Disclaimer : Chère madame Rowling, vous avez fait le choix d'un Prince de sang-mêlé, à votre guise… J'en déduis donc que je peux, sans risque de vous nuire, proclamer haut et fort que la Troisième Constellation est ma propriété. Plait-il ? Vous désirez d'abord me reprendre vos personnages ? Très bien… Chers lecteurs, ôtez de ce récit tout l'unviers rowlingien, ce qui restera m'appartiendra. Alors ? Que demeure-t-il après épuration ?
Mille excuses pour ces mises à jour pour le moins tardives. Les aléas de la vie et de l'inspiration font qu'il ne peut parfois en être autrement… Mais j'essaierai de m'appliquer.
Réponses aux reviews :
Alixe : Les relations au sein de la famille Weasley se sont développées assez naturellement sans que j'y réfléchisse beaucoup en fait. Des tensions, des frictions, des réconciliations et des affinités particulières : un modèle moldu qui colle assez bien à la marmaille du Terrier ! Je suis contente que Ginny te plaise ainsi, j'avais cru effectivement remarquer que son personnage t'intéressait…
m4r13 : Tu mérites des remerciements particuliers puisque tu es la seule (jusqu'à présent) à avoir reconnu ma très chère Diane ! Je me suis permis un petit cross-over entre mes deux fics (y'en a qui font du SDA / Potter… meuh non je m'y crois pas !), un petit clin d'œil en passant. Tu peux vérifier, Diane rencontre bien Harry un 25 août… En revanche, je ne pense pas qu'on va la revoir par la suite, rien de prévu a priori ! Concernant le rêve, tu peux toujours rêver pour que je te dévoile le mot de la fin… Juste une chose (tu vas être dégoûtée je sais), je n'ai jamais caché que je refusais absolument de rescusciter Sirius. Voilà. Cette réponse a été écrite il y a 6 mois… :D
Cornelune : Merci pour tes deux reviews miss et merci pour Tante Pet' ! Je ne pense pas que HP et le Prince de Sang-mêlé (quel horrible nom) commencera comme moi et ce pour une tonne de raisons que je ne développerai pas ici (JKR a un schéma bien strict que j'ai décidé de zapper). Encore que… Je voudrais bien savoir ce qu'elle va faire de Buck, du square Grimmaurd, de Kreattur, etc… Et pourvu que Harry soit accepté en Potions !
Eiream : Hello Majesté ! Serpentard Power… Hum, je n'irai pas jusque là ! (pas dans cette fic en tout cas qui va être terriblement gryffondorienne et même potterienne !). Pour mon travail impressionnant, c'est surtout le remplissage qui l'est ! Moi qui suis habituée aux fics « cérébrales » avec des personnages qui ne font que réfléchir, ici je suis obligée de mettre un brin d'action, aussi inutile soit-elle ! Je t'ai réconciliée avec Molly ou tu lui en veux toujours à mort (tiens, je viens de me rendre compte que Molly c'est le nom de mon chat. J'avais jamais percuter…) ?
Poucie : Que vais-je faire de Drago ? Bonne question. Une chose est sûre, Harry va s'en donner à cœur joie. Une deuxième chose est sûre : moi aussi. Tu as bien reconnu Diane ! ;p
Rapovlovski : J'espère que tu as dormi en attendant l'update, parce que sinon tu dois être dans un sale état ! Je te remercie pour tous tes compliments… Je ne sais pas si j'écris une suite qui se tient (je ne crois pas) mais j'essaie de limiter au mieux les incohérences !
Angie Black : Ressembler à Rowling… Par Zeus si ça pouvait être vrai ! Je n'ai pas le quart de la moitié d'un atome de son imagination. Néanmoins, tu peux continuer à ne pas être originale dans tes reviews…
Dji Djo : Même si je tarde, je ne m'arrête pas… Merci.
Petite Dilly : J'ai bien peur que l'encas ne soit pas terminé avant le plat de consistance… Tu as raison, Harry fait preuve d'une lucidité qu'on le lui connaissait pas. Mais j'ai envie de le faire mûrir un peu : A 16 ans, je l'imagine toujours dans la peau d'un gamin de 11. Merci pour tes compliments…
Arathorn : Le problème du chapitrage est qu'on ne voit pas l'action avancer. Je distille des éléments un peu à la fois, mais le puzzle ne se reconstituera qu'à la toute fin. Merci pour tes compliments, je les accepte en oubliant toute modestie : Je mets effectivement un point d'honneur à écrire en français !
Beru ou Bloub : J'ai commencé cette fic et le Journal d'une Moldue en même temps. Au départ, pas de cross-over prévu, mais peut-être que finalement…
Siriel
: Qu'ai-je fait à ton Sirius ? Quel est cet affreux machin qui apparaît dans le
rêve de Harry ? Que manigance Voldemort ? Tu crois vraiment que tu auras la
réponse dans le troisième chapitre ?
Au départ l'apparition de Diane n'était qu'un clin d'œil, mais on la retrouvera
peut-être plus tard. Sans doute lors d'une sortie au pré-au-lard.
Csame : Tu es le seul à t'être demandé ce qu'était la LPCM ! Merci ! J'avais délibérément omis d'en mettre la signification (un test tout serpentard) pour évaluer la curiosité du lecteur… Résultat : 1/14 attentif. La LPCM est la Ligue Protectrice des Créatures Magiques, tout simplement. A part ça… Oui, il y a de l'auto-dérision, non ce n'est pas le titre d'un de mes livres, oui les histoires vont sans doute se recouper…
Ilys : Merci pour tes compliments entouthiastes… Je m'excuse d'être aussi lente !
Un énorme merci à m4r13 pour ses corrections et commentaires pertinents… Que ferais-je sans toi !
Chapitre 3 - Janus
« Hey Harry ! Attends-moi ! » Ron venait
de descendre de la calèche des Préfets et courait vers Harry sans prendre garde
aux mares d'eau que la pluie torrentielle avait formées dans l'allée principale
de Poudlard. Les élèves qu'il aspergeait sur son passage faisaient entendre
leur mécontentement par de furieux grognements qu'il ignora avec superbe.
« Où est Hermione ? » demanda Harry qui rabattit les pans de sa cape sur sa
tête et celle de son ami.
« En arrière, elle discute avec les autres préfets. » fit Ron s'accompagnant
d'un haussement d'épaules. « Les Serpentard sont arrivés. Leurs attelages sont
postés devant les grilles du collège. Tu n'as pas vu ? »
Harry opina du chef en signe de dénégation et porta son regard vers les hautes
grilles de l'école. L'obscurité crépusculaire et les assauts diluviens ne lui
permirent de distinguer que trois masses sombres qui semblaient flotter devant
les grilles. Il se tourna vers Ron.
« Ce n'est même pas la peine d'y penser Harry ! Je ne me ferai pas tremper pour
accueillir Malefoy ! »
Réfugiés derrière un
arbre dont le feuillage touffu les protégeait un peu de la morsure glacée de
l'eau, Ron bougonnait, tandis qu'Harry observait le curieux équipage. Au bout
de cinq années passées dans le monde sorcier, il découvrait encore des choses
qui semblaient être l'évidence même à son actuel compagnon d'infortune.
« Ce sont des attelages volants. Seules les familles les plus riches en
possèdent. Les autres, comme nous, voyagent par le réseau commun des cheminées.
Ou en magicobus. Ce n'est pas le même confort. Harry ? On peut y aller
maintenant ? » Ron claquait des dents mais Harry n'en avait cure. Il observait
ces grandes calèches dépourvues de roues qui lévitaient souplement à quelques
mètres du sol. L'une d'entre elles portait les armoiries de la famille,
frappées sur la porte de bois noir : un serpent d'argent avalant sa queue,
symbole de grandeur et d'éternité.
« Malefoy… » murmura Harry en grinçant des dents.
Un hennissement profond et déchirant fendit l'air et l'attention de Harry fut
détournée du blason vers l'animal d'où émanait la plainte. Il n'y avait guère
prêté attention, croyant de loin avoir affaire à des sombrals. Il n'en était
rien.
« Ce sont des chevaux d'Hélikon » grelotta Ron. « C'est une honte de les
asservir ainsi. C'est comme si on attelait une licorne à une charrue ! Ca fait
des années que la L.P.C.M lutte contre l'emploi de ces créatures dans des
tâches aussi dégradantes, mais face au pouvoir de ces familles, ils ne peuvent
rien. Allez Harry, on y va maintenant ! »
Malgré les suppliques de son ami, Harry ne parvenait à détacher son regard de
la magnifique créature ailée. Comment avait-il pu la confondre avec un sombral ?
C'était un cheval colossal, à la robe d'ébène. De son poil soyeux, trempé de
pluie et de sueur, s'échappaient des volutes de fumée. Il était fougueux,
puissant et ne demandait qu'à briser les brancards qui le maintenaient
prisonnier. Harry voyait ses muscles saillants rouler sous sa peau tendue. Ses
naseaux écumaient et ses yeux opalins s'obscurcissaient sous l'effet de la
fureur. Ses longues ailes de cuir d'un noir de jais battaient l'air par
saccades, accompagnant ses ruades de dément. Harry crut un instant qu'il allait
réussir à se libérer de ses chaînes. Mais il y eut un claquement sec de fouet.
Le cheval ailé se cabra une dernière fois avant de s'envoler et de disparaître
dans la nuit.
Il s'aperçut alors qu'il avait froid et qu'il était trempé jusqu'aux os. Ils
coururent vers le perron du château où s'amassaient les collégiens pressés de
se mettre à l'abri. Ron ne râlait plus.
Tous les élèves étaient maintenant installés dans la grande salle, attendant impatiemment le début du banquet dans un tintamarre assourdissant. Le ventre de Harry gargouillait furieusement mais il ne serait pas satisfait dans l'instant : les élèves de première année n'étaient pas encore arrivés, retardés certainement par les trombes d'eau qui s'abattaient sur l'école. Harry tenta d'oublier les tiraillements douloureux de son estomac et dirigea son regard vers la table des professeurs. Dumbledore s'était levé de son imposant fauteuil doré et tendait désespérément ses bras vers l'assemblée pour obtenir le silence. L'orage devait aussi influer sur l'humeur des adultes car ceux-ci, tout à leur conversation animée, ignoraient superbement le directeur. En bout de table, Rogue, le regard vide, semblait faire acte de présence, son esprit visiblement bien loin de toute cette agitation collégienne. Harry le fixait intensément espérant lire dans ses pensées l'objet de sa rêverie quand il reçut un coup dans les côtes.
« On dirait qu'ils n'ont trouvé personne » lui
dit Ron en désignant du menton la place vide au côté du maître des potions.
« Je crois qu'on va le savoir tout de suite » chuchota Hermione.
En effet, le directeur avait enfin obtenu le silence et il s'apprêtait à parler. 'Pourvu que ce ne soit pas Rogue' pensa Harry, 'Tout mais pas ça...'. L'ignoble bonhomme, comme s'il avait compris ce qui tourmentait Harry, se tourna brusquement vers lui. Leurs regards se croisèrent et la lueur sinistre qui anima l'œil atone du professeur ne laissa rien présager de bon. Le coin de ses lèvres frémit un instant puis il porta son attention vers le directeur.
« Jeunes gens, avant que nous rejoignent les premières années, je tenais à vous faire savoir combien je suis heureux de pouvoir vous accueillir une fois de plus pour cette nouvelle année scolaire à Poudlard. Je ne reviendrai pas sur les événements douloureux dont notre collège fut la cible l'an passé, mais je vous crois en mesure de comprendre la joie qui m'anime aujourd'hui et le plaisir que j'éprouve à vous retrouver. Evidemment, la place de professeur de défense contre les forces du Mal étant de nouveau vacante, j'ai du me remettre en chasse : et vous n'êtes pas sans ignorer combien le gibier de qualité se fait rare! »
En temps normal, des rires auraient fusé dans les rangs des élèves, mais pour l'heure ils ne prisaient guère cette galéjade. Ils avaient trop eu le sentiment d'être eux-mêmes les proies des précédents professeurs de défense contre les forces du Mal. Harry serrait les dents en attendant le verdict. La météo était tout à fait adaptée à la situation et il songea aux mauvais films moldus de série B (qui terrifiaient les Dursley) où un tragique événement est toujours précédé d'un épouvantable coup de tonnerre. Le plafond de la grande salle, justement, s'était obscurci : de gros nuages noirs menaçant convulsaient dans la tempête et semblaient se gonfler d'énergie électrique jusqu'à la limite de l'explosion. Des éclairs aveuglant strièrent brusquement le ciel artificiel.
« Crache-la, ta dragée Bertie crochue » marmonna Harry.
A l'instant où il murmura ces mots, un nouvel éclair zébra la voûte céleste et la petite porte qui faisait dos à la table des professeurs s'entrebâillât timidement sur un Rusard penaud, son affreuse chatte sur les talons. Le concierge se comportait en être parfaitement odieux face à un élève de première année désemparé, mais devant une assemblée d'une centaine de personnes qui l'observaient, il devenait insignifiant. Son dos s'était voûté comme pour faire disparaître son visage décharné dans ses épaules. Il fit quelques pas et s'écarta dans une petite révérence obséquieuse pour laisser place à la personne qu'il avait guidée jusqu'ici.
Une silhouette sombre se faufila, fit un petit signe de tête à Rusard qui disparut aussi vite qu'il était entré, et se tint raide auprès du vieux directeur.
« Vous arrivez à point nommé » s'exclama le professeur Dumbledore en gratifiant la nouvelle arrivante d'un gracieux baisemain.
Les regards de Ron et de Harry se croisèrent dans un air entendu. Ron grimaça douloureusement.
« Génial. Dumbledore a embauché un… »
Mais la fin de sa phrase finit étouffée dans le fracas assourdissant de la grande porte qui s'ouvrit, laissant entrer dans un courant d'air glacial un professeur McGonagall aux robes ruisselantes. Elle pénétra dans la grande salle suivie d'une troupe de premières années trempé jusqu'aux os. Le petit chignon serré de la sorcière avait été malmené par la tempête et lui donnait l'apparence d'un moineau ébouriffé ; pourtant l'on s'abstint de rire devant sa mine autoritaire. Les petits nouveaux avançaient en masse compacte, pressés les uns contre les autres, comme pour se sentir plus forts, protégés de l'assaut massif de toutes ces prunelles braquées vers eux. Ils lançaient des regards furtifs et inquiets vers les quatre longues tables qu'ils allaient rejoindre plus tard, vers ces inconnus qui deviendraient leurs compagnons ou leurs concurrents.
« Approchez chers enfants, n'ayez crainte, vous avez laissé la tempête au seuil de Poudlard, vous n'allez plus tarder à vous réchauffer et à contenter vos estomacs affamés. » Alors que le directeur prononçait ces mots, les feux crépitèrent de plus belle dans les hautes cheminées de la salle et Harry se sentit enveloppé d'un agréable souffle tiède. Les jeunes élèves semblèrent se détendre un peu. « Pour la plupart d'entre vous, l'intégration à notre école officialise votre appartenance au monde de la sorcellerie. La magie qui opérait en vous s'est enfin pleinement révélée et l'heure de l'apprentissage est venue. Pour d'autres, cette entrée à Poudlard est d'abord la marque douloureuse des événements qui agitent notre communauté depuis peu. Parce que le danger s'est fait plus proche, parce que vos familles ont été touchées par la peine, vous avez du renoncer aux enseignements que l'on vous délivrez chez vous ou dans d'autres écoles… Poudlard n'a pas la prétention d'être un havre de paix, mais sachez chers enfants que vous serez ici en sécurité, même si la chaleur de votre foyer vous manque. Comme les premières années, vous serez répartis dans les différentes maisons de Poudlard. Je compte sur les anciens élèves pour vous accueillir avec compréhension et générosité. »
« Mais de quoi parle-t-il ? » chuchota Ron à
l'oreille d'Hermione.
« Si tu étais resté avec les préfets tout à l'heure, tu l'aurais su… Des élèves
plus âgés intègrent Poudlard, c'est très rare. La dernière fois, c'était
pendant le règne de Voldemort. »
« Plus âgés ? Mais que faisaient-ils avant ? Ils sont cracmols ? »
« Poudlard n'est pas ouvert aux cracmols, Ron… Non, ils étaient dans d'autres
écoles ou avaient des professeurs à domicile. Tous les enfants sorciers
d'Angleterre ne vont pas à Poudlard tu sais ! »
« Bien sûr que je le sais » grogna Ron.
« Mais avec ce qu'il se passe maintenant, certaines familles ont jugé
préférable de confier leurs enfants à la garde du professeur Dumbledore.
Poudlard a la réputation d'être une forteresse infranchissable. »
Tout en écoutant les explications d'Hermione, Harry observait la foule exceptionnellement bigarrée des nouveaux venus, quand son attention fut attirée vers les derniers rangs, par deux jeunes filles à la beauté époustouflante, à peine plus jeunes qu'eux.
« Ron tu as v... »
« chuuut Harry, la cérémonie de la Répartition va commencer » le coupa Hermione
sèchement.
Effectivement, le choixpeau magique posé sur son trépied par la directrice adjointe entonnait sa sempiternelle chanson...
«
Voilà mille ans que fut fondée
Par quatre sorciers les plus doués
... »
Harry n'y prit pas garde et dirigea son attention vers les deux nouvelles. Elles devaient être sœurs, peut-être même des jumelles, mais comme pouvaient l'être le jour et la nuit. De la première se dégageait un caractère fougueux et passionné. Elle avait la peau brune et le cheveu épais d'un noir de jais. Son port était fier et altier, farouche et sauvage. Au fond de ses pupilles noires, Harry vit danser des flammes rougeoyantes. La seconde incarnait la pureté absolue. Son teint diaphane, presque translucide, et ses cheveux flavescents fins comme de la soie, l'élevaient au rang d'une beauté virginale et séraphique. De ses grands yeux opalins irradiait la lumière froide de cristaux de glace.
« Cocyte Bellone ! »
La jeune fille brune au regard de feu s'avança d'un pas déterminé vers le tabouret. Elle coiffa le choixpeau avec un brin d'arrogance dédaigneuse, le verdict fut prompt.
« Serpentard ! »
D'un bond elle quitta le tabouret pour rejoindre sa table tout en lançant un regard victorieux et méprisant à sa sœur.
« Cocyte Suadella ! »
Elle prit place à son tour sur le trépied et
attendit patiemment que le choixpeau lui désigne sa maison. Le temps parut se
suspendre indéfiniment. Harry voyait le choixpeau se déformer sur la tête de la
jeune fille, livrant pour elle seule le fruit de ses réflexions. Elle restait
impassible tandis que le couvre-chef était en proie à l'hésitation.
« Tiens… La dernière fois que le choixpeau a autant tardé à rendre son
jugement, il était posé sur ta tête, Harry. » chuchota Hermione.
« Serdaigle ! » s'écria t-il enfin.
Un tonnerre d'applaudissements accueillit cette décision et Suadella s'avança vers ses nouveaux camarades le sourire aux lèvres. La répartition continua et Harry reporta ses pensées vers la table des professeurs. Dumbledore affichait un sourire radieux, comme c'était souvent son habitude. Il gratifia même Harry d'un clin d'œil quand il croisa son regard. Rogue, en revanche, fixait de son œil noir et inquisiteur la jeune fille qui venait d'intégrer sa maison. Après quelques instants, il s'attarda sur sa blonde jumelle. Un pli de réflexion lui barrait le front.
« Cette répartition
est désespérément interminable… Mais quand allons-nous pouvoir manger ? »
« C'est incroyable Ron, tu devrais figurer dans le programme de soins aux
créatures magiques... »
« Et dans quelle rubrique miss Granger-je-sais-tout ? » répliqua Ron d'un ton
faussement vexé.
« homo magico gastropodis, chapitre des espèces rares » susurra-t-elle l'œil
narquois.
Ron sourit à son amie, s'empourpra – ce qui lui valut un ricanement de sa jeune sœur – et détourna rapidement son regard vers les professeurs. Harry le vit se rembrunir instantanément.
« Qu'est-ce que tu disais tout à l'heure ? Sur
le nouveau professeur… Je n'ai pas compris. »
« Je disais à peu près : Quelle excellente idée... Dumbledore a engagé un
mangemort pour parfaire notre pratique ! »
Le ton se voulait sarcastique, mais Harry y décela une pointe d'angoisse. En
fait, à mieux y réfléchir, il avait pensé à la même chose et le regard de ses
compagnons lui indiqua qu'ils n'étaient pas les seuls à avoir tiré cette sombre
conclusion.
« On dirait la fille cachée de Rogue et McGonagall
! » grogna Ron.
Hermione le fusilla du regard.
« C'est bien toi ça, juger les gens d'un seul regard ! Parce qu'elle a un
physique peu accueillant, elle est forcément mauvaise ou acariâtre ! Ce qui
n'est d'ailleurs pas le cas du professeur McGonagall…»
« Non mais regarde-les Hermione ! » insista Ron en désignant du menton les
professeurs de potions et de Défense contre les forces du mal, « On dirait deux
chauves-souris assises côte à côte ! Ne me fais pas croire que tu la trouves
épanouie et avenante... »
Harry préféra ne pas se mêler à la conversation animée de ses amis. Il
observait la jeune femme. Dans un sens, il était d'accord avec Ron. Les traits
de son visage étaient inexpressifs et austères comme pouvaient l'être ceux du
maître des potions. Et sa peau brune couverte de signes cabalistiques lui
donnait un air étrange et effrayant. Mais son regard n'avait rien de commun
avec celui de l'homme assis à ses côtés où se lisaient aigreur et dédain. Dans
les grands yeux de la sorcière, Harry ne voyait
que la froideur de la mélancolie teintée d'un soupçon de tristesse. Elle
se pencha vers Rogue et lui dit quelques mots ; il la dévisagea d'un air
méprisant en pinçant un peu plus ses lèvres. Lorsqu'elle releva la tête, Harry fut
persuadé l'avoir vue sourire. Mais quand ses yeux croisèrent les siens, il n'y
lut que froideur et indifférence. Finalement elle n'était peut-être bien qu'une
chauve-souris, aussi aimable et attachante que son acariâtre collègue.
« Moi, je la trouve plutôt jolie avec ces
marques noires sur le visage, bredouilla Neville tout en rosissant. J'espère qu'elle
ne sera pas comme Rogue, je ne pourrais pas supporter l'acharnement de deux
professeurs ... »
« Deux professeurs, Neville ? L'interrogea Hermione surprise. Ne me dis pas que
tu as choisi Potions en option ! »
« Ben... Si je veux être auror, je n'ai pas vraiment le choix... »
C'était bien le problème, beaucoup avaient choisi Potions, non par goût
véritable mais par nécessité. Dans l'entourage de Harry où on voulait surtout
être aurors ou médicomages, les cours de Rogue étaient un passage obligé.
Pauvre Neville ! Il n'en avait pas terminé avec les
épouvantards-maître-des-potions !
Ron continuait à cracher son fiel sur la jeune femme .
« Jolie ! Neville, tu as de la poudre de brume dans les yeux !... Quoique...
Après tout, pourquoi pas. Elle est bien conservée pour une vieille goule ! »
Hermione lança les yeux au ciel et fit un sourire mi-navré, mi-amusé à Harry. Ron était surtout mort de trouille à l'idée de devoir affronter une fois de plus une chouette revêche pendant toute une année (deux semblaient utopiques...). En noircissant le portrait à l'extrême, il ne pourrait être déçu. Au contraire, il ne pourrait que se réjouir de la méprise de son jugement. Mais sans doute n'avait-il pas complètement tort. L'expérience leur avait appris à se méfier…
A la fin de la Répartition, Dumbledore reprit la parole et les murmures inopportuns disparurent.
« Je sais que vous avez hâte de voir commencer le banquet, je serai donc bref. »
Un horrible gargouillement provenant du ventre d'un Weasley écarlate ponctua sa phrase.
« Hum, effectivement on m'intime de me presser » continua-t-il dans un sourire... « Voici que débute officiellement cette nouvelle année scolaire. Qu'elle soit synonyme de paix et de solidarité… Que les tensions s'estompent et que les querelles prennent fin… Souvenez-vous que Poudlard ne fût que par l'union des quatre maisons… Et maintenant, bon appétit à tous ! »
Un cri de contentement emplit la salle et les tables se couvrirent des mets les plus appétissants. Ron attrapa une cuisse de poulet croustillante d'une main, tandis que de l'autre il enfournait une ration de frites trois fois trop grande pour sa bouche. Hermione le dévisagea d'un air dégoûté.
« Vous êtes un remède à l'amour monsieur Ron
Weasley, et tous les filtres aphrodisiaques n'y changeraient rien... »
« bchien quchoi » parvint-il à articuler en avalant sans prendre la peine de
mâcher. « J'ai faim moi ! Je ne joue pas la mijaurée en tenant ma fourchette
entre deux doigts en relevant délicatement l'auriculaire ! MOI ! »
« Tu es répugnant... »
C'était reparti. Harry et Ginny échangèrent un regard complice et se joignirent à la conversation de Dean et Seamus sur la constitution des équipes de Quidditch.
« Maintenant
qu'Ombrage est parti, tu vas reprendre ta place d'attrapeur Harry ? »
interrogea Dean.
« Tu pourrais même être le nouveau capitaine » continua Seamus.
Harry lança un coup d'œil gêné à Ginny.
« On en a déjà parlé Harry, j'ai juste occupé ton poste en attendant ton retour. Et puis je préfère le poste de poursuiveur… L'équipe en manque il me semble ? »
Effectivement Angelina et Alicia avaient terminé leur scolarité à Poudlard. Katie Bell entamait sa dernière année… Gryffondor était désormais sans capitaine et devait se trouver deux nouveaux poursuiveurs.
« Et Seamus a raison, tu peux prétendre au
poste de capitaine. C'est toi qui as le plus d'expérience avec Katie. »
« Ron a toujours rêvé d'être le cap… »
« Il en rêve mais il n'en a pas la carrure, Harry. »
« Oui, il faut déjà qu'il acquière de la confiance en lui en tant que gardien
avant de diriger une équipe » renchérit Dean.
Harry observait son reflet dans le gobelet d'or rempli de jus de citrouille. Capitaine de l'équipe de Quidditch… Est-ce que Dumbledore le permettrait ?
« Apparemment on parle aussi de moi en bien ici
? »
Ron s'était penché vers le groupe d'amis et les avait interpellés d'un ton
irrité. Ses oreilles étaient devenues écarlates et ses yeux lançaient des
éclairs courroucés.
« On émettait juste des hypothèses sur la constitution de l'équipe de Gryffondor » marmonna Harry gêné.
Dean et Seamus s'étaient courageusement tournés vers Parvati et Lavande qui discutaient du programme de divination.
« Et je disais que tu n'avais pas les qualités requises pour en être le capitaine : tu manques d'expérience et d'assurance » formula Ginny d'un ton tranché. « Je pense que tu seras d'accord avec moi pour dire que Harry est le plus qualifié des quatre joueurs en lice ? »
La rougeur de ses oreilles se propagea à l'ensemble de son visage et il regarda Harry la mine confuse.
« Tu as raison Ginny, je ne suis déjà pas un
brillant gardien… »
« Suffisamment pour rester dans l'équipe en tout cas. » Harry regardait son ami
en souriant. « Tu as fait tes preuves finalement, malgré des débuts peu
reluisants… Weasley notre Roi ! »
Ils rirent tous de bon cœur et la conversation dériva vers les exploits plus ou moins glorieux de Ron et des déboires et succès de l'équipe de Gryffondor connus l'année précédente.
Le repas touchait à sa fin. La joie des retrouvailles et la fatigue naissante contre laquelle on tentait de lutter, avaient transformé la saine exaltation en une effervescence fiévreuse et turbulente de plus en plus insupportable.
« Ron ?
Je crois qu'il est temps d'y aller avant que la situation ne devienne
ingérable. »
« Aller où Hermione ? »
« Je te rappelle que nous sommes préfets et qu'à ce titre nous devons
accompagner les nouveaux élèves dans les quartiers de Gryffondor. »
Ron soupira et tapota son insigne du bout des doigts.
« Le devoir m'appelle Harry, on se rejoint dans la salle commune. Je crois que
je paie très cher mon Brossdur... »
Hermione lui décocha un de ses regards hautains et désapprobateurs dont elle
avait le secret puis s'adressa aux élèves d'un ton sec.
« Les premières années, venez avec moi
s'il vous plaît ! Plus vite que cela, il se fait tard ! »
Harry observa ses deux amis s'éloigner. Ron suivait Hermione de quelques mètres
en caricaturant la démarche guindée de la jeune fille qui parcourait la longue
allée les lèvres serrées et le nez en l'air. Le groupe d'enfants qui l'entouraientt
étouffèrent des petits rires que Ron tenta de réprimer en posant son doigt sur
sa bouche. Il décocha un dernier clin d'œil à Harry avant de disparaître dans
les couloirs du château.
Harry jeta un regard circulaire sur la grande
salle qui commençait à se vider. Les Serpentard avaient déjà tous rejoint leurs
quartiers. Il n'avait pas encore aperçu Malefoy. Bien malgré lui, il dut
reconnaître qu'il avait hâte de voir si son ennemi juré avait gardé son
arrogance méprisante depuis que son père avait fait connaissance avec les
cellules luxueuses de la prison d'Azkaban.
Quelques professeurs étaient restés assis autour de la grande table et
discutaient avec animation. Les professeurs McGonagall et Flitwick semblaient
expliquer à la nouvelle enseignante quelques points de fonctionnement du
collège. Rogue affichait un petit air narquois qui fit sourire Harry. A
l'évidence, certaines choses semblaient ne jamais devoir changer. Quelque part,
c'était rassurant.
« Tu viens Harry ? »
Ginny, Dean, Seamus et Neville l'attendaient.
« J'arrive ! McGonagall et Flitwick informent le nouveau professeur qu'il y a
peu de chances pour qu'elle passe l'année ! »
« Mmh, et ça a l'air d'amuser Rogue follement. Enfin, autant que cela lui est
possible ! »
Les cinq amis s'esclaffèrent et regagnèrent leur salle commune tout en
extrapolant des hypothèses sur les raisons du renvoi de leur futur
ex-professeur de défense contre les forces du mal. Quand ils arrivèrent dans
les salons chaleureux de Gryffondor, les trois garçons épuisés montèrent dans
leur dortoir abandonnant Harry et Ginny qui se laissèrent tomber dans des
fauteuils moelleux. Il observa quelques instants la jeune fille rousse dont les
yeux se perdaient dans la contemplation du feu.
« Tu n'es plus avec Dean ? »
Elle releva lentement la tête et lui adressa un regard à la fois mutin et
mystérieux.
« Dean ? Oh non... Tu sais, deux mois de vacances, c'est long. Tu es bien placé
pour le savoir. »
« Oui, mais je n'arrête pas d'aimer les gens quand je ne les vois pas. C'est
même pire, je ne pense qu'à eux. »
« Moi aussi Harry. C'est pour cela qu'il était inutile de poursuivre une
relation avec Dean. Je ne pensais jamais à lui. »
Elle le scruta intensément un léger sourire espiègle au coin des lèvres. Harry
se sentit brusquement mal à l'aise et s'empourpra. Il fit mine d'ajuster sa
position sur son fauteuil en tentant de paraître dégagé. Ginny n'était plus la
petite fille timide et maladroite qu'il avait connue six ans auparavant : aujourd'hui était assise en face de lui une
jeune fille audacieuse et sûre d'elle.
« Ah vous êtes n'êtes que deux ! Où sont les autres ? » demanda Ron en
s'écrasant lourdement dans un canapé.
« Ils dorment. »
« Déjà ? Bon, très bien... »
« Comment sont les nouveaux ? »
Harry orienta la conversation de manière à détourner l'attention de ses amis de
son tête-à-tête avec Ginny. Hermione le regardait d'un air amusé. Elle alla
s'asseoir auprès de la sorcière aux cheveux rouges avec qui elle échangea un
sourire complice. Ron, comme à son habitude semblait imperméable à ces échanges
muets. Harry lui en était reconnaissant.
« Comme d'habitude... Mmmh, je crois qu'ils m'aiment bien. »
« Evidemment qu'ils t'aiment bien, tu as autant d'autorité qu'un polochon ! Tu
es fade et mou ! Oh... Harry, si tu les avais vus, ils n'ont pas cessé de se
moquer de lui. Et il continuait d'affichait son air niais et impuissant... »
Harry fit mine de soupirer et de compatir aux malheurs de son ami tout en se
mordant les joues pour ne pas éclater de rire.
« C'est une tactique Hermione, tu verras. Ils vont m'obéir au doigt et à l'œil
et je n'aurais pas besoin d'endosser mon costume de Furie. »
« Ce qui signifie ? »
« Juste que je vais te surprendre... »
« Ta sagacité me surprend déjà chaque jour davantage Ronald Weasley ! »
« Ma sagacité, hein... parce que la vôtre est infaillible Miss Granger. Et bien
laissez-moi vous dire pour votre information que vos chères têtes blondes ne se
moq... »
« Euh… Et à part ça… » coupa Harry qui sentait la tempête monter une fois de
plus. « Vous en savez un peu plus sur le nouveau professeur ? Dumbledore ne
nous a même pas dit son nom. »
« Tiens oui, tu as raison. Il a sans doute été perturbé par des gargouillement intempestifs… Elle s'appelle di Pandore. Nadè di Pandore. C'est tout ce qu'on sait. » répondit Hermione.
« Mais il y a une chose que nous savons… McGonagall
nous en a parlé tout à l'heure… » renchérit Ron.
Hermione lui décocha un large sourire.
« Effectivement, elle en a parlé aux préfets. Nous ne sommes pas
censés... »
« Mais comme nous sommes entre nous, il n'y a pas de raison que nous gardions
le secret. C'est ce que tu voulais dire Hermione. »
Ron lui montrait des dents étincelantes. La jeune fille eut une petite moue et
continua.
« Tout à fait. Le club de Duels va rouvrir. »
« Ah je comprends mieux maintenant... »
« Comment ça ? »
Harry et Ginny échangèrent un petit rire entendu.
« Je comprends mieux l'air goguenard de Rogue. Ça lui rappelle de bons
souvenirs ! »
« Je ne vois pas de quoi tu veux parler... »
Mais le ton piqué d'Hermione démentait ce qu'elle venait de dire.
« Peu importe... Continue. »
« Et bien voilà, c'est tout. Le club va fonctionner de nouveau. »
« Tu l'as mouchée Harry... Hermione, ne te fâche pas. Il voulait juste dire que
Rogue serait enchanté de pouvoir ridiculiser cette femme qui occupe le poste
qu'il convoite. »
« Tu ne t'adresses pas à un neurone de Troll, Ron ! »
Ginny soupira.
« Nom d'un épouvantard, votre manège devient lassant à tous les deux ! On ne
peut pas discuter calmement sans subir vos chamailleries puériles ? Gardez-les
pour vos moments d'intimité, mais de grâce, Epargnez-nous
! Hermione, termine donc ton explication s'il te plaît... »
La préfète rosit légèrement, bafouilla quelques excuses incompréhensibles et
reprit contenance.
« Euh, oui. La différence est qu'il s'appellera désormais Initiation à
l'auto-défense magique. Les professeurs l'animeront à tour de rôle pour
présenter l'apport de chaque discipline. Il y aura des séances différentes
chaque soir. »
« Intensif comme entraînement. »
Hermione opina.
« Je crois qu'ils ont peur Harry malgré l'apparente assurance de Dumbledore…Et
ils sont là aussi pour nous apprendre à nous protéger. »
« L'A.D. va officiellement renaître de ses
cendres » murmura Ron.
Les quatre amis restèrent songeurs quelques instants.
Hermione la première brisa le silence.
« Harry… Puisqu'on parle de défense. As-tu
envisagé de reprendre l'occlumancie ? »
Harry vit la mâchoire de Ron s'affaisser.
« Tu- tu plaisantes Hermione, n'est-ce pas ? »
La jeune sorcière ne répondit pas mais continua de regarder Harry fixement.
« Je n'ai pas besoin de l'occlumancie. »
Hermione ne cilla pas.
« Dumbledore m'a dit lui-même que ce n'était
peut-être pas une bonne idée, en fin de compte. »
« Alors si Dumbledore l'a dit… »
« Et puis après ce que je lui ai fait… » murmura-t-il comme pour lui-même.
« Qu'est-ce que tu lui as fait ? » s'exclama Ron.
« Je... Je suis désolé, je ne peux rien dire. Je lui ai promis. »
« Tu as fait une promesse à Rogue ! » s'écria Ron outré.
« Laisse-le Ron » lança Hermione. « Ecoute Harry, peu importe ce que tu lui as
fait, vous pouvez sans doute dépasser les différents qui vous opposent... Vous
luttez dans le même camp. »
« Ça, c'est encore à prouver », maugréa Ron.
En temps normal, Hermione aurait fusillé son
ami du regard en lui rappelant d'un ton péremptoire la confiance absolu du
directeur pour le maître des potions. Mais cette fois, elle n'en fit rien et
rattrapa même la balle au bond.
« Tout a fait, Ron. C'est pour cela que même si ces cours sont loin d'être une
partie de franche rigolade, ils peuvent peut-être devenir une arme retournée
contre l'adversaire, s'il en est. Au lieu de réprimer tes émotions utilise-les,
au lieu de supprimer tes visions, apprends à les reconnaître et à les
comprendre. Et si Rogue peut accéder à tes pensées, le contraire peut être
envisageable... »
« Mmm... »
« Harry ? »
« Je vais y réfléchir Hermione. »
« C'est cela, allons y réfléchir ! Faut-il que le Survivant reprenne des cours
de trifouillage-de-pensées avec le
professeur-mangemort-ennemi-juré-dudit-survivant ? Faut-il se laisser manger
par le loup pour mieux l'empoisonner ? J'en ai assez entendu, je vais me
coucher, Bonne nuit tout le monde ! »
Ron se leva et rejoignit son dortoir tout en bougonnant et en agitant sa tête
en signe d'incompréhension.
« Il n'a pas l'air de te donner raison
Hermione. »
« Ça, c'est nouveau »! railla Ginny. « Moi, je crois qu'il faut tenter
l'expérience. Je vais peut-être te sembler dure Harry. Mais entre nous,
qu'est-ce que Voldemort pourrait apprendre de plus en décortiquant ta cervelle ?
Que tu souffres, que tu le hais pour ce qu'il a fait de ta vie ? Que tu doutes ?
Que tu as peur ? Tout cela il le sait déjà. Et toi tu sais qu'il t'utilise contre
toi-même. Alors fonce. Tu n'as rien à perdre mais tout à apprendre. »
« Reste à convaincre Rogue... Un détail ! »
« Désolée, mais tu vas devoir mettre ta rancœur dans ta poche et accepter de
courber l'échine ! Bon, je vais me coucher aussi. Ginny ? »
« J'arrive, à demain Harry. Bonne nuit. »
« Mmm. A demain. »
Harry regagna son lit mais il n'était pas fatigué. Ses yeux fixaient le plafond et ses pensées s'agitaient sous son crâne sans qu'il puisse les apaiser. On en revenait toujours à Rogue. Il était le nœud. Il était le lien. Espion de Dumbledore ou mangemort de Voldemort, et même certainement les deux par nécessité... Agent double fatalement. Il devait livrer des informations aux deux parties. Mais à qui était-il sincèrement fidèle ? Harry admirait la ruse de son amie... Elle lui conseillait de reprendre l'occlumancie pour garder un œil sur le maître des potions. Mais il n'était pas dupe. Il savait qu'Hermione avait une confiance quasi aveugle en Rogue, pour la simple raison que Dumbledore s'en portait garant. Mais le vieil homme était-il infaillible ? Ne s'était-il pas laissé abuser par le professeur Quirell, l'imposteur Maugrey / Croupton et même par le traître Pettigrow ? Non, il ne voyait pas tout... Alors Rogue, dont l'intelligence surpassait, et de loin, celle de tous ces misérables factotums... Et pourtant, pourtant, il avait envie de lui faire confiance aussi. Cet homme qu'il haïssait mais qui le fascinait tout autant... Ses yeux se fermèrent sur l'image d'un petit garçon aux cheveux noirs qui pleuraient dans un coin, un petit garçon seul et triste... Harry s'endormit.
« Debout Harry ! Il est
déjà 7 heures ! »
Il entrouvrit un œil et distingua une longue silhouette au bout de laquelle se
dressait une touffe de cheveux roux.
« corunpeu... »
« Mince Harry ! Dépêche-toi, on commence notre premier cours de l'année dans
une heure. Tu ne veux pas arriver en retard en Potions ? »
« Coa ! »
Harry s'était redressé brusquement sur son lit et avait attrapé précipitamment
ses lunettes. Il empoigna sa robe jetée négligemment la veille au pied du lit
et se dirigea prestement vers la salle d'eau. Au bout de quelques pas il se
figea sur place.
« Tu viens de faire un mensonge éhonté... Nous n'avons pas encore nos emplois
du temps... »
« Possible, mais tu es debout ! Je ne savais pas que Rogue pouvait te mettre
dans cet état ! »
Harry se tourna vers son ami qui affichait un air moqueur.
« Je crois que je vais suivre le conseil d'Hermione. Alors j'ai plutôt intérêt
à tout faire pour éviter d'essuyer un refus. »
Ron se renfrogna instantanément.
« Tu es tombé sur la tête Harry. Tu vas au devant du danger... »
« De toute façon il faudra bien m'y frotter un jour ou l'autre. Je suis né pour
ça. » marmonna-t-il.
« Mais qu'est-ce que tu racontes ? »
« Je veux dire que Voldemort s'est juré de me tuer, je ne veux pas attendre
qu'il vienne. C'est tout. On se retrouve au petit déjeuner. »
Harry abandonna son ami pour se préparer. Il devrait le leur dire un jour. La
prophétie. Pas tout de suite, pas maintenant. Il faisait comme Dumbledore en
repoussant toujours l'échéance de la vérité. Il voulait les protéger aussi. Car
il le savait, ils le suivraient jusqu'au bout. Ce combat, c'était le sien. Il
se tairait.
Quand il entra dans la grande salle, Ginny lui
fit un grand signe de la main.
« On est là Harry ! »
« Voilà Cendrillon qui appelle son empoté de prince Potter », fit une voix
nonchalante.
« Oh, bonjour Malefoy. Désolé de ne pas t'avoir vu hier... J'ai beaucoup pensé
à toi. Comment va ton père ? »
Harry n'avait pas détourné le regard de la table des Gryffondor et avait
répondu au jeune homme sur un ton faussement enjoué.
« Tu m'excuses Malefoy, les indigents et les sangs-de-bourbe attendent leur
sauveur. Je ne voudrais pas les décevoir. A plus tard. Mes amitiés à tes petits
copains. »
Sur ces mots, il s'éloigna d'un air parfaitement détendu tout en brûlant de se
retourner pour voir son ennemi se consumer de rage. La mine radieuse, il
s'assit à côté de Ron.
« Excuse-moi pour tout à l'heure. Tu as raison. »
« Aucun problème Ron... »
Il continuait d'afficher un air béat.
« Qu'est-ce que tu as ? »
« Oh, je viens de voir Malefoy. »
« Et c'est ce qui te réjouit autant ? Tu m'inquiètes vraiment Harry…»
Il raconta son entrevue à ses amis qui s'esclaffèrent. A ce moment McGonagall
passa dans les rangs pour distribuer les emplois du temps et le calme revint.
« Nous avons deux cours double ce matin. Sortilèges puis métamorphose. Et j'ai
un cours de Runes anciennes cet après-midi, suivi d'une heure de vol. »
Hermione esquissa une grimace.
« Tu as pris vol Hermione ? Mais tu as horreur de ça ! »
« Je sais bien, mais c'est utile. Je ne veux pas faire des prouesses
acrobatiques, juste vaincre ma peur et m'améliorer un peu. Et puis on sera
ensemble, alors... Et en ce qui vous concerne, vous pouvez parler avec vos
cours de potions ! Heureusement que vous avez arrêté la divination... »
« Et bien figure-toi que Harry a hésité en remplissant son formulaire
d'inscription », pouffa Ron.
« Tiens donc, quelle idée absurde ! »
Harry s'était pris d'un intérêt subi pour les motifs incrustés de sa petite
cuillère. Il sentit le regard suspicieux de Ron se poser sur lui.
« Harry... Ne me dis pas que... »
« Si, je m'y suis inscrit finalement. »
« Mais... »
« Les cours de Trelawney sont soporifiques et ses grands airs éthérés me sont
insupportables. Mais elle a un don. Dumbledore le sait et c'est pour cela
qu'elle est à Poudlard. Son troisième œil est aveugle la plupart du temps. Mais
quand il se réveille... Enfin voilà, je veux juste être là. Au cas où, c'est tout.
»
« Ah bon. »
« De toute façon, je suis nul en divination. J'ai été accepté parce qu'il n'y
avait pas assez d'élèves à avoir choisi l'option... »
« Tu crois qu'il n'est pas trop tard pour moi ? »
Ron le regardait en souriant.
« Ben oui, je ne vais pas te laisser seul là-bas en compagnie de Lavande et
Parvati. Tu vas devenir dingue mon pauvre Harry. Et puis comme on n'y va pas
pour apprendre, on risque de bien s'amuser : de quoi as-tu rêvé cette nuit ? »
« Que je jetais un sort de misenpli à Rogue ! »
« Je crois que c'est un rêve prémonitoire Harry. Pour qu'il se réalise, il va
falloir ouvrir le livre que t'a offert Hagrid. »
Les deux amis partirent d'un grand éclat de rire.
« Avant de déclarer la guerre à Rogue, n'oublie pas que tu dois faire la paix !
lança Hermione d'un ton cassant. »
« Quelle rabat-joie cette fille ! On ne faisait que rêver Hermione ! »
Ron roula des yeux en haussant les épaules et Hermione émit un petit « hum »
pincé. Ils finirent leur petit déjeuner en silence avant de rejoindre la salle
du professeur Flitwick.
Le cours de métamorphoses touchait à sa fin. Harry avait réussi brillamment à changer une touffe de chiendent en un magnifique bouquet de roses blanches. C'étaient les fleurs que préférait sa mère, le professeur Lupin le lui avait écrit dans une de ses lettres cet été. Il lui avait beaucoup parlé de ses parents, de Sirius, de leurs relations à tous les quatre. C'était important pour lui, Lupin était la dernière mémoire vivante d'un passé qu' il n'avait pas connu et il partageait avec lui ses souvenirs heureux.
A côté de lui, Hermione avait en toute
simplicité réalisé une véritable composition florale dont le professeur
McGonagall s'était empressé d'orner son bureau, tout en gratifiant Gryffondor
de quinze points. Ron quant à lui , observait dépité ses quelques pâquerettes.
« J'ai peut-être une idée pour améliorer tes performances », dit Hermione.
« Ah vraiment ? » marmonna Ron vexé.
« Oui. Tu devrais essayer de penser à la personne à qui tu aimerais offrir ton
bouquet... »
Ron lança un regard incrédule à son amie.
« D'accord... Ce n'est pas gagné ! »
« Je ne vois vraiment pas en quoi ça va m'aider Hermione ».
« Et bien réfléchis ! que tu es ballot, Ron ... Oh, c'est l'heure ! Je file à
la bibliothèque et je vous retrouve pour le déjeuner. A tout de suite ! »
Ron regarda la jeune sorcière se sauver rapidement ses livres sous le bras et
regarda Harry d'un air benêt.
« Je ne comprends pas cette fille... »
« C'est exactement ce qu'elle te reproche je crois. »
Le front de Ron se plissa dans une mimique d'incompréhension totale.
« Monsieur Potter, j'aimerais m'entretenir avec vous quelques instants. »
« J'arrive professeur... On en reparlera plus tard Ron, vas-y, je vous rejoins.
»
« A tout à l'heure Harry. »
Il regarda son ami s'éloigner la mine toujours pensive puis s'approcha du
bureau du professeur McGonagall.
« Je suis fière des résultats obtenus à vos BUSES, monsieur Potter. »
« Merci professeur. »
« Je me suis juré l'année dernière de
vous aider à devenir auror : ne pensez pas que j'avais parlé sous le coup de
l'énervement dû à la présence de madame Ombrage. Je suis contente que vous ayez
dépassé votre... différent avec le professeur Rogue et que vous ayez choisi
Potions comme je vous l'avais conseillé. C'est très bien. »
Harry hocha la tête et attendit patiemment la suite. McGonagall ne l'avait
certainement pas appelé pour le féliciter de ses choix. Ils étaient plusieurs à
avoir surmonté pour leur bien leur différent avec Rogue, ce qu'il
avait fait ne relevait pas de l'exploit. La sorcière toussota et posa sur lui
un regard bienveillant.
« Comment allez-vous monsieur Potter ? »
« Je... bien. »
« En ce cas, je voulais vous faire savoir que je ne suis pas seulement la
vieille chouette revêche, directrice intransigeante des Gryffondor. »
L'œil humide, elle lui accorda un de ses rares sourires.
« Je sais que vous êtes entouré d'amis fidèles et dévoués, aussi je ne
m'attends pas à vous voir un jour taper à la porte de mon bureau en quête d'une
oreille attentive. Mais sachez qu'elle restera ouverte, au cas où... »
Harry regarda le bout de ses chaussures en marmonnant quelques remerciements.
La compassion affichée de sa directrice de maison le gênait. Il préférait
affronter le regard glacial de la sorcière, sa froide impartialité. Une sécheresse
apparente et un humour caustique : c'est ainsi qu'il l'appréciait, car il
savait que cela cachait une profonde sensibilité. Il leva les yeux vers
elle. Son sourire avait disparu, le
professeur de métamorphose était revenu...
« D'autre part monsieur Potter, je suppose qu'il n'a pas échappé à votre sens
aigu de l'observation que l'équipe de Quidditch de Gryffondor a besoin d'un
remaniement complet. Le professeur Dumbledore et moi-même avons songé à annuler
votre interdiction de jeu à vie. Mais cela vous semblait sans doute déjà
évident... Miss Weasley est venue me voir
à la fin de son cours ce matin et m'a fait part de son désir de vous
céder le poste d'Attrapeur pour intégrer celui de poursuiveur. Or comme vous le
savez, monsieur Potter, ce n'est pas à moi de constituer l'équipe mais au
nouveau capitaine. Inutile de vous cacher que vous êtes le favori, miss Bell ne
tenant pas à assumer cette responsabilité... Mais le directeur souhaite d'abord
en discuter avec vous, il vous attendra à 16h00 dans son bureau. Le mot de
passe est collodent. Vous pouvez disposer monsieur Potter, bon appétit. »
Il quitta la salle comme un automate sans savoir s'il avait remercié et salué son professeur. Capitaine de l'équipe de Quidditch, ce n'étaient plus des paroles en l'air, des rêves de collégien. La tête en feu, il prit la direction de la grande salle impatient de raconter à ses amis son entrevue avec McGonagall.
Il regarda sa montre-bracelet :
« 12h25. Oui, il est temps que je les rejoigne. »
Un affreux gargouillement serra ses entrailles. Harry grimaça en pressant son
estomac.
« Oui, il est grand temps ! »
Il accélèra le pas,
guidé par l'excitation, son appétit féroce et l'odeur des mets qui lui
parvenaient jusqu'aux narines. Une silhouette surgit alors hors d'une pièce.
« Ne devriez-vous pas vous trouver dans la grande salle monsieur Potter ? Vos
errances dans les couloirs ne vont-elles pas un jour cesser ? Quel mauvais coup
préparez-vous encore, Potter ? »
Face à lui, le professeur de potions le fixait de ses yeux noirs et brillants,
un rictus satisfait au coin des lèvres. Harry se sentit blêmir. Il savait que
Rogue trouverait une excuse pour le punir, un moyen de lui nuire sans qu'il
puisse contester. Il ne devait pas contester... Rester humble, penser à son
projet... Ne surtout pas le contrarier : il attendit la sentence...
« Professeur Rogue... Je suis soulagée de vous trouver ici. J'ai bien peur de
m'être égarée dans ce dédale, je ne parviens pas à retrouver la grande salle. »
Le professeur de défense contre les forces du mal venait d'apparaître derrière
le professeur Rogue et s'était adressé à lui d'une voix à peine plus élevée
qu'un murmure. Elle fixait le maître des potions de ses grands yeux émeraudes.
Son visage était impassible. Il lui répondit d'une voix doucereuse.
« Vous vous êtes égarée. Cela est fâcheux. Nous ne gardons jamais longtemps nos
professeurs de défense, mais à ma connaissance aucun n'a encore disparu dans
les oubliettes du château. »
« Et je ne serai pas celui-là si vous consentez à m'escorter. »
Elle se tourna vers Harry qu'elle avait ignoré jusqu'alors.
« Ça ne va pas monsieur Potter, je vous trouve un peu pâle. Je suis confuse je
n'ai pas de chocolat. Professeur Rogue ?... Non, évidemment. »
Harry crut lire sur ses lèvres un rictus moqueur, mais ses traits retrouvèrent
instantanément leur impénétrabilité.
« Vous devez avoir faim Potter. Allez manger. »
Le regard perçant du professeur Di Pandore
semblait le pénétrer entièrement. Ses ordres étaient fermes et sans appel mais
pourtant emprunts d'une profonde douceur. Harry resta immobile quelques
instants.
« Qu'attendez-vous ? Allez-y, monsieur Potter ! »
« Oui... prononça-t-il en s'étranglant. »
Après un quart de tour si brusque qu'il manqua de chuter, Harry s'éloigna et
pressa le pas avant de disparaître dans un couloir adjacent. Il s'arrêta et
prit appui contre la pierre, le cœur battant. Il tendit l'oreille. Il ignorait
si elle l'avait libéré des griffes de Rogue pour lui éviter une punition mais
il était sûr qu'elle tenait surtout à se retrouver seule avec lui. Il n'était
pas fier de ce qu'il s'apprêtait à faire, mais il ne voulait rien manquer de
cette conversation...
« Monsieur Potter était avec le professeur McGonagall », déclara Di Pandore de
sa voix calme et profonde.
« Et en quoi cela me concerne-t-il mademoiselle ? »
« Vous alliez le punir injustement. »
« Je constate que le troisième Œil de notre chère Sybille va encore souffrir de
la concurrence… » ricana Rogue du ton sarcastique qui était désormais sa
signature.
« En aucune façon. Chez moi, c'est l'ouïe qui est particulièrement développée.
Dans certains couloirs courent des bruits auxquels vous n'êtes pas étranger… Et
vous savez comme moi qu'il n'y a pas de sort sans sorcier, comme le dit le
dicton. »
« Je fais peu de cas des proverbes, mademoiselle.
Ils ne véhiculent que les vérités auxquelles croient les sots… Et sans vouloir
vous offenser, nous ne devons pas fréquenter les mêmes couloirs. »
« N'en soyez pas si sûr professeur… »
Les deux adultes restèrent silencieux quelques instants et Harry fut tenter de
jeter un œil hors de sa cache pour observer le face à face visuel qu'il
imaginait électrique. Il ne le fit pas et entendit de nouveau la voix de la
jeune femme.
« Concernant Potter, vous devriez peut-être vous cantonner au rôle qui est le
vôtre et ne pas vous laisser envahir par des émotions parasites. L'enjeu ne
vous a sans doute pas échappé… Mais je ne vais pas vous importuner plus
longtemps. Mon sens de l'orientation semble donner signe de vie à nouveau. Je
pense pouvoir retrouver mon chemin, j'espère qu'il en sera de même pour vous. A
plus tard professeur. »
Harry aurait sacrifié quelques gallions pour
assister de visu à cette scène. Il regrettait de n'avoir pas cédé à sa
curiosité. Il imagina son professeur de potions blême de rage, figé et
tremblant, le visage déformé par un rictus hostile, les yeux d'encre plus
sombres encore, qui auraient tué sur place la jeune femme s'ils en avaient eu
le pouvoir. Cette simple vision le réjouit et lui fit oublier qu'il n'avait pas
saisi la moitié du sens des propos échangés !
Un bruit d'étoffes passa à sa hauteur et le dépassa. Son professeur de défense
contre les forces du mal, enveloppée dans son indéfectible cape noire, s'arrêta
et sans se retourner, prononça d'une voix cristalline :
« Et bien monsieur Potter, il semblerait que vous soyez vous aussi perdu,
faisons route ensemble... »
Surpris, Harry s'avança et essaya de lire dans le regard de la jeune femme des
reproches. Il n'y vit que le détachement qu'il lui connaissait déjà.
« Merci mademoiselle... »
« Mais de rien, nous trouverons plus facilement à deux. »
Elle
savait qu'il savait, il en était certain. Mais elle ne souhaitait pas en
discuter avec lui. C'était normal après tout, il lui avait désobéi, avait
assisté à une conversation dont on l'avait délibérément écarté. Elle passait
l'éponge, mais mieux valait en rester là.
Ils ne s'adressèrent pas la parole de tout le trajet et rejoignirent la grande
salle sans autre événement.
« Bon appétit Harry. »
« Bon appétit professeur... »
Ses amis attablés avaient déjà bien entamé leur repas. Ron dévorait tout ce qui
se présentait à lui, comme d'habitude, sous le regard réprobateur de Hermione.
« Que faisais-tu avec Di Pandore Harry ? dit-il la bouche pleine. Tu en as mis
du temps... »
« Je l'ai croisée en sortant du cours de métamorphose. ».
Harry leur fit le récit de ce qu'il s'était passé en moins d'une heure. Ron
s'était arrêté de manger et le fixait rouge d'admiration.
« Capitaine de l'équipe, j'en étais sûr Harry, nous en parlions avec Hermione en
attendant. Je suis très heureux pour toi... Tu me gardes dans l'équipe, dis ? »
« Evide... »
« Vous avez le don pour vous attacher à l'essentiel tous les deux ! »
« Il n'y a rien de plus essentiel que le Quidditch Hermione ! »
La jeune fille roula des yeux et se tourna vers Harry.
« Il semble que notre nouveau professeur n'ait pas été
recrutée au hasard, elle doit en savoir un peu plus que le programme de
défense... »
« Ils étaient tous un peu... particuliers, Hermione. »
« Mmm. Sans doute. »
A cet instant le professeur Dumbledore tapa quelques coups de son couteau sur
son verre de cristal ciselé pour attirer l'attention des élèves. Rogue entra au
même moment et rejoignit sa place en ignorant superbement la jeune femme assise
à ses côtés. Elle lui rendit la pareille.
« Chers enfants, maintenant que vos estomacs sont en partie rassasiés, je
souhaiterais faire une petite annonce. Le professeur McGonagall m'a entretenu
hier soir d'un petit projet qui pourrait vous intéresser. Après avoir été
abandonné, le club de duel va renaître de ses cendres avec quelques
améliorations. Il sera animé tous les soirs par des équipes de deux professeurs
qui se relaieront. Vous aurez ainsi la possibilité de découvrir les liens qui
unissent toutes les disciplines et les intérêts de chacune en dehors d'un cadre
scolaire strict. Madame Pomfresh se joindra aussi à l'équipe pour vous
enseigner les rudiments des premiers soins. Rendez-vous dès aujourd'hui à ceux
qui le souhaitent à 20h00 dans le grand cachot, le bal sera ouvert par les
professeurs McGonagall et Flitwick ! Le planning de la semaine sera affiché
dans les salles communes. Bonne fin de repas à tous ! »
Les conversations s'animèrent alors dans les rangs des élèves.
« On y va Harry ? »
« Moi j'ai bien envie d'y participer, oui. Ça peut être très intéressant. »
« De toute façon ça ne peut être que plus instructif qu'avec Lockhart. La seule
chose que nous ayons apprise est le sortilège de désarmement, et c'était grâce
à Rogue. Alors c'est dire... »
Une petite toux irritée coupa Ron dans son élan. Hermione s'était
ostensiblement plongée dans un énorme livre d'arithmancie ignorant délibérément
les deux garçons.
« Je crois qu'elle a toujours un béguin pour ce bellâtre. Et après, elle dira
qu'elle me trouve bête et peu perspicace. Rappelle-moi de prendre ça pour un
compliment la prochaine fois ! »
Harry haussa les épaules et les sourcils tout en souriant et les deux amis
reprirent leur conversation sur le quidditch jusqu'à la fin du repas.
Harry venait de ranger son éclair de feu dans
le placard à balais de l'équipe de Gryffondor et se dirigeait maintenant vers
le bureau de Dumbledore. Les cours de vol avaient cet avantage de lui faire
gagner des points sans peine et avec un maximum de plaisir. La plupart du
temps, madame Bibine le laissait évoluer dans les airs à sa guise tandis
qu'elle tentait d'aider les autres élèves à vaincre leur peur du vide.
Hermione, surtout, éprouvait de grandes difficultés à se détendre et ses mains
se crispaient invariablement sur le manche avant même que ses pieds n'aient
décollé du sol.
« Il faudra que tu demandes à Rogue de te concocter une potion contre le
vertige, avait ricané Ron devant le visage verdâtre de son amie. »
« Pourquoi pas ? » avait-elle rétorqué, piquée.
C'était effectivement peut-être la seule solution. Ce problème, Hermione
n'avait pu le résoudre en consultant les livres, et la pratique n'y changeait
rien malgré la grande patience de madame Bibine.
Tout en pensant à la jeune fille, Harry était
arrivé devant l'affreuse gargouille qui gardait le bureau du directeur. Après
avoir prononcé le mot de passe collodent, un nouveau bonbon fabrication
Weasley qui scellait les maxillaires pendant une heure, Harry se laissa porter
par l'escalier en colimaçon qui le mena devant la grande porte en chêne. Il
s'apprêtait à frôler le heurtoir quand la porte s'ouvrit.
« Mais cette décision est démesurée et injuste professeur Rogue ! »
« En tant que directeur de votre maison j'en pâtis également monsieur Malefoy,
mais je crains que nous ne devions nous incliner, une fois de plus. »
« Le capitaine qu'il a nommé connaît à peine les règles... »
« Un général n'est rien sans son bras droit Malefoy, vous saurez retourner
cette situation à votre avantage, je vous fais confiance. »
Le professeur Rogue avait commencé à esquisser un sourire sournois et entendu à
Drago Malefoy quand il aperçut Harry qui s'était effacé pour leur céder le
passage. Son visage se figea aussitôt dans une expression de haine sauvage, les
narines palpitantes et les mâchoires crispées. Si Harry n'avait pas cette sueur
froide qui lui coulait dans le dos, il lui aurait demandé s'il n'avait pas
avalé, justement, un collodent par mégarde. Malefoy lui lança le regard
le plus méprisant qu'il avait en stock et ouvrit la bouche pour lui décocher
une remarque cinglante quand une voix chaleureuse se fit entendre de
l'intérieur de la pièce.
« Entre donc Harry, c'est ton tour. »
Harry abandonna le directeur de Serpentard et son favori sans se faire prier.
Il pénétra dans le bureau trop bien connu de Dumbledore.
« Bonjour Harry. »
« Bonjour professeur. »
« Tu viens de croiser Drago Malefoy il me semble. »
Harry acquiesça. Une petite voix intérieure lui disait que cette rencontre
n'était pas fortuite.
« Je lui ai refusé à l'instant le poste de capitaine de l'équipe. »
Il tressaillit. Et si le vieil homme s'apprêtait à faire de même avec lui.
Dumbledore lui sourit et Harry lut dans ses yeux pétillants qu'il avait lu le
fond de sa pensée.
« A regret, je l'avoue, car je n'aime pas punir toute une maison pour les erreurs
d'un de ses membres. »
« C'est pourtant ainsi que fonctionne la coupe des maisons... avec ce système
de points... »
« C'est vrai Harry. Mais un point perdu peut être regagné. Dans le cas de
Malefoy, je prive l'équipe d'un bon élément sans compensation possible. La
perte est irréversible. Pour cette année tout du moins. »
Harry ne partageait pas l'opinion du directeur et ne comprenait pas en quoi la
perte de Malefoy pouvait être aussi désastreuse... Et après les conseils que
Rogue avait donné à son poulain, quelque chose lui disait que la décision
directoriale ne changerait rien. Mais Dumbledore ne devait pas être dupe, sans
quoi il n'aurait pas agi de cette manière si le souci de l'équité lui tenait
tant à cœur.
« Enfin, monsieur Malefoy doit comprendre que les agissements auxquels il s'est
prêté avec une trop grande complaisance l'année dernière, n'ont pas leur place
dans ce collège. La punition est douce : il demeure préfet et conserve son
poste d'attrapeur. Je lui refuse juste une promotion qu'il n'a pas méritée.
Quant à toi Harry... »
Dumbledore avait posé son menton sur ses mains en accent circonflexe et fixait
intensément le jeune homme qui lui faisait face.
« Quant à toi... Il serait logique, au vu de tes performances et de ton
ancienneté dans l'équipe que tu accèdes à ce poste de capitaine, et j'en serais
très fier. Mais, le souhaites-tu Harry ? »
Harry regarda le directeur interloqué. Il ne
comprenait pas vraiment le sens de sa question. Pourquoi est-ce qu'il ne
souhaiterait plus ce qu'il avait toujours voulu. Le vieil homme dut comprendre
son désarroi et reprit la parole.
« J'ai préféré ne pas te nommer préfet l'année dernière pensant que tu avais
assez de responsabilité à assumer... »
« Mais cela n'a rien à voir avec le quidditch professeur ! Voler, jouer est
sans doute la rare chose qui me permette justement d'oublier toutes ces
responsabilités ! Etre capitaine fait partie du jeu, ce n'est pas une charge ! »
Harry débita sa phrase sans réfléchir comme une récitation apprise. Mais il le
dit avec tant de véhémence, tant de fougue, tant de passion, qu'il prit
conscience que c'est son cœur qui avait parlé pour lui. Dumbledore sourit.
« Très bien. C'est ce que je voulais entendre. Je prends ça pour un oui, donc ?
»
« Euh... Oui. »
« Très bien, il ne te reste donc qu'à constituer ton équipe. Tu peux y aller
maintenant. »
Harry
remercia le directeur et s'avança vers la porte. Mais au moment de sortir il
s'arrêta. Il repensa au professeur Di Pandore, à Rogue et aux conseils
d'Hermione. Il se retourna vers le vieil homme qui le regardait avec attention.
« Professeur, encore une chose... Hermione m'a conseillé de reprendre des cours
d'occlumancie, pour m'aider... à utiliser au mieux mes visions. »
« Pourquoi pas, oui... c'est envisageable. »
Le directeur caressait sa barbe argentée de ses longs doigts. Son regard s'était
fait lointain.
« Mais je ne sais pas si le professeur Rogue... »
« ... acceptera. Il faut que tu voies cela avec lui. Je ne peux malheureusement
rien faire pour améliorer votre relation. C'est à vous de trouver un terrain...
d'entente, si je puis dire. »
« Et un autre professeur peut-être ? »
« Si c'est à moi que tu penses, ma réponse reste négative. En ta présence je me
dois... comment dire... de poser des verrous psychiques pour empêcher Voldemort
de te faire réagir à mon contact. Si tu ne ressens plus cette haine qui t'habitait
l'année dernière, c'est que je suis obligé de me fermer, en quelque sorte. Tu
comprends pourquoi je ne peux pas t'enseigner l'occlumancie.En ce qui concerne
les autres professeurs aucun ne pratique l'occlumancie à un niveau suffisamment
élevé. »
« Et puis ce serait tellement plus utile que ce soit votre espion qui le fasse !
Ça le rendrait plus crédible auprès de son maître
! »
Harry sentait la rage bouillonner en lui. Son directeur venait de lui avouer,
non sans tact mais quand même, qu'il se méfiait de lui et que la seule personne
apte à lire dans ses pensées les plus intimes était un espion mangemort
détestable, à qui il devait faire confiance sans même vraiment savoir pourquoi.
« Tout à fait Harry. »
« Quoi ? »
« Tout à fait », continua Dumbledore d'un
ton posé. « Tu dois bien comprendre que le professeur Rogue joue forcément un
double jeu et qu'il est contraint d'apporter certaines informations à
Voldemort, que je te prie de ne
plus appeler son maître, puisqu'il
travaille à mes côtés. S'il acceptait de reprendre les cours d'occlumancie avec
toi, il acquerrait effectivement de la valeur auprès de Voldemort... Ce qui
rendrait sa mission moins périlleuse. »
« Parce que vous croyez que Voldemort
est dupe ? »
« Oui, je pense qu'il l'est, en partie
en tout cas. Il a conscience de la duplicité obligée de Severus Rogue, mais il
doit être convaincu de son entière loyauté envers lui. »
Harry lança un regard lourd de
sous-entendu à son directeur.
«Je sais, je suis moi-même convaincu
de l'attachement de Severus à notre cause... Mais pour des raisons tout à fait
différentes. Vois-tu Harry, Voldemort ne peut concevoir qu'un de ses mangemorts
puisse rallier le camp adverse. Pourquoi renonceraient-ils au pouvoir, à la
puissance, à la domination, à la richesse ? S'ils le quittent, c'est par
couardise. Il ignore les élans du cœur. Il pense que le lâche professeur Rogue
a vaincu sa peur et est revenu à lui, mais il ne peut envisager que le ver est
maintenant dans le fruit. Et il doit sans doute penser que ma bonté m'aveugle...
Pauvre Tom... s'il savait. »
Harry fit une moue sceptique.
Dumbledore sortit de sa semi-rêverie et lui sourit.
« En conclusion Harry, ce serait sans
doute une bonne chose de reprendre l'occlumancie avec le professeur Rogue, pour
lui et pour nous. Et ne t'inquiète pas, il ne révélera rien d'essentiel te
concernant... Il ne te déteste pas à ce point. »
« C'est encore à prouver. »
Le directeur émit un petit rire.
« Et inversement ! Vous avez encore
des progrès à faire tous les deux. »
« Bien, j'essaierai de lui en parler,
soupira Harry. »
« Tu y arriveras si tu sais te montrer
patient et humble. Bonne chance capitaine ! »
Dumbledore cligna de l'œil et Harry
quitta enfin son bureau. Il ne savait pas s'il devait se réjouir ou s'effrayer
de ce qu'il venait d'entendre. Tout cela ne faisait que confirmer ce qu'il
soupçonnait déjà. Rogue était un agent double, chacun des deux camps le croyant
dévoué à sa cause, pour des raisons différentes mais tout aussi valables. S'il
lui confiait ses pensées, qui sait quel usage il en ferait... A lui donc de
débrouiller les fils... Soit, il apporterait ses pensées à Rogue sur un plateau
d'argent, mais il s'entraînerait avec acharnement pour percer les siennes.
Si. Il avait une bonne raison de se réjouir. Il était capitaine de l'équipe de
Quidditch de Gryffondor, devançant Malefoy d'une bonne longueur...
