdre l'image du Perfect Soldier qu'il se devait de donner. Et sans qu'ils ne puissent l'interrompre, Heero raconta tout. Tout même sa petite hésitation. Sa minuscule hésitation entre choisir d'aider Duo et choisir la mission. Et quand il eut fini, un silence gêné s'installa, lourd et pesant. Si pesant qu'Heero éprouva soudain le besoin d'être rassuré sur son choix :

- J'ai bien fait ? Hein, les mecs, j'ai bien fait ?

N'avait-il pas écouté la raison ? La raison suit toujours le droit chemin, elle n'a jamais tort, ne s'égare jamais et on n'en a jamais de regrets. Alors pourquoi ce silence ? Pourquoi ce poids sur son cœur ?

- Mouais, mouais, t'as bien fait...

- Si, si, c'était... ce qu'il fallait faire.

Wufei et Trowa détournèrent le regard pour éviter au Japonais de sonder leurs yeux qui, à coup sûr, démentaient leurs quelques mots bafouillés.

- T'es un connard de première ! (1)

Tout le monde se retourna. C'était Quatre. Il était là, debout sur le pas de la porte, pâle comme la mort dans son pyjama d'hôpital. Il était là et il avait entendu Heero. Il avait tout entendu. Trowa eut du mal à se lever du lit, s'enfonçant dans l'épais matelas à chaque pas et se dirigea lentement vers lui, titubant comme hypnotisé par la vision du corps de l'être tant aimé. Il ne put que lui frôler le visage avant que des larmes n'envahissent à nouveau ses prunelles vertes et se déversent dans un cri de délivrance, dans un cri d'amour :

- Quatre !

Alors que ce prénom remplissait l'air vide et inutile de la pièce, alors que les deux amants se retrouvaient enfin dans l'amour si immense qu'il en coupe le souffle, alors qu'ils n'étaient plus qu'eux deux au monde, un autre être, perdu, éperdu, se retrouvait seul face à ses angoisses. Seul parce qu'il y avait renoncé, seul face à ce qu'il pourrait être, seul...

POV d'Heero :

-T'es un connard de première !

Pourquoi m'a-t-il dit ça ? Je ne comprend pas. Ou bien je comprend trop bien... Pourquoi suis-je d'accord avec lui ? Parce que... Non... Il faut que j'en parle au professeur J. ... Non... Il ne vaut mieux pas... C'est bizarre, j'ai l'impression de savoir que ce n'est pas bien de ne rien dire et pourtant que ça vaux mieux. Qu'est-ce qu'il faut que je fasse ?

-T'es un connard de première !

Et ces mots qui me reviennent en tête, sans cesse.

-T'es un connard de première !

Et les voir ensemble. Heureux alors que ça m'est interdit. Ensemble. Pourquoi eux et pas moi ?

-T'es un connard de première !

Il a raison ! Je l'ai laissé tomber alors que lui... lui se serait tué pour moi. Je l'ai laissé se faire prendre, je l'ai... abandonné... alors qu'en l'aidant, on s'en serait tous sortis ! En l'aidant, il serait là... avec moi... à côté de moi... Il serait... là...

-T'es un connard de première !

J'y vais ! Je n'ai pas su l'aider au bon moment mais je saurais lui montrer que je serais là les prochaines fois... toutes les prochaines fois... pour lui... pour nous... Nous... Attends-moi Duo. Il me faudra du temps, beaucoup de temps mais j'y arriverais... pour nous... parce que tu le mérites... parce que...

-T'es un connard de première !

J'y vais ! Et seul. Et je tuerais quiconque aura osé te toucher, te frôler ou même croiser ton regard... Ton regard... Celui qui me perce jusque dans mon cœur si froid, si... si mal-aimé... sauf par toi. Je te ramènerais Duo et je te dirais... je te dirais ces mots que je brûle de te dire depuis... depuis la première fois, depuis que mon âme s'est perdue dans tes yeux améthystes. Et personne ne m'y empêchera. Personne. Et surtout pas J. ... Et surtout pas moi. Je ne m'en empêcherais pas, je ne m'en empêcherais plus.

Je m'enlèverais ces chaînes qui me rattachent au sol pour m'envoler vers toi.

Je briserais ces barreaux qui m'empêchent d'atteindre le ciel pour m'envoler vers toi.

À part toi, plus aucune emprise n'aura lieu sur moi.

Pourquoi ?

"On a beau emprisonner un oiseau dans une cage pour l'empêcher de voler, ça ne lui enlève pas ses ailes pour autant." (2)

Voilà pourquoi.

Fin du POV.


(1) Faut le dire à la "Coup de foudre à Notting Hill" ! Sinon, c'est moins drôle !

(2) Je la mets entre guillemets cette phrase parce que c'est une citation. De moi. Si, si, j'vous assure ! C'est mon petit cerveau qui a sorti cette phrase, une nuit comme ça, d'un coup et comme je l'ai trouvée très belle et très "citation", je me suis dite que ça serait MA citation. Si un jour, vous l'utilisez, veuillez mettre les guillemets et signé Kyralya en-dessous, merci !


Ralalalah ! Ce Heero ! Il apprend vite mais il met du temps à comprendre ! Alors, il n'est pas bien ce sous-chapitre ? Tout est bien qui finit bien ! Du moins pour l'instant et pour le couple 03x04x03. Le prochain sous-chapitre ne concernera uniquement que mon couple de chouchous : Heeroninouchet d'amour et Dudulinet ! À très vite alors !!!